Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat le 14 mai 1984, présentée pour M. Jean X…, chirurgien-dentiste, demeurant Résidence « La Couronne », Rue des Ecoles à La Roche Bernard (56130) ; M. X… demande que le Conseil d’Etat :
1°) annule le jugement en date du 14 mars 1984 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en décharge du complément de la taxe sur la valeur ajoutée auquel il a été assujetti au titre de la période allant du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1979 ;
2°) prononce la décharge de ces impositions et des pénalités dont elles ont été assorties ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
– le rapport de M. Plagnol, Maître des requêtes,
– les observations de Me Roger, avocat de M. Jean X…,
– les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Sur la procédure d’imposition :
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que l’avis de vérification de comptabilité notifié à M. X…, le 25 mai 1979 ait indiqué une période de vérification allant jusqu’au 30 juin suivant est sans influence sur la régularité de cet avis dès lors que les délais de souscription des déclarations de chiffre d’affaires relatives au premier semestre 1979 étaient expirés à la date de clôture du contrôle ;
Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que l’agent qui a signé les avis de vérification et la notification de redressement n’aurait pas été compétent, n’est assorti d’aucune précision permettant d’en apprécier la portée ;
Considérant, en troisième lieu, que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés résultent de la vérification de comptabilité et non de la vérification approfondie de la situation fiscale d’ensemble de M. X… ; que dès lors le moyen tiré de l’irrégularité dont serait entachée cette dernière ne saurait être utilement invoqué ;
Considérant, en quatrième lieu que la notification de redressement indique clairement la nature, le montant et le motif des redressements envisagés et était suffisamment motivée pour mettre le contribuable en mesure de présenter, comme il l’a d’ailleurs fait, ses observations ; que l’administration n’était pas tenue de joindre à la notification la copie de l’instruction à laquelle elle se référait ;
Considérant, en cinquième lieu, que le service a précisé dans sa réponse en date du 13 décembre 1979 au contribuable qui avait demandé la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires la nature des redressements en cause ne permettait pas cette saisine ; qu’ainsi entout état de cause l’administration a suffisamment motivé son refus ;
Considérant, en sixième lieu, qu’il résulte des dispositions de l’article 1649 quinquies A3 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur qu’en cas de désaccord persistant, le différend peut être soumis « sur l’initiative de l’administration ou à la demande du redevable … à l’avis … de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires dans les matières prévues aux articles 55, 98 et 287-3 » ; qu’aux termes de l’article 287-3 le désaccord est soumis à la commission lorsqu’il porte sur le montant du chiffre d’affaires réalisé ; que M. X… n’a jamais contesté le montant du rappel litigieux mais le principe même de l’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des rétrocessions d’honoraires faites par ses associés à son profit ; que dès lors c’est à bon droit que l’administration a estimé que la commission n’était pas compétente ;
Considérant, en septième lieu, que l’avis de mise en recouvrement du rappel litigieux comportait toutes les indications nécessaires à la connaissance par M. X…, de ses droits conformément à l’article 389-1 de l’annexe II au code général des impôts, applicable en l’espèce ; que la circonstance qu’une erreur matérielle ait été commise dans la mention de la date de notification des redressements litigieux, n’est pas de nature à elle-seule à entacher d’irrégularité cet avis ; que les dispositions de l’article 2 IV de la loi n° 88-1193 du 29 décembre 1988 font obstacle à ce que le moyen tiré de la prétendue incompétence de l’agent qui a signé l’avis soit utilement soulevé devant le juge ;
Considérant, enfin, que l’irrégularité de la décision de rejet de la réclamation de M. X…, à la supposer établie, est sans influence sur la légalité de la procédure d’imposition ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu’aux termes de l’article 256 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au cours de la période du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1978 : « les affaires faites en France … sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu’elles relèvent d’une activité de nature industrielle ou commerciale ; quels qu’en soient les buts ou les résultats » ; qu’aux termes du même article dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 1979 : I- Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée … les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel » ;
Considérant que M. X…, qui exerce la profession de chirurgien-dentiste a conclu à compter de 1976 avec d’autres praticiens des conventions aux termes desquelles les signataires décidaient de mettre en commun leurs activités pour l’exercice de leur profession dans un même cabinet ; que ce cabinet et les aménagements qu’il comportait appartenaient à M. X… ; que les conventions prévoyaient notamment que chacun des signataires prélèverait « à titre de première répartition 40 % du montant des honoraires personnels qu’il aura perçus et qui viendront en déduction des excédents à partager » ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction que le groupement ainsi constitué ne tenait aucune comptabilité propre ; qu’aucune des conventions ne précise les apports en nature ou en espèces de chacun des associés ; que les praticiens autres que M. X… versaient à celui-ci 60 % du montant des honoraires qu’ils percevaient et ne bénéficiaient d’aucun reversement en fin d’année ; qu’ainsi, l’administration établit que, nonobstant les termes des conventions précitées, M. X… se bornait en fait à mettre à la disposition des autres praticiens, moyennant le versement de 60 % de leurs honoraires, le local et les équipements nécessaires à l’exercice de leur art ; qu’une telle activité présente le caractère d’une affaire imposable à la taxe sur la valeur ajoutée, conformément aux dispositions précitées de l’article 256 du code général des impôts tant dans leur rédaction en vigueur jusqu’au 31 décembre 1978 qu’à celle en vigueur à compter du 1er janvier 1979 ; qu’ainsi, c’est par une exacte application de ces dispositions successives, que l’administration a estimé que les recettes tirées par M. X… de cette activité étaient passibles de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant que M. X… ne peut utilement invoquer, sur le fondement des dispositions de l’article 1649 quinquies E du code général des impôts, repris à l’article L. 80-A du livre des procédures fiscales, l’instruction administrative 3-A-10-77 du 15 mars 1977, d’après lesquelles les opérations internes réalisées dans le cadre d’une convention d’exercice conjoint par les membres d’une profession médicale ou paramédicale échappent au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, dès lors que les opérations réalisées par le requérant ne peuvent être regardées, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, comme ayant été réalisées dans le cadre d’une convention d’exercice conjoint ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. X… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de M. X… est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X… et au ministre délégué auprès du ministre d’Etat, ministre de l’économie, des finances et du budget, chargé du budget.