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COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 08 Février 2024
N° RG 13/01472 – N° Portalis DBVY-V-B65-ETYC
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BONNEVILLE en date du 31 Mai 2013, RG 10/553
Appelants
M. [IB] [W]
né le 15 Avril 1967 à [Localité 23] ([Localité 23]), demeurant [Adresse 32]
Mme [GP] [Z] veuve [W] agissant à titre personnel et en qualité d’ayant droit de Mr [A] [W]
née le 08 Janvier 1944 à [Localité 24] ([Localité 21]), demeurant [Adresse 32]
Représentés par la SELURL BOLLONJEON, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me Lionel FALCONNET, avocat plaidant au barreau de THONON-LES-BAINS
Intimés
Mme [U] [L] épouse [R] agissant tant personnellement qu’es-qualités d’héritière de Monsieur [F] [L]
née le 14 Mars 1932 à [Localité 33], demeurant [Adresse 19]
Mme [J] [M] [S] veuve [L] agissant tant personnellement qu’es-qualités d’héritière de Monsieur [F] [L]
née le 17 Septembre 1941 à [Localité 24] ([Localité 21]), demeurant [Adresse 31]
Mme [V] [L] épouse [G] agissant tant personnellement qu’es-qualités d’héritière de Monsieur [F] [L]
née le 29 Février 1948 à [Localité 24] ([Localité 21]), demeurant [Adresse 22]
Mme [D] [SS] [L] majeure protégée placée sous le régime de la tutelle des majeurs protégés suivant jugement en date du 12 août 2003 nommant administrateur légal sous contrôle judiciaire sa soeur Madame [Y] [TU], agissant tant personnellement qu’es-qualités d’héritière de Monsieur [F] [L]
née le 05 Décembre 1961 à [Localité 24] ([Localité 21]), demeurant EHPAD – [30] -[Adresse 2]T
Mme [Y] [L] épouse [TU] agissant tant personnellement qu’es-qualités d’héritière de Monsieur [F] [L] et es-qualités d’administrateur légal sous contrôle judiciaire de Melle [D] [SS] [L]
née le 31 Août 1967 à [Localité 35] ([Localité 24]), demeurant [Adresse 3]
Mme [I] [L] épouse [C] agissant tant personnellement qu’es-qualités d’héritière de Monsieur [F] [L]
née le 09 Février 1977 à [Localité 35] ([Localité 24]), demeurant [Adresse 34]
Représentées par Me Clarisse DORMEVAL, avocat au barreau de CHAMBERY
* * * *
M. [N] [L] agissant tant personnellement qu’es-qualités d’héritier de Monsieur [F] [L]
né le 25 Février 1945 à [Localité 24] ([Localité 21]), demeurant [Adresse 20]
Représenté par la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me Catherine LANTELME, avocat plaidant au barreau de PARIS
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l’audience publique des débats, tenue le 21 novembre 2023 avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par :
– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente
– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
Sur la commune de [Localité 33], figurait à la section A du cadastre une parcelle [Cadastre 4] d’une contenance de 14 hectares, 10 ares et 3 centiares, dont la propriété était partagée entre plusieurs personnes en vertu de titres se rapportant à des portions non-délimitées à prendre sur cette parcelle.
Sur un litige les opposant, notamment sur la division de cette parcelle et la délimitation des parties revenant à chacun, le tribunal de grande instance de Bonneville a ordonné une expertise le 2 février 2007. Sur la base d’un premier rapport de M. [O] [E], lequel a établi un plan d’arpentage pour délimiter quatre lots, les parties n’ont pas réussi à s’entendre.
Sur assignation à la requête des consorts [L] par acte du 12 avril 2010, le juge de la mise en état a, par ordonnance du 15 décembre 2010 confirmée par arrêt de la cour d’appel du 17 janvier 2012, rejeté une demande d’annulation de l’expertise et ordonné un complément d’expertise pour rendre les opérations opposables à Mme [GP] [W] et à M. [IB] [W], ce dernier, fils des époux [A] [W], étant devenu propriétaire d’une parcelle acquise des époux [GZ], et qui est de ce fait intervenu à l’instance. L’expert a déposé son rapport le 1er juin 2011.
Devant le premier juge, la discussion a porté sur la nature divise ou indivise des droits de propriété des différentes parties sur les portions de la parcelle [Cadastre 4] revenant à chacun, ainsi que sur des prétentions de [IB] et de [A] [W] d’attribution préférentielle puis, subsidiairement, de bail rural.
L’examen des titres de propriété des parties par l’expert a conduit ce dernier à déterminer leurs droits de superficie sur la parcelle [Cadastre 4] dont la propriété est reconnue aux consorts [L] concurrence de 10 hectares, 35 ares et 67 centiares, à M. [K] [L] à concurrence de 34 ares 50 centiares, à M. [IB] [W] au droit des époux [GZ] à concurrence de 2 hectares, 30 ares, 4 centiares et aux époux [A] [W] aux droits de Melle [U] [X] à concurrence de 1ha, 9 ares et 3 centiares.
