Conseil en communication : 12 janvier 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/03157

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Conseil en communication : 12 janvier 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/03157
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N° RG 21/03157 – N° Portalis DBVM-V-B7F-K66V

C1

Minute N°

Copie exécutoire

délivrée le :

la SELARL IDEOJ AVOCATS

Me Pascale HAYS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 12 JANVIER 2023

Appel d’un jugement (N° RG 2020J00206)

rendu par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 10 juin 2021

suivant déclaration d’appel du 13 juillet 2021

APPELANTE :

SAS H&L PRESTATIONS A DOMICILE au capital de 104.775 euros, immatriculée au RCS de VIENNE sous le numéro 477 934 343, prise en la personne de son président en exercice domicilié es qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

représentée par Me Sophie DELON de la SELARL IDEOJ AVOCATS, avocat au barreau de VIENNE

INTIMÉE :

SAS GOBETWIN au capital de 1000 €, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 834 144 289, prise en la personne de son président, Monsieur [Z] [H]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Pascale HAYS, avocat au barreau de GRENOBLE postulant et par Me Marion LAMBERT-BARRET de la SELARL ALDEBARAN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente,

Mme Marie-Pascale BLANCHARD, Conseillère,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Caroline BERTOLO, greffière et en présence de Clémence RUILLAT, greffière stagiaire

DÉBATS :

A l’audience publique du 26 octobre 2022, Mme BLANCHARD, conseillère, a été entendue en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions.

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour que l’arrêt soit rendu ce jour,

EXPOSE DU LITIGE :

Dans le cadre d’un projet de création d’une plateforme de services en ligne et d’une application pour smartphone, la Sas H&L Prestations à Domicile (H&L) est entrée en relation avec la Sas Gobetwin, agence de communication, pour assurer la communication de sa plateforme à travers une nouvelle marque.

Le 15 mai 2019, la société Gobetwin a établi un budget de ses prestations et de celles de son sous-traitant, la société AdforAll, d’un montant total de 1.606.980 euros sans option et de 1.624.980 euros avec options.

Transmis le 16 mai suivant à la société H&L, ce document a été validé par cette dernière le 27 mai 2019.

Les deux premières factures de mai et juin 2019 ont été payées par la société H&L.

La société Gobetwin a émis six autres factures dont la société H&L a refusé le règlement au motif qu’elles ne correspondaient à aucun devis accepté, ni à aucune prestation.

Après vaine mise en demeure du 20 juillet 2020, la société Gobetwin a fait assigner la société H&L devant la juridiction commerciale par acte d’huissier du 2 décembre 2020.

Par jugement du 10 juin 2021, le tribunal de commerce de Vienne a :

– condamné la Sas H&L Prestations à Domicile à payer à la Sas Gobetwin la somme de 64.595,03 euros ttc au titre des factures des prestations des mois de juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2019, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 juillet 2020 pour les factures F201910028, F201910029 et F201910030 et à compter du 15 août 2020 pour les factures F2020003009, F202003010 et F202003011 bis ;

– débouté la société H&L Prestations à Domicile de sa demande de paiement de la somme de 240 euros au titre des indemnités forfaitaires pour frais de recouvrement,

– débouté la société Gobetwin de sa demande de paiement au titre de dommages et intérêts,

– débouté la Sas H&L Prestations à Domicile de sa demande reconventionnelle tendant à voir Gobetwin condamnée à lui rembourser la somme de 21.360 euros ttc au titre d’honoraires injustifiés et trop versés ;

– débouté la société H&L prestations à domicile de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,

– condamné la Sas H&L Prestations à Domicile à payer à la Sas Gobetwin la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Sas H&L Prestations à Domicile aux dépens.

Suivant déclaration au greffe du 13 juillet 2021, la société H&L a relevé appel de cette décision qui lui a été signifiée le 15 juin 2021, en ce qu’elle a :

– condamné la Sas H&L Prestations à Domicile à payer à la Sas Gobetwin la somme de 64.595,03 euros ttc au titre des factures des prestations des mois de juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2019, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 juillet 2020 pour les factures F201910028, F201910029 et F201910030 et à compter du 15 août 2020 pour les factures F2020003009, F202003010 et F202003011 bis,

– débouté la Sas H&L Prestations à Domicile de sa demande reconventionnelle tendant à voir Gobetwin condamnée à lui rembourser la somme de 21.360 euros ttc au titre d’honoraires injustifiés et trop versés,

– débouté la Sas H&L Prestations à Domicile de sa demande reconventionnelle tendant à voir la Sas Gobetwin condamnée à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– débouté la Sas H&L Prestations à Domicile de sa demande reconventionnelle tendant à voir la Sas Gobetwin condamnée à lui payer la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la Sas H&L Prestations à Domicile à payer à la Sas Gobetwin la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la Sas H&L Prestations à Domicile aux dépens.

Sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire ayant été déclarée irrecevable, les parties sont convenues de la mise en ‘uvre d’un échéancier.

Prétentions et moyens de la société H&L :

Au terme de ses dernières écritures notifiées le 5 juillet 2022, la société H&L demande à la cour de :

– prononcer la nullité du jugement pour défaut de motivation,

– statuer à nouveau sur le fond comme indiqué ci-après,

– subsidiairement,

– réformer le jugement en ce qu’il a :

. condamné la Sas H&L Prestations à Domicile à payer à la Sas Gobetwin la somme de 64.595,03 euros ttc au titre des factures des prestations des mois de juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2019, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 juillet 2020 pour les factures F201910028, F201910029 et F201910030 et à compter du 15 août 2020 pour les factures F2020003009, F202003010 et F202003011 bis,

. débouté la Sas H&L Prestations à Domicile de sa demande reconventionnelle tendant à voir la Sas Gobetwin condamnée à lui rembourser la somme de 21.360 euros ttc au titre d’honoraires injustifiés et trop versés,

. débouté la Sas H&L Prestations à Domicile de sa demande reconventionnelle tendant à voir la Sas Gobetwin condamnée à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

. débouté la Sas H&L Prestations à Domicile de sa demande reconventionnelle tendant à voir la Sas Gobetwin condamnée à lui payer la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

. condamné la Sas H&L Prestations à Domicile à payer à la Sas Gobetwin la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

. condamné la Sas H&L Prestations à Domicile aux dépens,

– le confirmer en ce qu’il a débouté la Sas Gobetwin de ses demandes au titre des indemnités forfaitaires pour frais de recouvrement et au titre de dommages et intérêts,

– en tout état de cause :

– statuer à nouveau,

– constater l’absence d’accord sur la chose et sur le prix,

– constater que les factures impayées ne correspondent à aucun devis détaillé signé de H&L Prestations à Domicile, ni à aucune prestation commandée par H&L Prestations à Domicile et réalisée par Gobetwin,

– constater que la Sas Gobetwin ne rapporte pas la preuve de l’accord de la Sas H&L Prestations à Domicile sur les prestations facturées et sur leur prix,

– constater que la Sas Gobetwin ne rapporte pas la preuve de la réalité des prestations facturées et de leur juste valorisation,

– dire que les factures dont le paiement est poursuivi ne correspondent à aucune contrepartie véritable,

– juger que Gobetwin ne justifie pas d’une créance certaine liquide et exigible, – débouter Gobetwin de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– subsidiairement,

– juger que seul le prix des prestations matérielles sera retenu à l’exclusion de tout honoraires,

– rejeter la somme totale de 38.916 euros correspondant aux honoraires et réduire la somme éventuellement due à 25.679,03 euros ttc,

– en tout état de cause :

– rejeter la demande d’indemnité forfaitaire de recouvrement,

– rejeter pareillement la demande d’intérêts à compter du 20 juillet 2020 étant observé qu’à cette date, les trois factures du 15 juillet 2020 n’étaient même pas exigibles,

– débouter Gobetwin de sa demande de dommages et intérêts,

– la débouter de ses demandes au titre de l’article 700 au titre de la première instance et des dépens,

– reconventionnellement :

– condamner Gobetwin à rembourser à H&L Prestations à Domicile la somme de 21.360 euros ttc d’honoraires injustifiés et trop versés,

– condamner Gobetwin à payer à H&L Prestations à Domicile la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– condamner Gobetwin à payer à H&L Prestations à Domicile la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance,

– condamner Gobetwin à payer à H&L Prestations à Domicile la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’appel,

– ordonner, le cas échéant, la compensation entre les créances réciproques,

– condamner Gobetwin aux entiers dépens de première instance et d’appel.

