Constitution d’avocat : décision du 24 octobre 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/01217

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Constitution d’avocat : décision du 24 octobre 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/01217
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N° RG 22/01217 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LJIX

LB

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Bernard BOULLOUD

la SELARL ALPAZUR AVOCATS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 24 OCTOBRE 2023

Appel d’une décision (N° RG 21/00223)

rendue par le Juge des contentieux de la protection de GAP

en date du 01 février 2022

suivant déclaration d’appel du 23 mars 2022

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège et venant aux droits de la SA CETELEM

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Bernard BOULLOUD, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

Mme [W], [J], [B] [X]

née le [Date naissance 2] 1989 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 1]

représentée par Me Jean-Pierre AOUDIANI de la SELARL ALPAZUR AVOCATS, avocat au barreau de HAUTES-ALPES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Catherine Clerc, président de chambre,

Mme Joëlle Blatry, conseiller

M. Lionel Bruno , conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 27 juin 2023 Monsieur Bruno conseiller chargé du rapport, assisté de Anne Burel, greffier, a entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

En présence de madame [S] [V] et de monsieur [K] [N] auditeurs de justice, qui ont siégé en surnombre et participé avec voix consultatives au délibéré.

Il en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu ce jour.

Faits et procédure :

Selon une offre de contrat de crédit signée le 5 décembre 2018, la Bnp Paribas Personal Finance a prêté à [W] [X] un capital de 33.000 euros remboursable en 72 mensualités au taux d’intérêt annuel effectif global de 5,87 % en vue de l’acquisition d’un véhicule. Les mensualités ont cessé d’être payées, conduisant le prêteur à se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte d’huissier du 4 mars 2021, la Bnp Paribas Personal Finance a fait assigner madame [X] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire deGap aux ‘ns de la voir condamner :

au paiement de la somme de 36.256,50 euros au titre du prêt du 5 décembre 2018, outre les intérêts au taux contractuel de 5,04% sur la somme de 33.622,21 euros, outre intérêts au taux légal pour le surplus à compter de l’assignation valant prononcé de la déchéance du terme’;

à restituer le véhicule 3008 2.0 BL HDI 180 CH mis en circulation le 3 août 2018 et dont le numéro de série est VF3MJEHZRJS340463.

Par jugement du 1er février 2022, le juge des contentieux de la protection de Gap a’:

constaté la forclusion des demandes de la Bnp Paribas Personal Finance vis-à-vis de [W] [X], et en conséquence les a déclarées irrecevables;

condamné la Bnp Paribas Personal Finance à régler à [W] [X] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

condamné la Bnp Paribas Personal Finance aux dépens.

La Bnp Paribas Personnal Finance a interjeté appel de cette décision le 23 mars 2022 en toutes ses dispositions reprises dans son acte d’appel.

L’instruction de cette procédure a été clôturée le 27 juin 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 27 juin 2023, lors de laquelle il a été soutenu par l’appelante que l’intimée n’a pas réglé le droit prévu à l’article 963 du code de procédure civile. L’appelante a ainsi conclu à l’irrecevabilité des conclusions de madame [X].

Prétentions et moyens de la société Bnp Paribas Personnal Finance’:

Selon ses conclusions remises le 17 mai 2022, elle demande à la cour, au visa de l’article R. 632-1 du code de la consommation, des articles 1103, 1342-10 et 1353 et suivants du code civil’:

de déclarer la demande de la concluante bien fondée’;

en conséquence de condamner [W] [X] à payer à la concluante la somme de 36.256,50 euros, outre intérêts au taux de 5,04 % sur la somme de 33.622,21 euros à compter du 28 janvier 2021, date de la mise en demeure non récupérée par la débitrice;

d’ordonner, en tout état de cause, la capitalisation des intérêts par application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil;

d’ordonner à [W] [X] de restituer le véhicule de marque Peugeot 3008 2.0 HDI mis en circulation le 3 août2018 portant le numéro de série VF3MJEHZRJS340463 sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir;

de condamner [W] [X] à payer à la concluante la somme de 2.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile’;

de condamner [W] [X] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Elle expose’:

concernant l’absence de forclusion, que le tribunal a considéré à tort que le premier incident de paiement non régularisé remonte au 5 février 2019, estimant que l’annulation de la mensualité du mois de février 2019 par le prêteur ne peut être assimilée à un paiement par l’emprunteur pouvant avoir pour effet de reporter le point de départ du délai de forclusion’; qu’il résulte en réalité du tableau d’amortissement et de l’historique des règlements que sans tenir compte des annulations et des régularisations de retard, le premier incident de paiement non régularisé est le 5 mars 2019′; que l’assignation ayant été délivrée le 4 mars 2021, la forclusion n’est pas ainsi acquise’;

sur le fond, que la demande est justifiée par la production de l’offre de prêt, du tableau d’amortissement, de l’historique du compte, du détail de la créance et des mises en demeure’;

que la capitalisation des intérêts est d’ordre public.