L’expert a par ailleurs proposé un document d’arpentage en tenant compte d’une part des indications d’un plan établi par un géomètre le 2 août 1957, bien qu’il mentionne une répartition différente des surfaces, et d’autre part des observations et contestations des parties, pour proposer un nouveau document d’arpentage.
Par jugement du 31 mai 2013, le tribunal de grande instance de Bonneville a :
– homologué ce document d’arpentage constituant l’annexe 9 du rapport d’expertise du 1er juin 2011,
– ordonné sa publication à frais partagés,
– débouté les consorts [W] de leurs prétentions,
– condamné les consorts [W] à payer aux consorts [L] une indemnité de 1 500 euros pour frais irrépétibles,
– ordonné le partage des dépens.
Par déclaration reçue au greffe le 1er juillet 2013, M. [IB] [W], M. [A] [W] et Madame [GP] [W] ont interjeté appel du jugement.
Par arrêt du 24 avril 2014, la cour d’appel de Chambéry a :
– confirmé le jugement rendu le 31 mai 2013 par le tribunal de grande instance de Bonneville en ce qu’il a débouté les consorts [W] de toutes leurs demandes dont il était saisi, et en ce qu’il a homologué le document d’arpentage établi par M. [O] [E], constituant l’annexe 9 de son rapport d’expertise du 1er juin 2011 et dit qu’il serait annexé à la décision,
– avant dire droit sur les autres prétentions des parties, relatives au bornage, à la définition d’une servitude légale de passage pour enclave, à la publication au fichier mobilier, et aux frais et dépens :
– ordonné un complément d’expertise, désigné pour y procéder M. [O] [E] avec pour mission de compléter les rapports d’expertise précédemment établis les 2 novembre 2009 et 1er juin 2011, puis de déterminer et de faire figurer sur un plan géométrique les différents points permettant de définir les limites divisoires des portions de la parcelle [Cadastre 4] suivant la proposition n°2 du document d’arpentage constituant l’annexe 9 du rapport du 1er juin 2011, en vue de l’implantation de bornes le cas échéant, d’établir un document d’arpentage définitif avec numérotation des parcelles définies pour la division de la parcelle [Cadastre 4], aux fins de publication au fichier immobilier et de modification de la matrice et du plan cadastral,
– sursis à statuer sur les autres prétentions des parties jusqu’au dépôt du rapport d’expertise.
Par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 3 septembre 2014, Madame [T] [B] a été nommée en remplacement de l’expert initialement désigné.
L’expert a déposé son rapport le 30 septembre 2015.
Par arrêt du 7 juillet 2016, la cour d’appel de Chambéry a :
– homologué les conclusions du rapport d’expertise de Mme [T] [B],
– jugé que les parties non-délimitées de la parcelle [Cadastre 4] de la section D du plan cadastral de la Commune de [Localité 33], au lieudit [Adresse 1] sont désormais délimitées suivant la proposition de limites figurant en annexe 2 du rapport de Mme [T] [B] en date du 30 septembre 2015, suivant les points b1 et b14 de ce plan qui demeurera annexé à l’arrêt,
– jugé que la parcelle désignée sur ce plan sous le n°138 d, appartenant à M. [A] [W] et à Mme [GP] [Z] épouse [W], et celle désignée sous le n°138 c appartenant à M. [IB] [W], bénéficient à titre de servitude légale d’un droit de passage sur une largeur de trois mètres dans le prolongement du chemin existant grevant, depuis l’Est, les parcelles situées sur le territoire de ladite commune, au même lieu-dit, cadastrées section D numéro:
* 230 et 1 519 appartenant aux consorts [L],
* 231 et 143 appartenant aux héritiers de M. [P] [L],
* 1 509 appartenant à Madame [U] [R],
* 142 appartenant à M. [N] [L],
* 139 appartenant aux héritiers de M. [P] [L],
* partie de la parcelle [Cadastre 4] désignée au plan sous le n°138 b pour une contenance de 7 ha 20 a 25 centiares attribuée aux consorts [L],
– ordonné la publication de l’arrêt au fichier immobilier par la partie la plus diligente, dont le coût suivra le sort des dépens,
– confirmé le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles,
– débouté les parties de leurs autres demandes d’indemnisation de frais irrépétibles,
– condamné les consorts [L] et les consorts [W] par moitié aux dépens comprenant les frais d’expertise, les frais d’apposition de bornes et d’arpentage, et ceux de publicité foncière, et ordonne leur distraction éventuelle au profit des avocats postulants,
– commis à nouveau l’expert Mme [T] [B] avec pour mission :
– de se rendre sur les lieux en présence des parties et de leurs conseils, ou ceux-ci dûment convoqués,
– d’apposer des bornes aux points b1 à b14 ou en fonction de la situation des lieux et de la pente, ainsi qu’aux points situés en limite avec des propriétés de riverains qui ne sont pas parties à la procédure en un point déplacé du même alignement, et de reporter tous les points d’implantation des bornes sur un plan de bornage identique au plan de proposition de limites annexé au présent arrêt,
– de proposer le tracé du passage à titre de servitude, sur une largeur de trois mètres dans le prolongement du chemin existant grevant depuis l’Est les parcelles cadastrées section [Cadastre 27], [Cadastre 13], [Cadastre 18], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 10], [Cadastre 9] et [Cadastre 5], et de reporter cette assiette sur le plan,
– d’établir un document d’arpentage aux fins de modification de la matrice et du plan cadastral de faire parvenir ces plans aux parties et au greffe de la Cour sous forme de complément de rapport.