La société H&L soulève la nullité du jugement au motif d’une absence et à tout le moins d’une insuffisance de motivation, reprochant au tribunal de :

– ne pas avoir répondu à ses trois principaux moyens tirés de l’absence de contrat et de détermination de son objet, de la contestation de la réalité des prestations facturées et enfin du caractère excessif des honoraires facturés,

– avoir procédé par affirmation, sans analyse du détail de son argumentation et s’être contenté de renvoyer sans précisions aux pièces versées et aux dires des parties pour constater la réalité des prestations,

– s’être trompé sur la charge de la preuve du montant de la créance et sur les éléments qu’il lui appartenait d’examiner au titre du caractère excessif des honoraires.

Elle conteste avoir reçu de la société Gobetwin des informations précises sur la nature, la quantité et la qualité des prestations vendues et leur prix, qu’elle ne lui a communiqué qu’un budget prévisionnel global, que sa validation, le 27 mai 2019, ne vaut pas engagement de dépense de sa part, qu’il ne s’agissait pas de devis fermes et définitifs, mais de projets et qu’il n’y a pas eu accord sur la chose et sur le prix.

Elle explique notamment qu’elle n’a signé qu’un document d’une seule page, sans descriptif détaillé annexé, que les onglets produits détaillant chacun des postes ne lui ont pas été adressés et n’ont pas été signés.

Elle relève que le budget transmis ne comporte pas les mentions obligatoires devant figurer sur un devis.

L’appelante conteste la réalité des prestations facturées soutenant que le budget prévisionnel global ne permet pas la détermination du contenu de chacune des prestations vendues ; qu’aucun justificatif des prix facturés n’a été fourni, les courriels produits portant sur des propositions non retenues par la société H&L, ou des prestations déjà facturées, ou encore des prestations inutiles; que les factures d’une société Gooz lui sont inopposables, que la société Gobetwin ne peut justifier d’aucun produit livré, ni de validation de sa part d’un produit livrable.

Elle fait valoir qu’elle a réglé deux factures pour une somme de plus de 100.000 euros correspondant à la marque et aux visuels qu’elle est en droit d’utiliser sur son nouveau site et que la société Gobetwin échoue à rapporter la preuve d’autres prestations justifiant une créance certaine, liquide et exigible.

Elle se prévaut du caractère excessif des honoraires facturés alors que la société Gobetwin ne fournit pas de justificatif d’une somme de 38.916 euros ttc, objet de ses deux dernières factures et qu’aucune contrepartie distincte aux prestations matérielles (marque et vidéos) n’est identifiée comme correspondant aux honoraires facturés les 20 juin et 8 juillet 2019.

A titre subsidiaire, elle estime que la société Gobetwin ne rapporte pas la preuve d’avoir subi un préjudice indépendant du retard de paiement qui justifierait l’octroi de dommages-intérêts.

Prétentions et moyens de la société Gobetwin:

Selon ses dernières conclusions notifiées le 22 juin 2022, la société Gobetwin entend voir :

– sur l’appel interjeté par la société H&L Prestations à Domicile :

– confirmer le jugement du 10 juin 2021 rendu par le tribunal de commerce de Vienne en toutes ses dispositions critiquées par H&L Prestations à Domicile, et notamment en ce qu’il l’a condamnée à payer la somme de 64.595,03 euros ttc à Gobetwin au titre des prestations des mois de juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2019 outre les intérêts au taux légal courant à compter du 20 juillet 2021 pour les factures F201910028, F201910029 et F201910030 et à compter du 15 août 2020 pour les factures F202003009, F202003010 et F202003011 bis ;

– sur l’appel incident de la société Gobetwin :

– infirmer le jugement du 10 juin 2021 rendu par le tribunal de commerce de Vienne en ce qu’il a débouté la société Gobetwin de sa demande de dommages et intérêts ;

– statuant à nouveau :

– constater la perte de chance de la société Gobetwin de se développer, du fait de l’absence de trésorerie résultant directement du défaut de paiement des six factures par H&L Prestations à Domicile ;

– en conséquence ;

– condamner la société H&L Prestations à Domicile à verser à la société Gobetwin la somme de 12.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– en tout état de cause:

– débouter la société H&L Prestations à Domicile de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

– condamner la société H&L Prestations à Domicile à verser à la société Gobetwin la somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société H&L Prestations à Domicile aux entiers dépens.

La société Gobetwin soutient que le jugement est parfaitement motivé, l’exigence de motivation devant s’apprécier au regard des circonstances de l’espèce et la nullité n’étant encourue qu’en l’absence totale de motivation, que le tribunal a analysé les documents qui lui étaient soumis pour en déduire l’existence d’un contrat valablement conclu entre les parties, que si le tribunal a renvoyé aux pièces du dossier, il en a extrait la substance et n’était pas tenu de reprendre chaque argument de la société H&L que le développement de ses analyses conduisait à écarter implicitement, que le tribunal a tiré les conséquences de ses constatations, fait une exacte application des termes du contrat et considéré que la société H&L, qui n’avait jamais élevé de contestation à réception des factures, ne rapportait pas la preuve du caractère excessif des honoraires contractuellement définis.

Elle fait valoir qu’elle a transmis son offre de prestations le 16 mai 2019 à la société H&L qui l’a acceptée le 27 mai suivant, que son offre se présentait sous la forme d’un tableau récapitulatif accompagné de plusieurs onglets séparés détaillant chacune des prestations, qu’il s’agissait bien d’une offre ferme et définitive et non d’un projet, que sa «validation» par la société H&L vaut acceptation des prestations et de leur prix et que les critiques de la forme de son devis sont sans conséquence sur sa validité.

Elle relève que la société H&L a réglé sans réserves les premières factures émises.

Elle se prévaut de la parfaite exécution de ses prestations dans les conditions notamment tarifaires énoncées par le contrat, de la remise des livrables à sa cliente, d’une facturation détaillant chacun des postes et leur état d’avancement, ainsi que des échanges entre les parties démontrant la matérialité de ses diligences et prestations.

Elle indique que les seules critiques émises par la société H&L porte sur l’effacement d’avis négatifs sur son site web ne relevant pas de ses missions.

La société Gobetwin considère qu’elle a fait une exacte application des tarifs convenus relatifs à ses honoraires de conseil, d’accompagnement et de pilotage, que ces prestations ayant été exécutées, leur facturation n’a pas à être révisée et que la société H&L ne peut lui reprocher et lui faire supporter les délais d’exécution du prestataire qu’elle a chargé du développement informatique de la plateforme.

Elle expose que depuis le jugement la société H&L a mis en ligne son site en utilisant la marque Wanteez et l’identité graphique créées par elle et dont elle refuse d’honorer les factures, que depuis, le site a subi des modifications visant à faire disparaître l’usage de ses travaux, signe de la mauvaise foi de l’appelante.

Elle forme appel incident du rejet de ses demandes indemnitaires estimant que la résistance abusive de la société H&L au paiement de ses factures a eu des conséquences lourdes nées du défaut de trésorerie à hauteur de 65.000 euros qu’elle n’a pu utiliser pour financer son développement alors qu’elle est une jeune société créée en 2018 et l’a mise en difficultés à l’égard de ses sous-traitants.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 29 septembre 2022

MOTIFS DE LA DECISION :

En application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour n’est tenue de statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions d’appel.

Ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile, les demandes des parties tendant à voir «constater», «donner acte» de même que celles de «dire et juger» lorsqu’elles se contentent d’énoncer, voire de développer, ce qui ne constituent en réalité que des moyens au soutien des prétentions.

En conséquence, il n’y sera pas répondu.

1°) sur la nullité du jugement :

L’article 455 du code de procédure civile impose au juge de motiver sa décision, c’est à dire d’expliquer les raisons de fait et de droit qui le conduisent à se déterminer.

Si la société H&L reproche aux premiers juges de ne pas avoir examiné les trois moyens qu’elle oppose à la demande en paiement de la société Gobetwin, force est de constater que les motifs du jugement examinent successivement, sous trois paragraphes distinctement identifiés, les questions de l’existence du contrat, de la réalité des prestations facturées et du caractère excessif des honoraires facturés, en y apportant une réponse explicite.

Il ressort de chacun de ces paragraphes que le tribunal de commerce, qui n’avait pas l’obligation de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a examiné et apprécié la force probante des éléments qui lui étaient soumis, précisant ceux qui lui ont paru pertinents et ont fondé sa décision.

Il apparaît que sous le grief d’absence de motivation, la société H&L entend contester l’appréciation par les premiers juges des éléments de la cause, alors que le simple fait qu’elle a été différente de la sienne ne prive pas leur décision de la motivation exigée.

En conséquence, la demande de nullité du jugement sera rejetée.

2°) sur l’existence d’un accord contractuel :

Il n’est pas discuté entre les parties qu’en date du 15 mai 2019, la société Gobetwin a établi un budget du projet d’accompagnement global 2019/2020 de la société H&L, document que cette dernière lui a retourné le 27 mai suivant, complété de la mention «bon pour accord», signé et revêtu de son cachet commercial.

