Conseil d’État, 3ème / 8ème SSR, 28/05/2014, 362172, Inédit au recueil Lebon

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Conseil d’État, 3ème / 8ème SSR, 28/05/2014, 362172, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 août et 22 novembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. et Mme B…A…, demeurant… ; M. et Mme A…demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt n° 11LY02962 du 26 juin 2012 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel qu’ils ont interjeté du jugement du 18 octobre 2011 du tribunal administratif de Grenoble rejetant leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2004 ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit leur appel ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Anne Egerszegi, maître des requêtes,

– les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. et Mme A…;

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, dans le cadre d’une opération globale de cession, la SAS JFP Gestion, son dirigeant et actionnaire unique, M. B… A…, et les enfants de celui-ci, ont, en février 2004, cédé, par l’intermédiaire des cabinets TCI et IXA, les titres de la société César Vuarchex qu’ils détenaient ; que la société JFP Gestion a fait l’objet d’une vérification de comptabilité à l’issue de laquelle l’administration fiscale a remis en cause la déduction de ses résultats de l’exercice clos le 31 décembre 2004 d’une partie des commissions facturées par les cabinets TCI et IXA, au motif que cette part aurait dû être supportée par M. A…et les membres de sa famille à raison de la cession des titres de la société César Vuarchex qu’ils détenaient personnellement ; que la prise en charge de ces frais par la société a été regardée comme une distribution, sur le fondement du 2° du 1 de l’article 109 du code général des impôts pour M. B…A…, et sur le fondement du c de l’article 111 du même code pour ses enfants ; que M. et Mme B…A…se pourvoient en cassation contre l’arrêt du 26 juin 2012 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel qu’ils ont interjeté du jugement du 18 octobre 2011 du tribunal administratif de Grenoble rejetant leur demande tendant à la décharge des compléments d’impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes auxquels ils ont été assujettis au titre de l’année 2004 du fait de ces redressements ;

Sur l’arrêt attaqué en tant qu’il concerne les enfants mineurs ou rattachés au foyer fiscal :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 111 du code général des impôts :  » Sont notamment considérés comme revenus distribués : (…) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (…)  » ; que lorsqu’une société a pris en charge des dépenses incombant normalement à un tiers sans que la comptabilisation de cette opération ne révèle, par elle-même, l’octroi d’un avantage, il appartient à l’administration, si elle entend faire application des dispositions précitées du c de l’article 111 du code général des impôts pour imposer, dans les mains du tiers, cette somme, d’établir, d’une part, que la prise en charge de cette dépense ne comportait pas de contrepartie pour la société, et d’autre part, qu’il existait une intention, pour celle-ci, d’octroyer, et pour le tiers, de recevoir, une libéralité ;

3. Considérant, par suite, qu’en regardant la prise en charge par la société JFP Gestion des frais d’intermédiation et d’avocat afférents à la cession des titres de la société César Vuarchex détenus par les enfants mineurs ou rattachés au foyer fiscal de M. B…A…, comme une distribution occulte au seul motif de l’absence de contrepartie avérée pour la société JFP Gestion à l’octroi de cet avantage, sans rechercher l’existence d’une intention libérale, la cour a fait une inexacte application des dispositions du c de l’article 111 du code général des impôts ;

Sur l’arrêt attaqué en tant qu’il concerne M.A… :

4. Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts : « 1. Sont considérés comme revenus distribués : (…) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. »;

5. Considérant, en premier lieu, qu’après avoir relevé le nombre de titres de la société César Vuarchex respectivement détenus par la société JFP Gestion et par M. A…et sa famille, la cour n’a pas entaché sa décision d’insuffisance de motivation ou d’erreur de droit en jugeant que le montant de frais facturé à la société, qui n’était pas proportionnel au nombre de titres qu’elle détenait, intégrait la part des frais afférente aux titres cédés par M. A… et ses enfants ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que la cour a constaté l’absence de toute contrepartie avérée pour la société à la prise en charge de ces frais et jugé que, dans ces conditions, l’octroi d’un tel avantage était constitutif d’un acte anormal de gestion, alors même que le montant de ces frais n’était pas excessif ; qu’en statuant ainsi, la cour, qui n’a pas commis d’erreur de droit au regard de la charge de la preuve, a exactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu’en écartant comme inopérante la circonstance que les cabinets TCI et IXA auraient entendu faire un geste commercial en faveur de M. A…en ne lui facturant pas les frais d’intermédiation et d’avocat à raison des titres que lui et sa famille détenaient, dès lors que la société JFP Gestion avait pris en charge, en leur lieu et place, lesdits frais, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ;

8. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A…sont seulement fondés à demander l’annulation de l’arrêt attaqué en tant qu’il a statué sur le redressement notifié au titre de leurs enfants mineurs ou rattachés à leur foyer fiscal ainsi que sur les pénalités pour mauvaise foi qui leur ont été appliquées, dès lors qu’il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que l’administration, pour appliquer ces majorations, a porté une appréciation d’ensemble sur les rectifications qui leur ont été notifiées ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. et MmeA…, au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

————–

Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 26 juin 2012 est annulé en tant qu’il a statué sur le redressement notifié au titre des enfants mineurs ou rattachés au foyer fiscal de M. et Mme A…ainsi que sur les pénalités pour mauvaise foi.

Article 2 : L’affaire est renvoyée dans les limites de la cassation énoncée ci-dessus à la cour administrative d’appel de Lyon.

Article 3 : L’Etat versera 1 500 euros à M. et Mme A…au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. et Mme A…est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B…A…et au ministre des finances et des comptes publics.

ECLI:FR:CESSR:2014:362172.20140528


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