Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société F.B. Immobilier a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015. Par un jugement n° 1701420 du 30 novembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a fait droit à sa demande.
Par un arrêt n° 18LY01019 du 7 mai 2019, la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel formé par le ministre de l’action et des comptes publics contre ce jugement.
Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés le 3 juillet 2019 et le 16 juillet 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre de l’action et des comptes publics demande au Conseil d’Etat d’annuler cet arrêt.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;
– la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 ;
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes,
– les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinie, avocat de la société F.B. Immobilier;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société F.B. Immobilier, qui exerce une activité de marchand de biens, a procédé, au cours des années 2013 à 2015, à la cession de sept terrains à bâtir issus de la division parcellaire de trois ensembles immobiliers constitués, pour chacun, d’une maison à usage d’habitation et de son terrain d’assiette, acquis entre 2012 et 2014. A l’issue d’une vérification de sa comptabilité, la société s’est vue réclamer des rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant de la remise en cause du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge qu’elle avait appliqué à ces opérations. Par jugement du 30 novembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a prononcé la décharge de ces impositions. Le ministre de l’action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 7 mai 2019 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel qu’il avait formé contre ce jugement.
2. Le I de l’article 257 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige, issue de l’article 16 de la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, prévoit que les opérations concourant à la production ou à la livraison d’immeubles, lesquelles comprennent les livraisons à titre onéreux de terrains à bâtir, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. En vertu du 2 du b de l’article 266 du même code, l’assiette de la taxe est en principe constituée par le prix de cession.
3. L’article 392 de la directive 2006/112/CE du 20 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée dispose toutefois que : » Les États membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n’a pas eu droit à déduction à l’occasion de l’acquisition, la base d’imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d’achat « . L’article 268 du code général des impôts, pris pour la transposition de ces dispositions, prévoit, dans sa rédaction également issue de l’article 16 de la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, que : » S’agissant de la livraison d’un terrain à bâtir (…), si l’acquisition par le cédant n’a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, la base d’imposition est constituée par la différence entre : / 1° D’une part, le prix exprimé et les charges qui s’y ajoutent ; / 2° D’autre part, selon le cas : / – soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l’acquisition du terrain(…) ; / – soit la valeur nominale des actions ou parts reçues en contrepartie des apports en nature qu’il a effectués. « .
4. Il résulte de ces dernières dispositions, lues à la lumière de celles de la directive dont elles ont pour objet d’assurer la transposition, que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient s’appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s’appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d’un terrain bâti.
5. Il suit de là que la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en jugeant qu’il résultait des dispositions des articles 268 du code général des impôts et 392 de la directive du 28 novembre 2006 que le bénéfice du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge était subordonné à la seule condition que l’acquisition du bien cédé n’ait pas ouvert droit à déduction de la taxe et en jugeant sans incidence sur sa mise en oeuvre la circonstance que les caractéristiques physiques et la qualification du bien en cause aient été modifiées entre son acquisition et sa vente.
6. Par suite, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’autre moyen du pourvoi et sans qu’il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l’Union européenne d’une question préjudicielle, le ministre de l’action et des comptes publics est fondé à demander l’annulation de l’arrêt qu’il attaque.
7. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt du 7 mai 2019 de la cour administrative d’appel de Lyon est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Lyon.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société F.B. Immobilier au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l’économie, des finances et de la relance et à la société F.B. Immobilier.
ECLI:FR:CECHS:2021:432224.20210609