La société H&L dénie à la signature de ce document la valeur d’un engagement contractuel à défaut de détermination précise des prestations offertes par la société Gobetwin et de leur prix.

Il résulte des courriels produits et du constat d’huissier dressé le 13 décembre 2021 de la boite aux lettres électronique de M. [H], dirigeant de la société Gobetwin, que le budget en date du 15 mai 2019 a été transmis à la société H&L le lendemain 16 mai par un courriel dont l’objet était intitulé : «devis Adforall/Gobetwin/liste de questions», que la pièce jointe à ce message était un tableau au format excel ainsi intitulé : «devis Gobetwin/H&L/ Récap devis Gobetwin/AdforAll/H&L2019» et comportant en bas d’écran plusieurs onglets numérotés de 1 à 12, que le même jour, la société H&L, sous l’adresse électronique de son dirigeant, M. [G], a fait la réponse suivante : «Nous étudions le devis et nous renvoyons les documents», que le 24 mai 2019, dans un courriel ayant pour objet le compte rendu d’une réunion du 23 mars précédent, la société Gobetwin relançait la société H&L en insistant sur : «le besoin impératif d’une validation par écrit de notre proposition budgétaire (hors prestation AdforAll)», que le 27 mai 2019, la société H&L répondait à ce message : «Vous trouverez ci-joint le budget validé» joignant le document signé.

Contrairement à ce qu’elle affirme, la société H&L a bien été rendue destinataire d’un devis des prestations proposées par la société Gobetwin, déclinées par rubriques tarifées dans le récapitulatif signé par elle et détaillées en différents postes, sous les onglets du tableau excel, chacun ouvrant un nouveau tableau précisant la nature de la tâche, la qualité des intervenants, leur tarif journalier, le délai d’exécution de chaque prestation et son prix total, repris dans le récapitulatif, le tout constituant une seule et même offre contractuelle.

En acceptant et en signant la première page de ce devis, constitué du récapitulatif chiffré des prestations proposées, la société H&L en a nécessairement accepté le calcul sur la base du tarif/jour.

Si la société AdforAll, malgré acceptation de son devis de 84.000 euros ht, tel qu’intégré dans la proposition de la société Gobetwin du 15 mai 2019, a établi le 28 mai suivant, un nouveau budget de son intervention, ramené à 74.400 euros ht et dont il était précisé qu’étant prévisionnel, il ne constituait pas un engagement de dépenses pour la société H&L, ces relations contractuelles ne peuvent avoir aucun effet contraignant à l’égard de la société Gobetwin, personne morale distincte et tiers, dont l’offre de prestation était ferme et dépourvue de caractère prévisionnel.

La société H&L revendique par ailleurs, ainsi qu’il ressort notamment de son courrier du 23 août 2020, avoir réglé deux factures (F20190716, 2019060011) de la société Gobetwin, émises les 20 juin et 8 juillet 2019, qui font expressément référence au marché du 15 mai 2019. Ce commencement d’exécution de sa part, démontre qu’elle s’est engagée dans la relation contractuelle avec la société Gobetwin, selon l’offre de cette dernière du 15 mai 2019.

Au surplus, l’ensemble des échanges entre les parties produits aux débats démontrent qu’elles avaient dépassé le stade des pourparlers et entamé l’exécution des prestations objet du contrat, notamment relatives à la création du nom et du logo, de la charte graphique et des contenus du site.

Il est ainsi établi que la société H&L a accepté l’offre de prestations de la société Gobetwin dont cette dernière lui a fourni le détail des contenus et des prix.

Le jugement du tribunal de commerce sera confirmé en ce qu’il a retenu l’existence d’un contrat.

3°) sur la demande en paiement :

La société Gobetwin réclame paiement de six factures au titre de prestations réalisées entre les mois de juillet et décembre 2019 pour des montants respectifs de 14.124,99 euros ht, 7.775 euros ht, 14.225,21 euros ht, 7.054 euros ht, 5.675 euros ht et 4.975 euros ht.

La cour relève que chaque facture comporte une description des prestations concernées, leur pourcentage de réalisation, le rappel du prix global de la prestation et pour les honoraires, le nombre d’heures réalisé et le coût horaire.

La comparaison des factures avec les différentes rubriques détaillées dans les onglets du tableau récapitulatif du budget permet de constater que la facturation a bien été faite sur la base du coût initial de la prestation correspondante.

