Confrontation entre obligations déclaratives et reconnaissance d’infraction dans le cadre du travail dissimulé

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Confrontation entre obligations déclaratives et reconnaissance d’infraction dans le cadre du travail dissimulé

Contrôle de l’URSSAF

La SASU [4] a été contrôlée le 21 juin 2022 par l’URSSAF Nord-Pas-de-Calais, dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé, en vertu des articles L. 8112-1, L. 8112-2 et L. 8113-7 du code du travail. Ce contrôle a révélé que M. [B] [Z] travaillait dans l’établissement sans déclaration de salaire.

Procédure de contestation

Suite à ce contrôle, un procès-verbal a été émis, et l’URSSAF a envoyé une lettre d’observations à la SASU [4] le 7 décembre 2022. La SASU a répondu le 3 janvier 2023, et l’URSSAF a réagi par un courrier le 20 janvier 2023. Le 17 mars 2023, la SASU a saisi la commission de recours amiable pour contester le redressement.

Mise en demeure et contestation

Le 21 mars 2023, l’URSSAF a mis en demeure la SASU [4] de payer 63 043 euros, comprenant des rappels de cotisations et des majorations. La SASU a de nouveau contesté cette mise en demeure par courrier le 7 avril 2023, puis a saisi le tribunal le 13 juillet 2023 pour contester le rejet implicite de la commission de recours amiable.

Arguments de la SASU [4]

La SASU [4] demande au tribunal de réduire le montant des cotisations à 14 787,90 euros, d’annuler les majorations de redressement, et de constater qu’elle a déjà réglé 52 156 euros. Elle reconnaît l’infraction de travail dissimulé, mais conteste la période de redressement et affirme que M. [Z] n’était pas salarié depuis 2019.

Arguments de l’URSSAF

L’URSSAF soutient que M. [B] [Z] a travaillé sans être déclaré entre le 23 octobre 2019 et le 21 juin 2022. Elle conteste la position de la SASU sur le chômage partiel, affirmant qu’aucune preuve n’a été fournie pour démontrer que M. [Z] était en chômage partiel durant les fermetures dues à la COVID-19.

Décision du tribunal

Le tribunal a déclaré le recours de la SASU [4] recevable. Il a validé la mise en demeure de l’URSSAF, confirmé le redressement pour travail dissimulé, et annulé les réductions de cotisations. La SASU a été condamnée à payer 11 878 euros à l’URSSAF, ainsi qu’à verser 1 000 euros pour les frais irrépétibles.

Conclusion

Le tribunal a statué en faveur de l’URSSAF, confirmant la légitimité de la mise en demeure et des redressements appliqués, tout en déboutant la SASU de ses demandes. La décision a été mise à disposition au greffe le 15 novembre 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

15 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG
23/01308
1/ Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/01308 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XLT4
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE

PÔLE SOCIAL

-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

JUGEMENT DU 15 NOVEMBRE 2024

N° RG 23/01308 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XLT4

DEMANDERESSE :

S.A.S. [4]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Emilie YVART, avocat au barreau de LILLE

DEFENDERESSE :

URSSAF NORD PAS DE CALAIS
[Adresse 5]
[Localité 2]
représentée par Me Maxime DESEURE, avocat au barreau de BÉTHUNE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Anne-Sophie SIEVERS, Juge
Assesseur : Thierry BOCQUET, Assesseur du pôle social collège employeur
Assesseur : Philippe DUGAUTIER, Assesseur du pôle social collège salarié

Greffier

Christian TUY,

DÉBATS :

A l’audience publique du 01 octobre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 15 Novembre 2024.

EXPOSÉ DU LITIGE

La SASU [4] a fait l’objet d’un contrôle effectué le 21 juin 2022 par l’URSSAF Nord-Pas-de-Calais portant sur l’application des articles L. 8112-1, L. 8112-2 et L. 8113-7 du code du travail dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé.

A l’issue de ce contrôle, un procès-verbal relevant le délit de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié a été adressé à l’encontre de la SASU [4] dans lequel les agents ont relevé que M. [B] [Z] était en situation de travail dans l’établissement alors qu’aucune déclaration de salaire n’avait été faite le concernant.

Par courrier recommandé expédié le 7 décembre 2022, l’URSSAF a adressé une lettre d’observations à la SASU [4], qui a répondu par courrier du 3 janvier 2023.

Par courrier du 20 janvier 2023, l’URSSAF a répondu à la SASU [4].

Par courrier expédié le 17 mars 2023, la SASU [4] a saisi la commission de recours amiable afin de contester le redressement opéré par l’inspecteur du recouvrement.

Par courrier recommandé expédié le 21 mars 2023, l’URSSAF a mis en demeure la SASU [4] de lui payer la somme de 63 043 euros, soit 51 862 euros de rappel de cotisations et contributions, 6 546 euros de majorations de redressement et 4 635 euros de majorations de retard, dues au titre de la période comprise entre le 20 octobre 2019 et le 21 juin 2022.

Par courrier recommandé expédié le 7 avril 2023, la SASU [4] a saisi la commission de recours amiable afin de contester la mise en demeure expédiée le 21 mars 2023.

Par requête déposée le 13 juillet 2023, la SASU [4] a saisi la présente juridiction afin de contester la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable.

Les parties ont échangé leurs écritures dans le cadre de la mise en état du dossier.

Par ordonnance du 13 juin 2024, la clôture de l’instruction a été ordonnée et l’affaire a été fixée à l’audience du 1er octobre 2024, date à laquelle elle a été plaidée en présence des parties dûment représentées.

La SASU [4] demande au tribunal :

À titre principal,

– juger que le montant des cotisations et cotisations recouvrées par l’URSSAF s’élèvent à 14 787,90 euros au lieu de 26 191 euros,
– dire n’y avoir lieu à l’application des majorations de redressement à hauteur de 25%,
– annuler l’annulation de réductions et exonérations de cotisations,
– constater qu’elle a déjà réglé la somme de 52 156 euros,
– ordonner le remboursement par l’URSSAF du trop-perçu des sommes versées et à minima les déduire de ses prochaines cotisations,

À titre subsidiaire,

– dire et juger que le montant des cotisations et cotisations recouvrées par l’URSSAF s’élèvent à 14 787,90 euros au lieu de 26 191 euros,
– juger que les majorations de redressement s’élèvent à la somme de 3 697, 21 euros et non à 6 547,81 euros,
– juger que les calculs de l’annulation de réduction et exonérations de cotisations doivent être reFaits par l’URSSAF sur la base de 35 902, 47 euros au lieu de 49 904 euros,
– constater qu’elle a déjà réglé la somme de 52 156 euros,
– lui accorder des délais de paiement pour régler la somme restant due sur 24 mois.

En tout état de cause,

– condamner l’URSSAF à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de Procédure civile,
– condamner l’URSSAF aux dépens.

Au soutien de ses prétentions la SASU [4] indique reconnaître l’infraction de travail dissimulé dans un contexte de surcharge de travail ayant entraîné des négligences au niveau des déclarations sociales.
Elle indique contester la période sur laquelle le redressement a été opéré par l’inspecteur du recouvrement, soit entre le 23 octobre 2019 et le 21 juin 2022.
En effet, elle soutient que M. [Z] n’était pas salarié depuis l’année 2019 bien qu’une déclaration préalable à l’embauche (DPAE) pour cette seule journée ait été établie pour ce salarié.

Par ailleurs la SASU [4] indique que M. [Z] n’aurait pas travaillé durant les fermetures imposées au cours de l’épidémie de COVID 19, étant donné qu’il était placé en situation de chômage partiel au même titre que les autres salariés du restaurant.
Sur l’annulation des réductions et exonérations des cotisations, la SASU [4] demande au tribunal d’annuler cette annulation dans la mesure où elle a reconnu la commission de l’infraction de travail dissimulé.
Enfin, elle indique avoir versé en une fois la somme de 40 000 euros réclamée par l’URSSAF et avoir par la suite sollicité un échéancier portant à hauteur de 52 156 euros le total des sommes versées. En conséquence, elle indique ne pas comprendre pourquoi l’URSSAF sollicite le versement de sommes supplémentaires.

L’URSSAF Nord-Pas-de-Calais demande au tribunal de :

– valider la mise en demeure du 21 mars 2023,
– débouter la SASU [4] de l’ensemble de ses demandes,
– condamner SASU [4] à lui payer la somme de 11 878 euros au titre du solde de la mise en demeure du 21 mars 2023, sans préjudice des majorations de retard complémentaires à liquider après complet paiement, et des sommes versées depuis lors,
– condamner la SASU [4] à verser à l’URSSAF Nord-Pas-de-Calais la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de Procédure civile.

À l’appui de ses demandes l’URSSAF expose que M. [B] [Z] a bien travaillé entre le 23 octobre 2019 et le 21 juin 2022 sans être déclaré, ce dernier ayant indiqué aux inspecteurs travailler régulièrement dans l’établissement depuis l’année 2019.
Sur le fait que M. [B] [Z] aurait été placé en situation de chômage partiel lors de la fermeture de l’établissement, l’URSSAF indique considérer que si les autres salariés ont été placés en situation de chômage partiel, la SASU [4] n’apporte pas la preuve que cela a pu également concerner M. [B] [Z], dès lors qu’il était possible de travailler dans l’établissement pour des travaux d’entretien et de nettoyage malgré sa fermeture.

Sur l’annulation des réductions des cotisations et contributions, l’URSSAF indique que celle-ci s’applique dès lors que l’infraction de travail dissimulé est constatée.
Concernant les différences de montants sur la réponse du 20 janvier 2023 et la mise en demeure du 21 mars 2023, l’URSSAF indique considérer que cela est dû à l’application des majorations de tard.
Sur l’octroi de délais de paiement, l’URSSAF indique enfin que le tribunal judiciaire n’est pas compétent sur ce point, seul le directeur de l’URSSAF pouvant octroyer des délais de paiement.

L’affaire a été mise en délibéré au 15 novembre 2024.

MOTIFS

À titre liminaire, il convient de préciser que la recevabilité du recours formé par la SASU [4] n’est plus discutée par les parties.

En conséquence, le recours sera jugé recevable.

À titre liminaire, sur le travail dissimulé

Il ressort des articles L. 8221-1 et L. 8221-5 du code travail qu’est interdit le travail dissimulé, étant précisé qu’est notamment réputé travail dissimulé par dissimulation d’employé salarié le fait pour tout employeur soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité relative à la déclaration préalable à l’embauche.

La dissimulation d’employé salarié impose de démontrer l’existence d’un contrat de travail et donc notamment d’un lien de subordination entre l’employeur et le salarié, l’employeur devant avoir un pouvoir de donner des ordres, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner le salarié en cas de mauvaise exécution.

En l’espèce, il n’est pas contesté par la requérante que M. [Z] exerçait, au moment du contrôle, une activité salariée et rémunérée au sein de l’établissement sans qu’une déclaration préalable à l’embauche n’ait été établie pour cette période.

Sur le montant du redressement

Aux termes de l’article R. 243-59-4 du code de la sécurité sociale :

 » I.-Dans le cadre d’un contrôle effectué en application de l’article L. 243-7, l’agent chargé du contrôle fixe forfaitairement le montant de l’assiette dans les cas suivants :
1° La comptabilité de la personne contrôlée ne permet pas d’établir le chiffre exact des rémunérations, ou le cas échéant des revenus, servant de base au calcul des cotisations dues ;
2° La personne contrôlée ne met pas à disposition les documents ou justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle ou leur présentation n’en permet pas l’exploitation.
Cette fixation forfaitaire est effectuée par tout moyen d’estimation probant permettant le chiffrage des cotisations et contributions sociales. Lorsque la personne contrôlée est un employeur, cette taxation tient compte, dans les cas mentionnés au 1°, notamment des conventions collectives en vigueur ou, à défaut, des salaires pratiqués dans la profession ou la région considérée. La durée de l’emploi est déterminée d’après les déclarations des intéressés ou par tout autre moyen de preuve.
En cas de travail dissimulé, cette fixation forfaitaire :
a) Peut être effectuée dans les conditions mentionnées à l’article L. 242-1-2 lorsque la personne contrôlée est un employeur ;
b) Peut être fixée, à défaut de preuve contraire, à hauteur pour chaque exercice contrôlé de trois fois la valeur annuelle du plafond mentionné à l’article L. 241-3 en vigueur à la date à laquelle le contrôle a débuté lorsque la personne contrôlée est un travailleur indépendant.
II.-En cas de carence de l’organisme créancier, le forfait est établi par le responsable du service mentionné à l’article R. 155-1 « .

Aux termes de l’article L. 243-7-7 du code de la sécurité sociale :
 » I.- Le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l’issue d’un contrôle réalisé en application de l’article L. 243-7 ou dans le cadre de l’article L. 243-7-5 du présent code est majoré de 25 % en cas de constat de l’infraction définie aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail.
La majoration est portée à 40 % dans les cas mentionnés à l’article L. 8224-2 du code du travail.
II.- Sauf dans les cas mentionnés au III, la personne contrôlée peut bénéficier d’une réduction de dix points du taux de ces majorations de redressement si, dans un délai de trente jours à compter de la notification de la mise en demeure, elle procède au règlement intégral des cotisations, pénalités et majorations de retard notifiées ou si, dans le même délai, elle a présenté un plan d’échelonnement du paiement au directeur de l’organisme et que ce dernier l’a accepté.
Les donneurs d’ordres peuvent également bénéficier, selon les mêmes modalités, d’une réduction des majorations mises à leur charge en application du 1° de l’article L. 8222-2 du code du travail.
La réduction des majorations est notifiée par le directeur de l’organisme une fois le paiement intégral constaté « .

Aux termes de l’article R. 243-59-4 du code de la sécurité sociale :

 » I.-Dans le cadre d’un contrôle effectué en application de l’article L. 243-7, l’agent chargé du contrôle fixe forfaitairement le montant de l’assiette dans les cas suivants :
1° La comptabilité de la personne contrôlée ne permet pas d’établir le chiffre exact des rémunérations, ou le cas échéant des revenus, servant de base au calcul des cotisations dues ;
2° La personne contrôlée ne met pas à disposition les documents ou justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle ou leur présentation n’en permet pas l’exploitation.
Cette fixation forfaitaire est effectuée par tout moyen d’estimation probant permettant le chiffrage des cotisations et contributions sociales. Lorsque la personne contrôlée est un employeur, cette taxation tient compte, dans les cas mentionnés au 1°, notamment des conventions collectives en vigueur ou, à défaut, des salaires pratiqués dans la profession ou la région considérée. La durée de l’emploi est déterminée d’après les déclarations des intéressés ou par tout autre moyen de preuve.

En cas de travail dissimulé, cette fixation forfaitaire :
a) Peut être effectuée dans les conditions mentionnées à l’article L. 242-1-2 lorsque la personne contrôlée est un employeur ;
b) Peut être fixée, à défaut de preuve contraire, à hauteur pour chaque exercice contrôlé de trois fois la valeur annuelle du plafond mentionné à l’article L. 241-3 en vigueur à la date à laquelle le contrôle a débuté lorsque la personne contrôlée est un travailleur indépendant.
II.-En cas de carence de l’organisme créancier, le forfait est établi par le responsable du service mentionné à l’article R. 155-1 « .
Enfin, aux termes de l’article L. 243-7-7 du code de la sécurité sociale :
 » I.- Le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l’issue d’un contrôle réalisé en application de l’article L. 243-7 ou dans le cadre de l’article L. 243-7-5 du présent code est majoré de 25 % en cas de constat de l’infraction définie aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail.
La majoration est portée à 40 % dans les cas mentionnés à l’article L. 8224-2 du code du travail.
II.- Sauf dans les cas mentionnés au III, la personne contrôlée peut bénéficier d’une réduction de dix points du taux de ces majorations de redressement si, dans un délai de trente jours à compter de la notification de la mise en demeure, elle procède au règlement intégral des cotisations, pénalités et majorations de retard notifiées ou si, dans le même délai, elle a présenté un plan d’échelonnement du paiement au directeur de l’organisme et que ce dernier l’a accepté.
Les donneurs d’ordres peuvent également bénéficier, selon les mêmes modalités, d’une réduction des majorations mises à leur charge en application du 1° de l’article L. 8222-2 du code du travail.
La réduction des majorations est notifiée par le directeur de l’organisme une fois le paiement intégral constaté « .

L’article L. 3242-1 du code du travail dispose que la rémunération des salariés est mensuelle et indépendante, pour un horaire de travail effectif déterminé, du nombre de jours travaillés dans le mois. Le paiement mensuel neutralise les conséquences de la répartition inégale des jours entre les douze mois de l’année.
Pour un horaire équivalent à la durée légale hebdomadaire, la rémunération mensuelle due au salarié se calcule en multipliant la rémunération horaire par les 52/12 de la durée légale hebdomadaire.
Le paiement de la rémunération est effectué une fois par mois. Un acompte correspondant, pour une quinzaine, à la moitié de la rémunération mensuelle, est versé au salarié qui en fait la demande.
Ces dispositions ne s’appliquent pas aux salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires.

*

En l’espèce, l’URSSAF a considéré que M. [B] [Z] a travaillé sans être déclaré auprès de ses services pour la période comprise entre le 23 octobre 2019 et le 21 juin 2022. Pour ce faire, l’URSSAF a pris en compte d’une part la réalisation d’une DPAE pour ce salarié le 23 octobre 2019, au demeurant non contestée par la société, et d’autre part les déclarations du salarié qui a indiqué travailler régulièrement dans cet établissement depuis l’année 2019.

La SASU [4] considère que le montant des rémunérations retenu par l’URSSAF est inexact en ce qu’il ne prend pas en compte les périodes et les jours de fermeture de l’établissement, ni même les périodes de chômage partiel. Elle produit en ce sens les bulletins de salaire des autres salariés du restaurant, et des communications du restaurant sur les réseaux sociaux indiquant que ce dernier est fermé.

Cependant, compte tenu du principe de la mensualisation des rémunérations visé à l’article L. 3242-1 du code de la sécurité sociale, il importe peu de prendre en compte les jours de fermeture hebdomadaire de l’établissement dans la mesure où la rémunération est prise en compte selon une base mensuelle ne variant pas d’un mois à l’autre.

Si la société allègue que M. [B] [Z] aurait été placé en situation de chômage partiel au même titre que les autres salariés, elle n’en rapporte pas la preuve. En effet, bien qu’il soit attesté que les autres salariés ont été placés en situation de chômage partiel durant les périodes de fermeture de l’établissement à la suite de l’épidémie de Covid 19, la société ne produit aucun bulletin de salaire ou autre élément susceptible d’apporter la preuve que M. [B] [Z] a été placé en situation de chômage partiel durant cette période.

Au regard de ces éléments, l’URSSAF a justement retenu que M. [B] [Z] a effectué une prestation de travail sans être déclaré auprès de ses services, entre le 23 octobre 2019 et le 21 juin 2022. En conséquence, a justement fait application des majorations de redressement en application de l’article L. 243-7-7 du code de la sécurité sociale.

Il convient de valider la mise en demeure et confirmer le chef de redressement de travail dissimulé avec verbalisation – dissimulation d’emploi salarié par absence de déclarations de salaires – taxation forfaitaire.

Sur l’annulation des réductions et exonérations de cotisations suite au constat de l’infraction de travail dissimulé :

Aux termes de l’article L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale :
 » I.-Le bénéfice de toute mesure de réduction ou d’exonération, totale ou partielle, de cotisations de sécurité sociale, de contributions dues aux organismes de sécurité sociale ou de cotisations ou contributions mentionnées au I de l’article L. 241-13 est supprimé en cas de constat des infractions mentionnées aux 1° à 4° de l’article L. 8211-1 du code du travail.

II.-Lorsque l’infraction est constatée par procès-verbal dans les conditions déterminées aux articles L. 8271-1 à L. 8271-19 du même code, l’organisme de recouvrement procède, dans la limite de la prescription applicable à l’infraction, à l’annulation des réductions et exonérations des cotisations ou contributions mentionnées au I du présent article « .

