M. [B] [Z], exerçant sous l’enseigne Arplaque, a assigné Mme [C] [N] devant le tribunal de proximité de Castelsarrasin pour obtenir le paiement de 7 770,40 euros, des intérêts de retard, 2 000 euros de dommages et intérêts, et 2 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il a soutenu que Mme [C] [N] lui avait confié des travaux de plâtrerie pour un montant convenu de 7 385 euros, mais qu’elle n’avait pas réglé la facture d’acompte de 4 400 euros. Le tribunal a débouté M. [B] [Z] de toutes ses demandes, estimant qu’il n’avait pas prouvé l’accord de Mme [C] sur le montant et la nature des travaux. M. [B] [Z] a interjeté appel de ce jugement. La cour d’appel de Toulouse a annulé la signification de l’acte d’appel et a invité les parties à se prononcer sur la caducité de l’appel. M. [B] [Z] a demandé la recevabilité de son appel et la condamnation de Mme [C] [N], tandis que cette dernière a demandé la caducité de l’appel et la confirmation du jugement de première instance. Lors de l’audience du 24 juin 2024, la cour a prononcé la caducité de l’acte d’appel, condamnant M. [B] [Z] aux dépens et à verser 3 000 euros à Mme [C] [N] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N° 333/24
N° RG 23/00132
N° Portalis DBVI-V-B7H-PGD2
MD/MP
Décision déférée du 29 Décembre 2022
Tribunal de proximité de CASTELSARRASIN 11-22-176
GABAUDE
[B] [Z]
C/
[C] [N]
CADUCITÉ DE L’ACTE D’APPEL
Grosse délivrée
le 16-10-24
à
Me Olivier MASSOL
Me Gilles SOREL
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 1
***
ARRÊT DU SEIZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE
***
APPELANT
Monsieur [B] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Olivier MASSOL de la SELARL MASSOL AVOCATS, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE
INTIMEE
Madame [C] [N]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Laurent SABOUNJI de la SARL LAFAYETTE AVOCATS TOULOUSE, avocat au barreau de TOULOUSE (plaidant) et par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant)
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 24 juin 2024 en audience publique, devant la cour composée de :
M. DEFIX, président
C. ROUGER, conseiller
A.M. ROBERT, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffière : lors des débats N.DIABY
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par M. DEFIX, président et par M. POZZOBON, greffière
Par acte d’huissier du 26 septembre 2022, M. [B] [Z], exerçant sous l’enseigne Arplaque, a fait assigner Mme [C] [N] pardevant le tribunal de proximité de Castelsarrasin, aux fins d’obtenir sa condamnation à lui payer :
– la somme de 7 770,40 euros augmentée des intérêts de retard au taux légal à compter du 30 juillet 2022 et jusqu’à parfait règlement,
– la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– la somme de 2 300 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
M. [B] [Z] a exposé au soutien de cette demande que Mme [C] [N] avait souhaité rénover son bien immobilier et lui avait confié des travaux de plâtrerie pour un montant de 7 385 euros sur lequel ils sont tombés d’accord à la suite d’un échange de sms. Il a précisé lui avoir adressé le 30 mai 2022 une facture d’acompte pour un montant de 4 400 euros toutes taxes comprises qui n’a jamais été réglée et avoir émis le 30 juillet 2022 une note d’honoraires d’un montant de 7 770,40 euros tenant compte d’une moins-value et de travaux complémentaires réclamés par Mme [N].
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Par jugement réputé contradictoire du 29 décembre 2022, le tribunal de proximité de Castelsarrasin, a :
– débouté M. [B] [Z] exerçant sous l’enseigne Arplaque de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de Mme [C] [N],
– dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [B] [Z] exerçant sous l’enseigne Arplaque aux dépens.
Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu que le demandeur ne produisait aucune pièce de nature à prouver la réalité d’un accord de la défenderesse sur le montant des travaux ni sur leur nature exacte, et qu’en absence de la défenderesse à l’audience, ces éléments ne pouvaient suffire pour entraîner condamnation.
