Conflits entre associés : 13 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00589

·

·

Conflits entre associés : 13 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00589

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRÊT DU 13 JANVIER 2023

(n° / 2023, 20 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00589 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CC4VI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2020 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2018033258

APPELANT

Monsieur [U] [R]

Né le [Date naissance 1] 1961 à DAKAR (Sénégal)

De nationalité française

Demeurant [Adresse 6]

[Localité 10]

Représenté par Me Céline ROMERO, avocate au barreau de PARIS, toque : C0226,

INTIMÉS

Monsieur [Z] [H]

Né le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 13] (77)

De nationalité française

Demeurant [Adresse 5]

[Localité 10]

Représenté par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

Assisté de Me Jacques MOURY de la SCP EL KHOURY MOURY, avocat au barreau de PARIS, toque A 213,

Monsieur [X] [T]

De nationalité française

Demeurant [Adresse 9]

[Localité 10]

Représenté par Me Sébastien BONO de la SAS BONO AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D674,

Monsieur [D] [T]

Né le [Date naissance 8] 1970 à AGRARADJ ( ALGERIE)

De nationalité française

Demeurant [Adresse 7]

[Localité 10]

Représenté et assisté de Me Nicolas CHAIGNEAU de la SELARL CPNC Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : D0230,

S.A.S. ALM FINANCES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 384 110 730,

Dont le siège social est situé [Adresse 3]

[Localité 10]

Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753,

Assistée de Me Joël BETTAN de la SELEURL CABINET BETTAN SELARL, avocat au barreau de PARIS, toque : A0763,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant la cour composée en double-rapporteur de :

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère.

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre,

Madame Anne-Sophie TEXIER, conseillère,

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère.

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

FAITS ET PROCÉDURE:

La SARL Central [Localité 12], créée en 1955, exploitait un fonds de commerce d’hôtellerie.

Le capital de la société était initialement réparti comme suit :

– 200 parts pour Mme [V]

– 300 parts pour M. [C]

– 500 parts pour M. [J] [T].

Par acte du 23 novembre 1989, une promesse synallagmatique de cession de la totalité des parts de la société Central [Localité 12], soumise à diverses conditions suspensives, a été consentie pour le prix de 4. 200. 000 francs par M. [J] [T],

Mme [V] et M. [C], au bénéfice de MM. [H] et [N].

Cette promesse n’a pas été réalisée du fait du refus des promettant d’accorder aux bénéficiaires une prorogation du délai de réalisation.MM.[H] et [N], bénéficiaires de la promesse, ont alors engagé une procédure contre les promettants en exécution forcée de la promesse devant le tribunal de commerce de Paris.

Alors que cette procédure était en cours, et par acte du 2 mai 1990, M. [C] a cédé 250 parts de la société Central [Localité 12] à M. [J] [T] et 50 parts à

Mme [V]. Le capital de la société se trouvant alors réparti comme suit :

– 750 parts pour M. [J] [T] ;

– 250 parts pour Mme [V].

Par arrêt du 30 septembre 1991, la cour d’appel de Paris, confirmant le jugement du tribunal de commerce de Paris du 26 février 1991, a fait droit aux demandes d’exécution forcée de la promesse au profit de MM.[H] et [N].

Sans attendre l’issue du pourvoi formé contre l’arrêt du 30 septembre 1991, MM.[H] et [N] ont usé de la faculté de substitution figurant dans la promesse du 23 novembre 1989 et le 11 décembre 1991, la SARL ALM Finances a ainsi acquis

970 parts de la société Central [Localité 12], MM. [H] et [N] ont chacun acquis 10 parts. Le prix de 3 990 000 francs a été payé par chèque de banque.

Le 11 décembre 1991, MM. [H] et [N] ont pris possession de l’hôtel, ont révoqué le gérant, M. [J] [T] et ont désigné M.[H] comme nouveau gérant. Le 23 janvier 1992, ils ont décidé de la transformation de la SARL société

Central [Localité 12] en SNC. La SAS ALM Finances, constituée le 24 janvier 1992 et dirigée par M. [H], a exploité le fonds de commerce d’hôtellerie appartenant à la société Central [Localité 12].

Par arrêt du 25 janvier 1994, la Cour de cassation a cassé l’arrêt du 30 septembre 1991 et renvoyé l’affaire devant la cour d’appel d’Orléans pour qu’il soit à nouveau statué.

Suivant arrêt du 11 septembre 1998, la cour d’appel d’Orléans, statuant comme cour de renvoi, a dit nulle la promesse de cession des parts et débouté MM.[H] et [N] de leurs demandes.

M.[J] [T] est décédé le [Date décès 4] 1999 et par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris du 1er octobre 2008, M. [X] [T] a été déclaré en possession de l’ensemble des biens du défunt rétroactivement à compter de la date du décès de celui-ci.

Le 29 mai 2007, Mme [V] a cédé à M. [X] [T] les parts qu’elle détenait dans la société Central [Localité 12], ce dernier se considérant alors comme seul associé de la société.

Par acte du 17 février 2009, M. [X] [T] a cédé 333 parts de la société Central [Localité 12] à M.[D] [T] moyennant le prix de 2. 540 euros, ainsi que

333 parts à M. [R] pour le même prix. Le capital de la société se trouvait alors réparti comme suit:

– 334 parts pour M.[X] [T]

– 333 parts pour M.[D] [T]

– 333 parts pour M.[R].

Le 7 décembre 2009, MM.[H] et [N] ont cédé l’intégralité de leurs parts dans la société Central [Localité 12] à la société ALM Finances et le 8 décembre 2009, la société ALM Finances a dissous la société Central [Localité 12] par transmission universelle de son patrimoine.

Le 5 janvier 2012, M. [X] [T] a fait assigner MM.[H] et [N], les sociétés Central [Localité 12] et ALM Finances pour voir constater que MM.[H] et [N] et la société ALM Finances n’ont pas la qualité d’associé de la société

Central [Localité 12], déclarer nuls l’ensemble des actes accomplis par eux en qualité d’associé, désigner un administrateur provisoire et ordonner une mesure d’expertise judiciaire.

Le 21 juillet 2015 MM.[X] et [D] [T], d’une part, M. [H] et la société ALM Finances, d’autre part, ont signé un protocole transactionnel aux termes duquel MM. [X] et [D] [T] renoncent à leurs demandes formées devant le tribunal de commerce de Paris ainsi qu’au bénéfice de l’arrêt de la Cour de cassation du

25 janvier 1994 et de l’arrêt de la cour d’appel d’Orléans du 11 septembre 1998, acquiescent au jugement du tribunal de commerce de Paris du 26 février 1991 et reconnaissent la validité du transfert des parts de la société Central [Localité 12] à la société ALM Finances et à MM.[H] et [N] , ainsi qu’à la transmission universelle de patrimoine contre paiement d’une indemnité de 150.000 euros.

Par jugement du 3 mars 2016, le tribunal de commerce de Paris a donné acte aux parties de leur désistement d’instance et d’action réciproque.

