Congé pour création d’entreprise : 12 janvier 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/15273
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 12 JANVIER 2023

N° 2023/

CM/FP-D

Rôle N° RG 19/15273 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BE6UL

[B] [D] épouse [N]

C/

Société SOCIETE DE DROIT ETRANGER TUNIS-AIR SOCIETE TUNISI ENNE DE L’AIR

Copie exécutoire délivrée

le :

12 JANVIER 2023

à :

Me Karine LE DANVIC, avocat au barreau de NICE

Me Mireille DAMIANO, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NICE en date du 06 Septembre 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 18/00409.

APPELANTE

Madame [B] [D] épouse [N], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Karine LE DANVIC, avocat au barreau de NICE substitué par Me Stephanie FALZONE-SOLER, avocat au barreau d’AVIGNON

INTIMEE

COMPAGNIE AERIENNE TUNIS-AIR, SOCIETE TUNISIENNE DE L’AIR, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Mireille DAMIANO, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Catherine MAILHES, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2023

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Mme [D] (la salariée) a été embauchée à compter du 12 juillet 2005 par la société tunisienne de l’air dite Tunis-Air selon contrat à durée déterminée en qualité d’agent commercial coefficient 160 afin d’assurer le remplacement de Mme [J] en congé maternité et prenant fin automatiquement au retour de cette dernière.

Un second contrat à durée déterminée a été conclu le 13 décembre 2005 à compter du 2 janvier 2006 aux fins de remplacer Mme [J], agent commercial en congé parental du 2 janvier au 31 décembre 2006 et expirant au retour de la salariée remplacée, aux mêmes fonctions et coefficient hiérarchique que précédemment.

Le 27 décembre 2007, le contrat à durée déterminée a été renouvelé jusqu’au retour de Mme [J] pour une durée minimale de huit mois aux fonctions d’agent commercial et au coefficient hiérarchique 168.

Le 2 janvier 2008, un avenant a été conclu et la salariée engagée selon contrat à durée indéterminée aux mêmes conditions.

Au dernier état de la relation de travaille, la salariée occupait le poste d’agent commercial de niveau 3 coefficient 211.

La salariée a été en arrêt maladie à compter du 25 avril 2018.

Le 18 mai 2018, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes de Nice aux fins de reclassification au coefficient 235 et voir la société tunisienne de l’air dite Tunis-Air condamnée à lui verser un rappel de salaire et les congés payés afférents au titre de la reclassification, le rappel de prime d’ancienneté , le rappel d’indemnité légale de licenciement, des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à lui remettre les bulletins de salaire et documents de fin de contrat rectifiés avec astreinte.

La société tunisienne de l’air s’est opposée aux demandes de la salariée et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de celle-ci au versement d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La salariée a été licenciée le 11 décembre 2018 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par jugement du 6 septembre 2019, le conseil de prud’hommes de Nice a :

dit que la société Tunis-Air a rémunéré à sa juste valeur les fonction occupées par Mme [D] et que cette dernière a été remplie de ses droits tout au long de la relation contractuelle avec Tunis-Air ;

débouté Mme [D] de ses demandes,

dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile,

dit que chaque partie conservera à sa charge les dépens et frais qu’elle a engagés dans l’instance.

Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 2 octobre 2019, Mme [D] a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement, en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes tendant à dire que les fonctions qu’elle occupait correspondaient au poste de technicien commercial de niveau 4 coefficient 235, en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes aux fins de condamner la société Tunis-Air au paiement d’une rappel de salaire pour sous-classification, le congés payés afférents, une prime d’ancienneté sur rappel de salaire, un rappel d’indemnité légale de licenciement, des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, en ce qu’il l’a déboutée de sa demande tendant à ordonner à la sociétéTunis-Air de lui remettre les documents sociaux et bulletins de salaire sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter du 30ème jour de la décision à intervenir, à condamner la société Tunis-Air au paiement des intérêts capitalisés au taux légal à compter de la demande en justice, à condamner la société Tunis-Air à la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 26 septembre 2022, Mme [D] demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris en ses dispositions déférées et statuant à nouveau de :

juger irrecevable l’exception de péremption et subsidiairement la rejeter comme étant infondée,

dire et juger que les fonctions qu’elle occupait correspondaient au poste de technicien commercial, niveau 4 coefficient 235,

dire et juger que l’employeur a manqué à ses obligations,

en conséquence,

condamner la société tunisienne de l’air dite Tunis-Air au paiement des sommes suivantes :

17.336,52 euros à titre de rappel de salaire ‘ pour sous classification’,

2.437,95 euros à titre de rappel de prime d’ancienneté,

1.977,47 euros à titre de congés payés su rappel de salaire,

3.453,77 euros à titre de rappel d’indemnité légale de licenciement,

subsidiairement, en cas de classification inférieure, à tout le moins à minima le coefficient 228 de la grille interne,

condamner la société tunisienne de l’air dite Tunis-Air aux rappels de salaires, prime d’ancienneté, congés payés et indemnité de licenciement suivantes : (sic)

Coefficient

Salaire

Déc

2015 à

Déc

2017

à

TOTAL

RAP

Rap

prime

Rap

CONGÉS PAYÉS

Rap indem lict

minimum

Nov 2017

mai 2018

SAL

ancienneté

afférents

228

1872,02

2512,44

1550,28

4062,72

487,5264

455,02,464

1607,821136

228A

1937,54

3691,8

2336,52

6028,32

723,3984

675,17184

1874,933072

2288

2005,36

4912,56

3150,36

8062,92

967,5504

903,04704

2151,421648

228C

2075,55

6175,98

3992,64

10168,62

1220,2344

1138,88544

2437,57224

228 D

2148,19

7483,5

4864,32

12347,82

1481,7384

1382,95584

2733,710992

228 E

2223,38

8836,92

5766,6

14603,52

1752,4224

1635,59424

3040,245584

228 F

2301,19

10237,5

6700,32

16937,82

2032,5384

1897,03584

3357,461392

en tout état de cause,

condamner la société tunisienne de l’air dite Tunis-Air au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

ordonner à la société tunisienne de l’air dite Tunis-Air de lui remettre ses documents sociaux et ses bulletins de salaire rectifiés, incluant les rappels de salaire au titre de la sous-classification et de l’indemnité de licenciement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, à compter du 30ème jour suivant la décision à intervenir, le conseil (sic) se réservant la faculté de liquider l’astreinte,

dire que la créance salariale portera intérêt au taux légal capitalisé à partir de la demande en justice,

condamner la société tunisienne de l’air au paiement de la somme de 4.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le24 mai 2022, la société tunisienne de l’air dite Tunis-Air demande à la cour de :

A titre principal et in limine litis,

dire et juger l’instance périmée depuis le 25 mars 2022, avec toutes conséquences de droit, le jugement de 1ère instance étant alors définitif et revêtu de ‘l’autorité de la force jugée’,

condamner Mme [D] aux entiers frais et dépens de l’instance,

condamner Mme [D] à lui régler la somme de 3.000 euros au titre de ses frais avancés pour assistance et représentation devant la cour d’appel en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire,

dire et jugé non fondé l’appel interjeté par Mme [D],

en conséquence,

confirmer purement et simplement ledit jugement,

dire et juger que les fonctions occupées par Mme [D] correspondaient au poste d’agent de comptoir, niveau III, coefficient 211 pour lesquelles elle avait été embauchée le 2 janvier 2008,

dire et juger que Mme [D] a été remplie de ses droits,

dire que l’employeur n’a pas manqué à ses obligations contractuelles,

en conséquence,

débouter Mme [D] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

à titre reconventionnel,

condamner Mme [D] à régler la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ,

condamner Mme [D] aux entiers frais et dépens de l’instance.

La clôture des débats a été ordonnée le 3 octobre 2022 et l’affaire a été évoquée à l’audience du 17 octobre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la péremption de l’instance d’appel

Au soutien de sa demande de péremption, la compagnie aérienne fait valoir que la salariée a adressé ses premières conclusions d’appelant le 27 décembre 2019 par rpva, que la compagnie a répondu par conclusions du 25 mars 2020 et que depuis cette date, Mme [D] n’a accompli aucune diligence, en sorte que l’instance est périmée depuis le 25 mars 2022 malgré la fixation pour plaider qui est intervenue le 16 mai 2022.

La salariée soutient que seul le conseiller de la mise en état est compétent pour statuer sur les incidents mettant fin à l’instance et que la demande est irrecevable dans les conclusions au fond récapitulatives adressées à la cour. Elle ajoute qu’il s’agit d’une exception de procédure qui doit être soulevée avant tout moyen et avant toute conclusion suivant l’événement qui la fonde et que compte tenu des conclusions au fond de l’intimée notifiées le 24 mai 2022, celle-ci n’est plus recevable à la soulever. Elle précise à titre subsidiaire qu’elle avait demandé la fixation pour plaider selon acte du 2 février 2022 sur rpva.

Par application des dispositions combinées des article 907 et 789 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation le conseiller de la mise en état est jusqu’à son dessaisissement, seul compétent pour statuer sur les incidents mettant fin à l’instance et les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu’ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement de ce juge.

En l’occurrence, la péremption de l’instance été soulevée par l’intimé dans les conclusions au fond devant la cour déposées le 24 mai 2022 au rpva avant le dessaisissement du conseiller de la mise en état, en sorte que cet incident d’instance qui, aux dires de la compagnie a est survenu le 25 mars 2022, avant le dessaisissement du conseiller de la mise en état, est irrecevable devant la cour.

Il sera ajouté au jugement à ce titre.

Sur les demandes principales en paiement de salaire sur la base du coefficient 235 de la convention collective nationale

1- Sur la demande de reclassification au coefficient 235 de la convention collective nationale

La salariée conteste le jugement qui l’a déboutée de sa demande de rappel de salaire sur la base du coefficient 235 à compter du mois de décembre 2015, en faisant valoir qu’elle a été sous classée par rapport aux fonctions réellement exercées et qu’elle a subi une inégalité de traitement.

Elle indique qu’elle a bénéficié du coefficient 160 alors qu’elle remplaçait Mme [J] classée au coefficient 195, qu’en 2005 il lui a été attribué le coefficient 160 qui ne correspondait pas à l’ensemble des tâches qui lui étaient confiées, pas plus que le coefficient 210 qui lui a été attribué en 2014, revendiquant le coefficient 235 attaché à l’emploi de technicien commercial, de 4ème niveau échelon1.

Elle estime rapporter la preuve de sa polyvalence et de l’ensemble des tâches qui lui étaient dévolues par les attestations de collègues versées aux débats ainsi que par la classification supérieure de Mme [J], la salariée qu’elle avait été amenée à remplacer, tant pendant la période de contrat à durée déterminée que, pendant la période de suspension de son contrat de travail en 2011, au cours de laquelle Mme [J] l’avait également remplacée.

Elle ajoute que l’ancienneté de Mme [J] ne justifie nullement la différence de classification dès lors qu’il est prévu à cet égard de verser aux salariés une prime d’ancienneté et que le coefficient n’est attribué qu’en considération des seules tâches exercées.

La compagnie expose que la salariée n’était titulaire d’aucun diplôme à son embauche et n’avait aucune expérience professionnelle et qu’il lui a alors été attribué le coefficient 160 conformément à la classification de la convention collective nationale, même si elle remplaçait Mme [J], mais de façon partielle dans ses attributions, qu’elle a par la suite, en fonction de son expérience, accédé à l’emploi d’agent de comptoir du niveau 2 coefficient 180 en 2008 puis au niveau 3, coefficient 211 au dernier état de sa situation. Elle soutient que la salariée en sa qualité d’agent de comptoir avait pour tâches principales la vente et la réservation de billets et l’accueil de la clientèle mais que tout autre type de doléance était confié à d’autres salariés, que la supervision des vols au départ et des enregistrements sont assurées par le chef d’escale, le représentant et le handler mais pas par l’agent de comptoir, qu’elle n’était pas chargée de la gestion des modifications des réservations, qu’elle effectuait seulement ponctuellement et par roulement entre les agents de comptoir, la préparation des pochettes de vol et le traitement des vols, l’accompagnement de la valise diplomatique.

Il appartient au salarié qui se prévaut d’une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu’il assure effectivement de façon habituelle, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu’il revendique.

Les fonctions réellement exercées, qui sont prises en compte pour déterminer la qualification d’un salarié, sont celles qui correspondent à son activité principale, et non celles qui sont exercées à titre accessoire ou occasionnel.

Selon l’annexe IV relatif à la classification (avenant n°55 du 18 novembre 1996) de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, il était prévu au sein de la filière commerciale, les emplois suivants :

dans la catégorie des ouvriers et employés

au premier niveau hiérarchique, notamment

coef 160 l’emploi d’agent d’accueil, chargé de recevoir le public, de le renseigner, de l’orienter ; Pas d’expérience professionnelle ni de qualification ;

au 2ème niveau qualifié, notamment,

coeff 180, l’agent de réservation 1 qui effectue les opérations relatives à la réservation (ventes par téléphone, passagers individuels, agences de voyage) ; Formation niveau secondaire ;

au 3ème niveau très qualifié,

coeff 195 Agent de réservation 2 qui effectue toutes opérations complexes relatives à la réservation ; Formation niveau bac ; Expérience et autonomie dans le poste ;

coeff 200 Agent de comptoir 2 qui effectue toutes opérations relatives à la délivrance d’un titre de transport (constructions tarifaires) ; Formation niveau bac; Expérience dans  le poste ; Bonne connaissance des procédures et des opérations de constructions tarifaires ;

coeff 220 Agent de contrôle réservation, qui gère la modulation de l’offre en réservation ; Niveau bac ; Expérience du comptoir et de la réservation ;

dans la catégorie des techniciens et agents administratifs

coeff 235 Technicien commercial ; Personnel expérimenté dans les différentes fonctions (réservations, contrôle, ventes) l’amenant, outre la résolution de problèmes complexes, à concevoir des procédures et leurs moyens de mise en oeuvre ; B.T.S. ou D.U.T. ou diplôme spécialisé de même niveau et/ou expérience professionnelle ;

coeff 235 Attaché commercial qui mène une action de vente auprès des personnes ou organismes susceptibles d’utiliser les produits ; B.T.S. ou D.U.T. ou diplôme spécialisé de même niveau et/ou expérience professionnelle ;

coeff 235 Agent de coordination commercial qui anime et/ou assure la coordination des agents de sa spécialité de coefficient hiérarchique inférieur ; Transmet l’information (ascendante et descendante) ; Veille à la bonne application et au respect des règles de sécurité ; Contribue à assurer le perfectionnement technique des agents qu’il anime ; B.T.S., D.U.T. et/ou connaissance professionnelle des métiers intégrant la dimension sécurité.

L’annexe IV a été modifiée par avenant n°91 du 19 mai 2017 en vigueur à compter du 1er janvier 2018 étendu par arrêté du 29 janvier 2019, rénovant la grille de classification en conservant son caractère Parodi illustré par des emplois repères rattachés à des coefficients et mettant en exergue des critères classants précédemment sous-jacents.

Les filières exploitation et commerciale ont été intégrées au sein d’une filière relation clients.

La grille de classification professionnelle s’appuie sur trois critères classants. Pour chacun des niveaux hiérarchiques et des échelons qui les composent, les critères classants correspondent à un degré d’exigence en matière :

‘ de complexité et de technicité de l’activité mise en ‘uvre ;

‘ d’autonomie et d’initiatives, comprises comme la latitude des actions du salarié dans l’organisation de son travail ;

‘ et d’animation et de coordination des activités et/ou des collaborateurs.

Les critères classants sont communs à toutes les filières et ne sont pas hiérarchisés les uns par rapport aux autres.

En effet, les critères classants, en définissant les différents niveaux de compétences requis au sein de chaque échelon de chaque niveau hiérarchique, favorisent l’évolution professionnelle du salarié et élargissent les possibilités de mobilité professionnelle au sein d’une même filière ou inter filières.

Au sein de la filière relation clients, il est ainsi prévu :

au 3ème niveau très qualifié, ouvriers et employés

échelon 1 coefficient 200 à l’emploi repère générique ‘agent de relation clients très qualifié 1.2″ notamment l’emploi repère d’agent de comptoir 2 qui effectue toutes les opérations relatives à la délivrance d’un titre de transport (constructions tarifaires) et l’emploi d’agent de passage 3 qui outre les tâches dévolues l’agent de passage 2, est capable de résoudre les litiges liés aux opérations de débarquement et d’embarquement dont les litiges bagages ;

échelon 2 coefficient 220, l’emploi repère d’agent de relation clients très qualifié 2.1 correspondant à l’emploi repère d’agent de contrôle réservation qui gère la modulation de l’offre en réservation ;

au 4ème niveau, technicien et agent de coordination échelon 1 coefficient 235, les emplois repères génériques de

technicien de relation client 1.1, comprenant quatre emplois repères :

technicien commercial, s’agissant d’un personnel expérimenté dans les diverses fonctions (réservation, contrôle, ventes) l’amenant, outre la résolution de problèmes complexes, à concevoir des procédures et leurs moyens de mise en oeuvre ;

attaché commercial qui mène une action de vente auprès des personnes et organismes susceptibles d’utiliser les produits

délégué commercial aéroports qui assure le démarchage de l’ensemble du réseau de distribution pour commercialiser les services et installations et promouvoir le réseau aérien de la plate-forme aéroportuaire,

chargé de gestion commerciales des aéroports,

agent de coordination de relation clients 1.1 dont l’emploi repère ‘gent de coordination commercial’ qui anime et/ou assure la coordination des agents de sa spécialité de coefficient hiérarchique inférieur ; transmet l’information (ascendante et descendante); veille à la bonne application et au respect des règles de sécurité ; contribue à assurer le perfectionnement technique des agents qu’il anime.

Sur la période en litige, de décembre 2015 à mai 2018, la salariée était classée au niveau III, coefficient 211 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien.

Il ressort des attestations versées aux débats (de Mme [W], Mme [V], M. [Y]) que Mme [D] avec laquelle elles travaillaient, effectuait des tâches de réservation, ventes de billets, tenue de caisse. Toutefois, ces attestations établies dans des termes très généraux en ce qui concerne la préparation des pochettes de vol, la gestion et la supervision des vols ou dossier des vols, le départ et l’enregistrement ne permettent pas d’établir que la salariée effectuait régulièrement ces tâches, dès lors qu’il ressort des mails versés aux débats et des bordereaux de trafic qu’il relevait des tâches du chef d’escale (Mme [S] [O]) d’établir les bordereaux de trafic, même si la salariée a pu ponctuellement en remplir, notamment en lieu et place de la chef d’escale sur les 7 vols du 13 novembre 2017, sur un vol le 14 novembre, le 17 novembre et le 23 novembre et sur trois vols le 20 novembre 2017.

Par ailleurs les courriels du mois de décembre 2017 et janvier 2018 (pièce 25) établissent au contraire que la modification des billets était effectuée sur ordre ponctuel du superviseur d’agence et sous l’autorité de celui-ci qui les contrôlait, avant d’autoriser les modifications. D’ailleurs, l’attestation de Mme [J], également ancienne collègue de Mme [D], mentionne que les litiges ou réclamations faisaient l’objet d’une transmission et n’étaient pas traités directement par l’agent comptoir, venant contredire les attestations des salariées de la compagnie voisine Aéroflot.

De même l’accompagnement de la valise diplomatique, dont M. [Y] fait également état en termes généraux, était effectuée de manière ponctuelle sur ordre de Mme [C], chef d’escale comme il ressort du courriel du 9 décembre 2017 produit par la salariée.

Il ne résulte aucunement de l’ensemble des éléments versés par la salariée à qui appartient la charge de la preuve, qu’elle a:

effectué des tâches de contrôle ou de toute autre tâche l’amenant, outre la résolution de problèmes complexes, à concevoir des procédures et leurs moyens de mise en oeuvre relevant de l’emploi de technicien commercial ;

ou bien mené une action de vente auprès des personnes ou organismes susceptibles d’utiliser les produits relevant de l’emploi d’attaché commercial ;

ou bien animé et/ou assuré la coordination des agents de sa spécialité de coefficient hiérarchique inférieur ;veillé à la bonne application et au respect des règles de sécurité; contribué à assurer le perfectionnement technique des agents relevant de l’emploi d’agent de coordination commercial.

Il s’ensuit qu’elle ne peut prétendre au coefficient 235 de la convention collective nationale que ce soit par application de l’avenant n°55 ou 91 de l’annexe IV de la convention collective nationale et que ce soit lors de son embauche, ou par la suite, étant précisé que lors de son embauche, elle n’avait pas le diplôme (BTS ou DUT de la spécialité) requis ni même l’expérience.

La salariée sera donc déboutée de ses demandes de rappel de salaire, de prime d’ancienneté, d’indemnité de congés payés afférentes aux rappels de salaire et de rappel d’indemnité légale de licenciement calculés sur le fondement d’une reclassification au coefficient 235.

2- Sur le fondement de l’inégalité de traitement tout au long de sa carrière

La salariée soutient avoir été victime d’une inégalité de traitement pendant tout la période contractuelle en ce que dès son embauche, elle a exercé la totalité des tâches de Mme [J], ne s’agissant pas d’un remplacement partiel, mais d’un remplacement total qui devait lui donner droit à un coefficient supérieur à 160, sans que l’employeur puisse le justifier par la seule ancienneté, ce d’autant que par application de l’article 12 de la convention collective nationale dans le cas où un salarié assure, pendant une période continue d’un mois au moins, le remplacement provisoire d’un poste de classification supérieure, il bénéficie pendant cette période d’une rémunération correspondant au coefficient hiérarchique de l’emploi occupé temporairement et que ses tâches à l’embauche allaient bien eu-delà de celles prévues par le coefficient 160 qui ne s’applique qu’aux agents d’accueil chargés de recevoir du public ou de le renseigner et l’orienter.

Mme [D] se compare avec Mme [J] qu’elle remplaçait lors de son embauche selon les termes du contrat à durée déterminée et qui a été affectée pendant l’absence de la salariée en congé pour création d’entreprise sur une période d’un an à compter du 3 janvier 2011 au comptoir de l’agence de [Localité 3].

Selon l’attestation de Mme [J], celle-ci avait été engagée initialement comme agent polyvalent au coefficient 160. Toutefois il résulte des pièces produites par l’employeur ( contrat de travail) que cette dernière avait été engagée le 18 février 1992 aux fonctions d’agent polyvalent au coefficient 150, qu’elle avait accédé à l’emploi d’agent commercial classé au coefficient 190 puis au coefficient 195 au 1er janvier 2005 et par la suite au coefficient 211et qu’elle avait bénéficié d’une promotion aux fonctions de responsable de groupe au coefficient 235 le 1er janvier 2010.

Au regard de l’expérience et de la technicité que Mme [J] avait acquise dans l’entreprise puisqu’elle avait 13 ans d’ancienneté lors de l’embauche de Mme [D] en 2005, la situation de ces deux salariées n’est pas comparable, nonobstant l’emploi en contrat à durée déterminée en remplacement de Mme [J]. C’est d’ailleurs sur ces éléments que l’employeur, par courrier du 5 juin 2013, a dénié à Mme [D] le coefficient 235 qu’elle lui réclamait.

Il en est de même lorsque Mme [J] a été affectée à partir du 3 janvier 2011 au comptoir de l’agence de [Localité 3] en qualité de superviseur adjoint, pendant le congé de Mme [D], ne s’agissant pas en outre d’une affectation sur le poste de cette dernière.

Par ailleurs, les dispositions de l’article 12 de la convention collective nationale ne sont pas applicables dans le cadre d’une réclamation fondée sur une inégalité de traitement.

La salariée qui n’apporte pas les éléments suffisants susceptible de caractériser une inégalité de rémunération sera déboutée de sa demande de rappel de salaire à ce titre.

La salariée sera donc en outre déboutée de ses demandes de rappel de prime, d’indemnité de congés payés afférentes aux rappels de salaire et rappel d’indemnité légale de licenciement calculés sur le fondement d’une inégalité de traitement.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes de rappel de salaires sous-classification, rappel de prime d’ancienneté, rappel d’indemnité légale de licenciement sur la base du coefficient 235 de la convention collective nationale.

Il sera néanmoins ajouté au jugement en ce qui concerne le rejet de la demande d’indemnité compensatrice de congés payés afférente, s’agissant du complément nécessaire à ces demandes salariales.

Sur la demande subsidiaire de reclassification aux coefficients 228, 228 A à F de la grille interne

La salariée soutient qu’elle effectuait toutes les tâches afférentes à un technicien polyvalent, équivalentes à ce qu’effectuaient d’autres salariés comme Mme [J] et qu’elle était malgré tout traitée différemment.

La salariée ne produit aucune grille de salaire interne à Tunis-Air et n’articule aucun élément de fait par rapport à des éléments de droit qui ressortiraient de cette grille, alors même que l’employeur a toujours indiqué appliquer la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 et qu’aucun résultat n’a été trouvé concernant un accord d’entreprise au sein de la société au moyen du numéro SIRET sur la base nationale Légifrance.

Elle échoue donc à démontrer qu’elle n’a pas été classée au coefficient correspondant aux tâches qu’elle accomplissait et qu’elle a été ‘sous-classée’.

