Constitution d’avocat : décision du 22 novembre 2023 Cour d’appel de Rouen RG n° 22/03087

·

·

Constitution d’avocat : décision du 22 novembre 2023 Cour d’appel de Rouen RG n° 22/03087
Ce point juridique est utile ?

N° RG 22/03087 – N° Portalis DBV2-V-B7G-JFVY

COUR D’APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 22 NOVEMBRE 2023

AVANT DIRE DROIT

DÉCISION DÉFÉRÉE :

20/01290

Tribunal judiciaire d’Evreux du 12 juillet 2022

APPELANT :

Monsieur [T] [M]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 8]

[Adresse 5]

[Localité 4]

représenté par Me Florence GODDEFROY-GANCEL de la Scp GODDEFROY-GANCEL & GRECO, avocat au barreau de Rouen

INTIMEES :

Sa PACIFICA

RCS de Paris 352 358 865

[Adresse 7]

[Localité 6]

représentée et assistée par Me Marie LEPRETRE de la Scp MESNIL-LEPRETRE, avocat au barreau de l’Eure

Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Eure

[Adresse 1]

[Localité 3]

non constituée bien que régulièrement assignée par acte d’huissier remis à personne habilitée le 21 octobre 2022

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 20 septembre 2023 sans opposition des avocats devant Mme Anne-Laure BERGERE, conseillère, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre

Mme Magali DEGUETTE, conseillère

Mme Anne-Laure BERGERE, conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER

DEBATS :

A l’audience publique du 20 septembre 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 22 novembre 2023

ARRET :

AVANT DIRE DROIT

Prononcé publiquement le 22 novembre 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente de chambre et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*

* *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 3 août 2016, M. [T] [M], assuré au titre d’un contrat garantie accidents de la vie souscrit auprès de la Sa Pacifica, a été victime d’une chute responsable d’une fracture-tassement communitive de la 3ème vertèbre lombaire avec recul du mur postérieur.

À la suite du rapport d’expertise déposé le 7 décembre 2017 par le Dr [K] mandaté par l’assureur pour évaluer les préjudices subis par M. [M], la Sa Pacifica a, par courrier du 19 mars 2019, présenté une offre d’indemnisation à la victime.

Contestant l’évaluation et la proposition d’indemnisation ainsi faite,

M. [M] a sollicité l’avis complémentaire du Dr [D] qui a établi un rapport le 7 avril 2020.

Par exploit du 12 mai 2020, M. [M] a fait assigner la Sa Pacifica et la Caisse primaire d’assurance maladie de l’Eure devant le tribunal judiciaire d’Evreux aux fins d’indemnisation de son préjudice.

Par ordonnance du 7 décembre 2020, le juge de la mise en état a ordonné une expertise judiciaire confiée au Dr [H]. L’expert a déposé son pré-rapport le 17 mars 2021.

Par jugement du 12 juillet 2022, le tribunal judiciaire d’Evreux a condamné la Sa Pacifica à payer à M. [M] la somme totale de 70 826,83 euros, provisions non déduites, au titre de la réparation de son préjudice corporel fixé comme suit :

– assistance tierce personne temporaire : 7 200 euros

– incidence professionnelle : 27 381, 83 euros

– déficit fonctionnel temporaire : 4 645 euros

– souffrances endurées : 12 000 euros

– préjudice esthétique temporaire : 1 000 euros

– déficit fonctionnel permanent : 15 600 euros

– préjudice esthétique permanent : 3 000 euros

– dit que ces sommes porteraient intérêt au taux légal à compter du jugement, condamné la Sa Pacifica à payer à M. [M] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec distraction.

Par déclaration au greffe du 20 septembre 2022, M. [M] a interjeté appel de cette décision s’agissant des sommes allouées au titre de l’assistance tierce personne temporaire et de l’incidence professionnelle ainsi que le rejet de ses demandes au titre de la tierce personne définitive et du préjudice d’agrément.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS

Par dernières conclusions notifiées le 26 juin 2023,

M. [M] demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil et des conclusions du rapport d’expertise du Dr [H], d’infirmer le jugement entrepris sur les sommes allouées au titre de l’assistance tierce personne temporaire et de l’incidence professionnelle ainsi que le rejet de ses demandes au titre de la tierce personne définitive et du préjudice d’agrément,

statuant à nouveau,

– condamner la Sa Pacifica à lui payer les sommes suivantes :

. au titre de l’incidence professionnelle et après déduction de la créance des tiers payeurs : 127 990, 85 euros, somme à parfaire,

. au titre de la tierce personne temporaire : 8 000 euros,

. au titre de la tierce personne permanente : 60 399, 68 euros

. au titre du préjudice d’agrément :10 000 euros,

– confirmer, pour le surplus le jugement entrepris,

et en conséquence,

– condamner la Sa Pacifica à lui payer au titre de l’indemnisation de son entier préjudice la somme totale de 242 365,53 euros,

en tout état de cause,

– juger que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la décision à intervenir,

– lui donner acte de ce qu’il a perçu, à titre de provision, la somme de 1 500 euros,

– condamner la Sa Pacifica à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec distraction au profit de la Scp Goddefroy-Gancel & Greco.

M. [M] reproche aux premiers juges d’avoir évalué son préjudice d’incidence professionnelle conformément à la définition de la nomenclature Dintihac alors que c’est la définition contractuelle qui aurait dû être appliquée, soutenant que cette dernière inclut dans l’incidence professionnelle la perte de gains futurs et la perte de droits à la retraite, ce que la Sa Pacifica ne conteste pas. Il propose une méthode de calcul pour chiffrer son préjudice au titre tant de la perte de gains professionnels futurs que de la perte de ses droits à la retraite.