La présente procédure:

Par actes des 11, 12 et 15 juin 2018, M.[R], arguant que ses droits d’associé de la société Central [Localité 12] ont été bafoués et que le protocole transactionnel auquel il n’est pas partie lui est inopposable, a fait assigner devant le tribunal de commerce de Paris la société ALM Finances à titre personnel et, venant aux droits de la société Central [Localité 12] par suite de transmission universelle de patrimoine, MM. [H], [N] (décédé), [X] [T] et [D] [T], pour voir juger que MM.[H] et [N] et la société ALM Finances n’ont jamais eu la qualité d’associés de la société

Central Damrémont, annuler tout acte accompli en qualité d’associés depuis le 11 décembre 1991 sauf ceux qui seraient conformes à l’intérêt de la société, et désigner un administrateur provisoire pour la société Central [Localité 12] à l’effet de tout reconstituer.

Par jugement du 4 décembre 2020, non assorti de l’exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris a dit nul l’acte introductif d’instance délivré le 15 juin 2018 à l’encontre de M. [H], dit irrecevable pour prescription l’action de M. [R], ouverte par l’acte introductif d’instance du 21 mars 2019, à l’encontre de M. [H], déclaré

M. [R] irrecevable en l’ensemble de ses demandes, débouté M. [X] [T] de l’ensemble de ses demandes, condamné M. [R] à payer 10. 000 euros à la société

ALM Finances et 5. 000 euros chacun, à M. [D] [T] et à M. [H], au titre de l’article 700 du code de procédure civile, rejeté les demandes des parties autres, plus amples ou contraires et condamné M. [R] aux dépens.

M. [R] a relevé appel des dispositions du jugement le concernant selon déclaration du 3 janvier 2021.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 mars 2022, M. [R] demande à la cour de :

– le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

– infirmer la décision entreprise dans toutes ses dispositions,

– statuant à nouveau, déclarer irrecevables M. [H] et la société

ALM Finances, et en toute hypothèse, mal fondés à contester l’opposabilité et la validité des cessions de parts intervenues en 2007 et 2009, faute de qualité d’associés de la société Central [Localité 12], le déclarer recevable et bien fondé en son action, constater que

M. [H] en tant que de besoin, et la société ALM Finances, n’ont pas et n’ont jamais eu la qualité d’associé de la société Central [Localité 12],

– en conséquence, déclarer nuls et de nul effet, en tout état de cause inopposables, et prononcer la nullité ou l’inopposabilité, sous réserve de la mission qui sera ci-après confiée à l’administrateur provisoire, de l’ensemble des actes par eux accomplis en cette prétendue qualité depuis le 11 décembre 1991, à l’exception de ceux qui se révéleraient conformes aux intérêts de la société et de ses associés

– désigner un mandataire de justice en qualité d’administrateur provisoire avec mission de mettre en ‘uvre les conséquences juridiques de l’annulation rétroactive ou de l’inopposabilité de tous les actes intervenus depuis le 11 décembre 1991, à l’exception de ceux qui pourraient se révéler en définitive favorables à la société, à son intérêt social ou à celui de ses associés, faire un tri rigoureux entre les uns et les autres, accomplir toutes les formalités correspondantes notamment auprès du greffe du registre du commerce et des sociétés de Paris, de l’administration de l’enregistrement territorialement compétente, procéder à toutes les publicités légalement requises pour les rendre opposables aux tiers et corrélativement, gérer la société, poursuivre l’exploitation de son fonds de commerce d’hôtellerie et préparer son avenir de façon concertée avec les associés de la société Central [Localité 12], en commençant par procéder à la nomination de M.[R] en qualité de gérant de ladite société,

– condamner in solidum M. [H] et la société ALM Finances, au paiement des frais de l’administrateur provisoire,

– ordonner  » avant dire droit  » une mesure d’expertise confiée à tel expert judiciaire comptable et financier qu’il plaira à la cour de désigner avec mission de reconstituer, à compter du 11 décembre 1991, tous les flux et mouvements financiers de la société Central [Localité 12] et des structures juridiques qui en ont constitué la suite dans l’exploitation de son fonds de commerce d’hôtellerie de manière à déterminer le montant des sommes qui ont été indûment perçues directement ou indirectement par M. [H] ainsi que la société ALM Finances et qui en sont comptables et débiteurs in solidum à l’égard des associés de la société Central [Localité 12], plus généralement, établir la situation comptable, financière, économique et sociale de la structure juridique exploitant actuellement le fonds de commerce d’hôtellerie de la société Central [Localité 12], afin notamment, de mesurer l’ampleur de la spoliation financière dont ont été victimes les associés réels de ladite société et, en particulier, M. [R], et déterminer la valeur actuelle des droits sociaux de M. [R] et du montant des dividendes dont il a été indûment privé depuis le 17 février 2009, mettre à la charge de M. [H] et la société ALM Finances les frais nécessités par la mise en ‘uvre de cette mission jusqu’à son terme ; au besoin, les condamner in solidum au paiement de ces frais,

– condamner in solidum M. [H] ainsi que la société ALM Finances à lui payer la somme provisionnelle de 500. 000 euros chacun à valoir sur le montant des sommes qui lui seront ultérieurement accordées au titre de la valeur de ses parts sociales et au titre des dommages-intérêts pour les dividendes dont il a été indûment privés depuis

le 17 février 2009,

– constater en outre que MM. [H], [D] [T] et [X] [T] ont commis une faute au préjudice de M. [R] en signant le protocole d’accord en date du

21 juillet 2015, en fraude de ses droits, en conséquence, déclarer que ce protocole d’accord ne lui est à aucun titre opposable,

-condamner in solidum MM. [H], [D] [T] et [X] [T] et la société ALM Finances, à lui payer la somme de 150. 000 euros chacun à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la signature du protocole d’accord en date du 21 juillet 2015, en fraude de ses droits,

– subsidiairement, condamner in solidum MM.[D] [T] et [X] [T] à lui régler la somme de 50. 000 euros au titre de la cession de ses droits par ces derniers dans le protocole du 21 juillet 2015,

-débouter les intimés de leur appel incident et de toutes demandes, fins et prétentions contraires aux présentes,

– condamner M. [H], la société ALM Finances et MM. [D] [T] et [X] [T] à lui régler la somme de 15. 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– les condamner in solidum en tous les dépens, y compris la totalité des frais nécessités par les deux missions sollicitées, l’une confiée à un administrateur provisoire, l’autre confiée à l’expert judiciaire comptable et financier.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 février 2022, la société ALM Finances demande à la cour de :

– la recevoir en ses demandes, fins et conclusions,

– sur les prétentions élevées par M. [R] à son encontre:

-à titre principal:

– confirmer le jugement entrepris 1)en ce qu’il a déclaré irrecevable M. [R] en l’ensemble de ses demandes, 2)en ce qu’il a dit que les prétentions élevées par M. [R] à l’encontre de la société ALM Finances sont irrecevables comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée par la Cour de cassation le 25 janvier 1994 et par la cour d’appel d’Orléans le 11 septembre 1998 et au défaut subséquent de qualité de M. [R] de poursuivre l’exécution de ces décisions, 3)en ce qu’il a dit, après avoir constaté que l’arrêt rendu le

11 septembre 1998 par la cour d’appel d’Orléans n’avait jamais été signifié à la société

ALM Finances, que M. [R] est dépourvu du droit à agir en ce qui concerne ses prétentions à l’encontre de la société ALM Finances en exécution d’une décision jamais signifiée à cette société,4) en ce qu’il a dit, ayant constaté que les 333 parts de la société dont M. [R] dit être titulaire ont été acquises en vertu d’une cession, et ensuite d’une séquence de cessions, qui n’ont fait l’objet d’aucune des formalités prescrites par les dispositions combinées des articles L. 221-14 et L. 223-14 du code de commerce, que cette cession, de même que les cessions qui l’ont précédée, sont inopposables tant à la société ALM Finances qui vient aux droits de la société Central [Localité 12] dont les titres ont été acquis, qu’aux tiers, M. [R] n’ayant dès lors aucune qualité pour les invoquer et échoue à établir sa qualité à agir à l’égard de la société ALM Finances, en ce qu’il a dit que les prétentions de M. [R], qui agit  » en sa qualité d’associé de la société Central [Localité 12] « , se heurtent à une fin de non-recevoir tirée de l’impossibilité d’exercer une action qui suppose l’existence de cette société, 5) en ce qu’il a dit que les prétentions de M. [R] se heurtent à la prescription,

– Constater que l’arrêt de la cour de renvoi d’Orléans du 11 septembre 1998 réputé contradictoire pour M.[N] n’a pas été valablement signifié à M. [N], décédé le

9 octobre 1996, et donc à la date à laquelle cet arrêt a été rendu,

-Dire que l’arrêt de la cour d’appel de renvoi d’Orléans du 11 septembre 1998 est non avenu faute d’avoir été valablement signifié dans le délai de six mois de son prononcé,

– Dire, en conséquence, que la procédure engagée par M.[R] ne peut prospérer puisque M. [R] n’a pas attrait en première instance devant le tribunal de commerce de Paris l’ensemble des parties en la cause, dont la succession de M. [N] partie à la promesse synallagmatique de vente des parts de la société Central [Localité 12] conclue le 23 novembre 1989.

à titre subsidiaire, si la cour devait infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré irrecevables les prétentions de M.[R] à l’encontre de la société ALM Finances, juger, en vertu de l’adage  » Nemo plus juris ad alium transferre potest quam ipse habet « , que M. [R], se heurtant aux renonciations formulées dans la convention de transaction du 21 juillet 2015 par son auteur M.[X] [T], n’est pas fondé dans ses demandes tendant à voir :

– constater que M.[H], en tant que de besoin, la société ALM Finances, n’ont pas et n’ont jamais eu la qualité d’associé de la société SARL devenue SNC

Central [Localité 12],

– en conséquence, déclarer nuls et de nul effet, en tout état de cause inopposables, et prononcer la nullité ou l’inopposabilité, sous réserve de la mission qui sera ci- après confiée à l’administrateur provisoire, de l’ensemble des actes par eux accomplis en cette prétendue qualité depuis le 11 décembre 1991(…),

– juger que les prétentions au soutien desquelles M.[R] invoque à l’encontre de M.[H] une prétendue fraude à ses droits ne sont aucunement fondées, et le débouter en conséquence de sa demande tendant à la condamnation in solidum de

MM. [X] [T] et [D] [T], M. [H] et la société ALM Finances à lui payer la somme de 150 000 euros chacun,

– juger que la demande de M. [R] tendant à la condamnation  » in solidum’ de

M. [H] ainsi que de la société ALM Finances à lui payer la somme provisionnelle de 500.000 euros chacun à valoir sur le montant des sommes qui leur seront ultérieurement accordées au titre de la valeur de ses parts sociales est dépourvue de tout fondement, et l’en débouter,

– juger que la demande de M.[R] tendant à la condamnation in solidum de

M. [H] ainsi que de la société ALM Finances à lui payer la somme provisionnelle de 500.000 euros chacun au titre des dommages et intérêts pour les dividendes dont il a été indument privé depuis le 17 février 2009 est dépourvue de tout fondement, et l’en débouter,

– débouter M.[R] de sa demande tendant à la désignation d’un mandataire de justice en qualité d’administrateur provisoire avec pour mission de mettre en ‘uvre les conséquences juridiques de l’annulation rétroactive ou de l’inopposabilité de tous les actes intervenus depuis le 11 décembre 1991 (…), et corrélativement, gérer la société, poursuivre l’exploitation de son fonds de commerce (…),

– débouter M. [R] de sa demande tendant à ordonner avant dire droit une mesure d’expertise,

– en toute hypothèse, condamner solidairement MM.[X] [T] et [D] [T] à garantir la société ALM Finances de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au profit de M.[R], et ce quels que soient la nature et le montant de cette ou de ces condamnations.

– en tout état de cause, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné

M. [R] à payer à la société ALM Finances la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– y ajoutant, condamner M.[R] à lui payer la somme de 20.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société ALM Finances de sa demande à l’encontre de M. [X] [T] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, condamner M. [X] [T] à lui payer la somme de 10. 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par elle devant le tribunal et 10.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour,

– condamner M. [R] en tous les dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 février 2022, M. [H] demande à la cour de :

Sur les prétentions élevées par M. [R] à son encontre,

– à titre principal, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que l’acte introductif d’instance délivré le 15 juin 2018 à l’encontre de M. [H] est nul, et dit irrecevable l’action de M. [R], ouverte par l’acte introductif d’instance du 21 mars 2019, à l’encontre de M. [H] pour prescription, en ce qu’il a dit que les prétentions élevées par M. [R] à l’encontre de M. [H] sont irrecevables car elles se heurtent à l’autorité de la chose jugée par la Cour de cassation le 25 janvier 1994 et par la cour d’appel d’Orléans le 11 septembre 1998 et au défaut subséquent de qualité de M. [R] de poursuivre l’exécution de ces décisions, en ce qu’il a dit, ayant constaté que les 333 parts de la société dont M. [R] dit être titulaire ont été acquises en vertu d’une cession, et ensuite d’une séquence de cessions, qui n’ont fait l’objet d’aucune des formalités prescrites par les dispositions combinées des articles L. 221-14 et L. 223-14 du code de commerce, que cette cession, de même que les cessions qui l’ont précédée, sont inopposables tant à la société, dont les titres ont été acquis, qu’aux tiers, dont M. [H], M. [R] n’ayant dès lors aucune qualité pour les invoquer, tant contre la société que contre M. [H], en ce qu’il a dit que les prétentions de M. [R], qui agit  » en sa qualité d’associé de la société Central [Localité 12] « , se heurtent à une fin de non-recevoir tirée de l’impossibilité d’exercer une action qui suppose l’existence de cette société, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que les prétentions de M. [R] se heurtent à la prescription,

– à titre subsidiaire, si la cour devait infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré irrecevables les prétentions de M. [R] à l’encontre de M. [H], juger, en vertu de l’adage  » Nemo plus juris ad alium transferre potest quam ipse habet « , que M. [R], se heurtant aux renonciations formulées dans la convention de transaction du 21 juillet 2015 par son auteur M. [X] [T], n’est aucunement fondé dans ses demandes tendant à voir juger que MM. [H] et [N] ainsi, en tant que de besoin, que la société