Cette décision a fait l’objet d’un pourvoi en cassation déposé lequel a été rejeté par arrêt du 6 septembre 2018.
Par arrêt du 23 janvier 2020, la cour d’appel de Chambéry a :
– dit que pour les besoins de la publicité foncière, l’ancienne parcelle cadastrée section [Cadastre 8], lieudit Gérat, sise sur la commune de Petit-Bornant-les-Glières, est désormais divisée et cadastrée comme suit :
– parcelle [Cadastre 4] des époux [A] [W] : D 1729,
– parcelle [Cadastre 5] des consorts [L] : D 1730,
– parcelle [Cadastre 4] c de M. [IB] [W] : D 1731,
– parcelle [Cadastre 4] d des époux [A] [W] : D 1732,
– parcelle [Cadastre 4] e des consorts [L] : D 1733,
– parcelle [Cadastre 7] des consorts [L] : D 1734,
– dit que les parcelles des consorts [W] 138 d et 138 c sont enclavées,
– dit qu’elles sont à usage agricole (alpage et exploitation forestière),
– dit que leur desserte peut n’être effectuée qu’au moyen d’engins mécaniques appropriés, comme des véhicules tous terrains,
– dit que ne peut être revendiqué par les propriétaires des fonds dominants un accès carrossable par véhicules de tourisme,
– ordonné un complément d’expertise,
– désigné Mme [T] [B] avec pour mission de :
– se rendre sur place,
– étudier un tracé de passage à titre de servitude sur une largeur de 3 mètres par le Nord, en passant notamment par un côté du murger, aux fins de desserte de la parcelle [W], étant précisé que le consorts [W] déclarent faire leur affaire personnelle de la desserte de la parcelle [Cadastre 4] d par la parcelle [Cadastre 6],
– en établir un tracé sommaire,
– déterminer les travaux à réaliser et donner un coût approximatif,
– donner son avis sur l’indemnité à verser aux propriétaires des fonds servants,
– donner à la cour tous les éléments techniques et de fait recensant les mérites et les inconvénients respectifs des différents tracés proposés,
– fixé à la somme de 2 500 euros le montant de la consignation mi à la charge des consorts [W],
– dit que l’expert devra déposer son rapport pour le 30 novembre 2020,
– sursis à statuer sur les plus amples demandes et réservé les dépens.
Par ordonnance du 9 septembre 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Chambéry a étendu la mission confiée à Mme [T] [B] par arrêt de la deuxième section de la chambre civile de la cour d’appel de Chambéry en date 23 janvier 2020 et dit qu’il y a lieu d’étudier, pour le désenclavement des parcelles138 d et 138 c appartenant aux consorts [W], une solution de désenclavement consistant en un tracé sur une largeur de 3 mètres passant :
soit sur les parcelles [Cadastre 11] et [Cadastre 14], aux fins de desserte des parcelles [W] étant précisé que les consorts [W] déclarent faire leur affaire personnelle de la desserte de la parcelle [Cadastre 4] d par la parcelle [Cadastre 6]’,
soit sur la parcelle [Cadastre 5] pour rejoindre directement la parcelle1731 dans le prolongement de la servitude existante’.
Le rapport final d’expertise a été rendu par Mme [T] [B] le 1er octobre 2021.
L’expert préconise l’accès n°2 : ‘L’accès 2 est le moins contraignant en terme de préjudice, que ce soit en terme de trouble de jouissance, de préjudice environnemental ou esthétique. C’est l’accès le plus court et le moins dommageable pour la finalité qui, nous le rappelons est l’accompagnement des troupeaux par des bergers. L’accès véhicules devra s’arrêter environ 40m avant la parcelle enclavée et la seconde partie devra s’effectuer à pieds.
Les accès 4 et 5 sont beaucoup plus longs, onéreux et nettement plus préjudiciables en terme de trouble de jouissance, environnemental et esthétique et relativement aux chalets existants. Ils permettent en revanche un accès véhicules 4×4 jusqu’au pied de la parcelle [Cadastre 15]’.
