Constitution d’avocat : décision du 15 février 2024 Cour d’appel de Versailles RG n° 23/00449

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Constitution d’avocat : décision du 15 février 2024 Cour d’appel de Versailles RG n° 23/00449
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 58Z

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 FEVRIER 2024

N° RG 23/00449

N° Portalis DBV3-V-B7H-VUM3

AFFAIRE :

[E] [T]

C/

S.A. GENERALI IARD

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 03 Janvier 2023 par le TJ de Pontoise

N° chambre : 1

N° RG : 22/02121

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Raphaël MAYET de la SELARL MAYET & PERRAULT

Me Nicolas BOUYER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [E] [T]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Raphaël MAYET de la SELARL MAYET & PERRAULT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 393

APPELANTE

****************

S.A. GENERALI IARD

N° SIRET : 552 062 663

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Nicolas BOUYER, Postulant, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 33

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 04 décembre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence PERRET, Président,

Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,

Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme FOULON,

FAITS ET PROCEDURE :

Mme [E] [T] a souscrit un contrat d’assurance multirisque habitation dénommé ” L’habitation generali ” auprès de la société Generali Iard (ci-après ” la société Generali “), à effet au 9 novembre 2018, afin d’assurer le bien dont elle déclare être propriétaire situé [Adresse 3] à [Localité 6].

Exposant avoir été victime d’un vol avec dégradations à son domicile, le 9 juin 2019, elle a déclaré le sinistre à son assureur, la société Generali, qui a diligenté une expertise amiable et missionné le cabinet Texa.

Plusieurs réunions d’expertises se sont tenues, y compris avec le cabinet Nora expertises.

Se plaignant de ce que ses différentes sollicitations sont demeurées sans suite, Mme [T] a, par acte du 30 mars 2022, fait assigner la société Generali devant le tribunal judiciaire de Pontoise afin de la voir condamnée à lui régler la somme de 70 017,15 euros en application de l’article 1103 du code civil.

Par ordonnance du 3 janvier 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Pontoise a déclaré son action prescrite et l’a condamnée à payer outre les dépens, la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 19 janvier 2023, Mme [T] a interjeté appel.

Par ordonnance du 6 février 2023, la présidente de chambre a fixé l’affaire à bref délai.

Me Bouyer a déposé sa constitution d’avocat au soutien des intérêts de la société Generali le 26 janvier 2023.

Par ses conclusions du 23 février 2023, Mme [T] prie la cour d’infirmer l’ordonnance entreprise, statuant à nouveau, de déclarer non prescrite son action intentée à l’encontre de la société Generali le 30 mars 2022, et de condamner la société Generali à lui payer à la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions du 30 octobre 2023, la société Generali prie la cour de dire mal fondé l’appel de Mme [T], de confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance déférée et de condamner Mme [T] à payer outre les dépens dont distraction, la somme de 3 000 sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 7 novembre 2023, Mme [T] a déposé des conclusions de procédure aux fins de voir déclarer irrecevables comme tardives les conclusions signifiées par la société Generali le 30 octobre 2023.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L’incident a été joint au fond.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’irrecevabilité des conclusions de l’intimée

Ayant conclu pour sa part le 23 février 2023, Mme [T] soutient que l’intimée devait conclure au plus tard le 23 mars 2023, compte tenu de l’ordonnance fixative du 6 février 2023 ayant fixé l’affaire à bref délai.

Suivant message RPVA du 8 novembre 2023, la société Generali a indiqué qu’elle n’entendait pas répliquer.

Sur ce,

Aux termes de l’article 905-2 alinéa 2 du code de procédure civile, l’intimé dispose d’un délai d’un mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.

Il ressort des éléments de la procédure qu’à la suite de la communication par l’appelante de ses conclusions, le 23 février 2023, l’intimée a attendu le 30 octobre 2023 pour conclure à son tour.

Les conclusions de l’intimée, communiquées au-delà du délai d’un mois prévu dans le cadre des procédures à bref délai, seront donc déclarées irrecevables comme tardives.

Dans ces conditions, il est néanmoins statué sur le fond, en application de l’article 472 du code de procédure civile, la cour n’étant appelée à faire droit aux prétentions et moyens de l’appelante que dans la mesure où elle les estime réguliers, recevables et bien fondés.

Sur la prescription de l’action intentée à l’encontre de la société Generali Iard

Pour déclarer irrecevable comme prescrite l’action en paiement de Mme [T], sur le fondement des articles L114-1 et L. 114-2 du code des assurances, le juge de la mise en état a fixé le point de départ de la prescription biennale à la date de désignation d’un expert amiable par la société Generali, soit le 18 juin 2019, et en a déduit qu’à la date de l’assignation le 30 mars 2022, le délai était écoulé pour avoir expiré le 18 juin 2021.

