Conseil d’Etat, du 19 avril 2000, 198532, inédit au recueil Lebon

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Conseil d’Etat, du 19 avril 2000, 198532, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 10 août 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE, dont le siège social est situé … ; la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 mai 1998 par laquelle le Conseil supérieur de l’audiovisuel a rejeté sa candidature en vue de l’exploitation d’un service de radiodiffusion sonore par voie hertzienne dans la zone de Montpellier ;

2°) d’ordonner au Conseil supérieur de l’audiovisuel de prendre, dans un délai de trois semaines après la notification de la décision du Conseil d’Etat, une nouvelle décision sur la candidature de la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE ;

3°) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée ;

Vu la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

– le rapport de M. Fabre-Aubrespy, Maître des Requêtes,

– les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, le Conseil supérieur de l’audiovisuel « accorde des autorisations en appréciant l’intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socio-culturels, la diversification des opérateurs et la nécessité d’éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence. Il tient également compte : 1° de l’expérience acquise par le candidat dans les activités de communication … » ; que si le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut, en vertu de ces dispositions, tenir compte, lorsqu’il accorde une autorisation, de l’expérience acquise par le candidat dans les activités de communication, il ne peut légalement déduire de la seule circonstance qu’un candidat n’est pas présent dans la zone concernée qu’il ne satisfait pas au critère précité, qui est relatif au professionnalisme des opérateurs, ni retenir la candidature d’un autre opérateur pour le seul motif que ce dernier est déjà présent dans cette zone ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que pour rejeter la candidature de la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE et retenir celle de Radio Nostalgie, le Conseil supérieur de l’audiovisuel s’est exclusivement fondé sur le fait que cette dernière disposait d’une « expérience acquise sur la zone » dont ne peut se prévaloir BFM ; que ce motif est entaché d’erreur de droit ; que, par suite, la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE est fondée à demander l’annulation de la décision en date du 27 mai 1998 par laquelle le Conseil supérieur de l’audiovisuel a rejeté sa candidature en vue de l’exploitation d’un service de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre dans la zone de Montpellier ;

Sur les conclusions de la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE tendant à ce que le Conseil d’Etat ordonne au Conseil supérieur de l’audiovisuel de réexaminer la candidature de la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE :

Considérant qu’aux termes du second alinéa de l’article 6-1 de la loi du 16 juillet 1980 modifiée : « Lorsqu’il règle un litige au fond par une décision qui implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public doit à nouveau se prononcer après une nouvelle instruction, le Conseil d’Etat, saisi de conclusions en ce sens, prescrit que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé, qu’il peut assortir d’une astreinte prenant effet à la date qu’il fixe » ;

Considérant que l’annulation de la décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel en date du 27 mai 1998 prononcée par la présente décision du Conseil d’Etat implique nécessairement que le Conseil supérieur de l’audiovisuel se prononce à nouveau sur la candidature de la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE (BFM) ; que, dès lors, il y a lieu pour le Conseil d’Etat d’ordonner au Conseil supérieur de l’audiovisuel de réexaminer ladite candidature dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l’Etat à verser à la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant, en revanche, que les mêmes dispositions de l’article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à l’Etat la somme qui est demandée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Article 1er : La décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel en date du 27 mai 1998 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au Conseil supérieur de l’audiovisuel de prendre les mesures nécessaires au réexamen, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, de la candidature de la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE à l’exploitation d’un service de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre dans la zone de Montpellier.

Article 3 : L’Etat versera à la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE la somme de 10 000 F en application de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Les conclusions du Conseil supérieur de l’audiovisuel tendant à l’application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE D’EXPLOITATION DE RADIO FINANCE, au Conseil supérieur de l’audiovisuel, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.


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