*

En l’espèce, la SASU [4] conteste l’annulation de la réduction des cotisations au motif qu’elle aurait fait preuve de bonne foi en reconnaissant l’infraction de travail dissimulé au bout de trois ans.

Cependant, la seule constatation de l’infraction dissimulé suffit à entraîner l’annulation des réductions des cotisations et contributions sociales, sans que la bonne foi alléguée de la demanderesse permette de revenir sur cette annulation.

Au regard des éléments ci-dessus, l’URSSAF était fondée à annuler les exonérations de cotisations et de contributions sociale pour la période comprise entre le 23 octobre 2019 et le 21 juin 2022.

En conséquence, il convient de valider le chef de redressement relatif à l’annulation des réductions et exonérations de cotisations suite au constat de l’infraction de travail dissimulé.

Sur les comptes entre les parties et la condamnation au paiement :

Aux termes de l’article 1343 du code civil, le débiteur d’une obligation de somme d’argent se libère par le versement de son montant nominal.
Le montant de la somme due peut varier par le jeu de l’indexation.
Le débiteur d’une dette de valeur se libère par le versement de la somme d’argent résultant de sa liquidation.

*

Il est constant que la mise en demeure d’un montant de 63 043 euros a fait l’objet d’un versement de 40 000 euros le 23 janvier 2023 et des virements mensuels d’un montant de 1 013 euros ont été établis à compter du mois de juillet 2023.

En l’espèce, l’URSSAF produit un décompte des sommes versées par la SASU [4] à la date du 16 mai 2024 laissant apparaître un solde débiteur de 11 878 euros.

L’URSSAF ne conteste pas les versements effectués et mentionnés par la SASU [4] dans ses écritures, qui ne critique pas elle-même le décompte produit par l’URSSAF.

En conséquence, il convient de condamner la SASU [4] à payer à l’URSSAF Nord-Pas-de-Calais la somme de 11 878 euros sous réserve, d’une part, des paiements, régularisations ou crédits qui auraient pu intervenir sur le compte URSSAF de la société depuis l’émission de la mise en demeure et, d’autre part, des majorations de retard, lesquelles continuent à courir jusqu’à parfait paiement.

Sur les demandes accessoires

La SASU [4], partie succombante, sera condamné aux dépens de l’instance.

Etant déboutée de l’ensemble de ses demandes principales, la SASU [4] doit être déboutée de ses demandes au titre des frais irrépétibles.

La SASU [4] sera condamnée au versement de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de Procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, par décision contradictoire rendue en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

DÉCLARE recevable le recours formé par la SASU [4] ;

VALIDE la mise en demeure du 21 mars 2023 ;

CONFIRME le chef de redressement de de travail dissimulé avec verbalisation – dissimulation d’emploi salarié par absence de déclarations de salaires – taxation forfaitaire ;

CONFIRME le chef de redressement annulation des réductions et exonérations de cotisations suite au constat de l’infraction de travail dissimulé ;

CONDAMNE la SASU [4] à payer à l’URSSAF du Nord-Pas-de-Calais la somme de 11 878 euros au titre du solde la mise en demeure du 21 mars 2023, sous réserve, d’une part, des paiements, régularisations ou crédits qui auraient pu intervenir sur le compte URSSAF de la SASU [4] depuis l’émission de la mise en demeure et, d’autre part, des majorations de retard, lesquelles continuent à courir jusqu’à parfait paiement ;

DÉBOUTE la SASU [4] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE la SASU [4] au versement de la somme de 1 000 euros à l’URSSAF Nord-Pas-de-Calais au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE la SASU [4] aux dépens ;

DIT que le présent jugement sera notifié à chacune des parties conformément à l’article R.142-10-7 du code de la sécurité sociale par le greffe du tribunal.

Ainsi jugé et mis à disposition au greffe du tribunal le 15 novembre 2024 et signé par le président et le greffier.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE.
Christian TUY Anne-Sophie SIEVERS

Expédié aux parties le :

– 1 CE à Me Maxime DESEURE
– 1 CCC à l’URSSAF, à Me Emilie YVART, à la société [4]


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