Prétentions et moyens de [W] [X]’:

Selon ses conclusions remises le 9 août 2022, elle demande à la cour’:

de débouter la Bnp Paribas Personal Finance de son appel;

en conséquence, de confirmer intégralement le jugement de première instance en ce qu’il a constaté la forclusion des demandes de la Bnp Paribas Personal Finance envers la concluante pour les déclarer irrecevables avec condamnation de la Bnp au paiement d’une somme de 1.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens;

en tout état de cause, de débouter la Bnp Paribas Personal Finance de tous droits aux intérêts contractuels;

reconventionnellement, de condamner la Bnp Paribas Personal Finance au paiement d’une somme de 3.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l’appel.

Elle soutient’:

concernant la forclusion, que le tableau d’amortissement produit par l’appelante n’en est pas un, puisqu’il a été édité le 13 octobre 2020 avant l’engagement de la procédure, alors que le prêt a été signé le 5 décembre 2018′; qu’il résulte par contre de l’historique des règlements que le premier prélèvement de l’échéance du 5 février 2019 a été impayé’; que le 13 février 2019, il a été noté un prélèvement immédiatement repassé en débit pour le même montant’; que si le 1er mars 2019, la somme de 644,51 euros a été passée au crédit avec la mention «’annulation de retard’», cela ne peut être considéré comme un règlement effectif par prélèvement sur le compte de la concluante’; que si cet historique mentionne un prélèvement de 596,77 euros, faisant penser qu’un paiement serait intervenu, il résulte cependant du tableau récapitulatif que le dossier a été transmis au contentieux le 21 mars 2019 pour 33.622,21 euros, ce qui indique qu’aucune échéance n’a été en réalité prélevée, de sorte que l’appelante est forclose’;

s’agissant des intérêts, que l’offre de prêt produite par l’appelante mentionne l’existence du droit de rétractation de 14 jours calendaires’; qu’il n’est cependant pas justifié de la remise effective du bordereau de rétractation détachable.

Il convient en application de l’article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS

En premier lieu, il résulte des dispositions de l’article 963 du code de procédure civile que lorsque l’appel entre dans le champ d’application de l’article 1635 bis P du code général des impôts, les parties justifient, à peine d’irrecevabilité de l’appel ou des défenses selon le cas, de l’acquittement du droit prévu à cet article. Selon l’article 1635 bis P du code général des impôts, il est institué un droit d’un montant de 225 euros dû par les parties à l’instance d’appel lorsque la constitution d’avocat est obligatoire devant la cour d’appel. Le droit est acquitté par l’avocat postulant pour le compte de son client par voie électronique. Il n’est pas dû par la partie bénéficiaire de l’aide juridictionnelle. Le produit de ce droit est affecté au fonds d’indemnisation de la profession d’avoués près les cours d’appel. Ce droit est perçu jusqu’au 31 décembre 2026.

En la cause, la constitution d’avocat est obligatoire dans la présente procédure, et madame [X] ne bénéficie pas de l’aide juridictionnelle. Elle doit en conséquence acquitter ce droit. Or, il résulte des débats et des pièces de la procédure que ce droit n’a pas été réglé. Il s’ensuit que ses conclusions sont irrecevables.

Concernant la recevabilité de l’action de l’appelante, le juge des contentieux de la protection a énoncé que selon les articles R312-35 du code de la consommation et 1253 et suivants du code civil, le délai biennal de forclusion court à compter de la première échéance non régularisée compte tenu des règles d’imputation des paiements des articles 1253 et suivants du code civil et que seul un réaménagement conventionnel peut avoir pour effet de reporter le point de départ du délai.