ALM Finances, n’ont pas et n’ont jamais eu la qualité d’associé de la société Central [Localité 12], en conséquence, déclarer nuls et de nul effet, en tout état de cause inopposables, et prononcer la nullité ou l’inopposabilité de l’ensemble des actes par eux accomplis en cette prétendue qualité depuis le 11 décembre 1991,juger que les prétentions au soutien desquelles M. [R] invoque à l’encontre de M. [H] une prétendue  » fraude à ses droits  » ne sont aucunement fondées, et le débouter en conséquence de sa demande tendant à la condamnation in solidum de MM. [X] [T] et [D] [T],

M. [H] et la société ALM Finances à lui payer la somme de 150. 000 euros chacun, juger que la demande de M.[R] tendant à la condamnation in solidum M. [H] ainsi que de la société ALM Finances au paiement de la somme provisionnelle de 500. 000 00 euros chacun à valoir sur le montant des sommes qui leur seront ultérieurement accordées au titre de la valeur de ses parts sociales est dépourvue de tout fondement, et l’en débouter, juger que la demande de M. [R] tendant à la condamnation in solidum de M. [H] ainsi que de la société ALM Finances au paiement de la somme provisionnelle de 500. 000 euros chacun au titre des dommages et intérêts pour les dividendes dont il a été indument privé depuis le 17 février 2009 est dépourvue de tout fondement, et l’en débouter, débouter M. [R] de sa demande tendant à la désignation d’un mandataire de justice en qualité d’administrateur provisoire avec pour mission de mettre en ‘uvre les conséquences juridiques de l’annulation rétroactive ou de l’inopposabilité de tous les actes intervenus depuis le 11 décembre 1991, et corrélativement, gérer la société, poursuivre l’exploitation de son fonds de commerce, débouter M. [R] de sa demande tendant à ordonner avant dire droit une mesure d’expertise,

En toute hypothèse, condamner solidairement MM. [X] [T] et [D] [T] à garantir M. [H] de toutes condamnations qui pourraient être prononcées au profit de M. [R] et à l’encontre de M. [H], et ce quels que soient la nature et le montant de cette ou de ces condamnations, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné M.[R] à lui payer la somme de 5. 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– y ajoutant, condamner M. [R] à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés par lui devant la cour, infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [H] de la demande qu’il élevait à l’encontre de M. [X] [T] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, condamner M. [X] [T] à payer à M. [H] la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par lui devant le tribunal et 5.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour, condamner M. [R] en tous les dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 février 2022, M. [D] [T] demande à la cour de le recevoir en ses conclusions, fins et arguments et le déclarer bien fondé, confirmer le jugement en ce qu’il a dit nul l’acte introductif d’instance délivré le 15 juin 2028 à l’encontre de M. [H], en ce qu’il a jugé irrecevable l’action de M. [R] à l’encontre de M. [H] pour prescription, en ce qu’il a déclaré irrecevable M. [R] en l’ensemble de ses demandes, débouté M. [X] [T], de l’ensemble de ses demandes, condamné M. [R] à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, condamné M. [R] aux entiers dépens, débouter M. [R] de toutes ses demandes, fins et conclusions, ordonner la mise hors de cause de M. [D] [T], débouter toute demande sur quelque fondement que ce soit à l’encontre de M. [D] [T], condamner M. [R] à verser à M. [D] [T] la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et condamner M. [R] aux entiers dépens.

Par ordonnance du 15 février 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré les conclusions d’intimé de M. [X] [T] irrecevables.

Pour un plus ample exposé des demandes et moyens des parties il est expressément renvoyé à leurs écritures.

SUR CE

M.[R] a acquis le 17 février 2009 de M.[X] [T], lequel se trouvait aux droits d’une part de M.[J] [T] son oncle décédé, d’autre part de Mme [V], 333 parts de la société Central [Localité 12], représentant un tiers du capital social, moyennant le prix de 2.450 euros. L’acte de cession a été enregistré par le SIE de [Localité 14] le

17 février 2009.

Arguant de sa qualité d’associé de la société Central [Localité 12], M.[R] entend:

-de première part voir constater que M.[H] et à sa suite la société

ALM Finances n’ont pas et n’ont jamais eu la qualité d’associé de la SARL devenue

la SNC Central [Localité 12], juger nuls et de nul effet et en tout cas inopposables les actes intervenus depuis le 11 décembre 1991 à l’exception de ceux qui pourraient se révéler favorables à la société, désigner un mandataire de justice, ordonner une expertise comptable et financière, et condamner in solidum M.[H] et la société ALM Finances au paiement d’une provision de 500.000 euros à valoir sur le montant des sommes qui lui seront accordées au titre de la valeur de ses parts sociales et des dommages et intérêts pour les dividendes dont il a été privé depuis son acquisition le 17 février 2009,

– de seconde part, voir juger que le protocole d’accord signé le 21 juillet 2015, intervenu en fraude de ses droits, ne lui est pas opposable et engage la responsabilité délictuelle de MM.[X] [T], [D] [T], [H] et de la société

ALM Finances, signataires du protocole ou subsidiairement celle de MM.[X] et [D] [T], et justifie leur condamnation in solidum à des dommages et intérêts en réparation de son préjudice.

La société ALM Finances, M.[H] et M.[D] [T] (les conclusions de M.[X] [T] ont été déclarées irrecevables) contestent l’ensemble de ces demandes et opposent diverses fins de non recevoir aux prétentions de M.[R].M.[H] invoque liminairement la nullité de l’assignation qui lui a été délivrée.

-Sur la nullité de l’acte introductif d’instance délivré à M.[H]

M. [H] soutient que l’assignation qui lui a été délivrée le 15 juin 2018 dans les formes de l’article 659 du code de procédure civile est nulle, que cette signification lui a causé un grief et que dès lors l’action engagée à son encontre est prescrite.

L’assignation délivrée le 15 juin 2018 à M.[H] a été signifiée dans les formes de l’article 659 du code de procédure civile, l’huissier de justice mentionnant qu’il s’est transporté à l’adresse du [Adresse 11], qu’il a constaté ‘qu’à ce jour, aucune personne répondant à l’identification du destinataire de l’acte n’y a son domicile ou sa résidence, le nom du destinataire ne figure ni sur la liste des occupants ni sur les boites aux lettres, ni sur les interphones’, qu’il a donc consulté le site ‘pages jaunes.fr’ sur Paris qui ne lui a pas permis de retrouver le destinataire de l’acte.

Le 21 mars 2019, M. [H] a été réassigné au [Adresse 5]. L’huissier de justice constatant que l’intéressé était absent du domicile qui avait été certifié par l’inscription du nom sur la boite aux lettres et le tableau des occupants et que personne n’avait pu ou voulu recevoir l’acte, a déposé copie de l’acte en son étude.

M.[H] explique qu’il résulte des propres énonciations de l’assignation qu’il était le gérant de la société qui exploitait un fonds de commerce d’hôtellerie [Adresse 3] et prétend qu’il relevait de la plus élémentaire diligence, de la part de l’huissier instrumentaire, d’effectuer l’une des multiples démarches qui s’offraient à lui à la seule lecture de l’acte qu’il était chargé de signifier pour le délivrer à sa personne, que l’huissier de justice pouvait aisément trouver son adresse personnelle en consultant sur Infogreffe le K bis de la société Alm Finances, dont il savait qu’il était le dirigeant, précision étant apportée que la société Alm Finances avait été assignée dans la même instance et que l’acte avait été délivré à personne, qu’il pouvait également délivrer l’assignation sur son lieu de travail, soit à l’hôtel, dont l’adresse était connue, soit au siège social de la société Alm Finances.

Aux termes de l’article 654 du code de procédure civile, la signification doit être faite à personne. La procédure de l’article 659 du code de procédure civile ne peut être valablement mise en oeuvre que dans les cas où les diligences nécessaires n’ont permis de découvrir ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail de la personne à qui l’acte doit être signifié.

En l’espèce, il ne saurait être sérieusement contesté que les diligences consistant dans la lecture des pages jaunes ne peuvent constituer des diligences suffisantes, alors au surplus que l’adresse du [Adresse 11] où l’assignation a été délivrée était, comme le relève M. [R], celle du siège social de la société Alm Finances, qui, elle, y a été régulièrement assignée et que M. [H] est le dirigeant de celle-ci.

S’agissant d’une nullité de forme résultant de l’insuffisance des diligences de l’huissier de justice, celle-ci n’est encourue que pour autant que M. [H] puisse justifier d’un grief, lequel, au sens de l’article 114 du code de procédure civile, s’entend du préjudice procédural qui trouve sa cause directe dans l’irrégularité formelle dont se prévaut le défendeur.

Or en l’espèce, l’irrégularité de forme alléguée n’a eu aucune incidence immédiate sur la conduite du procès, puisqu’ainsi que le souligne à juste titre M. [R], et ainsi que cela résulte du bulletin de procédure établi lors de la première audience du 6 septembre 2018, M. [H], qui a été informé de la procédure, a constitué avocat.

En réalité M. [H] opère une confusion entre le grief subi et l’intérêt qu’il peut avoir à faire échouer son adversaire au fond .

Le jugement déféré qui a fait sienne l’analyse de M.[H] doit être infirmé en ce qu’il a annulé l’acte introductif d’instance et déclaré l’action engagée contre M.[H] prescrite, les motifs retenus étant tirés du préjudice causé par l’action en justice, et étant donc impropres à caractériser le grief résultant du vice de forme.

L’assignation du 15 juin 2018 ne sera donc pas annulée. En conséquence, le moyen fondant la prescription de l’action sur la seule annulation de l’assignation est inopérant et le jugement sera infirmé en ce qu’il a dit nulle l’assignation du 15 juin 2018 et dit irrecevable l’action introduite à l’encontre de M.[H] par la seconde assignation délivrée le 21 mars 2019.

– Sur les autres fins de non recevoir

La société Alm Finances invoque l’autorité relative de la chose jugée par la Cour de cassation le 25 janvier 1994 et par la cour d’appel d’Orléans le 11 septembre 1998, et le défaut de qualité de M. [R] pour poursuivre l’exécution de ces décisions alors qu’il n’a pas été partie à l’instance, et ce au visa des articles 1351 ancien du code civil,

480, al. 1 er , du code de procédure civile, L 111-1 alinéa 1 er du code des procédures civiles d’exécution , L111-2 du même code. Elle se prévaut, ensuite, du défaut de droit d’agir de M. [R] à son encontre en exécution de l’arrêt rendu le 11 septembre 1998 par la cour d’appel d’Orléans en ce que cette décision ne lui a jamais été signifiée, au visa de l’article 503, alinéa 1er, du code de procédure civile, puis du défaut de qualité pour agir de M. [R] en raison de l’inopposabilité à la société défenderesse des cessions des

2 mai 1990, 29 mai 2007 et 17 février 2009, ces cessions n’ayant été ni publiées ni notifiées à la société en violation des articles L.221-14 et L.223-14 du code de commerce, R.221-9 du même code, 1690 du code civil. Elle prétend ensuite qu’il est impossible pour M. [R] d’agir en qualité d’associé d’une société et d’exercer une action qui suppose l’existence de cette société, la société Central [Localité 12] ayant disparu suite à la transmission universelle de patrimoine, à laquelle il n’a pas fait opposition. Elle soulève enfin la prescription de l’action en nullité des actes et délibérations accomplis depuis le 11 décembre 1991, à l’expiration d’un délai de 3 ans à compter du 11 septembre 1998, soit depuis le 12 septembre 2001 et ce en vertu de l’article 1844-14 du code civil.

Elle explique, d’autre part, que, contrairement à ce qu’a ordonné le tribunal de commerce de Paris dans sa décision avant dire droit du 15 février 2019, M.[R] n’a pas régularisé la procédure à l’égard de la succession de M. [W] [N] et qu’il s’est par la suite désisté de l’instance à l’égard de cette partie, qui était désignée comme cessionnaire aux côtés de M. [H] dans la promesse de vente et partie aux arrêts rendus les

25 janvier 1994 et 11 septembre 1998. Elle précise que l’arrêt du 11 septembre 1998 n’a pas été valablement signifié à M.[N], décédé 22 mois plus tôt, le 9 octobre 1996, que cet arrêt, qui n’a pas été signifié régulièrement à M.[W] [N] dans les six mois de son prononcé, alors qu’il s’agit d’un arrêt réputé contradictoire pour

M.[W] [N], est en conséquence non avenu en application des dispositions de l’article 478 du code de procédure civile, ce qu’elle peut invoquer compte tenu de l’indivisibilité. Elle soutient que la procédure engagée par M.[R] ne peut prospérer, puisqu’il n’a pas attrait dans la cause en première instance l’ensemble des parties, dont la succession de M. [W] [N] partie à la promesse synallagmatique de vente des parts de la société Central [Localité 12] conclue le 23 novembre 1989.

M. [H] soutient que l’action engagée à son encontre est prescrite et reprend les fins de non non recevoir développées par la société Alm Finances tirées de l’autorité relative de la chose jugée des décisions dont M.[R] demande l’exécution, du défaut de qualité de M. [R], qui n’a pas été partie à l’instance, du défaut de qualité pour agir de M.[R] en raison de l’inopposabilité à la société défenderesse des cessions des 2 mai 1990, 29 mai 2007 et 17 février 2009, ces cessions n’ayant été ni publiées ni notifiées à la société en violation des articles L.221-14 et L.223-14 du code de commerce, R.221-9 du même code, 1690 du code civil, de l’impossibilité pour M.[R] d’agir en qualité d’associé d’une société qui n’existe plus, de la prescription de l’action en nullité des actes et délibérations accomplies depuis le 11 décembre 1991, l’action étant expirée depuis le 12 septembre 2001.

M. [D] [T] invoque les mêmes fins de non recevoir que la société

Alm Finances et M.[H] tenant à l’autorité relative de chose jugée des décisions dont M. [R] demande l’exécution, à son défaut de droit d’agir et à son défaut de qualité à agir.

M.[R] réplique:

– qu’il est recevable à agir en exécution des arrêts des 25 janvier 1994 et

11 septembre 1998, ayant acquis 333 parts de la Sarl Central [Localité 12] de M. [X] [T], ce dernier étant titulaire de la totalité des parts sociales de la société du fait de son oncle [J] [T], dont il est le légataire universel, et de la cession intervenue avec Mme [V]. Il soutient que M [J] [T] et Mme [V], contrairement à ce que soutiennent les intimés, n’avaient pas renoncé à poursuivre l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel d’Orléans,

– que si l’arrêt de la cour d’Orléans n’a pas été signifié à la société ALM Finances, il l’a bien été à M. [Z] [H], son gérant, le 12 novembre 1998, qu’en outre la société n’a pas été partie aux instances précédant celle pendante devant la cour de renvoi alors même qu’elle avait acquis les 970 parts de la société Central Damremont le

11 décembre 1991 et qu’elle est seulement intervenue volontairement, de façon accessoire, devant la cour d’Orléans et était irrecevable à former des demandes propres. Il ajoute que c’est en tant que venant aux droits de MM.[H] et [N] qui lui avaient transféré l’intégralité des parts de la société Central [Localité 12] qu’elle a été est attraite dans la

présente procédure, peu important en conséquence qu’elle ait reçu notification de la décision,

– qu’en application de l’arrêt de cassation du 25 janvier 1994 ayant entraîné l’annulation de tout acte pris en exécution de la décision cassée, puis de l’arrêt de la cour de renvoi du 11 septembre 1998, M.[H] et la société Alm Finances sont considérés comme n’ayant jamais été associés de la société Sarl Central Damremont et n’ont donc aucun titre ni qualité pour contester la validité des cessions de parts intervenues entre des personnes qui en sont les véritables propriétaires et qui en possèdent la totalité et sont donc irrecevables à soulever l’inopposabilité des cessions de parts sociales intervenues en 2007 et 2009. Il ajoute que les tiers qui ont eu personnellement connaissance de l’acte non publié ne peuvent se prévaloir du défaut de publicité et que dès la cession intervenue en février 2009, M. [H] s’est empressé de dissoudre sans liquidation la Sarl devenue la SNC Damremont pour ensuite en transférer le patrimoine à la société Alm Finances, dont il est actionnaire et dirigeant et qu’il a été nécessairement informé de cette cession par l’administration fiscale à l’occasion du recouvrement d’arriérés de taxe professionnelle, en tout état de cause, par l’assignation délivrée à la requête de M. [X] [T] en 2012, et dans le protocole d’accord conclu le 21 juillet 2015,

– que depuis l’arrêt de 1998, M. [H] et la société Alm Finances ont parfaitement conscience qu’ils n’ont aucun droit sur les parts sociales de la Sarl devenue SNC Central Damremont et que pour échapper aux restitutions dues à la suite de cette décision et en éviter les conséquences financières, M. [H] a d’abord transformé la Sarl en SNC en 1991, pour ensuite transférer l’intégralité de son patrimoine à la société Alm Finances dont il était le bénéficiaire économique, avant de la dissoudre le 8 décembre 2009, de sorte qu’ils ne sauraient valablement évoquer leur propre turpitude pour échapper à leurs obligations découlant de l’arrêt de la Cour de renvoi,

– que la décision de disparition de la société Sarl devenue SNC Central [Localité 12] a été prise par M. [H] alors que celui-ci n’avait plus aucun droit depuis l’arrêt de cassation du 25 janvier 1994, et que c’est dans le seul but de faire échec à une revendication des véritables propriétaires des parts de la société Sarl devenue SNC Central [Localité 12] consécutivement à la cassation et à l’arrêt de la Cour de renvoi du 11 septembre 1998 que la société a été dissoute et que nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude, qu’en application de l’article 625 du code de procédure civile, la cassation a pour effet de replacer les parties dans l’état où elles se trouvaient avant l’arrêt cassé, que le jugement du tribunal de commerce de Paris du 26 février 1991 n’étant pas assorti de l’exécution provisoire, MM. [H] et [N] ne pouvaient ignorer que dès le prononcé de l’arrêt de cassation le 25 janvier 1994, ils ne détenaient plus de titre valable pour agir, que

M. [J] [T] et Mme [V] ont poursuivi la procédure pendant près de dix ans pour aboutir à un arrêt de la Cour d’appel d’Orléans sur renvoi, arrêt qu’ils ont ensuite régulièrement signifié aux parties concernées, que leur volonté était de mener à son terme la procédure engagée, que le décès de M. [J] [T] le [Date décès 4] 1999, qui a profondément affecté sa compagne Mme [V], a retardé l’exécution des décisions de justice ainsi rendues.

– que son action en nullité n’est pas enfermée dans le délai de prescription de trois ans, mais dans le délai d’exécution des décisions de justice, ce qui conduit à fixer au 19 juin 2018, compte tenu des dispositions de la loi du 17 juin 2018, la date de prescription de l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel d’Orléans du 11 septembre 1998, qu’en outre ses prétentions, en tant qu’ayant-droit de M. [X] [T], lui-même ayant droit de son oncle [J] [T] et de Mme [V] reposent sur l’article 625 du code de procédure civile selon lequel ‘la décision de la Cour de cassation entraîne l’annulation de toute décision qui est la suite, l’application ou l’exécution de la décision cassée ou qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire’ et sur l’article L111-11 du code des procédures civiles d’exécution pour obtenir les restitutions et réparations qui s’imposent, l’exécution ayant été poursuivie en toute mauvaise foi depuis le 25 janvier 1994.

– s’agissant du défaut d’intimation des héritiers de M.[N], que M. [H] et la société Alm Finances ont fait part, pour la première fois, du décès de celui-ci devant le tribunal de commerce et qu’ils l’ont daté devant la cour, que devant la cour d’appel d’Orléans, M.[N] était représenté par les mêmes conseils qui assistent encore M.[H] et la société Alm Finances devant la présente cour, lesquels ont fait intervenir volontairement la société Alm Finances mais n’ont pas informé la cour du décès de cette partie, alors qu’ils en avaient connaissance, de sorte que les intimés ne sauraient se prévaloir d’une absence de signification de la décision à ses héritiers pour qu’elle soit déclarée non avenue, étant rappelé que seule la partie non comparante peut se prévaloir de l’absence de signification, qu’en outre, il ressort de l’acte de cession de parts sociales en date du 25 octobre 1993 que c’est en réalité l’épouse de M.[N], Mme [I] [E] qui a acquis les 10 parts de la société Central Damremont pour ensuite les céder à M. [Z] [H] le 25 octobre 1993.

– Sur la qualité à agir de M.[R]:

Les intimés arguent que M.[R] ne peut se prévaloir pour agir de l’autorité de la chose jugée par l’arrêt de la cour d’appel d’Orléans, ayant statué comme cour de renvoi.

L’article 1351 devenu l’article 1355 du code civil, énonce que : ‘l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’ à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. ll faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité.’

S’agissant de la condition tenant à l’identité des parties, si l’autorité de la chose jugée est relative quant aux parties en cause, et ne peut nuire ou profiter qu’aux seules personnes ayant été parties à l’instance initiale, les ayants-cause, succédant à leurs auteurs, peuvent se voir opposer ou profiter de l’autorité de la chose jugée à l’égard de ceux-ci et il en est ainsi à l’égard d’un ayant-cause tant universel qu’à titre particulier.

