Constitution d’avocat : décision du 25 octobre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 23/03368

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Constitution d’avocat : décision du 25 octobre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 23/03368
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25/10/2023

ARRÊT N° 560/2023

N° RG 23/03368 – N° Portalis DBVI-V-B7H-PW3W

CBB/MB

Décision déférée du 13 Juillet 2023 – Conseiller de la mise en état de TOULOUSE – 23/02006

[W] [D]

C/

S.A. BANQUE POPULAIRE DU SUD

IRRECEVABILITÉ

DE LA DEMANDE DE QPC

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT CINQ OCTOBRE DEUX MILLE VINGT TROIS

***

SUR UNE QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ

DEMANDEUR A LA QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ

Monsieur [W] [D]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Sans avocat constitué

DEFENDERESSE A LA QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ

S.A. BANQUE POPULAIRE DU SUD SA A CAPITAL VARIABLE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie ALZIEU de la SELARL ALZIEU-PUIG AVOCATS, avocat au barreau D’ARIEGE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 11 Octobre 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :

C. BENEIX-BACHER, président

O. STIENNE, conseiller

E.VET, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M. BUTEL

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée et qui a fait connaître son avis écrit le 05/10/2023

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par M. BUTEL, greffier de chambre.

La SA Banque Populaire du Sud a clôturé les comptes ouverts dans ses livres au nom de M. [D]. Par déclaration au greffe du 14 octobre 2022, ce dernier a saisi le Tribunal Judiciaire de Foix d’une demande d’annulation de cette décision.

Suivant jugement en date du 12 mai 2023, le tribunal judiciaire de Foix a déclaré M. [D] irrecevable en ses demandes en application des articles 750, 761 et 775 du code de procédure civile pour ne pas avoir saisi la juridiction par assignation et avocat, s’agissant d’une demande indéterminée.

Suivant requête par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 mai reçue le 1er juin 2023, M. [D] a relevé appel de cette décision.

Suite au courrier du greffe en date du 2 juin l’invitant à saisir un avocat, M.[D] a répondu par courrier du 6 juin reçu le 8 juin 2023 qu’il opposait les dispositions de l’article 931 du code de procédure civile, faisant valoir que la notification du jugement visait l’article 932 qui dispose que l’appel est formé par lettre recommandée avec accusé de réception au greffe de la cour.

Par courrier du 19 juin envoyé par lettre recommandée avec accusé de réception, le greffe sollicitait les observations de M. [D] sur l’irrecevabilité de l’appel soulevée d’office, à défaut de constitution d’avocat.

Par ordonnance en date du 13 juillet 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable l’appel formé par lettre recommandée avec accusé de réception et a condamné M. [D] aux dépens.

Par courrier recommandé du 30 juillet 2023 avec avis de réception du 1er août 2023, M. [D] a déféré la décision devant la cour au visa de l’article 945 du code de procédure civile.

Les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec accusé de réception à l’audience du 11 octobre 2023 à 14 heures pour voir statuer sur le déféré de l’ordonnance du conseiller de la mise en état

Parallèlement, par requête en date du 26 septembre 2023, M. [D] intimant la SA Banque Populaire du Sud demande à la cour sur le fondement de la déclaration du 26 août 1789 en ses articles 2, 4 et 5 et la constitution du 4 octobre 1958 en ses articles 66 et 34 de transmettre à la Cour de Cassation, le contrôle de constitutionnalité de l’article 899 du code de procédure civile en tant que moyen de droit dans l’instance considérant que ce texte qui oblige les parties à constituer avocat, opposé comme fin de non recevoir porte atteinte aux libertés et justifie l’exception d’illégalité soutenue.

Le même jour, le 26 septembre 2023, M. [D] et la SA Banque Populaire du Sud ont été convoqués à l’audience de la cour tenue en formation collégiale le 11 octobre 2023 à 14 heures, pour voir statuer sur la transmission à la Cour de Cassation de la question priroritaire de constitutionnalité présentée par M. [D].