Le juge a indiqué qu’en l’espèce, la Bnp Paribas Personal Finance indique que Ie premier impayé non régularisé se situe au 5 mars 2019, alors que le décompte et le justi’catif de calcul des intérêts de retard produits montrent qu’à la date du 5 mars 2019, et tel qu’elle le soutient, madame [X] n’avait réglé aucune mensualité, ce qui a généré des indemnités de retard d’un montant de 47,74 euros. Le juge en a retiré que la première mensualité étant exigible le 5 février 2019, la première mensualité impayée et non régularisée est celle du mois de février 2019. Il a dit que l’annulation à laquelle a procédé unilatéralement la société Bnp Paribas Personal Finance au titre du loyer du mois de février 2019 ne saurait être assimilée à un règlement de l’emprunteur et ne peut avoir pour effet de reporter le point de départ du délai de forclusion, lequel ne peut dépendre de la seule volonté de l’organisme prêteur. Il a conclu que la date du premier impayé non régularisé se situe non au 5 mars 2019 comme le soutient la société Bnp Paribas Personal Finance, mais au 5 février 2019, et que l’assignation en paiement a été délivrée le 4 mars 2021, soit plus de deux années après le premier incident de paiement non régularisé, de sorte que l’action de la banque est forclose.

La cour constate que le prêt affecté à l’acquisition du véhicule a été conclu par l’intermédiaire du concessionnaire automobile le 5 décembre 2018, avec signature de l’attestation de livraison le même jour. La demande de versement du montant intégral du prêt a été faite par le concessionnaire auprès du prêteur également le même jour. Selon le contrat de prêt, les échéances de remboursement devaient être réglées le 5 de chaque mois, à partir du délai de 30 jours suivants la mise à disposition des fonds. Selon l’historique du compte, le financement effectif est intervenu le 18 décembre 2018, et la première échéance a été quittancée le 5 février 2019.

Selon l’historique du compte, la première échéance du 5 février 2019 est revenue impayée, ce qui a entraîné la comptabilisation d’une indemnité de retard. Une nouvelle présentation du prélèvement a été effectuée le 13 février au titre de la mensualité du 5 février et des indemnités de retard, prélèvement également revenu impayé pour 644,51 euros. Cependant, comptablement, l’appelante a annulé ce prélèvement rejeté. Il en résulte que la mensualité de février 2019 est demeurée impayée. L’annulation du paiement opéré par l’appelante n’a pas eu d’effet.

Si selon cet historique, l’appelante a quittancé le 5 mars 2019 la mensualité afférente à ce mois, pour 588,47 euros, outre 8,30 euros au titre des prestations supplémentaires, soit un total de 596,77 euros, lequel a bien été prélevé, ce prélèvement n’a pas régularisé l’impayé de 644,51 euros, résultant de l’échéance impayée du 5 février 2019 majorée des prestations complémentaires et des indemnités de retard, en raison de l’insuffisance de son montant.

Selon l’article R312-35 du code de la consommation, le tribunal judiciaire connaît des litiges nés de l’application des dispositions du chapitre concernant les prêts à la consommation. Les actions en paiement engagées devant lui à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par :

le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme;

ou le premier incident de paiement non régularisé;

ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable;

ou le dépassement, au sens du 13° de l’article L. 311-1, non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L. 312-93.

Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l’objet d’un réaménagement ou d’un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés ou après adoption du plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 732-1 ou après décision de la commission imposant les mesures prévues à l’article L. 733-1 ou la décision du juge de l’exécution homologuant les mesures prévues à l’article L. 733-7.

En la cause, l’annulation comptable de l’impayé du mois de février 2019 ne correspond pas à un réaménagement ou à un rééchelonnement au sens de ce texte, et elle ne peut avoir eu pour effet de décaler la date du premier impayé. Le paiement effectué au mois de mars 2019 n’a pas suffit à apurer l’impayé constaté au mois de février.

Il en résulte, comme retenu par le premier juge, que la première échéance impayée non régularisée est bien celle du 5 février 2019, le paiement intervenu le 5 mars n’ayant pas suffit à apurer cette échéance. D’ailleurs, selon le décompte de la créance édité par l’appelante, une seule mensualité échue a été impayée pour 693,59 euros, et le règlement reçu avant passage au contentieux est de 596,77 euros, correspondant à la somme prélevée au mois de mars, ce qui confirme l’absence de régularisation de l’impayé du mois de février. L’assignation ayant été signifiée le 4 mars 2021, il en résulte que l’action de l’appelante était forclose et qu’elle était irrecevable. Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

La Bnp Paribas Personal Finance succombant en son appel sera condamnée aux dépens par application de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Vu l’article 963 du code de procédure civile, les articles R312-35 du code de la consommation et 1253 et suivants du code civil,

Déclare les conclusions déposées par madame [X] irrecevables,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour,

y ajoutant’;

Condamne la Bnp Paribas Personal Finance aux dépens d’appel.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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