Dans leurs conclusions adressées par voie électronique le 25 novembre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] demandent à la cour de :
– réformer le jugement,
– débouter les consorts [L] de leurs demandes,
– dire et juger que les parcelles [Cadastre 15] et [Cadastre 16] bénéficient d’une seule et même servitude de passage, à charge pour Mme [GP] [W] de faire son affaire personnelle de la desserte de la parcelle [Cadastre 16] depuis la parcelle 1731,sur une largeur de 3mètres,selon le tracé de la servitude S1 jusqu’à la parcelle [Cadastre 10], de l’est vers l’ouest, grevant les parcelles :
– 230 et 1519 appartenant aux consorts [L],
– 231 et 143 appartenant aux héritiers de M. [P] [L],
– 1509 appartenant à Mme [U] [R],
– 142 appartenant à M. [N] [L],
puis à titre principal, selon la servitude S5 figurant sous teinte violette du profil en long accès S5 annexé au rapport final de Mme [T] [B] du 30 septembre 2021, grevantles parcelles [Cadastre 10], 143 et 1730,
– Subsidiairement, selon la servitude S4 figurant sur le profil en long accès S4 annexé au rapport final d’expertise de Mme [T] [B] du 30 septembre 2021, grevant les parcelles [Cadastre 10], [Cadastre 11] et [Cadastre 14],
– juger que Mme [GP] [W] agissant tant personnellement qu’en qualité d’ayant droit de M. [A] [W] décédé et M. [IB] [W] ensemble verseront aux consorts [L] ensemble une indemnité globale de 400 euros au titre de l’indemnité de servitude de passage selon le tracé S5 ou subsidiairement la somme de 400 euros au titre de l’indemnité de servitude de passage selon le tracé S4,
– condamner in solidum les consorts [L] à payer à Mme [GP] [W] agissant tant personnellement qu’en qualité d’ayant-droit de M. [N] [L] [A] [W] et à M. [IB] [W] ensemble, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner in solidum les consorts [L], aux dépens de la procédure postérieure à l’arrêt du 7 juillet 2016, avec application pour les dépens d’appel au profit de la Selurl Bollonjeon, avocat associée, des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 19 mai 2022 Mme [U] [R] épouse [L], Mme [J] [S] veuve [L], Mme [V] [L] épouse [G], Mme [D] [L] représentée par sa soeur [Y] [TU], Mme [Y] [L] épouse [TU] et Mme [I] [L] épouse [C] (les consorts [L]) demandent à la cour de :
– homologuer le rapport d’expertise du 30 septembre 2021,
– juger que la parcelle [Cadastre 6] devenue [Cadastre 15] bénéficiera d’une servitude de passage qui s’exercera selon le tracé S2 figurant à l’annexe 3 du rapport,
– juger que la parcelle [Cadastre 4] d devenue [Cadastre 16] bénéficiera d’une servitude de passage qui s’exercera selon le tracé S2 figurant à l’annexe 3 du rapport,
– renvoyer les parties devant tel notaire qu’il appartiendra pour finaliser la création de servitudes aux fins de publications à la conservation des hypothèques,
– juger que les frais de notaire liés à la création des servitudes et de sa publication seront à la charge de M. [IB] [W] et Mme [GP] [Z] veuve [W], tant en leurs noms personnels qu’en leur qualité d’ayant-droit de M. [A] [W],
– condamner in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [Z] veuve [H], tant en leurs noms personnels qu’en leur qualité d’ayant-droit de M. [A] [W], à leur payer la somme de 2 000 euros au titre de l’indemnité de servitude de passage selon le tracé S2.
A titre subsidiaire, si par impossible la cour retenait un autre tracé,
– condamner in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [W], tant en leurs noms personnels qu’en leur qualité d’ayant-droit de M. [A] [W], à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l’indemnité de servitude de passage selon le tracé S4,
– condamner in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [W], tant en leurs noms personnels qu’en leur qualité d’ayant-droit de M. [A] [W], à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l’indemnité de servitude de passage selon le tracé S5,
En tout état de cause,
– débouter M. [IB] [W] et Mme [GP] [W], tant en leurs noms personnels qu’en leur qualité d’ayant-droit de M. [A] [W], de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
– condamner in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] tant en leurs noms personnels qu’en leur qualité d’ayant-droit de M. [A] [W], à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [W], tant en leurs noms personnels qu’en leur qualité d’ayant-droit de M. [A] [W], aux dépens de la procédure postérieure à l’arrêt du 7 juillet 2016, avec application pour ceux d’appel au profit de Me Clarisse Dormeval, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 8 novembre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [N] [L] demande à la cour de :
– homologuer le rapport d’expertise déposé par Madame [B] le 30 septembre 2021, aux termes duquel elle préconise le tracé S2,
A titre principal,
– de juger que la parcelle [Cadastre 6] ([Cadastre 25]) bénéficiera d’une servitude de passage qui s’exercera selon le tracé S2 figurant à l’annexe 3 du rapport d’expertise précité,
– de juger que la parcelle [Cadastre 8] ([Cadastre 26]) bénéficiera d’une servitude de passage qui s’exercera selon le tracé S2 figurant à l’annexe 3 du rapport d’expertise précité,
– de condamner in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] à payer à M. [N] [L] la somme de 2.000 € au titre de l’indemnité de servitude de passage selon le tracé S2,
A titre subsidiaire,
– de juger que la parcelle [Cadastre 6] ([Cadastre 25]) bénéficiera d’une servitude de passage qui s’exercera selon le tracé S5 figurant à l’annexe 5 du rapport d’expertise précité,
– de juger que les consorts [W] bénéficieront d’une seule servitude de passage pour la desserte des parcelles [Cadastre 6] ([Cadastre 15]) et [Cadastre 8] (1732) et qu’ils font leur affaire personnelle de la desserte de la parcelle [Cadastre 16] depuis la parcelle [Cadastre 15],
– de condamner in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] à payer à M. [N] [L] la somme de 50 000 euros au titre de l’indemnité de servitude de passage selon le tracé S2,
A titre infiniment subsidiaire si par extraordinaire la cour devait retenir le tracé S4,
– de condamner in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] à payer à M. [N] [L] la somme de 70 000 euros au titre de l’indemnité de servitude de passage selon le tracé S2,
En tout état de cause,
– de débouter M. [IB] [W] et Madame [GP] [W] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
– de renvoyer les parties devant tel notaire qu’il appartiendra pour finaliser la création de la servitude aux fins de publication au service de la publicité foncière,
– de juger que les frais de notaire liés à la création de la servitude et de sa publication seront, in solidum, à la charge de M. [IB] [W] et de Madame [GP] [W],
– de condamner in solidum, M. [IB] [W] et Madame [GP] [W] à payer à M. M. [N] [L] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– de condamner, in solidum, M. [IB] [W] et Madame [GP] [W], veuve [W] pour un septième, aux dépens de la procédure postérieurement à l’arrêt du 7 juillet 2016,avec application pour ceux de la présente procédure d’appel au profit de Me Catherine Lantelme, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédurecivile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 septembre 2023.
Par conclusions d’incident, notifiées par voie électronique le 7 novembre 2023, M. [N] [L] demande au conseiller de la mise en état de rabattre l’ordonnance de clôture.
Par conclusions au fond notifiées le 7 novembre 2023, M. [N] [L] demande à la cour, en plus des demandes effectuées dans ses précédentes conclusions de condamner M. [IB] [W] et Madame [GP] [W] à lui payer la somme de 9 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 novembre 2023, M. [IB] [W] et Madame [GP] [W] demandent à la cour, en plus des prétentions figurant dans leurs précédentes conclusions de :
– débouter M. [N] [L] de sa demande de rabat de clôture.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur la demande de rabat de l’ordonnance de clôture
L’article 803 alinéa 1 du code de procédure civile dispose que : ‘l ‘ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue ; la constitution d’avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation’.
M. [N] [L] expose qu’il a vainement tenté d’obtenir une mise à jour du cadastre par publication des précédentes décisions rendues dans le cadre de ce litige mais qu’il s’est vu opposer un refus de la part du service de la publicité foncière. Il explique encore avoir, sans succès, sollicité des autres parties au litige des éléments utiles à cette modification. Il considère que l’absence de modification du cadastre avant la clôture de la présente instance constitue une cause grave justifiant le rabat de l’ordonnance de clôture pour pouvoir faire état de cette difficulté dans la procédure.
La cour observe que la demande de rabat de clôture a pour seul objet de mettre dans le débat la difficulté qu’il soulève. Or la cour n’est aujourd’hui saisie en principal que de la question du tracé de la servitude et des indemnisations qui peuvent en découler. Il est constant, au regard des documents versés aux débats, en particulier des rapports d’expertise, que les parcelles concernées sont parfaitement identifiables dans leurs anciennes comme dans leurs nouvelles dénominations. De même les limites des différentes parcelles sont fixées par l’annexe 9 du rapport de M. [O] [E] du 1er juin 2011, homologué par arrêt définitif du 24 avril 2014, complété par l’annexe 2 du rapport de Mme [T] [B] du 30 septembre 2015, homologué par l’arrêt définitif du 7 juillet 2016. Il convient encore de relever que l’arrêt du 23 janvier 2020 a :
– jugé, comme cela est ci-dessus rappelé, que la parcelle [Cadastre 4] était désormais cadastrée et divisée selon les nouvelles numérotations telles que listées dans la décision,
– dit que les parcelles [Cadastre 6] et [Cadastre 8] devenues [Cadastre 28] et [Cadastre 29] sont enclavées et à usage agricole.
Le complément d’expertise n’avait pour objet que d’étudier l’assiette de la servitude de passage, déterminer les travaux à réaliser et en donner le coût approximatif et donner un avis sur l’indemnité à verser aux propriétaires des fonds servants.
Il en résulte que le simple fait de vouloir mettre dans le débat l’existence d’une difficulté à faire modifier le cadastre ne constitue pas une cause grave dès lors que cela n’impacte en rien la solution que la cour d’appel va apporter aux deux questions principales qui lui restent à trancher à savoir la détermination du tracé de la servitude et l’indemnisation des fonds servants.
En conséquence, la demande de rabat de l’ordonnance de clôture sera rejetée et les conclusions au fond produites après la clôture déclarées irrecevables.
2. Sur le tracé de l’assiette de la servitude de passage
La cour rappelle qu’il est désormais définitivement jugé que les parcelles [Cadastre 28] et [Cadastre 29] sont enclavées, qu’elles sont à usage agricole (alpage et exploitation forestière), que la desserte peut n’être effectuée qu’au moyen d’engins mécaniques appropriés comme des véhicules tous-terrains et que les fonds dominants ne peuvent pas revendiquer un accès carrossable pour véhicules de tourisme.
M. [IB] [W] et Mme [GP] [W], propriétaires des fonds dominants, revendiquent une servitude commune débutant sur le tracé S1 jusqu’à la parcelle [Cadastre 10] et se poursuivant, à titre principal par le tracé S5 ou subsidiairement par le tracé S4. Les consorts [L] ainsi que M. [N] [L] sollicitent à titre principal que l’accès emprunte le tracé S2 et subsidiairement le tracé S5.
La cour relève que personne ne remet en question le fait que la servitude de passage litigieuse se fera dans le prolongement de celle empruntant le tracé S1 que personne ne remet en question.
L’article 682 du code civil dispose que : ‘le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n’a sur la voie publique aucune issue, ou qu’une issue insuffisante, soit pour l’exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d’opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d’une indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner’.
L’article 683 du code civil précise que : ‘Le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique.
Néanmoins, il doit être fixé dans l’endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé’.
M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] expliquent que le tracé S2 ne permet pas d’accéder, au moins dans sa deuxième partie, jusqu’aux parcelles enclavées dans la mesure où la topographie des lieux n’est pas compatible avec l’usage agricole reconnu aux parcelles. Ils disent que l’activité d’alpage suppose de déposer des rouleaux de grillage pour les parcs, des piquets, des pierres de sel ainsi que la pose ou la dépose de brebis ou d’agneaux et ne se limite pas à un accompagnement à pied des troupeaux. En ce qui concerne l’activité d’exploitation de bois, M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] exposent qu’un accès en tracteur agricole avec remorque est indispensable. Ils estiment donc ce tracé inadapté à la destination des parcelles à desservir et indiquent que, selon le gérant d’une entreprise venu à leur demande sur les lieux, tout aménagement serait exorbitant et inutile faute de possibilité de réaliser une plate-forme de retournement en bout de servitude.
Les consorts [L] rappellent que l’expert préconise le tracé S2, jugé le plus court et le moins dommageable pour la finalité recherchée et le moins contraignant en terme de préjudice. Ils estiment que les arguments aujourd’hui avancés par M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] sont contraires à la pratique existante et que le tracé S5, au delà des nuisances, provoquerait une dénaturation des paysages.
M. [N] [L] pour sa part indique qu’il convient de conclure dans le même sens que le rapport d’expertise dans la mesure où le tracé S2 viendrait dans le prolongement du tracé déjà existant (S1), où il s’agit du tracé le plus court, le moins coûteux à aménager et le moins dommageable pour les familles habitant à l’année sur place. Il ajoute que les autres tracés (S4 et S5) passeraient ‘sous les fenêtres des chalets’ et à travers son jardin d’agrément. Il indique enfin que c’est le seul tracé permettant de désenclaver simultanément les deux parcelles.
Sur ce :
Sur le tracé S2
Le rapport d’expertise, s’il privilégie le tracé S2, ne le fait que sous un certain nombre de réserves. Il rappelle en effet que le passage est existant ‘jusqu’à un certain point’ et, qu’au delà d’un passage à travers un champ présentant une pente de 22% à travers lequel la création d’une voie d’accès de 3 mètres de large est envisageable, ‘le terrain devient hostile’ et ‘seul un semblant de passage à travers les rochers et les sapins présentant une pente de 42% (c’est la cour qui souligne) nous permet d’accéder à la parcelle [Cadastre 28]”. L’expert n’est pas même certain qu’un véhicule équipé de chenillettes pourrait accéder, par cette voie, à la parcelle [Cadastre 28] puisqu’il emploie le conditionnel (‘pourrait éventuellement accéder’). Enfin, il dit expressément que cet accès par le tracé S2 ne permet de regagner les parcelles enclavées qu’à pieds dans la seconde partie se basant sur le fait que la finalité de l’accès est l’accompagnement de moutons par des bergers à pieds. L’expert indique ainsi ensuite que sur le tracé S2 l’accès à véhicule devra s’arrêter environ 40 mètres avant la parcelle enclavée et que la fin devra s’effectuer à pieds. L’expert ne prend donc pas en considération ni certains aspects de l’activité d’alpage ni les particularités de l’activité d’exploitation forestière.
L’arrêt de la cour d’appel du Chambéry du 23 janvier 2020 a jugé, dans son dispositif, que les parcelles à desservir étaient à usage agricole d’alpage et d’exploitation forestière et que la desserte ne peut être effectuée qu’au moyen d’engins mécaniques appropriés comme des véhicules tous-terrains. Il convient de relever que les activités en question nécessitent plus que l’accompagnement de moutons par des bergers à pieds et que l’expression ‘une desserte sera suffisante dès lors que les parcelles seront accessibles aux troupeaux accompagnés de bergers à pieds, dès lors que des véhicules de type ‘tous terrains’ peuvent accéder à des endroits proches à desservir’ figurant en page 9 de l’arrêt ne concerne que l’activité d’alpage et encore, dans la seule partie de transhumance. Or l’activité d’exploitation forestière, de même que l’activité liée à la présence de moutons en alpage, supposent pour leurs parts un accès jusqu’à la parcelle avec des engins appropriés et non un arrêt à 40 mètres de celle-ci.
Il convient encore de noter, en réponse à M. [N] [L], que l’accès tel que visé par l’arrêt du 23 janvier 2020, traite bien de passage avec des engins mécaniques appropriés comme des véhicules tous terrains. Ce type de véhicule n’est donc cité que comme un exemple et la décision n’exclut donc pas l’utilisation de remorques ou de tracteurs pour transporter du bois, activité dont la réalité a été expressément reconnue dans le dispositif de la décision. En outre, un véhicule tous terrain peut se définir très largement comme un engin (auto, moto, etc) conçu spécialement pour circuler hors des chaussées aménagées, ce qui est le cas d’un tracteur par exemple. Les seuls engins que l’arrêt de 2020 exclut expressément sont les véhicules de tourisme.