Par observations du 29 septembre 2023, la Banque Populaire du Sud soutient que’:

– l’article 61-1 de la Constitution pose le principe de la procédure d’examen par voie d’exception de la constitutionnalité d’une loi, et prévoit expressément que doit être concernée une disposition législative portant «atteinte au droit et liberté que la constitution garantie»,

– en l’espèce, l’article 899 du Code de procédure civile est de nature règlementaire, de sorte que sa constitutionnalité ne peut être étudiée par le biais de cette procédure,

– également, la question de la recevabilité de cette demande, toujours formulée sans avocat, se pose.

En réponse et par courrier du 9 octobre reçu au greffe le 10 octobre 2023, M. [D] réplique que l’article 899 du code de procédure civile est certes un texte règlementaire du point de vue formel mais s’agissant d’une mesure restreignant abusivement une liberté fondamentale touchant à l’essence même de la démocratie, elle empiète indûment sur le domaine exclusif de la loi tel que défini par le préambule et les articles 2, 4, 5 de la DDHC repris à l’article 34 de la constitution. Ce texte est donc un règlement d’un point de vue organique mais une loi d’un point de vue fonctionnel, de sorte qu’il est légitime de soumettre la constitutionnalité de l’article 899 du code de procédure civile au juge institutionnel.

Par réquisitions du 5 octobre 2023 transmises aux parties, le ministère public conclut à l’irrecevabilité de la demande de transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement des articles 61-1, 34 et 37 de la constitution française, considérant que l’article 899 du code de procédure civile qui impose la constitution d’un avocat est une règle de procédure, ne relève pas de l’article 34 mais de l’article 37 et est donc de nature règlementaire.

A l’audience du 11 octobre 2023, M. [D] a développé son argumentation écrite.

MOTIVATION

En application de l’article 61-1 de la Constitution, lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé.

En application de l’article 23-1 de l’ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, devant les juridictions relevant du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation, le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d’irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé.

L’article 126-2 du code de procédure civile reprend ces dispositions en précisant qu’elles sont prescrites à peine d’irrecevabilité. Et l’article 126-3 ajoute que le juge de la question prioritaire de constitutionnalité est celui qui connaît de l’instance au cours de laquelle cette question est soulevée.

Or, d’une part, l’instance en cours concerne l’appel d’une ordonnance du conseiller de la mise en état soit une procédure avec représentation obligatoire, et, M. [D] a déposé sa requête sans recours à un avocat.

D’autre part, l’article 34 de la constitution française détermine le domaine de la loi et aux termes de l’article 37 les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire.

L’article 899 du code de procédure civile n’entre pas dans le domaine de la loi’tel que déterminé par l’article 34: il est donc de nature règlementaire. M.[D] le reconnaît expressément mais il demande à la cour de procéder à une interprétation afin d’en modifier la nature au regard de l’objectif poursuivi : en effet selon lui, dès lors qu’il restreint les libertés individuelles en exigeant la représentation par avocat, ce texte entre alors dans le domaine législatif.

Or, il n’entre pas dans les pouvoirs du juge judiciaire de modifier la nature d’un texte règlementaire pour le faire admettre dans le domaine de la loi.

Dans ces conditions, l’article 899 du code de procédure civile qui n’est pas une disposition législative ne peut faire l’objet d’un contrôle de constitutionnalité.

La demande est donc irrecevable.

PAR CES MOTIFS

La cour

– Déclare irrecevable la demande de transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité formée par requête de M. [D] en date du 25 septembre 2023 reçue le 26 septembre 2023.

– Avis est donné aux parties que la décision ne peut être contestée qu’ à l’occasion d’un recours formé contre la décision tranchant le litige.

– Réserve les dépens avec l’instance au fond.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

M. BUTEL C. BENEIX-BACHER

 


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