Your cart is currently empty!
ARRÊT DU
13 FEVRIER 2024
PF/LI
———————–
N° RG 23/00016 – N° Portalis DBVO-V-B7H-DCGS
———————–
[V] [D]
C/
SAS POSITRONIC INDUSTRIES
———————–
Grosse délivrée
le :
à
Me MARTY-DAVIES
Me GADY
ARRÊT n° 33/2024
COUR D’APPEL D’AGEN
Chambre Sociale
La COUR d’APPEL D’AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l’affaire
ENTRE :
[V] [D]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Me Nadège MARTY-DAVIES, avocat au barreau de TOULOUSE
APPELANT d’un jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’AUCH en date du 05 Décembre 2022 dans une affaire enregistrée au rôle sous le n° R.G. 21/00083
d’une part,
ET :
SAS POSITRONIC INDUSTRIES, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège social
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 2]
Représentée par Me Yann GADY, avocat au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉ
d’autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
l’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 12 Décembre 2023 sans opposition des parties, devant la cour composée de :
Président : Pascale FOUQUET, Conseiller, qui a fait un rapport oral à l’audience
Assesseurs : Anne Laure RIGAULT, Conseiller
Les magistrats en ont, dans leur délibéré rendu compte à la cour composée, outre eux-mêmes, d’Elisabeth SCHELLINO, présidente de chambre , en application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l’arrêt serait rendu
Greffière : lors des débats : Danièle CAUSSE
lors de la mise à disposition : Laurence IMBERT
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
‘ ‘
‘
I) EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Monsieur [D] a été embauché par la société Positronic industries par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein avec convention de forfait-jour de 218 jours, le 1er février 2013, avec reprise de l’ancienneté au 16 mai 2001.
Il occupait en dernier lieu le poste de directeur des ventes Europe, cadre, indice 240 de la convention collective des cadres de la métallurgie.
La société Positronic a pour activité la fabrication de composants électroniques. Elle appartient depuis le mois de janvier 2021 à la division AMAO (Amphenol Military & Aerospace Operations) du groupe Amphenol corporation.
Le salarié a été placé en arrêt de travail pour maladie du 27 janvier au 15 août 2021.
Par lettre du 16 avril 2021, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique fixé au 10 mai 2021.
Par un second courrier du 16 avril 2021, l’employeur a adressé au salarié deux propositions de reclassement en qualité d’ingénieur technico-commercial au sein du groupe.
Par courrier du 10 mai 2021, l’employeur a délivré au salarié une information relative au congé de reclassement et aux mesures d’accompagnement prévues dans le cadre du projet de licenciement collectif pour motif économique ainsi qu’une information relative aux motifs économiques.
Le salarié a été licencié pour motif économique le 21 mai 2021.
Par requête enregistrée au greffe le 3 août 2021, M. [D] a saisi le conseil de prud’hommes d’Auch en contestation de son licenciement et en demandes indemnitaires.
Par jugement rendu le 5 décembre 2022, le conseil de prud’hommes d’Auch a :
– ” Dit et jugé que le licenciement pour motif économique de Monsieur [D] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
– Condamné la SAS Positronic industries à verser à Monsieur [D] la somme de 161 120 euros au titre du préjudice subi du fait du licenciement injustifié ;
–
Déclaré que la convention de forfait-jour de Monsieur [D] est privée d’effet ;
– Débouté Monsieur [D] de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et au titre des congés-payés sur les heures supplémentaires ;
– Débouté Monsieur [D] de sa demande de rappel de salaire et de compensation pour les missions réalisées au-delà de ses fonctions ;
– Débouté Monsieur [D] de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale ;
– Condamné la SAS Positronic industries à rembourser à pôle emploi les indemnités de chômage payées à Monsieur [D] dans la limite de cinq mois ;
– Dit qu’il n’y a pas lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire autre que de droit ;
– Fixé la valeur du salaire de référence mensuel brut à 16 112,84 euros ;
– Rappelé que les créances salariales produisent intérêts à compter de la réception par l’employeur de la lettre de convocation devant la juridiction et que les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement ;
– Dit que chaque partie conserve ses propres dépens ;
– Débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
– Rejeté toute autre demande et dit inutile ou infondées celles plus amples ou contraires formées par les parties. ”
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 5 janvier 2023, Monsieur [D] a régulièrement déclaré former appel du jugement en désignant la société Positronic industries en qualité de partie intimée et en indiquant que l’appel porte sur les dispositions du jugement qui ont : Condamné la société Positronic industries à verser à Monsieur [D] la somme de 161 120 euros au titre du préjudice subi du fait du licenciement injustifié ; Débouté Monsieur [D] de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et au titre des congés-payés sur les heures supplémentaires ; débouté Monsieur [D] de sa demande de rappel de salaires et de compensation pour les missions réalisées au-delà de ses fonctions ; débouté Monsieur [D] de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ; Condamné la société Positronic industries à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage payées à Monsieur [D] dans la limite de cinq mois ; Dit qu’il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ; Dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire autre que de droit ; Fixe la valeur de référence du salaire mensuel brut à 16 112,84 euros ; Dit que chaque partie conserve ses propres dépens ; Déboute les parties du surplus de leurs demandes ; Rejette toute autre demande et dit inutiles ou mal fondées celles plus amples ou contraires formées par les parties.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 novembre 2023 et l’affaire fixée pour plaider à l’audience du 12 décembre 2023.
Par conclusions du 12 décembre 2023, M. [D] demande la révocation de l’ordonnance de clôture et de fixer la date de clôture au jour de l’audience de plaidoiries.
Aux termes de l’article 803 du code de procédure civile, l’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue ; la constitution d’avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, ensoi, une cause de révocation.
Si une demande en intervention volontaire est formée après la clôture de l’instruction,
l’ordonnance de clôture n’est révoquée que si le tribunal ne peut immédiatement statuer sur le tout.
L’ordonnance de clôture peut être révoquée, d’office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l’ouverture des débats, par décision du tribunal. ”
En application de l’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion. ”
En l’espèce force est de constater que M. [D] ne formule aucun moyen au soutien de ses conclusions aux fins de révocation de l’ordonnance de clôture et qu’aucune cause grave justifiant la révocation demandée n’est soulevée.
En conséquence, la cour rejette la demande.
II) MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions enregistrées au greffe le 15 novembre 2023, expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l’appelant, Monsieur [D] demande à la cour de :
– Confirmer le jugement rendu le 5 décembre 2022 par le conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il a :
* Dit et jugé que son licenciement pour motif économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
* Déclaré que sa convention de forfait jours est privée d’effet.
