Conseil d’État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 13/07/2006, 271205

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Conseil d’État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 13/07/2006, 271205

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le recours, enregistré le 13 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 26 mai 2004 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes, faisant partiellement droit à la requête de la SA Polyclinique de Keraudren, venant aux droits de la SA Clinique Saint-Louis, a, d’une part, annulé le jugement du 25 mai 2000 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés qu’elle a acquitté au titre de l’année 1990 à raison de la réintégration dans son bénéfice imposable de la perte sur exercices antérieurs résultant de la transformation en subvention de prêts accordés au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction et, d’autre part, prononcé la décharge des cotisations litigieuses ;

2°) statuant au fond, de remettre les impositions litigieuses à la charge de la SA Polyclinique de Keraudren ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Thomas Andrieu, Auditeur,

– les observations de la SCP Le Griel, avocat de la SA Polyclinique de Keraudren,

– les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SA Clinique Saint-Louis a, par une décision de l’assemblée générale des actionnaires en date du 31 décembre 1990, décidé la transformation en subventions des sommes versées de 1981 à 1990 sous la forme de prêts sans intérêt au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction prévue par les articles L. 313-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation ; qu’elle a en conséquence déduit de ses résultats de l’exercice clos à cette même date l’intégralité des montants correspondants qu’elle a portés dans sa comptabilité en pertes sur exercices antérieurs ; que, par un jugement du 25 mai 2000, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de la société tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l’exercice clos le 31 décembre 1990, à raison de la réintégration dans son bénéfice imposable de cette perte ; que, par un arrêt du 26 mai 2004, la cour administrative d’appel de Nantes, faisant droit à la requête de la SA Polyclinique de Keraudren, venue aux droits de la SA Clinique Saint-Louis, a annulé ce jugement et prononcé la décharge des impositions litigieuses ; que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt de la cour ;

Sur la régularité de l’arrêt attaqué :

Considérant qu’aux termes de l’article 39 quinquies du code général des impôts : L’aide apportée à fonds perdus aux sociétés d’habitation à loyer modéré, aux sociétés de crédit immobilier et aux sociétés ou organismes ayant pour objet la construction d’immeubles d’habitation et dont la liste est fixée par décrets peut être portée au compte des frais généraux, dans des conditions qui sont également fixées par décret ; que ces conditions sont définies aux articles 41 A à 41 D de l’annexe III à ce code ; qu’aux termes du 2° de l’article 41 B de cette annexe : L’entreprise versante doit perdre complètement et définitivement tout droit sur les sommes versées ;

Considérant que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE soutient qu’en relevant que l’administration ne soutenait pas que les prescriptions des articles 41 A à 41 D de l’annexe III au code général des impôts auraient été méconnues, alors qu’il ressort des écritures d’appel que l’administration avait évoqué une violation des dispositions de l’article 41 B-2° de l’annexe susmentionnée, la cour administrative d’appel de Nantes a dénaturé les écritures de l’administration et omis partiellement d’y répondre ; qu’il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que c’est après avoir expressément écarté le moyen que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE tirait d’une méconnaissance des dispositions de l’article 41 B-2° de l’annexe III au code général des impôts que la cour administrative d’appel de Nantes a relevé qu’il ne soutenait pas que les prescriptions des articles 41 A à 41 D de cette annexe auraient par ailleurs été méconnues ; qu’ainsi, le moyen du ministre ne peut qu’être écarté ;

Sur le bien-fondé de l’arrêt attaqué :

Considérant qu’il résulte des dispositions précitées de l’article 39 quinquies du code général des impôts que les prêts accordés au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction peuvent, par une décision de gestion qui ne modifie pas les écritures comptables des exercices antérieurs, être transformés en subventions, sous réserve que l’aide ainsi apportée respecte les conditions fixées aux articles 41 A à 41 D de l’annexe III au code général des impôts ; que si les dispositions précitées de l’article 41 B-2° de l’annexe III au code général des impôts visent à garantir que le versement des sommes dont la déduction est demandée sur le fondement de l’article 39 quinquies du même code soit inconditionnel et ne soit par suite assorti d’aucune condition suspensive ou résolutoire, elles n’ont ni pour objet, ni pour effet de soumettre la déductibilité de ces sommes à leur notification, voire même à leur acceptation par leur bénéficiaire ; que, dès lors, la cour n’a commis aucune erreur de droit en jugeant que la circonstance, non contestée, que ce n’est que les 25 avril et 13 mai 1991 que l’organisme débiteur a, respectivement, eu connaissance de la délibération du conseil d’administration et produit les reçus correspondants, était sans incidence sur le droit qu’avait la société de déduire les créances ainsi abandonnées par une décision du conseil d’administration du 31 décembre 1990 du résultat de l’exercice clos le même jour ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE doit être rejeté ; qu’il y a lieu, sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative d’accorder à la SA Polyclinique de Keraudren la somme de 2 500 euros qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

————–

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : L’Etat versera la somme de 2 500 euros à la SA Polyclinique de Keraudren.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE et à la SA Polyclinique de Keraudren.


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