Conseil d’Etat, 9 / 7 SSR, du 5 février 1988, 55899, inédit au recueil Lebon

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Conseil d’Etat, 9 / 7 SSR, du 5 février 1988, 55899, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête enregistrée le 26 décembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat, présentée par M. Jean-Pierre X…, demeurant …, et tendant à ce que le Conseil d’Etat :

1° annule un jugement du 11 octobre 1983 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande en décharge des compléments d’impôt sur le revenu et de majoration exceptionnelle qui ont été mis à sa charge respectivement au titre des années 1970, 1971, 1972 et 1973 et au titre de l’année 1973 dans les rôles de la commune d’Issoire ;

2° lui accorde les décharges demandées,

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu la loi du 12 juillet 1965 ;

Vu l’ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;

Vu la loi du 30 décembre 1977 ;

Après avoir entendu :

– le rapport de M. d’ Harcourt, Conseiller d’Etat,

– les conclusions de M. Le Roy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’à la suite de la vérification de la comptabilité dont la société anonyme « WASSMER-INDUSTRIE » a fait l’objet, l’administration a réintégré dans les revenus imposables de M. X…, son président-directeur général, d’une part, une fraction des indemnités forfaitaires pour frais d’emploi, d’un montant de 6 120 F pour l’année 1970 et de 8 874 F pour l’année 1971, d’autre part, des avantages en nature correspondant à la disposition d’un logement, évalués à 3 600 F pour l’année 1971, 7 000 F pour l’année 1972, 8 000 F pour l’année 1973, ainsi que la disposition d’une voiture pour une somme évaluée à 3 000 F pour l’année 1971, 5 000 F pour l’année 1972 et 6 000 F pour l’année 1973 ; que ces avantages en nature ont été regardés par l’administration comme constituant, en premier lieu, des suppléments de salaire imposables en vertu des dispositions de l’article 82 du code général des impôts jusqu’au 28 février 1972, date à laquelle M. X… a cessé d’exercer ses fonctions, et, en second lieu, postérieurement à cette date, des revenus distribués au sens de l’article 109 du même code ;

Sur la réintégration des indemnités pour frais d’emploi :

Considérant qu’aux termes de l’article 81 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d’imposition 1970 et 1971 : « Sont affranchis de l’impôt : 1 – Les allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l’emploi et effectivement utilisées conformément à leur objet ; – 1 bis a. Les indemnités ou allocations forfaitaires pour frais versées aux dirigeants de société s’il est justifié : – d’une part, qu’elles correspondent à des frais inhérents à la fonction ou à l’emploi dont le montant n’est pas couvert par la déduction forfaitaire de 10 % prévue à l’article 83 ; – d’autre part, qu’elles sont utilisées conformément à leur objet ; b. Ces dispositions sont applicables : 1. Dans les sociétés anonymes : – au président du conseil d’administration ; – au directeur général … » ; qu’en vertu de ces dispositions, le contribuable n’est admis à déduire de ses revenus les allocations forfaitaires qu’il reçoit pour faire face à ses frais professionnels qu’à condition d’établir que ces allocations ont été utilisées conformément à leur objet ;

Considérant que, pour les années 1970 et 1971, M. X… a reçu de la société « WASSMER-AVIATION » des indemnités forfaitaires pour frais d’un montant respectivement de 17 000 F et 24 650 F ; qu’il est constant qu’il n’a fourni à l’administration que des justifications incomplètes sur la destination de ces sommes et que l’administration n’a, toutefois, réintégré dans les bases d’imposition que la fraction susindiquée desdites indemnités ; que, pour contester les réintégrations partielles ainsi faites, M. X… se borne à faire état de réceptions à son domicile qu’aurait exigées l’exercice de ses fonctions tant de président-directeur général de la société que de directeur commercial et de pilote d’essais, sans donner de précisions et de justifications sur la date des réceptions et l’identité des personnes reçues ; que, si M. X… fait valoir que ses successeurs à la tête de la société « WASSMER AVIATION » ont refusé de le laisser accéder aux pièces justificatives qui se trouveraient dans les locaux de ladite société, cette situation ne le dispense pas, devant le juge de l’impôt, de satisfaire à l’obligation de produire les justifications prévues par la loi ; que, par suite, M. X… ne justifie pas qu’il a utilisé conformément à leur objet, pour la fraction non admise, lesdites indemnités ;