– Réformer le jugement rendu le 5 décembre 2022 par le conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il :
* A condamné la société Positronic industries à lui verser la somme de 161 12 euros au titre du préjudice subi du fait du licenciement injustifié ;
* L’a débouté de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et au titre des congés-payés sur les heures supplémentaires ;
* L’a débouté de sa demande de rappel de salaires et de compensation pour les missions réalisées au-delà de ses fonctions ;
* L’a débouté de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale ;
* A condamné la société Positronic industries à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage qui lui ont été payées dans la limite de cinq mois ;
* A dit qu’il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile;
* A dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire autre que de droit ;
* A fixé la valeur de référence du salaire mensuel brut à 16 112,84 euros ;
* A dit que chaque partie conserve la charge de ses propres dépens ;
* A débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
* A rejeté toutes les autres demandes et dit inutiles ou mal fondées celles plus amples ou contraires formées par les parties.
– Et, statuant à nouveau :
– Débouter la partie adverse de l’intégralité de ses demandes ;
– Déclarer irrecevable la demande nouvelle formulée par la société Positronic industries en cause d’appel et tendant à sa condamnation à la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts ;
– A titre principal : Condamner la société Positronic industries à lui verser la somme de 338 631 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
A titre subsidiaire, si la cour considérait le barème de l’article L.1235-3 du code du travail applicable, condamner la société Positronic industries à lui verser la somme de 253 973 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– Fixer son salaire de référence à la somme de 16 931,59 euros ;
– Fixer son indemnité de licenciement à la somme de 193 020,11 euros ;
– Condamner la société Positronic industries à lui verser la somme de 9 143,03 euros à titre de reliquat sur l’indemnité de licenciement ;
– Condamner la société Positronic à lui verser la somme de 124 243 euros, à parfaire, au titre des heures supplémentaires qu’il a effectuées, outre la somme de 12 424 euros, à parfaire, au titre des congés-payés y afférents ;
– Condamner la société Positronic industries à lui verser la somme de 228 000 euros à titre de rappels de salaires et de compensation pour les missions réalisées au-delà de ses fonctions ;
– Condamner la société Positronic industries à lui verser la somme de 405 000 euros de dommages-intérêts pour exécution déloyale ;
– Dire et juger que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes en application de l’article 1343-2 du code civil ;
– Rejeter les pièces adverses n°23, 24, 25, I, J et Y en raison de l’absence de traduction assermentée ;
– Condamner la société Positroni industries à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre la condamnation aux entiers dépens de première instance ;
– En tout état de cause :
– Condamner la société Positronic Industries à lui verser la somme de 7 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre la condamnation aux entiers dépens d’appel.
Au soutien de ses prétentions, M. [D] fait valoir que :
1° son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse
* Sur l’absence de motif économique
– Aucun élément produit aux débats n’établit concrètement et objectivement l’existence d’une menace précise et immédiate sur la compétitivité de la société ou du groupe, les éléments produits faisant référence à un contexte général pendant la pandémie de COVID-19 ;
– L’attestation du commissaire au compte est irrégulière, les chiffres ne correspondant pas à ceux apparaissant sur les comptes annuels ;
– Les pièces Positronic industries 23 à 25, I, J, X et Y n’ont pas fait l’objet d’une traduction assermentée et devront être écartées des débats ;
* Sur l’absence de menace sur la compétitivité
– La situation financière de la société était bonne en 2020 et le 27 janvier 2021, le groupe Amphenol a annoncé des ventes records, supérieures aux prévisions ;
– L’aéronautique ne représente que 17% du chiffre d’affaires du groupe ;
– Il est impossible de comparer les résultats avec ceux des sociétés Safran cabin, capable bv et Zodiac car les résultats s’expliquent par des événements exceptionnels
* Sur l’absence de tentative de reclassement
– Deux postes lui seront proposés, largement inférieurs, avec une baisse considérable de rémunération et de responsabilités ;
– Aucune recherche n’a été diligentée entre début avril 2021 (date du CSE) et fin mai 2021(date du licenciement) ;
* Sur l’ordre des licenciements
– L’employeur a procédé au licenciement de cinq salariés, tous de près de vingt ans d’ancienneté. Lui-même était âgé de 53 ans au moment du licenciement ;
– Aucune justification n’est apportée de l’ordre des licenciements opérés. L’unique but de la société a été de se servir de la crise sanitaire pour supprimer la force de vente de la société Positronic industries et la remplacer par les forces commerciales de son acquéreur.
2° sur les conséquences du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse
* L’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse
– l’inconventionnalité du barème de l’article L.1235-5 du code du travail, le préjudice n’étant pas intégralement réparé ;
– le préjudice financier est conséquent : perte financière de 282 034,73 euros de salaire sur 22 mois (décembre 2021 – fin septembre 2023), outre les conséquences sur sa retraite, la vente d’un bien immobilier à Toronto pour venir s’installer en France alors que les prix de l’immobilier ont doublés en dix ans, la vente de leur bien immobilier en France à des conditions défavorables
– son employabilité est fortement impactée : il est âgé de 54 ans, il exerçait des fonctions stratégiques pour une rémunération de 200 000 euros annuels
– Ie préjudice moral est important : il a consacré une partie importante de sa vie à la société, avec d’excellents résultats, au prix d’importants sacrifices personnels ;
– Si par extraordinaire le barème devait s’appliquer : 253 973 euros (15 mois de salaire).
– Son salaire de référence doit prendre en compte les 12 mois précédents l’arrêt de travail, solution la plus avantageuse et il conviendra d’écarter les dispositions de la convention collective ;
– Son ancienneté est de 20 ans et 6 mois
3° Sur l’exécution déloyale du contrat de travail
* Sur le rappel de salaire et compensation au titre des missions accomplies au-delà de ses fonctions
– Il est intervenu à de nombreuses reprises sur des missions purement techniques étrangères à sa fonction:
– Il est intervenu à de nombreuses reprises pour prendre en charge les réclamations clients afférentes à des problèmes de qualité, préparant et coordonnant les enquêtes :
– Ces missions d’ingénieurs ou d’expertise technique et de qualité produit ne relèvent pas des fonctions d’un directeur des ventes ;
* Sur les heures supplémentaires
– L’employeur n’a procédé à aucun contrôle de son temps de travail, aucun suivi régulier de son organisation et de sa charge de travail ;
– Un contrôle annuel du temps de travail ne permet pas une vérification régulière de la charge de travail, de la cohérence du volume horaire ou une réaction rapide en cas de dépassement du forfait;
– il était contraint à de nombreux déplacements mondiaux, au temps de déplacement bien supérieur à un temps de déplacement professionnel.
