Conseil d’Etat, 5 / 3 SSR, du 23 septembre 1998, 186399, inédit au recueil Lebon

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Conseil d’Etat, 5 / 3 SSR, du 23 septembre 1998, 186399, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mars 1997 et 21 juillet 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SOCIETE SERC FUN RADIO, dont le siège est … ; la SOCIETE SERC FUN RADIO demande au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 1er octobre 1996 par laquelle le Conseil supérieur de l’audiovisuel a partiellement rejeté sa demande d’autorisation en vue de l’exploitation de services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne en région Champagne-Ardennes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 30 septembre 1986 modifiée ;

Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

– le rapport de M. Thiellay, Auditeur,

– les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SOCIETE SERCFUN RADIO,

– les conclusions de M. Salat-Baroux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE SERC FUN RADIO demande l’annulation de la décision du 1er octobre 1996 par laquelle le Conseil supérieur de l’audiovisuel a partiellement rejeté sa demande d’autorisation en vue de l’exploitation de services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne en région Champagne-Ardennes dans les zones de Chaumont, Nogent-Romilly, Rethel, Saint-Dizier, Joinville et Sainte-Menehould ;

Sur la légalité externe :

Considérant qu’aux termes de l’article 32 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée : « Les refus d’autorisation sont notifiés aux candidats et motivés » ; que le Conseil supérieur de l’audiovisuel a invoqué, pour chaque zone, soit l’intérêt du projet pour le public, soit l’impératif du pluralisme de l’expression des courants socio-culturels, soit la diversification des opérateurs, soit l’existence de projets appuyés sur une expérience acquise dans ces zones ; que les tableaux, extraits du procès-verbal de la séance au cours de laquelle cette décision a été prise, et joints à la lettre notifiant le rejet de candidature, permettent d’identifier ceux des critères énumérés à l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée sur lesquels le Conseil supérieur de l’audiovisuel s’est particulièrement fondé pour rejeter la demande et précisent les éléments de fait que le Conseil a retenus pour estimer que la demande devait être écartée ; qu’ainsi la décision attaquée satisfait à l’obligation faite par l’article 32 susvisé au Conseil supérieur de l’audiovisuel de motiver son refus d’autorisation ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, le Conseil supérieur de l’audiovisuel « accorde des autorisations en appréciant l’intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socio-culturels, la diversification des opérateurs et la nécessité d’éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence. Il tient également compte : 1° de l’expérience acquise par le candidat dans les activités de communication … » ;

En ce qui concerne les zones de Sainte-Menehould et Nogent-Romilly :

Considérant que si le Conseil supérieur de l’audiovisuel, en vertu des dispositions précitées de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, peut tenir compte, lorsqu’il accorde une autorisation, de l’expérience acquise par le candidat dans les activités de communication, il ne peut légalement déduire de la seule circonstance qu’un candidat n’est pas présent dans les zones concernées qu’il ne satisfait pas au critère précité, qui est relatif au professionnalisme des opérateurs, ni retenir la candidature d’un autre opérateur pour le seul motif que ce dernier est déjà présent dans cette zone ; qu’il ressort des pièces du dossier que le Conseil supérieur de l’audiovisuel, pour rejeter la candidature de la société requérante dans les deux zones précitées, a opposé à celle-ci, non présente sur lesdites zones, l’expérience qu’avaient acquise dans ces zones d’autres opérateurs, dont la candidature a été retenue ; que ce motif est entaché d’erreur de droit ; qu’ainsi, la société requérante est fondée à demander l’annulation de la décision attaquée en tant qu’elle a rejeté sa candidature pour les zones de Sainte-Menehould et Nogent-Romilly ;

En ce qui concerne les autres zones :

Considérant que si la requérante soutient que son projet méritait d’être retenu pour la zone de Saint-Dizier, il ne ressort pas des pièces du dossier qu’il répondait aux critères retenus par le Conseil d’une manière plus satisfaisante que le projet de « Radio Nostalgie », qui était également candidate ; qu’elle n’est dès lors pas fondée à soutenir qu’en lui refusant l’autorisation sollicitée, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a fait pour cette zone une inexacte application des dispositions précitées de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée ;

Considérant, en ce qui concerne la zone de Chaumont, que si la société requérante soutient que les autorisations d’émettre dont elle disposait dans les zones de Charleville, Bar-sur-Aube, Troyes, Châlons, Epernay et Reims de la région Champagne-Ardennes ont été annulées par le Conseil d’Etat statuant au Contentieux, ces autorisations étaient antérieures à la décision n° 96-690 du 1er octobre 1996 par laquelle le Conseil supérieur de l’audiovisuel l’a autorisée à émettre dans ces six zones ; qu’ainsi le Conseil supérieur de l’audiovisuel n’a pas commis d’erreur de fait en faisant notamment valoir, pour écarter sa candidature dans la zone de Chaumont, la circonstance qu’elle était déjà autorisée à émettre dans six zones de la région Champagne-Ardennes ; que, par ailleurs, le Conseil supérieur de l’audiovisuel pouvait légalement, à l’appui de sa décision autorisant « Montmartre FM », Rires et chansons, RTL 2 et Skyrock, retenir le motif tiré de l’équilibre des opérateurs et des programmes sur la région, lequel se rattache au critère de sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socio-culturels fixés à l’article 29 précité de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, dont il n’a pas été fait une inexacte application ;

Considérant, en ce qui concerne la zone de Joinville, que le Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui pouvait légalement se référer au critère susmentionné de sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socio-culturels, n’a pas fait une inexacte application des dispositions dudit article 29 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, en retenant la candidature de l’association Cordier X… Etienne, « Radio C.B.E. » ;

Considérant, en ce qui concerne la zone de Rethel, que le Conseil supérieur de l’audiovisuel n’a entaché sa décision d’aucune erreur de droit, ni d’aucune erreur de fait, en se référant au critère de sauvegarde du pluralisme et de diversification des opérateurs et en retenant les candidatures d’ »Europe 1″ et de « Fun Radio » ;

Considérant que la requérante ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir des dispositions de l’article 28 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée dès lors que celles-ci sont relatives à la convention fixant les règles particulières applicables à un service de radiodiffusion sonore bénéficiant d’une autorisation d’usage des fréquences ;

Considérant que le moyen tiré de ce que le Conseil supérieur de l’audiovisuel aurait méconnu les principes « d’égalité de traitement » et de « libre choix » est dépourvu de précisions suffisantes permettant d’en apprécier la portée ;

Considérant que le détournement de pouvoir allégué n’est pas établi ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE SERC FUN RADIO n’est fondée à demander l’annulation de la décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel susvisée en date du 1er octobre 1996 qu’en tant qu’elle concerne les zones de Sainte-Menehould et Nogent-Romilly ;

Article 1er : La décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel en date du 1er octobre 1996 est annulée en tant qu’elle concerne les zones de Sainte-Menehould et Nogent-Romilly.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE SERC FUN RADIO est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SERC FUN RADIO, au Conseil supérieur de l’audiovisuel, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.


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