Il résulte ainsi, tant de la nature des activités que de la configuration du terrain dans la deuxième partie du chemin S2 telle que décrite par l’expert, que la desserte envisagée par ce tracé ne serait pas suffisante au sens de l’article 682 du code civil. Il importe donc peu dès lorsqu’il puisse être qualifié de plus court et de moins dommageable.
Il convient ainsi d’exclure le tracé S2 à titre d’assiette de la servitude revendiquée par M. [IB] [W] et Mme [GP] [W].
Sur les tracés S4 et S5
Il convient de rappeler à titre liminaire que M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] reconnaissent dans leurs écritures qu’ils font leur affaire de l’accessibilité à la parcelle [Cadastre 29] depuis la parcelle [Cadastre 28].
L’expert note que, tant le tracé S4 que le tracé S5, permettent un accès véhicule jusqu’au pied de la parcelle [Cadastre 28]. Ainsi ils autorisent tous les deux un accès suffisant au sens de l’article 682 du code civil. Il convient dès lors de choisir celui des deux qui est le plus court ou le moins dommageable.
Pour l’accès S4, l’expert précise qu’il est d’une longueur de 200 mètres à compter de la parcelle [Cadastre 10] à laquelle il est possible d’accéder via le chemin S1 non contesté. Ce passage traverse sur 80 mètres la parcelle [Cadastre 10] (propriété de M. [N] [L]), puis sur 120 mètres environ la parcelle [Cadastre 14] (propriété des consorts [L]). Il est précisé que ce chemin traverse le jardin d’agrément de M. [N] [L], n’est pas très visible depuis l’environnement lointain mais passe à proximité du chalet construit sur la parcelle [Cadastre 10] ce qui génère un trouble de jouissance (passage de véhicules dans la partie haute de la parcelle et séparation en deux de la parcelle). L’expert chiffre la réalisation de cet accès à la somme de 24 000 euros.
Pour l’accès S5, l’expert précise qu’il est d’une longueur de 215 mètres et traverse les parcelles [Cadastre 11] et [Cadastre 14] (propriété des consorts [L]). Il démarre avant l’arrivée au chalet depuis la servitude S1. Du point de vue esthétique il traverse un champ et sera donc beaucoup plus visible depuis l’environnement lointain. L’expert ajoute qu’il apporte un préjudice mineur en terme de trouble de jouissance car il passe assez loin des propriétés mais laisse ‘un reliquat de passage’ de véhicules dans la partie basse ce qui constitue un trouble de jouissance. L’expert chiffre la réalisation de cet accès à la somme de 26 000 euros.
Il en résulte que, si le tracé S4 est plus court -de seulement 15 mètres-, il apparaît plus dommageable pour les fonds servants que le tracé S5 lequel passe plus loin des constructions existantes. De ce point de vue la plus grand gène pour l’environnement lointain est à relativiser dans la mesure où les activités concernées ne sont pas de nature à entraîner des passages quotidiens ou d’une fréquence importante. Quant au coût d’installation du tracé il est quasiment identique. Enfin, le tracé S5 permet d’éviter de couper en deux la parcelle [Cadastre 10] appartenant à M. [N] [L] et éloigne le passage de cette parcelle qui ne sera pas concernée par l’assiette de la servitude. Ainsi, le tracé le plus conforme aux dispositions des articles 682 et 683 du code civil est le tracé S5.
3. Sur l’indemnisation des fonds servants
Il résulte de l’article 682 du code civil, ci-dessus rappelé, que le bénéfice d’une servitude de passage au profit d’un fonds enclavé peut être accordé à charge d’une indemnité proportionnée au dommage que le passage peut occasionner.
M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] proposent d’indemniser les fonds servants à hauteur de la somme de 400 euros, somme proposée par l’expert pour le tracé S5. M. [N] [L] pour sa part estime cette somme dérisoire par rapport au préjudice subi et dit que l’indemnisation ne doit pas être calculée en fonction de la seule valeur du terrain, très faible en l’espèce, mais en fonction de la perte de jouissance résultant des troubles liés au passage ainsi que du préjudice de vue, d’agrément et de sécurité. Il demande une indemnité de 50 000 euros pour le tracé S5. Pour le même tracé les consorts [L] réclament une indemnité de 5 000 euros.
La cour relève que seules sont impactées, par le tracé S5, les parcelles [Cadastre 11] et [Cadastre 14] et non la parcelle [Cadastre 10] appartenant à M. [N] [L]. L’expert a estimé que le préjudice lié à la servitude représentait, pour les fonds servants, la perte de propriété sur des surfaces respectives de 274 et 700 mètres carrés, le prix au mètre carré étant estimé à 0,20 euros. L’expert ajoute que le trouble de jouissance (bruit, odeurs, fréquence de passage) est minime et qu’il représente une perte de tranquillité liée à un passage se faisant loin des chalets existants.
