Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mai et 31 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Bernard A, demeurant … ; M. A demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 19 mars 2007 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a, d’une part, rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement du 12 mai 2005 du tribunal administratif de Melun rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1994 et 1995 et à la décharge des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre desdites années, d’autre part, à ce que lui soit accordée la décharge de ces impositions ;
2°) réglant l’affaire au fond, de lui accorder la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Frédéric Boudier, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
– les observations de Me Odent, avocat de M. A,
– les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Odent, avocat de M. A ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme C, divorcés depuis le 25 juin 1996, ont fait l’objet d’un contrôle sur pièces, au titre de l’année 1993, en ce qui concerne les revenus fonciers provenant de la SCI Saint-Hilaire dont Mme C, née B, détenait 90 % du capital et dont M. A était le gérant, et d’un examen contradictoire de l’ensemble de leur situation fiscale personnelle au titre des années 1994 et 1995 ; que la SCI Saint-Hilaire a fait l’objet d’un contrôle sur pièces au titre de l’année 1993, et d’une vérification de comptabilité au titre des années 1994 et 1995 ; qu’à la suite de ces contrôles, des redressements en matière de revenus fonciers au titre des années 1994 et 1995 ont été notifiés à la SCI Saint Hilaire, et à M. et Mme C à hauteur de leur participation dans la société ; que M. A se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 19 mars 2007 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement du 12 mai 2005 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1994 et 1995 ;
Considérant qu’aux termes de l’article 28 du code général des impôts : Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété ; qu’aux termes de l’article 29 du même code, dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : (…) le revenu brut des immeubles ou parties d’immeubles donnés en location est constitué par le montant des recettes brutes perçues par le propriétaire, augmenté du montant des dépenses incombant normalement à ce dernier et mises par les conventions à la charge des locataires et diminué du montant des dépenses supportées par le propriétaire pour le compte des locataires. Les subventions et indemnités destinées à financer des charges déductibles sont comprises dans le revenu brut (…) ; qu’il résulte de ces dispositions que seules les recettes perçues par le propriétaire ou l’usufruitier trouvant leur source dans la propriété ou l’usufruit de l’immeuble ainsi que les subventions et les indemnités destinées à financer des charges déductibles de l’immeuble doivent être comprises dans le revenu brut foncier ; qu’il résulte de l’instruction que M. A était propriétaire de 95 % du capital de la SARL Saint-Hilaire Parfums Beauté, et gérant de la SCI Saint-Hilaire dont 90 % du capital était détenu par Mme C, née B ; que la SCI Saint-Hilaire a contracté un prêt auprès du Crédit du Nord, pour lequel M. A s’est personnellement porté caution, en vue d’acquérir les locaux donnés en location à la SARL Saint-Hilaire Parfums Beauté ; qu’à la suite du défaut de paiement des loyers par la SARL, M. A a effectué au titre des années 1993, 1994 et 1995 des versements sur les comptes bancaires de la SCI Saint-Hilaire afin de lui permettre de faire face aux échéances de l’emprunt contracté par celle-ci pour l’acquisition des locaux ; que l’aide apportée par M. A pour permettre à la SCI Saint Hilaire de faire face à ses engagements ne peut être qualifiée ni de revenu tiré de la propriété de l’immeuble ni de subvention ou indemnité au sens de l’article 29 précité du code général des impôts ; qu’elle n’a donc pas à être incluse dans le revenu brut foncier de l’immeuble ; que, dès lors, la cour a commis une erreur de droit en jugeant que les sommes perçues par la SCI devaient être comprises dans le revenu brut de l’immeuble imposable, compris dans les revenus imposables du foyer fiscal de M. et Mme C ; que, par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, les sommes versées à la SCI Saint-Hilaire par M. A n’ont pas à être comprises dans le revenu brut de l’immeuble de la SCI et ne peuvent être prises en compte pour déterminer le revenu net foncier de la SCI, imposable, pour leur quote-part, au nom de M. et Mme C ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que M. A est fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Melun a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1994 et 1995 ;
Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 19 mars 2007 et le jugement du tribunal administratif de Melun du 12 mai 2005 sont annulés.
Article 2 : M. A est déchargé des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1994 et 1995.
Article 3 : L’Etat versera à M. A une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Bernard A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat.