Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par un mémoire et un nouveau mémoire, enregistrés les 6 juillet et 25 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société Polyanna demande au Conseil d’Etat, en application de l’article 23-5 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l’appui de son pourvoi tendant à l’annulation de l’arrêt n° 18PA01942 et 18PA01944 du 29 janvier 2020 de la cour administrative d’appel de Paris en tant qu’il rejette le surplus de ses conclusions tendant, d’une part, à l’annulation du jugement n° 1600447/1 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en date du 8 mars 2018 en tant qu’il a rejeté partiellement sa demande et, d’autre part, à la décharge, en droits et pénalités, des rappels d’impôt sur les sociétés, de contribution sociale additionnelle, de taxe de solidarité sur les services, d’impôt sur le revenu des valeurs mobilières, de contribution exceptionnelle de solidarité et de centimes additionnels auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 2011, 31 décembre 2011 et 31 décembre 2012, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles 536 et 536 bis du code des impôts de Nouvelle-Calédonie dans leur rédaction applicable au litige.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 34 et 61-1 ;
– l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
– la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 ;
– le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ;
– le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Bruno Delsol, Conseiller d’Etat,
– les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société Polyanna et à la SCP Buk Lament – Robillot, avocat du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l’article 23-5 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : » Le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (…) à l’occasion d’une instance devant le Conseil d’Etat (…) « . Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
2. Aux termes du deuxième alinéa de l’article 107 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : » Les dispositions d’une loi du pays peuvent faire l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité, qui obéit aux règles définies par les articles 23-1 à 23-12 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. »
3. Aux termes de l’article 536 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, dans sa rédaction applicable au présent litige : » Lorsqu’une société par actions ou à responsabilité limitée a reçu, en représentation de versements ou d’apports en nature ou en numéraire par elle faits : / a) à une autre société par actions, des actions ou des obligations nominatives de cette dernière société, / b) à une autre société à responsabilité limitée, des parts d’intérêts de cette dernière société ou des titres de créance, / les dividendes et intérêts distribués par la première société sont, pour chaque exercice, exonérés de l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières, dans la mesure du produit de ces actions, obligations et parts d’intérêts ou titres de créance touché par elle au cours de l’exercice qui ont déjà supporté l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières à condition que ces actions, obligations et parts d’intérêts ou titres de créance soient restés inscrits au nom de la société cédante ( … ) « . Aux termes de l’article 536 bis du même code : » Pour les distributions effectuées à compter du 1er janvier 1993, le bénéfice des dispositions de l’article 536 est transposé de plein droit et sous conditions identiques pour les dividendes issus de participations autres que celles résultant d’apports ou d’augmentations de capital « .
4. Les dispositions contestées, antérieures à la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, qui a créé la catégorie des lois du pays, ne sont pas issues d’une telle loi. Ces dispositions, qui ont un caractère règlementaire, ne sont donc pas au nombre des dispositions législatives visées par l’article 61-1 de la Constitution et l’article 23-5 de l’ordonnance du 7 novembre 1958. Elles ne sont, en conséquence, pas susceptibles de faire l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n’y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Polyanna.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Polyanna et au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre, au ministre de l’économie, des finances et de la relance et au ministre des outre-mer.
ECLI:FR:CECHR:2020:439969.20201002