* Sur l’exécution déloyale du contrat de travail par l’employeur
– son employeur a manqué à son obligation de sécurité laquelle est à l’origine de la dégradation de son état de santé en raison du dépassement de la durée maximale du travail et de la rupture brutale des négociations en vue de son nouveau poste
* Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
” Sur l’irrecevabilité de la demande nouvelle
– Celle-ci ne tend pas aux mêmes fins et aucune preuve d’un fait nouveau survenu entre les deux instances n’est rapportée
* Sur le caractère infondé de la demande nouvelle
– L’employeur ne justifie d’aucun préjudice
Dans ses dernières conclusions enregistrées au greffe le 31 octobre 2023, expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l’intimée, Positronic industries demande à la cour de :
– Réformer le jugement du conseil de prud’hommes d’Auch du 5 décembre 2022 en ce qu’il a :
* Dit et jugé que le licenciement pour motif économique de Monsieur [D] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
* Condamné la société Positronic industries à verser à Monsieur [D] la somme de 161 120 euros au titre du préjudice subi du fait du licenciement injustifié ;
* Condamné la société Positronic industries à rembourser à pôle emploi les indemnités de chômage payées à Monsieur [D] dans la limite de cinq mois ;
* Déclaré que la convention de forfait jours de Monsieur [D] était privée d’effet.
– Et, y ajoutant :
* A titre principal : Débouter Monsieur [D] de l’ensemble des demandes qu’il formule au titre du licenciement ;
* A titre subsidiaire : Limiter la condamnation de la société Positronic industries au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 45 807,30 euros ;
– Condamner Monsieur [D] à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale de son contrat de travail ;
– Condamner Monsieur [D] à lui verser la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– Confirmer pour le surplus le jugement du conseil des prud’hommes d'[Localité 2] du5 décembre 2022.
Au soutien de ses prétentions, la société Positronic fait valoir que :
1° le licenciement est pourvu de cause réelle et sérieuse
* Sur l’existence du motif économique
– Les difficultés économiques affectent l’ensemble du secteur d’activité de l’aéronautique, dont les acteurs sont ses clients, du fait de la crise sanitaire liée à la covid-19. Les confinements et les fermetures de frontières vont stopper le trafic aérien, avec de multiples annulations de commandes. De nombreux emplois vont être supprimés dans le secteur aéronautique. Les principaux clients et distributeurs ont vus leurs chiffres d’affaires baisser de 46% ;
– La fiabilité des chiffres du tableau – qui sont directement issus de la comptabilité de la société – est confirmée par l’attestation du commissaire aux comptes. Ils attestent de la dégradation de la situation ;
– Le secteur aéronautique représente 37,66% de l’activité en 2019 mais moins de 25% en 2021 du fait du Covid. Le chiffre d’affaires du secteur aéronautique passe de 6 093K€ en 2019 à 4 097K€ en 2020 à 3 538K€ en 2021, outre une baisse des commandes;
* Sur l’existence de menace sur la compétitivité
– L’activité de la division AMAO baisse à la suite de celle de ses clients ;
– Il a été constaté une baisse des commandes pour 25 clients sur 35 entre 2019 et 2021 ;
– Au mois de juin 2020, Positronic industries est passée sous son seuil de rentabilité, avec une marge opérationnelle et un résultat net négatif, et une incertitude totale sur la reprise ;
– Entre 2019 et 2021, le chiffre d’affaires de Positronic s’est réduit de 26,3% de 16 177K€ en 2019 à 13 538K€ en 2020, le résultat opérationnel de 67,4% et la marge brute chute de 31,3% à 27% ;
– La concurrence est accrue, ce qui a contraint l’employeur à consentir des conditions contractuelles et financières particulièrement favorables aux clients ;
* Sur la réorganisation mise en ‘uvre
– L’employeur a réorganisé ses activités commerciales, logistique, qualité et support de production afin de davantage les intégrer au groupe et pour que les clients aient un seul interlocuteur pour l’ensemble des sociétés du groupe ;
– L’employeur a tenté de diversifier ses débouchés : secteurs du ferroviaire, du médical et de l’industrie ;
– Le poste du salarié a été supprimé ;
* Sur les tentatives de reclassement mises en ‘uvre
– Elle a interrogé chacune des sociétés composant le groupe en France, 22 postes étaient ouverts et a proposé deux postes de niveau inférieur (ingénieur technico-commercial Nord-Est et Nord-Ouest) en l’absence de poste de catégorie identique ;
* Sur l’ordre des licenciements
– Il n’y a pas lieu d’établir un ordre des licenciements, le salarié étant seul membre de la catégorie ” encadrement ventes externes ”
2° sur les conséquences du licenciement pourvu de cause réelle et sérieuse
* L’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse
– Il convient de respecter le barème Macron
* Sur le salaire de référence
– Il convient de prendre en compte le salaire reconstitué pour les périodes de maladie conformément aux dispositions de la convention collective
* Sur l’indemnité de licenciement
– En utilisant le salaire de référence conventionnel il n’y a pas lieu de procéder à une régularisation
3° Sur l’exécution déloyale du contrat de travail
* Sur le rappel de salaire et compensation au titre des missions accomplies au-delà de ses fonctions
– Aucune preuve n’est apportée de l’accomplissement de ces tâches par le salarié ;
– Le contrat de travail prévoit la possibilité d’attributions secondaires ;
– La participation du salarié à ces projets relève de ses fonctions de directeur des ventes ;
* Sur les heures supplémentaires
– La convention de forfait porte sur 218 jours par an, les jours travaillés étant décomptés tous les ans du 1er juin au 31 mai, un suivi régulier de la charge de travail étant donc existant, outre l’entretien professionnel annuel, et le forfait valable ;
– Monsieur [D] sollicite une double indemnisation : au titre du dépassement de fonctions puis au titre des heures supplémentaires ;
– Le temps de déplacement professionnel n’est pas du temps de travail effectif ;
– Le salarié ne produit pas d’élément suffisamment précis pour lui permettre d’y répondre ;
* Sur l’exécution loyale du contrat de travail par elle-même
– Sur le respect des durées maximales de travail
Aucune pièce objective n’est fournie ;
A l’entretien annuel 2019, le salarié faisait état de l’harmonie entre sa vie professionnelle et privée ;
A l’entretien annuel 2020, le salarié refuse les aménagements de l’organisation du travail pour prendre en compte des contraintes familiales ;
– Tous les membres de la direction ont été sensibilisés au droit à la déconnexion et par courriel du 29 janvier 2021 l’employeur a rappelé au salarié son devoir de déconnexion pendant son arrêt ;
– Sur l’absence de lien entre l’état de santé du salarié et ses conditions de travail
Le médecin n’a rien constaté personnellement ;
Le salarié a été reconnu apte par le médecin du travail en juin 2015 et décembre 2019 ;
– Sur la rupture abusive des négociations par l’employeur
Aucune preuve n’est apportée ;
Ce litige ne concerne pas la société française Positronic industries mais la société américaine Positronic ;
Les parties sont libres de rompre à tout moment les pourparlers ;
* Sur l’exécution déloyale du contrat de travail par le salarié
