Conflits entre associés : 22 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 19/17870

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Conflits entre associés : 22 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 19/17870

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 2

ARRET DU 22 MARS 2023

(n° , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/17870 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAVZK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juillet 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS CEDEX 17 – RG n° 15/01586

APPELANTE

SCI DU 15

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro D 415 100 510

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

ayant pour avocat plaidant : Me Dalila AHMEDI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0387

INTIMES

LE CABINET ROUMILHAC

SASU exerçant sous le nom commercial Cabinet JOURDAN, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro B 480 708 858, prise en la personne de son Président, le Cabinet JOURDAN, SA immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro B 702 052 994, venant aux droits de la société ETUDE DE GESTION IMMOBILIERE DE COPROPRIETE ET DE GERANCE ‘EGIC’

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Pascale BETTINGER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0140

ayant pour avocat plaidant : Me Laurence LECLERCQ DEZAMIS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0551

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES [Adresse 2] représenté par son syndic, le Cabinet ROUMILHAC, SASU immatriculée au RCS de Paris sous le numéro B 480 708 858, venant aux droits de la société EGIC

C/O CABINET ROUMILHAC

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représenté par Me Sylvie KONG THONG de l’AARPI Dominique OLIVIER – Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

ayant pour avocat plaidant : Me Florence LOUIS de la SELARL GLC, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 129

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre

Madame Muriel PAGE, Conseillère

Mme Nathalie BRET, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Dominique CARMENT, Greffière présente lors du prononcé.

* * * * * * * * * *

FAITS & PROCÉDURE

La société civile immobilière du 15 est propriétaire des lots n°4 et 11 de l’état descriptif de division de l’immeuble régi par le statut de la copropriété des immeubles bâtis situé [Adresse 2] à [Localité 6].

L’assemblée générale de copropriétaires du 2 juin 2014 a renouvelé le mandat de syndic de la société à responsabilité limitée SE.PI.MA jusqu’à l’assemblée générale appelée à statuer sur les comptes arrêtés au 31 décembre 2015 ou à celle convoquée en application de l’article 25-1, dernier alinéa de la loi du 10 juillet 1965, statuant aux conditions de majorité simple.

Par jugement du 26 août 2014 le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société SE.PI.MA.

L’assemblée générale du 4 novembre 2014 a désigné en qualité de nouveau syndic la société par actions simplifiée unipersonnelle Etude de gestion immobilière de copropriétés et de gérances (EGIC), exerçant sous le nom commercial Cabinet Jourdan.

Le procès verbal de cette assemblée à été notifié à la SCI du 15 par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 novembre 2014 (AR signé le 19 novembre 2014).

Par actes des 16 et 27 janvier 2015 la SCI du 15 a assigné devant le tribunal le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 6] représenté par son syndic la société EGIC et cette dernière personnellement aux fins d’obtenir :

– l’annulation de l’assemblée générale du 4 novembre 2014,

– la désignation d’un administrateur provisoire avec mission, notamment, de convoquer l’assemblée en vue notamment de la désignation du syndic, du

conseil syndical, de l’établissement du budget et l’approbation des comptes

– la condamnation de la société Cabinet Jourdan à acquitter la provision à valoir sur la

rémunération de l’administrateur provisoire,

– la condamnation de la société Cabinet Jourdan à acquitter sa quote-part sur la provision à valoir sur la rémunération de l’administrateur provisoire,

– la condamnation de tout succombant aux dépens, ainsi qu’à lui payer la somme de 2.500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 18 août 2015 la SCI du 15 a assigné devant le tribunal le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 6] représenté par son syndic la société EGIC et cette dernière personnellement aux fins d’obtenir :

– l’annulation de l’assemblée générale du 2 juin 2015,

– la désignation d’un administrateur provisoire avec mission, notamment, de convoquer l’assemblée en vue notamment de la désignation du syndic, du

conseil syndical, de l’établissement du budget et l’approbation des comptes

– la condamnation de la société Cabinet Jourdan à acquitter la provision à valoir sur la

rémunération de l’administrateur provisoire,

– la condamnation de la société Cabinet Jourdan à acquitter sa quote-part sur la provision à valoir sur la rémunération de l’administrateur provisoire,

– la condamnation de tout succombant aux dépens, ainsi qu’à lui payer la somme de 2.500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 20 septembre 2016 la SCI du 15 a assigné devant le tribunal le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 6] représenté par son syndic la société EGIC et cette dernière personnellement aux fins d’obtenir :

– l’annulation de l’assemblée générale du 30 juin 2016,

– la désignation d’un administrateur provisoire avec mission, notamment, de convoquer l’assemblée en vue notamment de la désignation du syndic, du

conseil syndical, de l’établissement du budget et l’approbation des comptes

– la condamnation de la société Cabinet Jourdan à acquitter la provision à valoir sur la

rémunération de l’administrateur provisoire,

– la condamnation de la société Cabinet Jourdan à acquitter sa quote-part sur la provision à valoir sur la rémunération de l’administrateur provisoire,

– la condamnation de tout succombant aux dépens, ainsi qu’à lui payer la somme de 2.500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les trois affaires ont été jointes.

Le syndicat des copropriétaires s’est opposé à ces demandes et s’est porté reconventionnellement demandeur en condamnation de la SCI du 15 à lui payer les sommes de :

– 8.323,48 € au titre de l’arriéré des charges arrêté au 1er trimestre 2018 inclus, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 janvier 2015 sur la somme de 2.534,23 €, de la sommation de payer du 8 juin 2015 sur la somme de 2.941,15 €, à compter du 14 février 2018, date des conclusions, sur la totalité de la somme réclamée,

– 3.000 € de dommages-intérêts,

– 4.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La société EGIC s’est opposée aux demandes de la SCI du 15 et a sollicité la condamnation de cette dernière à lui payer les sommes de 2.500 € de dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire et 5.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par jugement du 18 juillet 2019 le tribunal de grande instance de Paris a :

– écarté des débats les conclusions du syndicat des copropriétaires notifiées le 14 février 2018, veille du prononcé de la clôture, mais ce, exclusivement en ce qu’elles portent actualisation de sa demande reconventionnelle en paiement de charges dues par la SCI du 15 à la somme principale de 8.323,48 €, appel de charges du 1er trimestre 2018 inclus, ainsi que les pièces y afférentes n° 40 et 41 du bordereau de communication de pièces notifié le 14 février 2018,

– déclaré la SCI du 15 irrecevable en sa demande d’annulation de l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2] à [Localité 6], tenue en date du 4 novembre 2014.

– débouté la SCI du 15 de sa demande d’annulation des assemblées générales des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2] à [Localité 6], tenues en date des 2 juin 2015 et 30 juin 2016,

– débouté la SCI du 15 de sa demande de désignation d’un administrateur provisoire du syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 6], à l’effet de convoquer une nouvelle assemblée aux fins de recouvrement des charges et de désignation d’un nouveau syndic,

– condamné la SCI du 15 à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 6] la somme de 7.138,85 € au titre des charges impayées au 4ème trimestre 2017, outre les intérêts au taux légal sur la somme de 2534,23 € à compter de la mise en demeure du 15 janvier 2015, sur la somme de 2941,15 € à compter de la sommation de payer du 8 juin 2015, et sur le montant global à compter du 6 octobre 2017, date de notification des dernières écritures du syndicat des copropriétaires déclarées sur ce point recevables,

– rejeté, pour le surplus la demande reconventionnelle en paiement de charges du syndicat des copropriétaires,

– condamné la SCI du 15 à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 6] la somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts,

– débouté la société EGIC de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– Condamné la SCI du 15 aux dépens avec application de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer respectivement au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 6] et à la société EGIOC les sommes de 3.000 € en application de l’article 700 du même code,

– débouté les parties de toute autre demande à ce titre,

– ordonné l’exécution provisoire.

La société civile immobilière du 15 a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 18 septembre 2019.

La procédure devant la cour a été clôturée le 14 décembre 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions en date du 28 novembre 2022 par lesquelles la société civile immobilière du 15, appelant, invite la cour, au visa des articles 114 du code de procédure civile, 1240, 2241, 2242 du code civil, 42 de la loi du 10 juillet 1965, 47 du décret du 17 mars 1967, à :

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a :

déclaré irrecevable en sa demande d’annulation de l’assemblée générale du 4 novembre 2014,

débouté de sa demande d’annulation des assemblées générales des 2 juin 2015 et 30 juin 2016,

débouté de sa demande de désignation d’un administrateur provisoire du syndicat des copropriétaires à l’effet de convoquer une nouvelle assemblée aux fins de recouvrement des charges et de désignation d’un nouveau syndic,

condamné à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 7.138, 85 € au titre des charges impayées au 4ème trimestre 2017 inclus, outre intérêts au taux légal sur la somme de 2.534, 23 € à compter de la mise en demeure du 15 janvier 2015, sur le somme de 2.941,15 € à compter de la sommation de payer du 8 Juin 2015, et sur le montant global de la somme réclamée à compter du 6 octobre 2017, date de la notification des dernières écritures du syndicat des copropriétaires déclarées sur ce point recevables,

condamné à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts,

l’a débouté du surplus de ses demandes,

condamné aux dépens, ainsi qu’à payer respectivement au syndicat des copropriétaires et à la société EGIC les sommes de 3.000 € par application de  »article 700 du code de procédure civile,

débouté de ses demandes à ce titre,

statuant à nouveau,

– la juger recevable et bien fondée en sa demande d’annulation de l’assemblée générale du 4 novembre 2014,

– annuler l’assemblée générale ordinaire du 4 novembre 2014,

– de manière subséquente à cette annulation, annuler les assemblées générales ordinaires des 2 juin 2015 et 30 juin 2016,

– juger que les convocations et le procès-verbaux déférés étant affectés de l’irrégularité de l’absence de mandat dévolu à la société EGIC exerçant sous le nom commercial Cabinet Jourdan et dont la société Roumilhac vient aux droits exerçant également sous l’enseigne Cabinet Jourdan, à l’effet de convoquer et être désigné en qualité de syndic, celui-ci n’est pas recevable à appeler des charges au titre des assemblées générales du 4 novembre 2014, du 2 juin 2015 et du 30 juin 2016,

– débouter le syndicat des copropriétaires et la société Roumilhac de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

– condamner tout succombant aux dépens avec application de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à lui payer la somme de 2.500 € par application de l’article 700 du même code ;

Vu les conclusions en date du 21 novembre 2022 par lesquelles le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 6], représenté par son syndic la société par actions simplifiée unipersonnelle Cabinet Roumilhac exerçant sous le nom commercial Cabinet Jourdan, venant aux droits de la société par actions simplifiée unipersonnelle Etude de gestion immobilière de copropriété et de gérance (EGIC), intimé, demande à la cour, au visa des articles 117, 648 du code de procédure civile, 10, 14-1, 18-V, 42 de la loi du 10 juillet 1965, 36, 47 du décret du 17 mars 1967, 1240 du code civil, de :

– confirmer le jugement,

y ajoutant,

– déclarer irrecevable la SCI du 15 en l’ensemble de ses demandes,

– débouter la SCI du 15 de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– condamner la SCI du 15 à lui payer la somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure et résistance abusives dans le paiement de ses obligations,

– condamner la SCI du 15 aux dépens d’appel avec application de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à lui payer la somme de 5.000 € par application de l’article 700 du même code en cause d’appel ;

Vu les conclusions en date du 21 novembre 2022 par lesquelles la société par actions simplifiée unipersonnelle Cabinet Roumilhac exerçant sous le nom commercial Cabinet Jourdan, venant aux droits de la société par actions simplifiée unipersonnelle Etude de gestion immobilière de copropriété et de gérance (EGIC), intimé ayant formé appel incident, demande à la cour, ai visa des articles 117, 329 du code de procédure civile, 18-V, 42 de la loi du 10 juillet 1965, 47 du décret du 17 mars 1965, 1240 du code civil, de :

– juger la société Cabinet Roumilhac venant aux droits de la société EGIC tant recevable que bien fondée en intervention volontaire en cause d’appel, et ce, à titre principal,

à titre principal,

– confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré la SCI du 15 irrecevable en sa demande d’annulation de l’assemblée générale du 4 novembre 2014 et l’a déboutée de sa demande d’annulation des assemblées générales des 2 juin 2015 et 30 juin 2016,

– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la SCI du 15 aux dépens, ainsi qu’à payer à la société EGIC la somme de 3.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile, en y ajoutant que ces condamnations sont désormais prononcées au profit de la société Cabinet Roumilhac venant aux droits de la société EGIC,

sur son appel incident,

– réformer le jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire,

– condamner la SCI du 15 à lui payer la somme de 2.500 € à titre de dommages-intérêts

pour procédure abusive et vexatoire,

en tout état de cause,

– condamner la SCI du 15 aux dépens d’appel avec application de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à lui payer la somme supplémentaire de 5.000 € par application de l’article 700 du même code en cause d’appel ;

SUR CE,

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;

En application de l’article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;

Sur l’intervention volontaire de la société Cabinet Roumilhac

Suivant traité de fusion du15 mai 2020 la société par actions simplifiée à associé unique Cabinet Roumilhac a absorbé la société par actions simplifiée à associé unique Etude de gestion immobilière de copropriétés et de gérances, dite EGIC ;

La société EGICa été radiée du registre du commerce et des sociétés le 20 juillet 2020 ;

L’assemblée générale ordinaire des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 6] du 28 décembre 2020 a, au terme de sa résolution n° 6, désigné la société Cabinet Roumilhac, agissant sous le nom commercial Cabinet Jourdan, en qualité de syndic, mandat renouvelé par les assemblées générales ordinaires des 20 mai 2021 et 8 juin 2022 ; il n’y a pas eu de recours contre ces 3 assemblées ;

La société Cabinet Roumilhac exerçant sous le nom commercial Cabinet Jourdan et venant aux droits de la société EGIC est intervenue volontairement à l’instance par conclusions notifiées le 21 novembre 2022 ;

Il y a lieu de la recevoir en son intervention volontaire ;

Sur les demandes de la SCI du 15 d’annulation des assemblées générales des 4 novembre 2014, 2 juin 2015 et 30 juin 2016

Sur la recevabilité de la demande d’annulation de l’assemblée générale du 4 novembre 2014

Il résulte de l’article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 que ‘les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillant, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic, dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l’assemblée générale’;

Le délai précité est un délai de forclusion, passé lequel, sauf inexistence, les résolutions de l’assemblée querellée deviennent définitives sans pouvoir être contestées, soit par voie d’action, soit par voie d’exception, quelque soit la nature ou la gravité des irrégularités constatées ;

Ce délai ne peut être interrompu que par la délivrance d’une assignation régulière au syndicat des copropriétaires, ou d’une assignation dont les irrégularités éventuelles doivent être couvertes avant expiration du même délai, en application de l’article 115 du code de procédure civile selon lequel ‘ la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief’ ;

Selon l’article 117 du code de procédure civile, ‘constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte :

Le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne atteinte d’une incapacité d’exercice…’;

Aux termes de l’article 648 du code de procédure civile, ‘tout acte d’huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs : … 4. Si l’acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social.

Ces mentions sont prescrites à peine de nullité’ ;

Il n’est pas contesté que le procès verbal de l’assemblée générale du 4 novembre 2014 a été notifié à la SCI du 15, copropriétaire absent et non représenté à cette assemblée, par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 novembre 2014 reçue le 19 novembre 2014 ; le délai de deux mois prescrit par l’article 42 alinéa 2 précité pour contester l’assemblée expirait le 20 janvier 2015 ;

L’assignation du 16 janvier 2015 a été délivrée d’une part au syndicat des copropriétaires, en la personne de son organe légal de représentation en justice ainsi désigné ‘le Cabinet Jourdan, S.A.R.L. immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 309 231 546, prise en la personne de son dirigent régulièrement désigné au siège social sis [Adresse 4]’, d’autre part et en son nom personnel à la même personne morale ci-dessus désigné ;

Or, comme l’a dit le tribunal, il est établi que le ‘Cabinet Jourdan’ constitue, non la personne morale désignée en qualité de syndic, en dépit même de la mention qui figure dans la résolution n° 2 de l’assemblée générale du 4 novembre 2014 portant élection aux fonctions de syndic et de ‘l’intuitu personae’ attaché à l’exercice de ces fonctions, mais la dénomination commerciale de la société Etude de gestion immobilière de copropriétés et de gérances, dite EGIC, société par actions simplifiée unipersonnelle, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le n° B 325 995 983 000 47, ayant son siège social au [Adresse 4], elle même filiale de la société Cabinet Jourdan, société anonyme ayant son siège social au [Adresse 3], immatriculée au RCS Nanterre sous le numéro B 702 052 994, et qui en constitue l’organe de représentation ;

Les premiers juges ont justement retenu que la désignation du défendeur personne morale, assigné tant en son nom personnel qu’en sa qualité d’organe légal de représentation du syndicat des copropriétaires, sous l’enseigne ou la dénomination commerciale sous laquelle il exerce, auquel s’ajoute un numéro erroné d’inscription au registre du commerce et des sociétés, constitue, non pas un vice de forme qui n’entraîne la nullité qu’à charge pour la partie qui l’invoque de rapporter la preuve de l’existence d’un grief, mais une nullité de fond tirée de l’inexistence de la personne morale assignée au sens de l’article 117 précité ;

La régularisation d’un tel vice ne pouvait intervenir que dans le délai de deux mois prévu à l’article 42 alinéa 2 que l’assignation irrégulièrement délivrée ne pouvait interrompre ;

Dès lors, comme l’a exactement énoncé le tribunal, l’assignation délivrée le 27 janvier 2015 par la SCI du 15 au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2], représenté par son syndic ‘le cabinet Jourdan, SAS immatriculée au RCS Paris sous le numéro 325 995 983, prise en son dirigeant régulièrement désigné au siège social sis [Adresse 4], ainsi qu’à la même personne morale prise en son nom personnel ‘aux fins et sur fins’ de l’assignation délivrée le 16 janvier 2015, n’a pu avoir effet, après expiration du délai de deux mois suivant la notification à la SCI du 15 du procès verbal de l’assemblée générale du 4 novembre 2014, de régulariser avant forclusion de la demande, le vice de fond dont était atteinte cette même assignation du 16 janvier 2015 ;

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a déclaré la SCI du 15 irrecevable en sa demande d’annulation de l’assemblée générale du 4 novembre 2014 ;

Sur la demande d’annulation des assemblées générales des 2 juin 2015 et 30 juin 2016

Le seul moyen de nullité invoqué à l’encontre de ces deux assemblées tient au défaut de pouvoir du syndic désigné en vertu de l’assemblée du 4 novembre 2014 pour les convoquer ;

La validité de l’assemblée du 4 novembre 2014 dont la demande d’annulation vient d’être déclarée irrecevable, entraîne la validité de l’assemblée postérieures du 2 juin 2015 puisqu’elle a été convoquée par le syndic régulièrement désigné par l’assemblée du 4 novembre 2014 et la validité de l’assemblée du 2 juin 2015 entraîne la validité de l’assemblée du 30 juin 2016 puisqu’elle a été convoquées par le syndic régulièrement désigné par l’assemblée du 2 juin 2015 ;