Elle manque également à démontrer qu’elle effectuait les mêmes tâches que Mme [J], qui avait accédé aux fonctions de responsable de groupe coefficient 235 maîtrise à compter du 1er janvier 2010 , étant précisé qu’aucune des attestations versée aux débats ne fait cette comparaison entre ces deux salariées et que l’expérience et la technicité acquise par Mme [J] compte tenu de son ancienneté empêche toute comparaison entre ces deux salariées pour fonder une inégalité de traitement.

Elle sera donc également déboutée de ses demandes de rappel de salaire aux coefficients 228 et 228 A à F de la grille interne et de toute ses demandes subséquentes de rappel de prime d’ancienneté, rappel d’indemnité compensatrice de congés payés, rappel d’indemnité de licenciement.

Il sera ajouté au jugement à ce titre, s’agissant d’une demande accessoire.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

La salariée fait grief au jugement de la débouter de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail alors que :

– l’employeur a toujours manifesté la volonté délibérée de ne pas lui verser le salaire auquel elle pouvait prétendre en ayant :

d’une part, manqué à ses obligations en la sous-classant, en ne prenant pas en considération sa polyvalence et en ne la rémunérant pas à hauteur du coefficient auquel elle pouvait prétendre ;

d’autre part, en lui ayant infligé une inégalité de traitement pendant tout la période contractuelle en ce que dès son embauche, elle a exercé la totalité des tâches de Mme [J], ne s’agissant pas d’un remplacement partiel, mais d’un remplacement total qui devait lui donner droit à un coefficient supérieur à 160, sans que l’employeur puisse le justifier par la seule ancienneté, ce d’autant que par application de l’article 12 de la convention collective nationale dans le cas où un salarié assure, pendant une période continue d’un mois au moins, le remplacement provisoire d’un poste de classification supérieure, il bénéficie pendant cette période d’une rémunération correspondant au coefficient hiérarchique de l’emploi occupé temporairement et que ses tâches à l’embauche allaient bien au-delà de celles prévues par le coefficient 160 qui ne s’applique qu’aux agents d’accueil chargés de recevoir du public ou de le renseigner et l’orienter ;

– l’employeur a traité avec la même malhonnêteté ses demandes ultérieures de régularisation de sa classification lorsqu’elle lui a réclamé en 2013 le coefficient 235, en lui répondant qu’aucun agent de comptoir ne bénéficie d’un tel coefficient alors que Mme [J] exerçait les mêmes fonctions qu’elle, peu importe que l’employeur octroie de manière artificielle des fonctions ou titres aux salariés.

Elle indique ainsi avoir subi un préjudice moral qui serait réparé par la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts.

La salariée a été déboutée de sa demande de reclassification aux coefficients 235 et subsidiairement 228, ainsi que de sa demande au titre d’une inégalité de traitement et ne saurait donc prétendre à un manquement de l’employeur sur ces fondements.

Elle ne démontre pas plus que lors de son embauche en 2005, elle se trouvait dans les conditions d’application de l’article 12 de la convention collective nationale.

Il ne ressort pas plus de la réponse de l’employeur selon laquelle aucun agent de comptoir ne bénéficie d’un coefficient 235, la démonstration d’une mauvaise foi, dès lors que Mme [J] qui avait accédé à ce poste était responsable de groupe ou superviseur adjoint assimilable à l’agent de coordination commercial et non pas simplement agent de comptoir.

La salariée sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et de toutes ses demandes subséquentes (remise des documents de fin de contrat et bulletins de salaire rectifiés sous astreinte et intérêts au taux légal)

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

La salariée succombant sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d’appel. Elle sera en conséquence, déboutée de toute demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande de faire bénéficier la compagnie d’une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’appel et de condamner Mme [D] au paiement de cette somme. Il sera ajouté au jugement ce titre.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile;

Dans la limite de la dévolution,

Confirme le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la péremption d’instance ;

Rejette de la demande d’indemnité compensatrice de congés payés afférente aux demandes salariales formulée par Mme [D] ;

Rejette les demandes de Mme [D] tendant à la condamnation de la société tunisienne de l’air diteTunis-Air au paiement de rappels de salaire aux coefficients 228 et 228 A à F de la grille interne et de toute ses demandes subséquentes de rappel de prime d’ancienneté, rappel d’indemnité compensatrice de congés payés, rappel d’indemnité de licenciement ;

Déboute Mme [D] de ses autres demandes ;

Condamne Mme [D] à payer à la société tunisienne de l’air dite Tunis-Air une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [D] aux entiers dépens de l’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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