– Sur la recevabilité de la demande nouvelle
Elle a découvert la confusion et le débauchage de son personnel postérieurement au jugement et demande réparation
* Sur le caractère fondé de la demande nouvelle
– Le salarié a créé une société ” Mindreach “, alors qu’il était en arrêt de travail, en violation de son obligation d’exclusivité
– Le salarié travaille au plus tard depuis 2021 en freelance comme le démontre son profil LinkedIn et il a créé en 2019, Andorre, une société dénommée ” Mindreach ” ainsi qu’une seconde société ” Performance Interconnect ” avec laquelle il entretient une confusion volontaire avec Positronic industries en utilisant l’acronyme PISAS (connu en interne et en externe comme désignant POSITRONIC INDUSTRIES SAS) dans l’URL du site de la société et dans les adresses courriels des collaborateurs
– Le salarié débauche une partie de son personnel au profit de ses nouvelles sociétés
– Le salarié percevait le maintien de salaire de son employeur et les indemnités journalières outre la rémunération tirée de sa nouvelle société
III) MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire :
– Sur l’irrecevabilité de la demande nouvelle à titre reconventionnel
A titre liminaire, il convient de rappeler que le principe d’unicité de l’instance a été abrogé par décret du 20 mai 2016.
Selon l’article R. 1451-1 du code du travail, la procédure prud’homale relève, sauf disposition spécifique du code du travail, des dispositions du livre premier du code de procédure civile, parmi lesquelles figurent l’article 70 du code de procédure civile : ” Les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant “.
Conformément à l’article 4 du code de procédure civile, les prétentions originaires sont celles fixées dans l’acte introductif d’instance, soit la requête prud’homale adressée par le demandeur
A hauteur d’appel, les prétentions nouvelles sont prohibées aux termes de l’article 564 du code de procédure civile, ” A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. ”
La portée de cet article est atténuée par deux exceptions :
Aux termes de l’article 565 précise que ” les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ”
Aux termes de l’article 566 du code de procédure civile, ” Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. ”
En l’espèce, cette nouvelle demande en dommages et intérêts ne tend pas aux mêmes fins que la demande principale en déclaration du licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle n’en constitue ni l’accessoire, ni la conséquence ni le complément nécessaire à celle présentée en première instance qui avait pour objet la rupture du contrat de travail et non son exécution.
En outre, la société employeur, qui reproche et soutient avoir découvert une confusion volontaire entre elle-même et les deux sociétés créées par M. [D], ainsi qu’un débauchage de son personnel, postérieurement au jugement, pour autant, celle-ci ne produit aucun élément précis et daté permettant d’établir l’existence de faits nouveaux dont elle n’aurait pas eu connaissance en première instance.
La demande indemnitaire pour exécution déloyale du contrat de travail présentée par la société Positronic industries sera donc déclarée irrecevable.
– Sur la demande de rejet des pièces formée par l’appelant
Les pièces 23, 24, 25, I, J, X et Y de l’intimée sont produites en langue anglaise et non traduites.
Si l’ordonnance de [Localité 5] d’août 1539 ne vise que les actes de procédure, le juge, sans violer l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, est fondé, dans l’exercice de son pouvoir souverain, à écarter comme élément de preuve un document écrit en langue étrangère, faute de production d’une traduction en langue française.
En conséquence, dans l’exercice de son pouvoir souverain, la cour fait droit à la demande de rejet et écarte les pièces susdites.
I- Sur l’exécution du contrat de travail
A – Sur le rappel de salaire
Pour confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté M. [D] de sa demande, il suffira de rappeler, respectivement de rajouter, que :
– M. [D] produit un tableau énumérant les taches qu’il prétend avoir accomplies hors du champ contractuel ainsi que le nombre d’heures respectivement consacrées aux projets techniques, à sa participation à des groupes de travail et à des travaux supplémentaires effectués pour négocier les réclamations de clients, mais sans justifier
– de plus, l’article II de son contrat de travail précise ses attributions ” principales ” en tant que directeur des ventes. Il ne s’agit donc pas d’une liste limitative et M. [D] ne démontre pas en quoi ces taches excédaient le périmètre de ses missions alors qu’il lui appartenait d’être en relation étroite avec les clients comme il ressort de la fiche métier produite
– le salarié n’a jamais alerté son employeur sur un tel dépassement de ses missions
B – Sur la convention de forfait en jours
A l’appui de sa demande, M. [D] soutient que la convention de forfait jours lui est inopposable et qu’en conséquence, les heures supplémentaires qu’il a accomplies doivent lui être payées.
A titre liminaire, il convient de rappeler :
– que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles ;
– qu’il résulte des articles 17 §§1 et 4 de la directive 93/ 104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 et des articles 17 §1 et 19 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 que les états membres de l’Union européenne ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur ;
– que toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les dispositions assurent la garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires
– que la conclusion d’une convention individuelle de forfait, établie sur une base hebdomadaire, mensuelle ou annuelle, requiert l’accord du salarié et que la convention doit être établie par écrit
Selon l’article L.3121-39 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, la conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l’année est prévue par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Cet accord collectif préalable détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi, et fixe les caractéristiques principales de ces conventions.
Les dispositions de l’accord, pour répondre aux exigences de droit à la santé et au repos, doivent assurer le respect des durées maximales raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires et il en est de même de la convention individuelle de forfait conclue en application d’un tel accord, qui doit être passée par écrit et préciser le nombre de jours travaillés.
En l’espèce, il est indiqué dans le contrat de travail du salarié du 1er février 2013 à l’article III ” Rémunération – Forfait assis sur un nombre de jours de travail ” : ” (…) De convention expresse entre les parties et en application de l’avenant du 29/01/2000 à l’accord national de la métallurgie sur l’organisation du temps de travail du 28/07/1998, la durée de travail de M. [D] est déterminée selon un nombre annuel de jours de travail, fixé à 218 jours pour la période allant du 1er juin au 31 mai de l’année suivante, soit un an. (…) ”
Il incombe à l’employeur de rapporter la preuve qu’il a respecté les stipulations de l’accord collectif destinées à assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés soumis au régime du forfait en jours.