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a débouté la SCI du 15 de sa demande d’annulation des assemblées générales des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2] à [Localité 6], tenues en date des 2 juin 2015 et 30 juin 2016 ;

Sur la demande du syndicat en paiement des charges

Aux termes de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipements communs en fonction de l’utilité que ces services et éléments présentent à l’égard de chaque lot, ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots ;

L’approbation des comptes du syndic par l’assemblée générale rend certaine, liquide et exigible la créance du syndicat des copropriétaires relative à chaque quote-part de charges ; les provisions pour charges sont exigibles le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour fixé par l’assemblée générale et les sommes afférentes aux dépenses pour travaux sont exigibles selon les modalités votées en assemblée générale ; 

Selon l’article 14-1 de la même loi, pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d’administration des parties communes et des équipements communs de l’immeuble, le syndicat des copropriétaires vote, chaque année, un budget prévisionnel et les copropriétaires paient au syndicat des provisions égales au quart du budget voté sauf modalités différentes adoptées par l’assemblée générale ; cette provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l’assemblée générale ;

En vertu des dispositions conjuguées des articles 1353 du code civil et 9 du code de procédure civile, il appartient au syndicat des copropriétaires de prouver que le copropriétaire est redevable de la somme réclamée dans sa totalité ;

Le syndicat des copropriétaires verse aux débats les pièces suivantes :

– les procès verbaux des assemblées générales des :

2 juin 2015 approuvant les comptes du 1er janvier au 31 décembre 2014,

30 juin 2016 approuvant les comptes du 1er janvier au 31 décembre 2015,

9 mars 2017 approuvant les comptes du 1er janvier au 31 décembre 2016,

8 mars 2018 approuvant les comptes du 1er janvier au 31 décembre 2017,

– les attestations de non recours des assemblées de 2017 et 2018

– les appels de fonds du 4ème trimestre 2014 au 4ème trimestre 2018,

– les relevés généraux des dépens et de charges pour opérations courantes des exercices 2014, 2015, 2016 et 2017,

– les extraits du grand Livre de la société SE.PI.MA, ancien syndic, arrêté au 25 juillet 2014, ainsi que pour les périodes des 24 juillet 2014 au 1er octobre 2015,

– les positions du compte de la SCI du 15 du 31 décembre 2014 au 1er avril 2016, du 31 janvier 2016 au 1er janvier 2017, le décompte des charges au 1er octobre 2017 (4ème appel 2017 inclus)

– le décompte des sommes dues,

– la mise en demeure du 15 janvier 2015 et la sommation de payer du 8 juin 2015 ;

Il résulte de ce qui a été dit plus haut que les assemblées de 2014, 2015 et 2016 sont définitives ;

La SCI du 15 n’a pas contesté en première instance et ne conteste pas davantage devant la cour le montant de la créance du syndicat, par ailleurs justifiée au vu des pièces produites ;

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a condamné la SCI du 15 à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 6] la somme de 7.138,85 € au titre des charges impayées au 4ème trimestre 2017, outre les intérêts au taux légal sur la somme de 2534,23 € à compter de la mise en demeure du 15 janvier 2015, sur la somme de 2941,15 € à compter de la sommation de payer du 8 juin 2015, et sur le montant global à compter du 6 octobre 2017 ;

Sur les demandes de dommages-intérêts

Sur la demande de dommages-intérêts du syndicat des copropriétaires

Il résulte de l’article 1231-6 alinéa 2 que ‘le créancier auquel son débiteur en retard a causé, pas sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages-intérêts, distincts des intérêts moratoires de la créance ;

Entre le 24 juillet 2014 et le 4ème trimestre 2017, soit plus de 3 ans, la SCI du 15 s’est abstenue de payer les charges de copropriété, malgré la mise en demeure et la sommation de payer qui lui ont été adressées en 2015, ce qui caractérise sa mauvaise foi ;

Les manquements systématiques et répétés de la SCI du 15 à son obligation essentielle à l’égard du syndicat des copropriétaires de régler les charges de copropriété sont constitutifs d’une faute qui cause à la collectivité des copropriétaires, privée de sommes importantes nécessaires à la gestion et à l’entretien de l’immeuble, un préjudice financier, direct et certain, distinct de celui compensé par les intérêts moratoires ;

Ce préjudice a été justement apprécié par le tribunal ; le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a condamné la SCI du 15 à payer au syndicat la somme de 1.000 € de dommage-intérêts ;

En revanche, du fait que la SCI du 15 est désormais à jour du paiement des charges en effectuant des versements réguliers et suffisants depuis le mois de novembre 2020 (pièce syndicat n°57), suite il est vrai à un commandement aux fins de saisie-vente, le syndicat doit être débouté de sa demande de condamnation de la SCI du 15 à lui payer la somme supplémentaire de 3.000 € de dommages-intérêts ;

Sur la demande de dommages-intérêts de la société Cabinet Roumilhac venant aux droits de la société EGIC

En application des articles 32-1 du code de procédure civile et 1240 du code civil, l’exercice d’une action en justice ne dégénère en abus que s’il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi, ou s’il s’agit d’une erreur grave équipollente au dol ; l’appréciation inexacte qu’une partie se fait de ses droits n’est pas constitutive en soi d’une faute ;

La société Cabinet Roumilhac venant aux droits de la société EGIC, ne rapporte pas la preuve de ce que l’action de la SCI du 15 aurait dégénéré en abus ;

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a débouté la société EGIC aux droits de laquelle vient la société Cabinet Roumilhac de sa demande de dommages-intérêts ;

Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l’application qui y a été équitablement faite des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Il y a lieu de dire que la condamnation par application de l’article 700 du code de procédure civile de première instance prononcée au profit de la société par actions simplifiée unipersonnelle Etude de gestion immobilière de copropriété et de gérance (EGIC) l’est au profit de la société par actions simplifiée unipersonnelle Cabinet Roumilhac exerçant sous le nom commercial Cabinet Jourdan, venant aux droits de la société par actions simplifiée unipersonnelle Etude de gestion immobilière de copropriétés et de gérances (EGIC) ;

La SCI du 15, partie perdante, doit être condamnée aux dépens d’appel ainsi qu’à payer les sommes supplémentaires suivantes par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel :

– au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 6] : 4.000 €,

– à la société par actions simplifiée unipersonnelle Cabinet Roumilhac : 3.000 € ;

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l’article 700 du code de procédure civile formulée par la SCI du 15 ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Reçoit la société par actions simplifiée unipersonnelle Cabinet Roumilhac exerçant sous le nom commercial Cabinet Jourdan, venant aux droits de la société par actions simplifiée unipersonnelle Etude de gestion immobilière de copropriétés et de gérances (EGIC), en son intervention volontaire ;

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Déboute le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 6] de sa demande supplémentaire de dommages-intérêts ;

Dit que la condamnation par application de l’article 700 du code de procédure civile de première instance prononcée au profit de la société par actions simplifiée unipersonnelle Etude de gestion immobilière de copropriétés et de gérances (EGIC) l’est au profit de la société par actions simplifiée unipersonnelle Cabinet Roumilhac exerçant sous le nom commercial Cabinet Jourdan, venant aux droits de la société par actions simplifiée unipersonnelle Etude de gestion immobilière de copropriété et de gérance (EGIC) ;

Condamne la société civile immobilière du 15 aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer les sommes supplémentaires suivantes par application de l’article 700 du même code en cause d’appel :

– au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 6] : 4.000 €,

– à la société par actions simplifiée unipersonnelle Cabinet Roumilhac : 3.000 € ;

Rejette toute autre demande.

LE GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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