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Par déclaration du 11 janvier 2023, M. [B] [Z] a relevé appel de ce jugement en ce qu’il a :
– débouté M. [Z] de sa demande de condamnation de Mme [N] au paiement de la somme de 7 770,40 euros augmentée des intérêts de retard au taux légal à compter du 30 juillet 2022 et jusqu’à parfait règlement,
– débouté M. [Z] de sa demande de condamnation de Mme [N] à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– débouté M. [Z] de sa demande de condamnation de Mme [N] à lui payer la somme de 2 300 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté M. [Z] de sa demande de condamnation de Mme [N] aux entiers dépens,
– condamné M. [Z] aux entiers dépens.
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Par arrêt du 28 mai 2024, la cour d’appel de Toulouse a :
– annulé l’acte d’huissier du 16 février 2023 portant signification de l’acte d’appel, des conclusions et pièces de l’appelant à Mme [C] [N].
Avant dire droit sur les autres demandes, dépens et frais irrépétibles,
– invité les parties à formuler toutes observations sur le moyen soulevé d’office de la caducité de l’appel encourue du fait de l’annulation de la signification de l’acte d’appel.
– renvoyé l’affaire à l’audience de plaidoirie du 24 juin 2024 à 14 heures
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES APRÈS RÉOUVERTURE
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 juin 2024, M. [B] [Z], appelant, demande à la cour au visa des dispositions de l’article 6 §1 de la Convention européenne de sauvergarde des droits de l’homme et l’article 1 103 du code civil, de :
– déclarer parfaitement recevable l’appel formé par M. [Z],
– rejeter la caducité de la déclaration d’appel,
– infirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions,
– condamner Mme [N] à payer à M. [Z] la somme de 7 770,40 euros augmentée des intérêts de retard au taux légal à compter du 30 juillet 2022 et jusqu’à parfait règlement,
– condamner Mme [N] à payer à M. [Z] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,
Subsidiairement,
– désigner tel expert qu’il plaira à la cour d’appel de Toulouse avec la mission ci-dessus développée,
En tout état de cause,
– condamner Mme [N] à payer à M. [Z] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– la condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Selarl Massol Avocats sur ses dires et affirmations de droit.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 juin 2024, Mme [C] [N], intimée, demande à la cour, au visa de l’article 112 du code de procédure civile, de l’article 909 du code de procédure civile, de l’article 1103 du code civil, des articles 1219 et suivants du code civil, et de l’article 1353 du code civil, de :
Au principal,
– Prenant acte de la nullité de la signification diligentée le 16 février 2023 par arrêt de la cour en date du 31 mai 2024,
– déclarer caduc l’acte d’appel et éteinte l’instance d’appel,
Sur le fond,
– confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 29 décembre 2022 par le tribunal de proximité de Castelsarrasin,
– débouter M. [B] [Z] exerçant sous l’enseigne Artplaque de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Subsidiairement
et si la Cour entendait faire droit à la mesure d’expertise sollicitée,
– mettre les frais de consignation de la mesure d’expertise à la seule charge de M. [B] [Z], exerçant sous l’enseigne Artplaque, qui en fait la demande,
En tout état de cause,
– condamner M. [B] [Z] exerçant sous l’enseigne Artplaque à payer à Mme [C] [N] la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L’affaire a été examinée à l’audience du 24 juin 2024.
1. Selon l’article 905-1 du code de procédure civile en sa version applicable au litige,
‘Lorsque l’affaire est fixée à bref délai par le président de la chambre, l’appelant signifie la déclaration d’appel dans les dix jours de la réception de l’avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d’appel relevée d’office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président ; cependant, si, entre-temps, l’intimé a constitué avocat avant signification de la déclaration d’appel, il est procédé par voie de notification à son avocat’.
2. Il est constant en l’espèce que la signification de la déclaration d’appel qui était à la charge de l’appelant et qui portait également signification des conclusions d’appelant a été annulée par décision de cette cour en raison du vice de forme qu’elle comportait et du grief dont l’intimée pouvait à juste titre se prévaloir.