Sur le poste relatif à la tierce personne, il sollicite l’indemnisation de son préjudice sur la base d’un taux horaire de 20 euros et soutient qu’il rapporte la preuve que son état de santé justifie une aide définitive de deux heures par semaine. De même, il estime établir de manière certaine et incontestable l’existence d’un préjudice d’agrément.

Par dernières conclusions récapitulatives notifiées le 11 août 2023 et signifiées à la Caisse primaire d’assurance maladie de l’Eure le 24 août 2023, la Sa Pacifica demande à la cour de débouter M. [M] de son appel, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et y ajoutant, de condamner

M. [M] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L’intimée conteste les calculs opérés par l’appelant concernant l’évaluation de la perte de gains professionnels futurs et ses droits à la retraite, relevant qu’ils sont tronqués par l’application d’un barème différent de celui appliqué par les organismes sociaux tiers payeurs, que la base du calcul retenue pour le départ à la retraite est 65 ans alors qu’il va être placé à la retraite à 62 ans. En outre, elle sollicite l’application du barème BCRIV 2021 de la fédération française de l’assurance, plus favorable aux victimes que celui de la Gazette du Palais.

La tierce personne étant assumée par un membre de la famille, la Sa Pacifica maintient sa proposition de taux horaire à 14 euros et s’oppose à l’indemnisation de la tierce personne à titre définitif, le contrat d’assurance prévoyant un tel poste de préjudice uniquement lorsque la victime a besoin d’aide pour les actes essentiels de la vie courante, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Enfin, elle soutient que M. [M] ne rapporte pas la preuve de son préjudice d’agrément.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour s’en réfère expressément à leurs dernières conclusions récapitulatives, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

La Caisse primaire d’assurance maladie de l’Eure, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 27 octobre 2022, n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 août 2023.

MOTIFS

Aux termes de l’article 803 du code de procédure civile, l’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue ; la constitution d’avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation. Si une demande en intervention volontaire est formée après la clôture de l’instruction, l’ordonnance de clôture n’est révoquée que si le tribunal ne peut immédiatement statuer sur le tout. L’ordonnance de clôture peut être révoquée, d’office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l’ouverture des débats, par décision du tribunal. L’ordonnance de clôture peut également être révoquée, après recueil de l’avis des parties, afin de permettre au juge de la mise en état, conformément à l’article 785, de décider de la convocation des parties à une audience de règlement amiable selon les modalités prévues aux articles 774-1 à 774-4.

En l’espèce, il résulte des écritures des parties que M. [M] entend critiquer les conclusions de l’expert judiciaire prise sur le poste de préjudice assistance tierce personne permanente et rédigées comme suit : ‘suite à son accident du 03 août 2016, il garde en séquelle une raideur douloureuse du rachis lombaire justifiant une incapacité permanente partielle de 10 %. Ce handicap n’est pas de nature à justifier l’aide d’une tierce personne à vie après consolidation.’

L’appelant reproche à l’expert de ne pas avoir répondu à son dire du 19 avril 2021 aux termes duquel il faisait valoir que la jurisprudence considère que le port de charges lourdes, que sa raideur du rachis lombaire rend impossible, est un acte de la vie courante qui doit être pris en compte pour déterminer les besoins en tierce personne, tout comme l’aide dont il a besoin pour l’entretien de ses espaces verts et de ses immeubles en location, pour faire le ménage ou encore mettre ses chaussettes ou faire ses lacets, actes pour lesquels il bénéficie de l’aide de sa mère avec qui il vit.

Or, il ressort des pièces communiquées en l’état par les parties que la cour ne dispose pas de toutes les informations nécessaires pour trancher cette question.

En effet, si M. [M] a produit le dire du 19 avril 2021, il ne verse, en revanche, aux débats que le pré-rapport d’expertise rédigé le 17 mars 2021 qui logiquement ne mentionne pas l’existence de cet écrit, et non le rapport définitif d’expertise judiciaire prenant en compte cette observation.

L’intimée est également défaillante dans la charge de la preuve qui lui incombe, puisqu’elle ne produit pas ce rapport définitif alors qu’elle fonde notamment sa critique de la demande indemnitaire présentée à ce titre, sur la réponse qu’aurait faite l’expert dans son courrier du 26 avril 2021, qu’elle ne communique pas de manière isolée.

Cet élément étant déterminant pour l’évaluation du poste de préjudice assistance tierce personne permanente, la cour entend d’office ordonner la révocation de l’ordonnance de clôture et la réouverture des débats afin d’enjoindre aux parties de produire le rapport définitif d’expertise judiciaire avec toutes ses annexes, en ce compris le dire du 19 avril 2021 et la réponse de l’expert du 26 avril 2021 et, le cas échéant, de conclure au vu du contenu de ces nouvelles pièces sur la liquidation du poste de préjudice discuté.

Les dépens sont réservés.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant avant dire droit, par arrêt mis à disposition au greffe,

Ordonne la révocation de l’ordonnance de clôture de la procédure intervenue le 30 août 2023 et la réouverture des débats ;

Enjoint à M. [M] et à la Sa Pacifica de :

– communiquer aux débats le rapport d’expertise judiciaire du Dr [H] accompagné de l’intégralité de ses annexes et plus spécifiquement du dire de Me Goddefroy Gancel du 19 avril 2021 et de la réponse de l’expert du 26 avril 2021,

– de conclure, au vu de ces nouvelles pièces, sur la liquidation du poste de préjudice assistance tierce personne permanente ;

Dit que la nouvelle ordonnance de clôture de la procédure interviendra le 10 janvier 2024 à 14 heures ;

Renvoie à l’audience de plaidoirie du 22 janvier 2024 à 14 heures ;

Réserve les dépens.

Le greffier, La présidente de chambre,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x