Il convient de noter que la perte de propriété ne peut s’indemniser que par référence à la valeur des terrains. A ce titre ni M. [N] [L] ni les consorts [L] n’apportent d’éléments de nature à contredire la valeur à dire d’expert, soit 0,20 euros le mètre carré. Ainsi la perte de propriété sera évaluée à 54,80 euros pour la parcelle [Cadastre 11] (0,20 x 274) et à 140 euros pour la parcelle [Cadastre 14] (0,20 x 700).
Il est constant que l’indemnité doit être proportionnée au dommage que le passage peut occasionner. A ce titre il résulte des pièces versées aux débats qu’un passage d’engins va être désormais possible sur les parcelles [Cadastre 11] et [Cadastre 14] qui en étaient jusqu’à présent exemptées. Ce passage va créer un trouble de jouissance certain mais néanmoins limité dans son ampleur. Ce préjudice de jouissance est plus important pour la parcelle [Cadastre 11] sur laquelle sont édifiées des habitations, le passage pouvant gêner les habitants, lorsqu’ils s’y trouvent. Il sera moins important sur la parcelle [Cadastre 14] à usage de pré. Le préjudice de vue lointaine reste pour sa part trop incertain, un passage n’étant par définition que temporaire et étant entendu qu’il n’est pas démontré que les activités généreront un passage d’une fréquence élevée impliquant un nombre important d’engins 365 jours par an. Ainsi le préjudice de jouissance de la parcelle [Cadastre 11] sera estimé à 3 000 euros et celui de la parcelle 1730à 1 000 euros.
Il résulte de ce qui précède que M. [IB] [W] et Mme [GP] [W], propriétaires actuels des fonds dominants seront condamnés à verser aux propriétaires actuels de la parcelle [Cadastre 11] la somme totale de 3 054,80 euros et aux propriétaires actuels de la parcelle [Cadastre 14] la somme totale de 1 140 euros à titre d’indemnité pour la servitude de passage.
4. Sur les dépens postérieurs à l’arrêt du 7 juillet 2016 et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, les consorts [L] et M. [N] [L] qui succombent seront condamnés in solidum aux dépens de la procédure postérieure à l’arrêt de la cour d’appel de Chambéry du 7 juillet 2016, avec distraction au profit de la Selurl Bollojeon, avocat associée par application de l’article 699 du code de procédure civile. Ils seront, dans le même temps déboutés de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile comme n’en remplissant pas les conditions d’octroi.
Il n’est pas inéquitable de faire supporter par les consorts [L] et M. [N] [L] partie des frais irrépétibles non compris dans les dépens exposés par M. [IB] [W] et Mme [GP] [W]. Ils seront donc condamnés in solidum à leur verser la somme totale de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Rejette la demande de rabat de l’ordonnance de clôture du 18 septembre 2023,
Dit irrecevables les conclusions au fond signifiées par voie électronique par M. [N] [L] le 7 novembre 2023 et par M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] le 17 novembre 2023,
Dit que les parcelles [Cadastre 28] et [Cadastre 29] bénéficient d’une seule et même servitude de passage de trois mètres de large selon le tracé S5 tel que décrit dans le rapport de Mme [T] [B] remis le 1er octobre 2021, dans la continuité de la servitude S1, traversant pour le S5 les parcelles [Cadastre 11] et [Cadastre 14], et pour le S1 les parcelles [Cadastre 17], [Cadastre 13], [Cadastre 18], 143, 1509 et 142,
Dit que l’ensemble des frais relatifs à la constitution, à la publication et à l’aménagement de la servitude seront à la charge de M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] propriétaires des fonds dominants,
Condamne in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] à verser aux propriétaires actuels de la parcelle [Cadastre 11] la somme de 3 054,80 euros à titre d’indemnité pour la servitude de passage,
Condamne in solidum M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] à verser aux propriétaires actuels de la parcelle [Cadastre 14] la somme totale de 1 140 euros à titre d’indemnité pour la servitude de passage,
Condamne in solidum M. [N] [L], Mme [U] [R] épouse [L], Mme [J] [S] veuve [L], Mme [V] [L] épouse [G], Mme [D] [L] représentée par sa soeur [Y] [TU], Mme [Y] [L] épouse [TU] et Mme [I] [L] épouse [C] aux dépens postérieurs à l’arrêt de la cour d’appel de Chambéry du 7 juillet 2016, la Selurl Bollojeon, avocat associée, étant autorisée à recouvrer directement auprès d’eux ceux dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision,
Déboute M. [N] [L], Mme [U] [R] épouse [L], Mme [J] [S] veuve [L], Mme [V] [L] épouse [G], Mme [D] [L] représentée par sa soeur [Y] [TU], Mme [Y] [L] épouse [TU] et Mme [I] [L] épouse [C] de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum M. [N] [L], Mme [U] [R] épouse [L], Mme [J] [S] veuve [L], Mme [V] [L] épouse [G], Mme [D] [L] représentée par sa soeur [Y] [TU], Mme [Y] [L] épouse [TU] et Mme [I] [L] épouse [C] à payer à M. [IB] [W] et Mme [GP] [W] la somme globale de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ainsi prononcé publiquement le 08 février 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente