Conflits entre associés : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/01204

·

·

Conflits entre associés : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/01204

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 10

ARRÊT DU 19 JANVIER 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 22/01204 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFBQU

Décision déférée à la cour :

Jugement du 07 janvier 2022-Juge de l’exécution de CRÉTEIL-RG n° 21/07003

APPELANTE

Madame [H] [T]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Benoît HENRY de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

INTIMÉ

Monsieur [S] [T]

[Adresse 4]

[Localité 3]- BELGIQUE

Représenté par Me Hélène WOLFF de l’AARPI Cabinet WOLFF – ZAZOUN – KLEINBOURG, avocat au barreau de PARIS, toque : K0004

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 08 décembre 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

-contradictoire

-par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

Par acte notarié du 4 mars 2011, la Sci [T] a été constituée entre M. [S] [T] et son épouse, Mme [H] [C].

Par ordonnance de référé du 4 avril 2019, un administrateur provisoire, Me Michèle Lebossé, a été désigné pour une durée de douze mois, prolongée pour une nouvelle durée de douze mois à compter du 4 avril 2020 par une ordonnance du 16 juillet 2020.

Par arrêt du 10 mars 2021, signifié le 10 août 2021, la cour d’appel de Paris a confirmé l’ordonnance de référé du 16 juillet 2020 prolongeant la mission de Maître [Z] [M] en qualité d’administrateur provisoire de la Sci [T] et, y ajoutant, a dit que les frais liés à l’occupation du bien sis [Adresse 1] devaient être pris en charge, à titre d’avance en compte courant d’associés, par M. [T] conformément à la décision de l’assemblée générale de la SCI du 20 avril 2018.

Le 17 mars 2021, Mme [H] [C] épouse [T] a déposé une requête en rectification d’erreur matérielle, complément d’arrêt et ultra petita, concernant l’arrêt précité.

Par arrêt du 24 novembre 2021, la cour a fait droit à la requête en ce qu’elle avait omis de statuer sur les frais de l’administration provisoire et, statuant de ce chef, a dit que ces frais étant engagés dans l’intérêt de la Sci [T], ceux-ci devaient être supportés par cette dernière et a donc confirmé l’ordonnance de référé du 16 juillet 2020 en ce qu’elle avait dit que les frais de l’administration provisoire étaient à la charge de la Sci [T]. En revanche, il a dit que le reste du dispositif de l’arrêt du 10 mars 2021 qui avait confirmé l’ordonnance était sans changement.

En exécution de l’arrêt du 10 mars 2021, Mme [T] a fait pratiquer, le 16 septembre 2021, une saisie-attribution, dénoncée le 24 septembre suivant, sur le compte bancaire de M. [S] [T], ouvert dans les livres du Crédit Agricole, pour paiement d’une somme de 13.984,50 euros en principal, correspondant à des factures EDF, Orange et à la taxe d’habitation pour l’année 2020.

Par acte d’huissier du 13 octobre 2021, M. [T] a fait assigner Mme [T] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bobigny en mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 16 septembre 2021 sous astreinte de 500 euros par jour de retard et en condamnation de Mme [T] à lui payer la somme 10.000 euros à titre de dommages-intérêts.

Par jugement du 7 janvier 2022, le juge de l’exécution a :

– déclaré recevable la contestation de la saisie-attribution pratiquée le 16 septembre 2021 et dénoncée le 24 septembre 2021,

– ordonné la mainlevée de ladite saisie-attribution,

– dit n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte,

– débouté M. [T] de sa demande de dommages-intérêts,

– condamné Mme [C] à payer M. [T] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [C] aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge de l’exécution a constaté que M. [T] justifiait avoir dénoncé sa contestation à l’huissier de justice instrumentaire dans le délai légal et que la mesure de saisie-attribution était fondée sur l’arrêt de la cour d’appel du 10 mars 2021, qui n’avait pas entendu condamner M. [T] à payer à Mme [T] les frais liés à l’occupation du bien, la prise en charge de ces frais devant se faire par l’intermédiaire d’un compte courant d’associé ; que si Mme [T] avait saisi la cour d’une requête en rectification d’erreur matérielle tendant à voir dire que M. [T] assumerait seul le règlement des frais liés à l’occupation du bien, la cour avait considéré, dans son arrêt du 24 novembre 2021, qu’il n’y avait pas d’omission matérielle. Le juge de l’exécution a donc levé la mesure de saisie-attribution en l’absence de titre exécutoire constatant une créance certaine et exigible à l’encontre de M. [T] au titre des frais d’occupation du bien.  

Selon déclaration du 19 janvier 2022, Mme [T] a interjeté appel de ce jugement.

Par dernières conclusions du 14 avril 2022, elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

– juger de la parfaite validité de la procédure de saisie conformément à l’ordonnance de non-conciliation du 7 mars 2018, à la décision d’assemblée générale de la Sci [T] du 20 avril 2018 et de l’arrêt rendu le 10 mars 2021 par la cour d’appel de Paris,

in limine litis,

– déclarer les conclusions de M. [T] du 16 mars 2022 irrecevables en ce qu’elles ne mentionnent pas son domicile réel au regard des articles 960 et 961 du code de procédure civile,

– débouter M. [T] de toutes ses demandes,

à titre principal,

– déclarer irrecevable la contestation de la saisie-attribution accompagnée de l’avis de dépôt du 13 octobre 2021 ne portant aucune signature du destinataire ni aucune date de la remise,

subsidiairement,

– déclarer mal fondé M. [T] en sa contestation de la saisie-attribution du 16 septembre 2021,

– déclarer régulière ladite saisie-attribution,

– rejeter la demande de mainlevée de ladite saisie-attribution,

en conséquence,

– débouter M. [T] de l’intégralité de ses demandes et « confirmer la pleine efficacité de la saisie sur son compte bancaire du Crédit Agricole »,

– condamner M. [T] à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 16 mars 2022, M. [T] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il l’a débouté de sa demande en dommages-intérêts,

statuant à nouveau sur cette demande,

– condamner Mme [T] à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil,

– condamner Mme [T] à lui payer la somme de 4000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 novembre 2022.

Par conclusions signifiées le 7 décembre 2022, Mme [T] demande la révocation de l’ordonnance de clôture afin de voir admettre aux débats et déclarer recevables ses dernières conclusions de sursis à statuer. A titre de causes graves de révocation au sens de l’article 803 du code de procédure civile, elle fait valoir :

– l’attestation de la mairie d'[Localité 3] (Belgique) du 27 juin 2022, trois récents actes de signification d’huissier du 10 octobre 2022, l’ordonnance de réouverture des débats devant le tribunal judiciaire de Paris du 20 septembre 2022, le courrier officiel adressé à Me Branjonneau le 13 octobre 2022, la constitution du 18 octobre 2022 devant la cour d’appel de Rennes, le bulletin de ladite cour faisant remarquer à l’avocat constitué que l’avis de déclaration d’appel a été retourné au greffe avec la mention « destinataire inconnu à l’adresse », la sommation de communiquer du 28 octobre 2022, tous éléments dont il résulte, à son sens, que son époux ne justifie pas de son adresse actuelle ;

– l’arrêt n°21/07231 du 24 février 2022, dont il résulte que la présidente de la chambre 1-10 de la cour d’appel, pour avoir pris position dans la procédure précitée en mettant M. [T] hors de cause, ne peut pas siéger dans la présente procédure ;

– la saisie de la pension alimentaire de l’enfant mineur [K] et de sa propre pension alimentaire au titre du devoir de secours par Mael Monfort, son propre avocat, le 3 décembre 2022, au mépris du caractère insaisissable de ces pensions.

Par conclusions d’incident « devant le conseiller de la mise en état », signifiées le 7 décembre 2022 également, Mme [T] demande le sursis à statuer, dans l’attente de la décision du tribunal judiciaire de Paris sur la responsabilité de l’huissier de justice ayant pratiqué la saisie, la condamnation de M. [T] à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Au soutien de ces conclusions, elle fait valoir que M. [T] a fourni plusieurs adresses contradictoires au gré des multiples procédures qui les opposent, que malgré sa sommation de communiquer du 28 octobre 2022, il n’a pas produit « la pièce dans un bordereau portant un numéro de pièce pour justifier de son domicile » ; que la présidente de la chambre ne peut pas statuer dans la présente procédure n°RG 22/02104 alors qu’elle a déjà statué sur le fond dans l’arrêt n°21/07231 rendu le 24 février 2022, mettant son époux hors de cause ; que le 1er décembre 2022, son propre huissier de justice lui a fait savoir qu’il avait saisi le tribunal judiciaire de Paris aux fins d’obtention d’un titre exécutoire contre elle pour la rédaction de la requête en saisie des rémunérations de M. [T] et pour la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée sur le compte de son époux ; que son propre avocat dans le cadre des procédures de divorce et de désignation d’un administrateur provisoire de la Sci [T] a refusé de plaider, a déposé des écritures sans fondement juridique et a fait saisir le 3 décembre dernier sa pension alimentaire au titre du devoir de secours et celle de son fils mineur ; qu’à l’inverse, l’huissier CERTEA a donné mainlevée en avril 2022 de la saisie sur le compte de M. [T] et a procédé à la saisie sur un des salaires de M. [T] mais en se trompant de société ; enfin que Maître [M], désignée administrateur provisoire de la Sci [T] le 25 novembre 2021 et jusqu’au 25 décembre 2021 a omis de faire saisir les comptes de M. [T] selon l’arrêt du 10 mars 2021.

MOTIFS

Sur la demande de révocation de l’ordonnance de clôture aux fins de voir admettre aux débats les conclusions de sursis à statuer

Selon les dispositions de l’article 803 aliné 1er du code de procédure civile, l’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue.

En l’espèce l’ordonnance de clôture a été rendue le 17 novembre 2022.

En ce qui concerne, en premier lieu, le fait que M. [T] fournirait des adresses différentes dans le cadre de plusieurs autres procédures, Mme [T] elle-même situe ces renseignements contradictoires à des dates antérieures au 17 novembre (27 juin 2022, 20 septembre 2022, 10 octobre 2022, 13 octobre 2022, 18 octobre 2022). D’autre part, c’est depuis ses premières conclusions que l’appelante soulève l’irrecevabilité des conclusions de l’intimé et il sera statué infra sur ce moyen.

En ce qui concerne, en deuxième lieu, la partialité alléguée du président de la chambre parce qu’il figure dans la composition de l’arrêt n°RG 21/07231 rendu le 24 février 2022, la circonstance que Mme [T] soit appelante de plusieurs procédures d’appel de jugements rendus par un juge de l’exécution ne prive par le président de la chambre chargée des appels de ces jugements de la possibilité de statuer successivement dans le cadre de plusieurs d’entre elles. En tout état de cause, outre que cette cause n’est pas postérieure à l’ordonnance de clôture, cette allégation ne peut être élevée devant la chambre précisément présidée par le magistrat mis en cause.

Enfin la circonstance que Mme [T] aurait fait l’objet d’une saisie le 3 décembre 2022 à l’initiative de son avocat dans la procédure de divorce, si elle est effectivement postérieure à l’ordonnance de clôture du 17 novembre précédent, est sans rapport avec le présent appel d’un jugement ordonnant la mainlevée d’une saisie-attribution pratiquée sur le compte bancaire de son époux.

Aucune cause grave révélée depuis le prononcé de l’ordonnance de clôture n’est ainsi caractérisée, qui justifierait la révocation de celle-ci. La demande de révocation de l’ordonnance de clôture doit donc être rejetée.

L’ordonnance de clôture n’étant pas révoquée, il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de sursis à statuer, outre que celle-ci est fondée sur les mêmes motifs que la demande de révocation de l’ordonnance de clôture et adressée improprement au conseiller de la mise en état dès lors que l’appel des décisions du juge de l’exécution est régi, conformément aux dispositions de l’article R. 121-20 du code des procédures civiles d’exécution, par la procédure à bref délai de l’article 905 du code de procédure civile, qui ne comporte pas de conseiller de la mise en état.

Sur la recevabilité des conclusions de M. [T]

Aux termes de l’article 960 alinéa 2 du code de procédure civile, l’acte de constitution d’avocat indique, s’il s’agit d’une personne physique, ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance.

L’article 961 alinéa 1er du même code dispose que les conclusions des parties ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées à l’alinéa 2 de l’article précédent, notamment le domicile, n’ont pas été fournies.

A la suite des sommations de communiquer de Mme [T] signifiées les 17 mai et 28 octobre 2022, le conseil de M. [T] a confirmé l’adresse figurant en tête de ses uniques conclusions signifiées le 16 mars 2022 dans la présente procédure et a justifié, par une attestation de l’officier de l’Etat Civil de la commune d'[Localité 3] en Belgique (Région de Bruxelles-Capitale), de la réalité de son adresse à [Adresse 4].

Par conséquent, il y a lieu de rejeter le moyen tiré de l’inobservation des articles 960 et 961 du code de procédure civile tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions de l’intimé.

Sur la recevabilité de la contestation formée par M. [T]

Mme [T] soulève l’irrecevabilité de la contestation de la saisie-attribution formée par M. [T] au motif que n’est pas produit l’avis de réception, signé par son destinataire et daté, de la lettre de dénonciation de la contestation à l’huissier instrumentaire.

Aux termes de l’article R. 211-11 alinéa 1er du code des procédures civiles d’exécution, à peine d’irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie.

Il résulte de ces dispositions que la date de la réception de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception de dénonciation de l’assignation devant le juge de l’exécution est sans incidence sur la recevabilité de la contestation. Seule importe la preuve du respect du délai de dénonciation par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, visé au texte précité, et par conséquent, de la date d’envoi de cette lettre. A cet effet, l’intimé produit la lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée le 13 octobre 2021 par la société d’huissiers de justice Actay à la société d’huissiers Certea qui avait procédé à la saisie-attribution, et joint le récépissé de dépôt de ladite lettre portant le cachet de la poste du 13 octobre 2021, date de l’assignation devant le juge de l’exécution.

C’est donc à juste titre que le juge de l’exécution a déclaré recevable, au regard des dispositions de l’article R. 211-11 précitées, la contestation formée par M. [T].

Sur la régularité de la saisie-attribution et la demande de mainlevée de la saisie-attribution

L’appelante fait valoir que :

elle doit faire face à de lourdes charges en raison des travaux rendus nécessaires dans le domicile conjugal qu’elle occupe avec son fils [K] et à de multiples dettes contractées du fait du détournement des fonds communs par son époux ;

sa demande est proportionnée d’une part à ses besoins les plus élémentaires de chauffage et d’éclairage, à ses faibles capacités financières et à la nécessité d’acquitter les taxes foncières dues, d’autre part aux très importantes capacités financières de son époux ;

son époux doit régler pour la Sci [T] les frais liés à l’occupation du bien devant être pris en charge à titre d’avance en compte courant d’associés, conformément à l’arrêt du 10 mars 2021 et à la décision de l’assemblée générale de la Sci du 20 avril 2018 ; comme la gestion de la Sci [T] est entravée par M. [T], tout associé, dont elle-même, muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible de la Sci [T] peut saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur pour en obtenir le paiement.

L’intimé soutient pour sa part que :

la créance dont se prévaut l’appelante n’est ni certaine ni exigible au regard des arrêts rendus par la cour d’appel les 10 mars et 24 novembre 2021, ce dernier arrêt ayant dit qu’il n’y avait pas d’erreur matérielle dans le premier, la cour n’ayant pas fait droit, en toute connaissance de cause des demandes des parties, à la demande de Mme [T] de voir mettre les frais liés à l’occupation du bien à la charge de son époux ;

dans son arrêt du 10 mars 2021, la cour n’a pas précisé la nature des frais liés à l’occupation du bien, mais il ne peut s’agir des factures de téléphonie, d’internet ou d’abonnement à des chaînes de télévision pour l’usage personnel et les loisirs de l’appelante ou de sa fille (factures EDF et Orange au nom de la fille de Mme [T]) ;

le titulaire d’un compte courant d’associé peut en demander à tout moment le remboursement ; il s’agit donc d’un prêt à la société et non pas d’un prêt à l’égard de Mme [T] ; or une procédure en dissolution de la Sci et de remboursement de ce compte courant d’associé est actuellement en cours devant le tribunal judiciaire de Paris et Mme [T] n’est pas recevable à en solliciter le paiement entre ses mains.

Selon l’article R. 121-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution invoqué par l’appelante, le juge de l’exécution ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice, en l’occurrence l’arrêt du 10 mars 2021, complété par arrêt du 24 novembre suivant, qui sert de fondement aux poursuites.

Or il ne ressort pas de ces titres que Mme [T] ait été désignée administrateur provisoire de la Sci [T], même après que le mandat de Maître [Z] [M] a pris fin. Alors que l’arrêt du 10 mars 2021 a dit que les frais liés à l’occupation du bien de la Sci devaient être pris en charge à titre d’avance en compte courant d’associé, conformément à la décision de l’assemblée générale du 20 avril 2018, par M. [T], seule la Sci ou son administrateur aurait qualité pour agir le cas échéant à l’encontre de M. [T] s’il ne respectait pas les obligations imparties par ce titre exécutoire. Pour sa part, Mme [T] n’a pas la qualité de créancier de M. [T], ne disposant d’aucun titre exécutoire à son encontre.

C’est donc à juste titre que le juge de l’exécution a estimé que l’appelante ne disposait d’aucun titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible à son égard.

Sur la demande en dommages-intérêts fondée sur l’article 1240 du code civil

Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

M. [T] soutient que c’est avec intention de nuire que son épouse a fait saisir le compte dont il est co-titulaire avec sa mère, âgée de 90 ans, causant à celle-ci une grande inquiétude, au mépris des répercussions sur l’état de santé de sa mère.

Mme [T] pour sa part soutient que le compte saisi, ouvert dans les livres du Crédit Agricole, est le seul que son époux ait conservé en France, et qu’elle a dû agir pour le compte de la Sci [T], l’état d’entretien de l’immeuble commun se dégradant et son mari ne remplissant pas les engagements pris lors de l’assemblée générale du 20 avril 2018.

Il appartient à M. [T] de démontrer la faute commise par son épouse dans l’exécution de l’arrêt du 10 mars 2021 en vertu duquel elle a déclaré agir. Or en l’espèce, Mme [T] s’est méprise sur l’étendue de ses droits en faisant exécuter ledit arrêt, mais le fait de saisir un compte bancaire joint avec un tiers ne constitue pas en soi un abus ni même une faute, dans l’exercice des voies d’exécution. Et M. [T] n’allègue ni ne démontre aucune faute commise par Mme [T] à cet égard.

Il y a donc lieu à confirmation de ce chef de dispositif également.

Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Mme [T], partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel, ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 3000 euros en compensation des frais exposés par M. [T] à hauteur d’appel et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Rejette la demande de révocation de l’ordonnance de clôture du 17 novembre 2022 ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Condamne Mme [H] [T] à payer à M. [S] [T] la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [H] [T] aux entiers dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x