Il s’en suit que M.[R], qui justifie venir, à la suite de cessions successives, aux droits des personnes en faveur desquelles ont été rendus les arrêts de la Cour de cassation et de la cour de renvoi, a bien qualité à agir pour contester les actes accomplis par M.[H] et la société ALM Finances. La circonstance que la société Central [Localité 12] a été dissoute par décision de l’associé unique du 8 décembre 2009, enregistrée le 16 décembre 2009 et publiée le 17 décembre 2009, cette dissolution ayant entrainé la transmission universelle de son patrimoine à la société ALM Finances, ne prive pas M.[R] de qualité à agir, l’action entreprise ayant pour objet de revenir sur cette décision de dissolution suivie d’une transmission universelle de patrimoine et visant plus généralement la nullité des actes sociaux accomplis depuis le 11 décembre 1991, donc antérieurement à la disparition de la société Central [Localité 12].

Si le défaut de signification de l’arrêt de la cour d’appel d’Orléans à la société ALM Finances fait obstacle à l’exécution forcée de cette décision à son encontre, il ne prive pas pour autant M.[R] de sa qualité à agir à l’encontre de la société ALM Finances en nullité des actes sociaux.

La qualité d’associé dont se prévaut M.[R] ensuite de l’arrêt rendu par la cour d’appel d’Orléans et de la cession intervenue à son profit le 17 février 2009 suffit à lui conférer qualité à agir.

– sur la prescription

La fin de non recevoir tirée de la prescription concerne les demandes relatives à la nullité des actes accomplis par M.[H] et la société ALM Finances et ses conséquences ( premier bloc de demandes). Il est en effet constant s’agissant des demandes fondées sur responsabilité délictuelle des signataires du protocole d’accord (deuxième bloc de demandes), que M.[R] les a formées moins de cinq ans après l’établissement de ce protocole, étant rappelé que M.[H] a été débouté de sa demande d’annulation de l’assignation délivrée le 15 juin 2018 et qu’il vient d’être jugé qu’aucune prescription n’était encourue de ce chef.

Les parties ne s’accordent pas sur le délai de prescription applicable.

M.[R] renvendique le délai de 10 ans d’exécution des décisions de justice, en l’espèce de l’arrêt de la cour d’appel d’Orléans en date du 11 septembre 1998.

La cour d’appel d’Orléans a jugé, dans les motifs de son arrêt, qu’aucune prorogation de délais régulière n’était intervenue avant leur expiration, de sorte que la promesse de vente du 23 novembre 1989 était devenue caduque et a dans le dispostif infirmé le jugement du tribunal de commerce de Paris du 26 février 1991 qui avait ordonné aux ‘consorts [C]’ ( MM.[C], [T] et Mme [V]) de régulariser la vente aux profit des consorts [H] et [N] dans le délai d’un mois à défaut de quoi le jugement vaudrait vente, débouté M. [H] et M.[N] de leurs demandes, et débouté M.[J] [T] et Mme [V] de leur demande de dommages et intérêts.

Il résulte du dispositif des écritures procédurales de M.[R], que celui-ci, en substance, affirmant que tant M. [H] que la société Alm Finances n’ont jamais eu la qualité d’associé de la société Central [Localité 12], réclame la nomination d’un administrateur provisoire et d’un expert judiciaire comptable et financier et au fond la nullité des actes sociaux intervenus depuis le 11 décembre 1991, ainsi que des dommages-intérêts pour les dividendes dont il a été indûment privé depuis le 17 février 2009. Il ne sollicite donc pas au sens strict l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel d’Orléans, qui implique des restitutions réciproques dans la limite des droits acquis, ce qui le ferait bénéficier d’une prescription de 10 ans. C’est en conséquence vainement qu’il se prévaut du délai de 10 ans pour exécuter l’arrêt du 11 septembre 1998, sans qu’il soit nécessaire d’examiner l’incidence de la réforme de la prescription sur ce délai.

C’est à bon droit que les intimés soutiennent que la demande d’annulation des actes sociaux relève de la prescription édictée par l’article L235-9 alinéa 1er du code de commerce, dont les termes sont repris par l’article 1844-14 du code civil, qui dispose que les actions en nullité de la société ou d’actes et délibérations postérieurs à sa constitution, se prescrivent par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue.

M.[R] se fondant sur les décision rendues par la Cour de cassation et la cour de renvoi, se prévaut donc des droits que tiraient M.[J] [T] et Mme [V] de la décision de la cour d’appel d’Orléans du 11 septembre 1998, droits que ceux-ci ont transmis à M.[X] [T], dont M.[R] est devenu l’ayant-droit le 17 février 2009 à hauteur des 333 parts sociales acquises. Si la cour d’appel d’Orléans ne se prononce pas sur la nullité des actes accomplis au nom de la société Central [Localité 12] par MM.[H] et [N] et la société ALM Finances, c’est bien dès cette décision que M.[J] [T] et Mme [V] avaient la possibilité,tirant les conséquences de cet arrêt, de demander l’annulation des délibérations votées par des associés qui avaient rétroactivement perdu cette qualité, sachant que MM.[H] et [N] et la société ALM Finances avaient, après l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 30 septembre 1991 ayant confirmé la validité de la promesse souscrite en 1989, pris possession du fonds de commerce et commencé à accomplir des actes sociaux, pour la première fois, en tenant l’assemblée générale du 11 décembre 1991, qui a décidé de la révocation de l’ancien dirigeant et de la nomination de M.[H], avant de décider le 23 janvier 1992 de la transformation de la

SARL Central [Localité 12] en SNC.

La nullité était donc encourue depuis l’arrêt du 11 septembre 1998, sachant qu’à cette date un certain nombre d’actes sociaux avaient déjà été accomplis au nom de la société Central [Localité 12] par M.[H] et la société ALM Finances et étaient susceptibles d’annulation.Les derniers actes exécutés au nom de la société Central [Localité 12] sont ceux décidant de sa dissolution décidée le 8 décembre 2009 et de la transmission universelle de patrimoine à la société ALM Finances, qui était devenue l’associée unique.

Il n’est pas établi que M.[J] [T] (décédé le [Date décès 4] 1999) et Mme [V] (avant qu’elle ne cède ses parts à [X] [T] le 29 mai 2007) ont entrepris une action aux fins d’annulation des actes et décisions pris par MM.[H] et [N] et ALM Finances.Quant à leur ayant-droit, M.[X] [T], il n’a pas davantage agi dans les trois ans de son acquisition (29 mai 2007), n’ayant assigné MM.[H] et

ALM Finances qu’en janvier 2012, avant de se désister suite au protocole d’accord conclu le 21 juillet 2015.

Ainsi aucune des personnes dont M.[R] tient les droits qu’il allégue n’a exercé l’action en nullité dans le délai de trois ans prévu par l’article L235-9 alinéa 1er du code de commerce.

En tout état de cause, M.[R] ayant acquis les parts sociales le 17 février 2009, était à compter de cette date en situation d’agir personnellement en nullité des actes sociaux, et il n’est pas soutenu que M.[R], qui connaissait au moins certains des protagonistes, aurait ignoré la situation de la société.