3. M. [Z] soutient que l’acte litigieux avait un effet interruptif, au sens de l’article 2241du code civil, du délai qui lui était imparti pour procéder à cette diligence.
4. Cet article dispose que ‘La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.
Il en est de même lorsqu’elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l’acte de saisine de la juridiction est annulé par l’effet d’un vice de procédure’.
5. Toutefois, cette disposition ne prévoit l’effet interruptif attaché à l’acte nul qu’aux délais pour présenter une demande ou saisir une juridiction à cette fin mais n’emporte aucun principe général d’interruption des délais de procédure.
6. La signification effectuée le 16 février 2023 à la requête de l’appelant pour porter à la connaissance de l’intimée la déclaration d’appel dans le délai de dix jours suivant l’avis d’avoir signifier émis par le greffe de la cour le 15 février 2023 ne pouvait donc avoir, par l’effet de la nullité prononcée, aucune valeur pour satisfaire l’obligation procédurale mise à sa charge en vertu du texte précité.
7. Selon la Cour européenne des droits de l’homme, ‘le droit d’accès aux tribunaux n’étant pas absolu, il peut donner lieu à des limitations implicitement admises car il appelle, de par sa nature même, une réglementation par l’État, laquelle peut varier dans le temps et dans l’espace en fonction des besoins et des ressources de la communauté et des individus. En élaborant pareille réglementation, les États contractants jouissent d’une certaine marge d’appréciation. Néanmoins, les limitations appliquées ne sauraient restreindre l’accès ouvert à l’individu d’une manière ou à un point tel que le droit s’en trouve atteint dans sa substance même. En outre, elles ne se concilient avec l’article 6, § 1, de la Convention que si elles poursuivent un but légitime et s’il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé’ (notamment CEDH Edificaciones March Gallego S.A. c. Espagne, 19 février 1998, § 34, Recueil 1998).
8. En l’espèce, le délai de dix jours pour signifier la déclaration d’appel à l’intimé afin qu’il constitue avocat, prévu par l’article 905-1 du code de procédure civile, dont le point de départ est la réception de l’avis de fixation adressé aux parties, est destiné à permettre de juger certaines affaires à bref délai. Il garantit, dans les limites de cette exigence de célérité liée à la nature de l’affaire, de s’assurer que l’intimé, qui n’a pas encore constitué avocat, soit appelé, et mis en mesure de préparer sa défense. Il n’est donc ni imprévisible ni insuffisant, cela d’autant que la nullité prononcée visait à sanctionner la méconnaissance d’une formalité substantielle sur l’exactitude des mentions informant l’intimée sur les délais dont elle disposait pour exercer ses droits.
9. En outre, les dispositions de l’article 905-1, précité, ne restreignent pas l’accès au juge d’appel d’une manière ou à un point tel que le droit s’en trouve atteint dans sa substance même. Elles poursuivent, d’une part, le but légitime d’une bonne administration de la justice, les procédures présentant un caractère d’urgence devant être organisées dans un cadre permettant d’assurer qu’une décision soit rendue à bref délai, et d’autre part, il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé, l’appelant, qui doit, par l’intermédiaire de son avocat se montrer vigilant s’agissant de l’accomplissement des différents actes de la procédure, étant mis en mesure de respecter l’obligation mise à sa charge de signifier la déclaration d’appel à l’intimé dans ce délai de dix jours (Cass. 2e civ., 9 septembre 2021, n° 19-25.187).
10. La caducité de la déclaration d’appel doit donc être prononcée.
11. La présente décision mettant fin à l’instance, M. [Z] sera condamné aux entiers dépens d’appel.
12. Mme [N] est en droit de réclamer l’indemnisation des frais non cmpris dans les dépens qu’elle a dû exposer à l’occasion de la procédure d’appel. M. [Z] sera condamné à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Prononce la caducité de l’acte d’appel formalisé par M. [B] [Z] le 11 janvier 2023.
Condamne M. [B] [Z] aux dépens d’appel.
Condamne M. [B] [Z] à payer à Mme [C] [N] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière Le président
M. POZZOBON M. DEFIX
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