Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 15 et 18 décembre 2021 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d’Etat, la SAS MEI Partners, la société europénne Banque-Assurance européenne des droits fondamentaux et M. B… A… demandent au juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative :
1°) d’ordonner l’interdiction de toutes formes de représailles, y compris les menaces et les tentatives de représailles, exercées contre M. B… A… et les sociétés dont il est actionnaire ou dirigeant, en raison du signalement des aides d’Etat octroyées aux entités du groupe Bpifrance ;
2°) d’enjoindre à l’Etat de justifier, sous astreinte, que l’absence de paiement de leur indemnité de gestion d’affaire est sans lien avec ce signalement ;
3°) de prononcer une astreinte de 3 500 000 euros par jour, exigible et liquidable à compter du 17 décembre 2021, s’il n’est rien justifié ou si la justification apportée ne permet pas d’écarter l’existence de représailles ;
4°) de liquider une partie de l’astreinte pour un montant de 3 500 000 euros, si durant l’instruction de leur requête, aucune justification n’est avancée par l’Etat ou si la justification apportée ne permet pas d’écarter l’existence de représailles ;
5°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
– le Conseil d’Etat est compétent en premier et dernier ressort pour connaître de leur requête ;
– ils justifient d’un intérêt à agir ;
– la condition d’urgence est satisfaite en ce que, d’une part, aucune disposition nationale de transposition de la directive (UE) 2019/1937 n’a été adoptée alors que la date d’échéance de l’obligation de transposition de cette directive était le 17 décembre 2021 et, d’autre part, les représailles dont ils ont fait l’objet préjudicient à leurs intérêts financiers ;
– les mesures demandées présentent une utilité certaine dès lors qu’elles les protègent contre les effets préjudiciables de représailles mises en œuvres à leur encontre, eu égard au fait que les mesures de protection prévues par la directive (UE) 2019/317 pour les auteurs de signalement des violations du droit de l’Union leur sont applicables ;
– le prononcé des mesures sollicitées ne fait obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative en ce que, d’une part, le retard pris dans la transposition d’une directive ne se rattache à l’exécution d’aucune décision administrative et, d’autre part, les mesures de protection prévues par la directive (UE) 2019/317 sont applicables sans qu’une consécration juridictionnelle de la gestion d’affaires et des violations du droit de l’Union soit nécessaire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– la Constitution ;
– la directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union ;
– le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l’article L. 521-3 du code de justice administrative, » En cas d’urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative « . En vertu de l’article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d’urgence n’est pas remplie ou lorsqu’il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu’elle est irrecevable ou qu’elle est mal fondée.
2. La société MEI Partners et autres ont demandé l’annulation de décisions implicites qui seraient nées du silence gardé par le ministre de l’économie, des finances et de la relance sur ses demandes à ce ministre. Mentionnant la crainte de » représailles » qui pourraient être exercées à l’encontre des requérants, les mesures utiles consisteraient en l’injonction faite aux pouvoirs publics de faire bénéficier les requérants des mesures prévues par la directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019, de nature à assurer leur protection comme lanceurs d’alerte, faute que cette directive ait été transposée en temps utile dans le droit interne.
3. Les requérants, qui n’indiquent pas ceux de leurs agissements susceptibles d’être regardés comme conduisant à les qualifier de lanceurs d’alerte, ne précisent pas plus la situation qui, par son urgence, qui n’est en rien caractérisée, pourrait justifier de mesures de protection, dont la nature n’est pas exposée, interdisant en tout état de cause d’examiner leur utilité. Dès lors, faute que les conditions posées par les dispositions de l’article L. 521-3 du code de justice administrative soient réunies, la demande de la société MEI Partners et autres ne peut qu’être rejetée, sur le fondement de l’article L. 522-3 du même code, ainsi que les conclusions subsidiaires tendant dans cette hypothèse à ce qu’une astreinte soit ordonnée et versée, cette demande n’étant en tout état de cause assortie d’aucune des précisions qui permettraient d’en apprécier la portée.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de la SAS MEI Partners, la société européenne Banque-Assurance européenne des droits fondamentaux et M. A… est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la SAS MEI Partners, première requérante dénommée.
Fait à Paris, le 23 décembre 2021
Signé : Thierry Tuot
ECLI:FR:CEORD:2021:459529.20211223