Mme [T] fait valoir que le fondement de son action est l’action contractuelle prévue à l’article 1103 du code civil et qu’à ce titre elle est soumise, non à la prescription biennale prévue par l’article L. 114-1 du code des assurances, mais à la prescription quinquennale. Elle ajoute, d’une part, que la société d’assurance a commis une fraude en tardant à prendre position sur le sinistre dans le but de laisser s’écouler la prescription, d’autre part, que la prescription a été interrompue par la lettre recommandée adressée par son conseil le 30 septembre 2021.

Sur ce,

Aux termes de l’article L114-1 du code des assurances ” Toutes actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par deux ans à compter de l’événement qui y donne naissance. “.

Or, il résulte de l’interprétation donnée à cette disposition par la Cour de cassation que l’action en paiement de l’indemnité due à la suite d’un sinistre, exercée par l’assuré contre l’assureur, dérive du contrat d’assurance et est donc soumise à la prescription biennale (Civ. 1ère, 3 oct. 1995, n° 93-12.967).

Le moyen tiré de l’application de la prescription quinquennale sera donc écarté, et la date du sinistre sera retenue comme point de départ de la prescription.

L’article L. 114-2 du code des assurances dispose : ” La prescription est interrompue par une des causes ordinaires d’interruption de la prescription et par la désignation d’experts à la suite d’un sinistre. L’interruption de la prescription de l’action peut, en outre, résulter de l’envoi d’une lettre recommandée ou d’un envoi recommandé électronique, avec accusé de réception, adressés par l’assureur à l’assuré en ce qui concerne l’action en paiement de la prime et par l’assuré à l’assureur en ce qui concerne le règlement de l’indemnité “.

En l’espèce, il est constant que la compagnie Generali a désigné un expert le 18 juin 2019, ce qui a interrompu la prescription. Néanmoins, il n’est pas rapporté la preuve que l’assureur a émis une offre d’indemnisation, tandis que le message envoyé par celui-ci le 4 mars 2020, selon lequel ” compte tenu de l’enjeu [du] dossier, celui-ci est encore à l’étude ” ne contient pas la reconnaissance du droit à indemnisation de Mme [T].

Dans ces conditions, en l’absence d’autre cause d’interruption de la prescription, la lettre recommandée de Mme [T], envoyée le 30 septembre 2021, n’a pu elle-même interrompre la prescription biennale qui était déjà acquise à la date du 19 juin 2021.

En outre, s’il ressort de la jurisprudence de la Cour de cassation que l’assureur peut être déchu du droit de se prévaloir de la prescription en cas de fraude (Cf. Civ. 1ère, 28 oct. 1991, n° 88-14.410 – Soc. 22 juin 2016, n° 15-16.994), c’est à la condition de rapporter la preuve d’actes de mauvaise foi ou de tromperie qui, telles des man’uvres dilatoires, sont de nature à révéler l’intention frauduleuse de leur auteur.

Or, Mme [T] entend faire cette démonstration à partir du seul courriel susmentionné, envoyé par la société Generali le 4 mars 2020, dont il apparaît qu’il lui a été adressé avant la fin des opérations d’expertise, lesquelles se sont prolongées au-delà du 22 mai 2020, date à laquelle a eu lieu une nouvelle réunion d’expertise (pièce n° 4 de son dossier).

Ainsi, même si le courriel est assorti de la mention ” nous reviendrons vers vous rapidement “, alors qu’il n’est fait état d’aucune réponse postérieure, il ne saurait à lui seul révéler l’intention frauduleuse de l’assureur, dès lors que le motif invoqué tenant à l’étude du dossier au regard de son enjeu, apparaît cohérent au vu des circonstances et qu’à cette date Mme [T] disposait de plus d’un an pour être à l’initiative d’un acte interruptif de prescription.

Mme [T] échouant à rapporter la preuve d’une fraude imputable à l’assureur, et toute autre cause interruptive de prescription étant écartée, c’est à juste titre que le premier juge a accueilli la fin de non-recevoir soulevée au terme d’une ordonnance que la cour confirme pour les motifs ci-dessus exposés.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Mme [T], qui succombe, sera condamnée aux dépens, sans qu’il y ait lieu de réformer les dispositions de l’ordonnance relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement

Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions

Y ajoutant,

Condamne Mme [T] aux dépens d’appel.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame F. PERRET, Président et par Madame K. FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


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