L’employeur justifie ainsi avoir mis en place une convention individuelle écrite, signée par le salarié prenant la forme d’une clause dans le contrat de travail.
La société Positronic industries produit les mêmes décomptes des jours travaillés qu’en première instance, (du 1er juin 2018 au 31 mai 2019, du 1er juin 2019 au 31 mai 2020 et du 1er juin 2020 au 31 mai 2021) alors que le conseil de prud’hommes a justement retenu que ce document ne répond pas à l’exigence de contrôle de l’amplitude journalière. Ce document ne permet pas davantage l’identification des dates des jours travaillés ou le positionnement des jours de repos.
Les entretiens annuels produits aux débats du 19 février 2019 et du 27 novembre 2020 sont presque illisibles et sont extrêmement succincts alors qu’ils ont pour but d’évoquer la charge de travail, son organisation et l’articulation vie privée /vie professionnelle et la rémunération.
Surtout, la société employeur ne rapporte pas la preuve d’avoir organisé annuellement et régulièrement un entretien avec M. [D] en ne produisant que ceux de 2019 et 2020.
En conséquence, la convention de forfait en jours est privée d’effet et la société ne peut valablement l’opposer à M. [D].
Par suite, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que la convention de forfait en jours était privée d’effet.
C – Sur les heures supplémentaires
Il résulte des constatations de la cour que le temps de travail de M. [L] doit être évalué conformément aux règles du droit commun.
M. [L] soutient que ses temps de déplacements professionnels de par le monde représentent 270 heures supplémentaires pour les années 2018, 2019 et 2020 et demande un rappel de salaire correspondant.
Selon l’article L3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles.
Selon l’article L3121-4 du même code, ” le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de trajet effectif.
Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière. (…) ”
M. [D] produit aux débats :
– les copies de ses billets d’avion
– un tableau, inclus dans le corps des conclusions en page 37, indiquant le nombre de jours de voyage respectivement en 2018, 2019 et 2020, le nombre d’heures supplémentaires accomplies par jour de voyage, fixé à 3 heures, le nombre d’heures supplémentaires accomplies chaque année amenant au total de 270 heures
Le décompte n’est pas suffisamment précis car il n’indique ni les jours ni les mois des déplacements ni leur durée respective. De plus, le salarié procède à une analyse forfaitaire du nombre d’heures supplémentaires par déplacement. Le nombre retenu de 270 heures n’est, par conséquent, pas corroboré par des éléments suffisamment précis. En conséquence, ces temps ne doivent pas être intégrés dans son temps de travail effectif et rémunérés comme tels.
La cour confirme le jugement de ce chef.
D – Sur l’exécution loyale du contrat de travail
L’arrêt de travail de décembre 2020 de Monsieur [D] fait état d’un ” épuisement nerveux dans un contexte professionnel ” . De même, dans son dossier médical produit, le médecin du travail, qui l’a examiné le 23 mars 2021, a noté ” un sentiment de trahison de la part de l’entreprise aux Etats-Unis “.
Or, il ne s’agit que des dires du patient repris par les praticiens et non de constatations purement médicales.
En outre, la cour relève que le salarié n’a jamais alerté son employeur sur une éventuelle surcharge de travail et que la preuve d’un dépassement des amplitudes horaires n’est pas rapportée.
De plus, l’allégation relative à la rupture des négociations professionnelles concerne la société américaine Positronic et non la société française Positronic Industries .
En l’absence de démonstration d’un comportement déloyal de l’employeur portant atteinte à la santé de Monsieur [D], le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a débouté de ce chef.
II – Sur le licenciement
A – Sur le motif économique
À titre liminaire, sur le motif économique du licenciement, il convient de rappeler que:
– l’article L. 1233-3 du code du travail, dans sa version issue de la loi n°2018-217 du 29 mars 2018 en vigueur au jour du licenciement, dispose que :
“Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :
1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente, au moins égale à :
a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;
2° A des mutations technologiques ;
3°A une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité
4° A la cessation d’activité de l’entreprise.
La matérialité de la suppression, de la transformation d’emploi ou de la modification d’un élément essentiel du contrat de travail s’apprécie au niveau de l’entreprise.
Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise s’apprécient au niveau de cette entreprise si elle n’appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d’activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.
Pour l’application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du code de commerce.
Le secteur d’activité permettant d’apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché.”
Pour apprécier les difficultés économiques invoquées par l’employeur, le juge doit se placer à la date de la rupture du contrat de travail mais il peut aussi tenir compte d’éléments postérieurs.
Pour satisfaire aux exigences des articles L.1233-2, L. 1232-6 et L. 1233-15, L.1233-16 du code du travail, la lettre de licenciement doit tout à la fois invoquer l’une des causes économiques prévues par la loi et mentionner l’incidence de cette cause économique sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié, à défaut de quoi, le licenciement se trouve ipso facto privé de cause réelle et sérieuse.
La lettre de licenciement du 21 mai 2021 est ainsi motivée :
” Cette réorganisation intègre une nouvelle organisation adaptée permettant de faire face aux conséquences de la crise COVID sur le marché aéronautique, aux exigences d’un marché aéronautique fortement concurrentiel et à l’évolution du carnet de commande du secteur AMAO du groupe Amphenol et de la société Positronic.
Ainsi, nous vous rappelons que la société Positronic est une entité du groupe Amphenol corporation. La société Positronic, en raison de son activité, est intégrée au secteur aéronautique civile et militaire dit division AMAO (amphenol military & aerospace operations)
Or, ce secteur est fortement touché par la crise ” COVID “.
En effet, la crise sanitaire de la Covid-19, débutée au printemps 2020, et les mesures prises par les différents États pour protéger leurs citoyens, ont ouvert un cycle de crise économique dans le secteur aéronautique sans précédent.
Les Compagnies aériennes européennes ont ainsi été massivement clouées au sol, avec des réductions temporaires de capacité comprises entre 90 et 100%.
Frontières fermées, confinement, aéroports vides, compagnies aériennes à l’arrêt, les conséquences de la pandémie ont frappé de plein fouet et au premier chef les constructeurs d’avions et le transport aérien.