Sur la réintégration des avantages en nature :

En ce qui concerne la période antérieure au 28 février 1972 :

Considérant qu’aux termes de l’article 82 du code général des impôts : « Pour la détermination des bases d’imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés en sus des traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères proprement dits … » ;

Considérant que l’administration a suivi l’avis émis le 28 avril 1976 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires en ce qui concerne l’imposition dans la catégorie des traitements et salaires de l’avantage en nature constitué par la mise à la disposition de M. X…, au cours de l’année 1971 et de la période comprise entre le 1er janvier et le 28 février 1972, d’une part, d’un véhicule automobile, d’autre part, d’un logement d’une superficie de 100 m2 ; que, par suite, il appartient au contribuable d’apporter sur ces points la preuve de l’exagération des bases d’imposition ;

Considérant, en premier lieu, que M. X…, qui disposait alors également d’un véhicule automobile personnel, établit que celui que la société a mis à sa disposition était utilisé exclusivement pour des besoins professionnels et qu’ainsi c’est à tort que l’administration a réintégré de ce chef dans ses bases d’imposition les sommes de 3 000 F au titre de l’année 1971 et de 834 F au titre des deux premiers mois de l’année 1972 ;

Considérant, en second lieu, que le requérant, qui ne conteste ni le principe de l’imposition dans la catégorie des traitements et salaires de l’avantage constitué par le logement dont s’agit, ni l’évaluation à 3 600 F du montant de cet avantage retenu par l’administration pour l’année 1971, établit qu’eu égard notamment aux sujétions inhérentes à la situation dudit logement dans l’enceinte de l’usine, l’évaluation de l’avantage dont il a bénéficié doit être ramené de 1 166 F à 666 F pour la période comprise entre le 1er janvier et le 28 février 1972 ;

En ce qui concerne la période postérieure au 28 février 1972 :

Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts : « 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1°) Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2°) Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. Les sommes imposables sont déterminées pour chaque période retenue pour l’établissement de l’impôt sur les sociétés par la comparaison des bilans de clôture de ladite période et de la période précédente selon des modalités fixées par décret en Conseil d’Etat … » ;

Considérant que les avantages en nature susmentionnés ont été, pour la période postérieure à la cessation des activités de M. X… dans l’entreprise, regardés par l’administration comme des revenus de capitaux mobiliers imposables sur le fondement des dispositions du 1 de l’article 109 précité du code et réintégrées dans les revenus imposables de M. X… conformément à l’avis émis sur ce point par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, laquelle était compétente, en vertu des dispositions des articles 29 et 32 de la loi n° 65-566 du 12 juillet 1965, pour se prononcer sur la valeur desdits avantages ; qu’il incombe, dès lors, au requérant d’apporter la preuve du caractère exagéré des bases d’imposition ; que, compte tenu des éléments d’appréciation qu’il fournit, M. X… doit être regardé comme apportant la preuve que, d’une part, la valeur de l’avantage constitué par la mise à disposition du logement n’est pas supérieure à 3 334 F pour les dix derniers mois de l’année 1972 et à 4 400 F pour l’année 1973 et, d’autre part, que l’avantage constitué par la disposition de la voiture automobile doit être évalué respectivement à 4 000 F et 5 000 F pour les mêmes périodes et années ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. X… est seulement fondé à soutenir que c’est à tort que l’administration a réintégré dans les bases d’imposition, au total, les sommes de 3 000 F au titre de l’année 1971, de 4 666 F au titre de l’année 1972 et de 4 600 F au titre de l’année 1973, et à demander la réformation en ce sens du jugement attaqué du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

Article 1er : Les bases de l’imposition supplémentaireà l’impôt sur le revenu auxquelles M. X… a été assujetti au titredes années 1971, 1972 et 1973 sont réduites respectivement de 3 000 F, 4 666 F et 4 600 F.

Article 2 : Il est accordé à M. X… décharge de la différence entre les droits et intérêts de retard qui lui ont été assignés en matière d’impôt sur le revenu et en matière de majoration exceptionnelle respectivement au titre des années 1971, 1972 et 1973 et au titre de l’année 1973 et le montant de ceux qui résultent de l’article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 11 octobre 1983 est réformé en ce qu’il ade contraire à la présente décision ;

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X… est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X… et au ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.


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