Pour les factures des mois de juillet, août et septembre 2019, la société Gobetwin produit aux débats des échanges de courriels qui démontrent la réalité de ses productions graphiques et rédactionnelles destinées à être intégrées sur le site web de la société H&L ainsi que sur ses pages sur les réseaux sociaux, et qu’elle a soumises à sa cliente en lui demandant de les valider.

Ainsi, il est justifié de la conception et de la production des messages de recrutement de collaborateurs, d’acquisition de clients, de la création d’un tee-shirt pour une équipe de course à pied, la création de pictogrammes, de formulaires de recrutement, d’un environnement graphique et d’un design propre à la marque Wanteez, la rédaction d’une charte éditoriale dédiée aux réseaux sociaux, la création et le paramétrage de pages Facebook et Linkedin.

La société H&L n’apporte aucune preuve de son refus des prestations telles qu’accomplies et livrées par la société Gobetwin.

Concernant les honoraires, ils portent sur des prestations de pilotage et conseils stratégiques, de coordination et suivi opérationnel et enfin de comité de pilotage.

Selon le devis du 15 mai 2019, ces prestations étaient chiffrées à la somme globale de 71.175 euros ttc et réparties sur une période de 11 mois à raison d’un certain nombre de jours tarifiés par mois pour chacun des deux intervenants, un directeur commercial et un directeur conseil.

Ainsi que l’illustrent les échanges de courriels produits, ces prestations, qui se sont poursuivies en janvier et février 2020, recouvraient le conseil en stratégie de communication commerciale, la coordination des interventions des différents prestataires (AdforAll, Marcelweb, Monteverdi.live, Gooz) et le suivi du projet.

Ces honoraires étaient donc décrits dans la proposition budgétaire soumise à la société H&L qui ne fournit aucun élément de nature à établir leur caractère excessif au regard d’une exécution imparfaite. Le seul devis de Mme [J] du 17 juin 2021 pour une somme de 2900 euros ht se rapporte uniquement à des modifications techniques du site web et de l’application mobile pour une prestation prévue sur 16,5 jours au total et ne peut ainsi être comparé à une prestation d’accompagnement de près d’une année par une agence de communication.

Il apparaît au demeurant que la contestation développée par la société H&L n’a en réalité jamais porté sur les prestations exécutées par la société Gobetwin, mais sur un problème technique périphérique relatif à la suppression d’avis négatifs sur la page Google de la société H&L, qui, ainsi que l’ont parfaitement relevé les premiers juges, n’entrait pas dans le champ des prestations envisagées par le devis.

En conséquence, la cour confirmera le jugement en ce qu’il a condamné la société H&L à régler à la société Gobetwin le montant de ses factures, soit la somme de 64.595,03 euros ttc, et en ce qu’il a rejeté la demande en restitution de la somme de 21360 euros payée au titre des factures des 20 juin et 8 juillet 2019.

Les factures relatives aux prestations des mois de juillet, août et septembre 2019 ayant été émises le 9 octobre 2019, c’est avec raison que le tribunal de commerce a fait courir les intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 20 juillet 2020 et pour les factures émises le 15 juillet 2020 à compter du 15 août suivant.

Sa décision sera pleinement confirmée.

4°) sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive :

Si le refus de payer de la société H&L, essentiellement fondé sur la contestation d’un devis pourtant accepté et signé par elle, est empreint de mauvaise foi, la société Gobetwin, qui se prévaut d’une perte de chance d’assurer son développement, n’en justifie pas. Elle rapporte cependant la preuve d’un préjudice distinct du seul retard dont la réparation est assurée par le jeu des intérêts moratoires, constitué par les frais de recouvrement forcé de sa créance à concurrence de 2.166, 89 euros.

Le jugement qui l’a déboutée de sa demande indemnitaire sera infirmé et la société H&L sera condamnée à lui verser 2166,89 euros de dommages-intérêts.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

DEBOUTE la Sas H&L Prestations à Domicile de sa demande de nullité du jugement,

CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de Vienne en date du 10 juin 2021 en ses chefs de dispositif soumis à la cour, sauf en ce qu’il a débouté la société Gobetwin de sa demande de paiement au titre de dommages et intérêts,

statuant à nouveau,

CONDAMNE la Sas H&L Prestations à Domicile à payer à la Sas Gobetwin la somme de 2166,89 euros à titre de dommages-intérêts,

y ajoutant,

CONDAMNE la Sas H&L Prestations à Domicile à payer à la Sas Gobetwin la somme complémentaire en cause d’appel de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Sas H&L Prestations à Domicile aux dépens de l’instance d’appel.

SIGNÉ par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


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