Dans l’aéronautique, la crise a touché aussi vite et fort tant les donneurs d’ordres comme AIRBUS et SAFRAN que les petits clients satellites de ces filières (comme A2C, LATELEC, LATECOERE, LISI Aerospace’).
Quelles que soient les études des économistes, les taux de croissance du PIB projetés en 2021 et 2022 ne permettront jamais de retrouver le niveau d’activité de 2019, avant 2023, au plus tôt.
La reprise du trafic aérien sera lente et progressive. Cette chute du trafic et les incertitudes sur la reprise vont très fortement impacter le secteur aéronautique.
A la différence des crises précédentes qui ont secoué le secteur aéronautique, celle-ci sera longue et de forte ampleur.
Les avionneurs ont basculé dans une spirale d’annulation de commandes et de nombreuses Compagnies sont en cours de négociation pour des reports ou des annulations.
C’est ainsi que AIRBUS a annoncé une réduction de ses cadences de 30 % et BOEING, des objectifs réduits de 40 % à horizon 2022.
Les fournisseurs aéronautiques subissent de plein fouet ces réductions de cadence, alors même qu’ils s’étaient engagés dans un programme massif d’investissement pour accompagner la montée en puissance du trafic aérien.
De nombreux opérateurs du secteur de l’aviation, fournisseurs d’avionneurs, se retrouvent avec un appareil productif largement surdimensionné et des engagements financiers peu compatibles avec une production réduite. Les fournisseurs de rang 2 ou 3 sont particulièrement exposés.
C’est dans ce contexte que chaque entreprise doit revoir les bases de sa propre stratégie en cohérence avec les objectifs de survie économique.
D’après ” LE MONDE “, qui se réfère à une étude de l’observatoire TRENDEO dont les données s’arrêtent à la fin du mois de septembre 2020, le secteur aéronautique a enregistré une perte nette de 11.950 emplois portée à 13.354 si sont ajoutés les sous-traitants.
En 6 mois, le secteur de l’aéronautique aura donc perdu la totalité des postes créés entre 2009 et 2019.
En région Occitanie, plus d’une trentaine de plans sociaux ont déjà été annoncés et plus de 6 000 emplois sont menacés dans l’aéronautique à [Localité 4].
Ainsi :
– LIEBHERR-AEROSPACE a lancé un plan de départs volontaires concernant 100 salariés et recourt parallèlement à l’activité partielle de longue durée,
– LATECOERE supprime 475 postes,
– FIGEAC AERO envisage 320 suppressions de postes,
– AIRBUS n’exclut pas des départs contraints,
– LISI AEROSPACE supprime 197 postes,
– SOGECLAIR AEROSPACE supprime 245 postes,
– DAHER annonce 1.300 suppressions de postes sur 8.000,
– AAA prestataire de services aéronautiques compte supprimer environ 700 emplois,
– MECAFI envisage 242 licenciements sur 500 emplois.,
La division AMAO du groupe Amphenol, en qualité de fournisseur aéronautique, subit de plein fouet la crise sans précédent qui sévit dans l’aviation civile.
Il en est de même de la société Positronic dont de nombreux clients, eux-mêmes touchés par la crise du secteur aéronautique, ont fortement réduits leurs commandes auprès de la société.
En résulte pour la société Positronic et les sociétés composant la division AMAO du groupe Amphenol de fortes baisses d’activités :
La société Positronic subit également une baisse de chiffre d’affaires.
Au titre de l’exercice 2020 (exercice clos le 31/08/2020), le chiffre d’affaires sera en baisse de plus de 1,8 millions d’euros (11%). Ce chiffre d’affaires est en baisse de 4,2 millions (28%) d’euros en prenant en compte la période septembre-novembre 2020.
Le résultat financier 2020 reste correct, à hauteur de 864K€, grâce aux gains effectués lors des six premiers mois de l’année fiscale. Le résultat depuis septembre 2020, malgré des efforts importants de tous, n’est pas tenable dans la durée et ne permet pas d’effectuer les investissements nécessaires pour assurer la compétitivité de Positronic à l’avenir.
Les difficultés du secteur d’activité, et plus particulièrement de la société Positronic, trouvent leur origine, à titre principal, dans les difficultés des sous-traitants des grands avionneurs (Airbus et Boeing). Le tableau ci-dessous reprend les principaux clients et distributeurs du secteur aéronautique civil et militaire. On peut constater une baisse de 46% du chiffre d’affaires de la société Positronic avec ces clients entre 2019 et la projection de 2021 (4 fois septembre à novembre 2020).
La baisse du chiffre d’affaires du secteur AMAO du groupe Amphenol corporation et de la société Positronic affaiblit les résultats économiques et tend vers la réalisation de pertes financières. Ces résultats économiques décroissants dégradent la compétitivité et représentent une menace face à la concurrence.
Et ce d’autant plus que le secteur de l’aéronautique est un secteur fortement concurrentiel.
En effet, le marché est de plus en plus exigeant :
Que ce soit en termes de prix,
Que ce soit en termes de qualité et de capacité,
Que ce soit en termes de respect des délais de livraison courts.
Ainsi, la concurrence s’est structurée, concentrée et organisée en localisant leur production au plus près du prix exigé par le marché, et a d’ores et déjà effectué des économies d’échelle nécessaires lui permettant d’être plus agressive sur un marché disputé, sans compter l’arrivée de nouveaux concurrents.
Ainsi, le groupe Tyco, numéro un mondial de la connectique et premier concurrent du groupe Amphenol, est particulièrement bien implanté dans l’innovation et dans la fabrication de produits à bas prix. LE groupe Radiall prend de plus en plus de parts de marché, notamment au travers de sa politique d’innovation lui permettant de rivaliser en parts de marché chez Airbus. [O], autre concurrent, tente de résister au marché et vient d’être racheté par le groupe Eaton.
Pour permettre de sauvegarder la compétitivité de la division AMAO du groupe Amphenol et celle de la société Positronic, il est donc essentiel d’opérer les réorganisations nécessaires. Ces réorganisations impliquent la suppression de 6 postes, dont le vôtre ”
La société Positronic industries invoque donc à la fois la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise et des difficultés économiques.
La société Positronic industries verse aux débats les mêmes pièces que celles communiquées en première instance à savoir : un communiqué de presse émanant du GIFAS daté du 13 avril 2021 sur le bilan 2020 de l’industrie française aéronautique et spatiale, le résultat d’enquête de la banque de France sur la conjoncture économique en Occitanie de septembre 2020, le bilan économique 2020 – Occitanie publié par l’institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), le point conjoncture banque de France UIMM Occitanie CPREFP du 25 juin 2021, une question d’actualité au gouvernement du 21 janvier 2021, un article sur les avions cloués au sol pendant la pandémie du Covid daté du 21 mai 2020 et un rapport SYNDEX de juin 2020, pour lesquels le conseil de prud’hommes avait justement considéré que ces éléments faisaient simplement état d’un contexte général pendant la pandémie de COVID.
La société Positronic industries verse le bilan économique 2021 – Occitanie publié par l’INSEE, lequel fait apparaître une lente reprise dans la filière aéronautique, les effectifs augmentant dans le secteur tertiaire.
Ce document, comme les précédents, fait état d’un contexte général et non de la situation particulière de la société Positronic industries.
La société Positronic industrie produit également la traduction des courriels échangés avec la société Bos Odem, laquelle société a décalé une partie de sa commande n°PISO49879. Pour une société exerçant à l’échelle de Positronic Industrie, l’issue partielle d’une seule commande de 225 880 euros est un élément isolé qui ne saurait permettre d’apprécier la nécessité de sauvegarder la société en procédant à sa réorganisation.
La société Positronic industrie verse des tableaux et des graphiques relatifs au budget et au chiffre d’affaires mensuel de janvier à mai 2021 qui ne sont ni datés ni sourcés ni certifiés.
A hauteur d’appel, la société Positronic verse une attestation du commissaire aux comptes relative aux ventes pour la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2021. Cette attestation se prononce exclusivement sur la concordance du chiffre d’affaires total pour les années 2017, 2018, 2019, 2020 et 2021, sur l’évolution des ventes annuelles par client et sur leur répartition entre le secteur aéronautique et les autres secteurs et ne reprend aucun des chiffres figurant dans les tableaux et les graphiques, ce qui ne permet aucune comparaison ; les tableaux et graphiques produits paraissant en conséquence avoir été établis unilatéralement par l’employeur.
Si cette attestation permet d’établir la baisse de chiffre d’affaires de la société Positronic industrie en 2020 et 2021, la seule réalisation d’un chiffre d’affaires moindre ne permet pas de juger que l’aptitude de la société à affronter la concurrence est menacée, la sauvegarde de la compétitivité ne se confondant pas avec la recherche de l’amélioration des résultats.
Aucun élément produit aux débats par la société Positronic industries n’établit concrètement et objectivement l’existence d’une menace précise et immédiate sur la compétitivité de la société ou du groupe.
Monsieur [D] verse aux débats le procès-verbal de la réunion du comité économique et social des 26 mars 2020, 29 octobre 2020, 1er décembre 2020, 18 décembre 2020 et 1er avril 2021 desquels il ressort que les commandes de fin d’année 2020 et du début de l’année 2021 étaient supérieures aux prévisions mais que la société a poursuivi sa recherche des ” monstres de coût d’usine ” et leur élimination.
Cette quête de performance ressort également du compte-rendu de réunion extraordinaire du comité économique et social du 6 avril 2021, lequel souligne que ” cette organisation a pour but d’optimiser les ressources ”
Dans ces conditions, la cour considère, et sans qu’il soit besoin dès lors de statuer ni sur le respect de l’obligation de reclassement ni sur les critères d’ordre du licenciement, que le licenciement de M. [D] ne repose pas sur un motif économique.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a déclaré le licenciement de Monsieur [D] dépourvu de cause réelle et sérieuse.
B – Sur les conséquences financières de la rupture du contrat de travail
1 – Sur le salaire de référence
L’article R.1234-4 du code du travail dispose que : ” Le salaire à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :
1° Soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement
2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n’est prise en compte que dans la limite d’un montant calculé à due proportion. ”
L’article 29 de la convention collective des cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 étendue par arrêté du 27 avril 1973 (avenant du 21 juin 2010) applicable en l’espèce prévoit en son article 29 ” indemnité de licenciement ” in fine qu’en ” cas de suspension du contrat de travail, pour quelque cause que ce soit, au cours des 12 ou 3 mois, il est retenu, au titre de chacune de ces périodes de suspension, la valeur de la rémunération que l’ingénieur ou cadre aurait gagnée s’il avait travaillé durant la période de suspension considérée, à l’exclusion de toutes les sommes destinées à se substituer aux salaires perdus – telles que les indemnités de maladie – éventuellement perçues par l’intéressé au titre de la période de suspension ”
M. [D] a été placé en arrêt de travail pour maladie du 27 janvier au 15 août 2021.
Il convient dès lors d’appliquer les dispositions conventionnelles qui prévoient expressément l’hypothèse d’une suspension du contrat de travail, notamment pour maladie, dans les mois précédant la rupture, étant précisé qu’elles sont conçues dans le sens d’une amélioration du statut des salariés dans l’entreprise et non de faire application de la jurisprudence visée par M. [D].
Le jugement a fait une exacte application de l’article 29 de la convention collective applicable et sera confirmé de ce chef en fixant le salaire de référence à 16 112,84 euros.
Sur l’indemnité conventionnelle de licenciement et le différentiel réclamé
Aux termes de l’article 29 alinéa 2 de la convention collective applicable, ” le taux de l’indemnité de licenciement est fixé comme suit, en fonction de la durée d’ancienneté de l’intéressé dans l’entreprise :
– pour la tranche de 1 à 7 ans d’ancienneté : 1/5 de mois pas année d’ancienneté
– pour la tranche au-delà de 7 ans : 3/5 par année d’ancienneté
pour le calcul de l’indemnité de licenciement, l’ancienneté et, le cas échéant, les conditions d’âge de l’ingénieur ou du cadre sont appréciées à la date du préavis exécuté ou non. (…)
En ce qui concerne l’ingénieur ou cadre âgé d’au moins 55 ans et de moins de 60 ans et ayant 2 ans d’ancienneté dans l’entreprise, l’indemnité de licenciement sera majoré de 20 % sans que le montant de l’indemnité puisse être inférieur à 3 mois “, ” sans dépasser la valeur de 18 mois de traitement “.
En l’espèce, M. [D] était âgé de 54 ans au moment de son licenciement et bénéficiait d’une ancienneté de 20 ans et 6 mois. Son préavis était de 6 mois.
Aux termes du reçu de son solde de tout compte du 21 novembre 2021, M. [D] a perçu :
– 101 605,08 euros à titre d’indemnité de licenciement soumise
– 82 272 euros à titre d’indemnité de licenciement exonérée
soit un total de 183 877,08 euros
En application des dispositions de l’article 29 de la convention collective susvisée, l’indemnité conventionnelle de licenciement est égale à :
((1/5 x 16 112,84 € x 7 ans) + ( 3/5 x 16 112,84 € x 13 ans) + (3/5 x 16 112,84 € x 6/12)) x 120 % = 183 686,38 euros
En conséquence, M. [D] a été rempli de ses droits et sera débouté de sa demande’ les premiers juges ayant omis de statuer de ce chef.
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Selon l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1397 du 22 septembre 2017, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, et si l’une des parties refuse la réintégration du salarié, le juge octroie une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux exprimés en mois de salaire brut dans les tableaux prévus par ce texte
S’agissant de la demande en dommages et intérêts présentée par M. [D] au titre de la réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat de travail il convient de relever que c’est vainement qu’il demande à la cour d’écarter les dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail .
En effet, en l’état de la jurisprudence de la Cour de cassation, ces dispositions, qui ne violent pas l’article 6 de la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l’Homme, sont de nature à permettre le versement au salarié d’une indemnité adéquate ou d’une réparation considérée comme appropriée au sens de l’article 10 de la convention n° 158 de l’Organisation Internationale du Travail, qui ne peut être utilement invoquée par l’appelant pour voir écarter les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail .
De même, les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale Européenne ne peuvent être invoquées pour s’opposer à l’application de l’article L.1235-3 , dès lors qu’elles n’ont pas d’effet direct en droit interne dans les litiges entre particuliers .
Le barème prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail apparaît donc conforme aux textes européens et internationaux, et ce nonobstant le fait que le Comité Européen des Droits Sociaux (CEDS) a estimé, que le plafonnement des indemnités prud’homales en cas de licenciement injustifié constitue une violation de la charte sociale européenne en ce que le droit à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée, au sens de l’article 24.b de la Charte, n’est pas garanti. En effet, si des réclamations peuvent être portées devant cette instance, sa saisine n’a pas de caractère juridictionnel : les décisions qu’elle prend n’ont pas de caractère contraignant en droit français.
En l’espèce, M. [D], embauché le 1er février 2013 avec reprise d’ancienneté au 16 mai 2001, comptabilisait, lors de son licenciement, le 21 mai 2021, 20 années et 6 mois d’ancienneté.
En application de l’article L. 1235-3 du code du travail, M. [D] peut prétendre à une indemnité de licenciement compriseentre trois mois de salaire brut et un montant maximal de quinze mois et demi de salaire brut, étant rappelé que le salaire de référence s’élève à la somme de 16 112,84 euros.
Pour s’opposer à la demande de M. [D] qu’il considère excessive, l’employeur allègue une activité en freelance depuis 2021 outre la création de deux sociétés entretenant ainsi, selon lui, une confusion volontaire avec la société Positonic mais sans tirer de conséquences juridiques des griefs soulevés.
En considération de son âge au moment de la rupture du contrat de travail, 54 ans, de la période de chômage consécutive dont il justifie, de la perte de ses droits consécutifs à la retraite, de l’indemnisation par Pôle emploi à compter de mai 2022 , de son déplacement en Europe à l’instigation de son employeur et de n’avoir perçu ni revenu salarié ni dividende de la société Mindreach I2I SL, ce dont il justifie en produisant l’attestation du cabinet Suissa Comptabilitat du 4 septembre 2023 et dans laquelle il est associé minoritaire, la cour estime que l’indemnité doit être équivalente à 15 mois et demi de salaire.
La société Positronic sera ainsi condamnée à payer à M. [D] des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un montant de 249 749,02 euros. Le jugement sera réformé de ce chef.
Sur les demandes annexes, les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Les sommes allouées à titre indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt. Le jugement sera infirmé de ce chef.
Il y a lieu d’ordonner la capitalisation des intérêts, dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil
La société Positronic employant plus de 11 salariés, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a condamné l’employeur au remboursement à Pôle emploi des indemnités chômage dans la limite de cinq mois, en application des articles L1235-4 et L1235-5 du code du travail.
Le jugement de première instance sera infirmé sur les dépens et les frais non répétibles de procédure.
La société Positronic industries, qui succombe principalement en appel, sera condamnée aux entiers dépens de la procédure, à hauteur de première instance et d’appel.
La société Positronic industries qui succombe sera condamnée à payer à Monsieur [D] la somme de 2 000 euros, à hauteur de première instance, et de 3 000 euros, à hauteur d’appel, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement rendu le 5 décembre 2022 par le conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il a :
– Dit et jugé que le licenciement de M. [D] est dépourvu de cause réelle et sérieuse
– Fixé le salaire de référence à 16 112,84 euros mensuels
– Déclaré la convention de forfait en jours privée d’effet
– Débouté M. [D] de sa demande en rappel de salaire sur heures supplémentaires et congés payés afférents
– Débouté M. [D] de sa demande en rappel de salaire et de compensation pour les missions réalisées au-delà de ses fonctions
– Débouté M. [D] de sa demande en dommages et intérêts pour exécution déloyale
– Condamné la société Positronic industries à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage payées à Monsieur [D] dans la limite de cinq mois
INFIRME le jugement rendu le 5 décembre 2022 par le conseil de prud’hommes d’Auch en ce qu’il a :
– Condamné la société Positronic industries à verser à M. [D] la somme de 161 120 euros au titre du préjudice subi du fait du licenciement injustifié,
– Dit que chaque partie conserverait ses propres dépens,
– Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Rappelé que les créances indemnitaires produiraient intérêts au taux légal à compter du jugement,
Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,
DECLARE irrecevable la demande additionnelle de la société Positronic industries,
FAIT droit à la demande de rejet des pièces numérotées 23, 24, 25, I, J, X et Y et
ECARTE les pièces numérotées 23, 24, 25, I, J, X et Y,
CONDAMNE la société Positronic industries à payer à M. [D] la somme de 249 749,02 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
DEBOUTE M. [D] de sa demande en fixation de l’indemnité de licenciement à la somme de 193 020,11 euros,
FIXE l’indemnité de licenciement à la somme de 183 686,38 euros,
DEBOUTE M. [D] de sa demande en paiement du reliquat sur l’indemnité de licenciement,
CONDAMNE la société Positronic industries à payer à Monsieur [D] la somme de
2 000 euros, à hauteur de première instance, et de 3 000 euros, à hauteur d’appel, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Positronic industries aux entiers dépens de première instance et d’appel,
DEBOUTE la société Positronic industries de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
RAPPELLE que les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.
Le présent arrêt a été signé par Pascale Fouquet, conseiller ayant participé au délibéré, en l’absence de Mme la présidente de chambre empêchée, et par Laurence Imbert, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,