Ainsi, quand bien même la prescription triennale n’aurait commencé à courir que le 17 février 2009, l’action en nullité est prescrite, l’assignation n’ayant été délivrée par M.[R] qu’en juin 2018. La cour, dira donc à la suite des premiers juges, l’action en nullité des actes sociaux prescrite.

S’agissant de la demande en paiement d’une provision formée par M.[R]

( demande différente de celle en dommages et intérêts fondée sur la responsabilité délictuelle des signataires du protocole d’accord), elle se trouve également prescrite en application de l’article 2224 du code civil selon lequel depuis la loi du 17 juin 2008, les actions personnelles et mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l’exercer, dès lors que le délai a commencé à courir le 17 février 2009.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a dit irrecevable M.[R] en ses demandes aux fins d’annulation des actes sociaux, en sa demande de provision. Y ajoutant la cour jugera irrecevable la demande de désignation d’un administrateur provisoire et la demande d’expertise sollicitée avant dire droit sur la valeur des parts de M.[R] et sur ses dividendes.

Cette prescription n’atteint pas la recevabilité de la demande de dommages et intérêts fondée sur la responsabilité délictuelle des signataires du protocole d’accord établi le 21 juillet 2015.

Sur la responsabilité délictuelle au titre du protocole d’accord

Le 5 janvier 2012, M.[X] [T] avait fait assigner devant le tribunal de commerce de Paris la société ALM Finances et MM.[H] et [N] pour voir constater qu’ils n’avaient pas la qualité d’associé de la société Central [Localité 12] et annuler l’ensemble des actes accomplis par eux en cette prétendue qualité.

Alors que cette procédure était pendante devant le tribunal de commerce de Paris, les parties se sont rapprochées sous l’égide de M.[A], présenté comme un ami intime du couple formé par M.[J] [T] et Mme [V], à même de témoigner du fait que ceux-ci n’avaient pas souhaité récupérer les parts sociales de la société Central [Localité 12] après la décision de la cour d’appel d’Orléans, car ils ne voulaient pas restituer les sommes perçues pour cette cession, les ayant utilisées pour diverses acquisitions et dépenses et voulant, compte tenu de leur âge, ‘tourner la page’.

C’est dans ce contexte que le 21 juillet 2015, MM.[X] [T] et [D] [T] d’une part, M.[Z] [H] et la société ALM Finances d’autre part, ont en présence de M.[A] signé un protocole d’accord transactionnel, ayant pour objet de régler définitivement les rapports entre les parties soussignées et de mettre un terme aux procédures en cours, notamment celle engagée par M.[X] [T] pendante devant le tribunal de commerce de Paris.

Aux termes de ce protocole M.[X] [T] et ‘en tant que besoin’ M.[D] [T], renoncent au bénéfice de l’arrêt de la Cour de cassation du 25 janvier 1994 et de l’arrêt de la cour d’appel d’Orléans du 11 septembre 1998 juridiction de renvoi, et acquiescent au jugement du tribunal de commerce de Paris du 26 février 1991 qui a ordonné la régularisation de la vente au profit de MM.[H] et [N], en conséquence de quoi ils renoncent à contester la vente promise le 23 novembre 1989 et intervenue au profit de MM.[H] et [N] auxquels s’est substituée la société

ALM Finances pour l’acquisition de 970 parts, reconnaissent la validité des transferts de parts sociales au profit de la société ALM Finances et de ‘Messieurs’ [H], la régularité de la dissolution sans liquidation de la société Central [Localité 12] prononcée le 8 décembre 2009, et la validité de la transmission universelle de patrimoine à son associé unique ALM Finances, acceptent l’ensemble des actes accomplis par MM.[H] et [N] et ALM Finances en leur qualité d’associés de la société Central [Localité 12], et renoncent en tant que de besoin à demander la nullité de l’assemblée générale ordinaire du 11 décembre 1991 et de tous actes subséquents.

M.[X] [T] a ainsi renoncé au bénéfice de la cession des 250 parts que lui avait consentie Mme [V] le 29 mai 2007 et M.[D] [T] au bénéfice de la cession des 333 parts que lui avait consentie le 17 février 2009, M.[X] [T] et ont en tant que de besoin déclarer céder leurs droits à la société ALM Finances.

En contrepartie, la société ALM Finances a accepté de verser à M.[X] [T] la somme de 150.000 euros à titre d’indemnité transactionnelle, à charge pour ce dernier de faire ‘son affaire personnelle du remboursement de l’indemnisation de Monsieur [D] [T]’, ce que ce dernier a déclaré accepter expressément, renonçant à toute réclamation contre la société ALM Finances, MM.[H], [W] [N] et [L] [H].

M.[R], qui n’était pas partie à l’instance engagée par M.[X] [T], n’a pas été partie au protocole transactionnel.

Se prévalant de l’effet relatif des conventions, M.[R] soutient que ce protocole ne lui est pas opposable et ne remet pas en cause son droit propre sur les 333 parts de la société Central [Localité 12] qu’il a acquises de M.[X] [T].

Si compte tenu de l’effet relatif des contrats, seuls les signataires du protocole sont engagés par les dispositions qu’il comporte, et que M.[R] n’est pas tenu d’exécuter les engagements qui y ont été pris, les intimés sont cependant fondés à soutenir que le protocole transactionnel, constitutif de droit entre les signataires, peut lui être opposé en tant que fait juridique.

M.[R] fait valoir que le protocole a été signé en fraude de ses droits puisqu’il tend à le priver définitivement de la propriété de ses parts sociales dans le capital de la société Central [Localité 12] et de toute participation aux résultats de l’exploitation de son fonds de commerce d’hôtellerie depuis le 17 février 2009.

Il expose que le protocole d’accord a été obtenu par suite de violences physiques et morales exercées de décembre 2013 à janvier 2016 sur M.[X] [T], par son cousin M.[D] [T], qui lui reprochait de l’avoir spolié de la succession de leur oncle et par M. [O] [A], cosignataire du protocole d’accord, ce qu’a constaté le conseil des prud’hommes de Paris qui a validé le licenciement pour faute lourde de MM.[D] [T] et [O] [A], lesquels ont harcelé M.[X] [T] pour le déposséder de son fonds de commerce de restauration, se sont emparés de toutes les espèces de la société Hôtel America qu’il gérait et l’ont contraint, avec M.[H], à signer le protocole d’accord du 21 juillet 2015, dont il n’a tiré aucun avantage puisque sur les 150.000 euros réglés en exécution du protocole, M.[X] [T] a été contraint d’en reverser 142.500 euros à M.[D] [T] et 7.200 euros à M. [O] [A].

Il ajoute que MM.[X] et [D] [T] n’ont jamais eu l’intention de lui reverser une quelconque somme d’argent bien qu’ils se soient engagés dans le protocole à faire leur affaire personnelle de toute réclamation qu’il pourrait présenter du fait de la cession des 333 titres de la société.

M.[R] n’ayant pas lui-même fait l’objet de violences destinées à extorquer son consentement et n’étant pas en charge des intérêts de M.[X] [T] à l’encontre duquel il conclut, ne peut utilement se prévaloir du vice du consentement, à le supposer avéré, de l’un des signataires du protocole.

M.[R] manque à établir l’existence d’une machination à son encontre, ce protocole ayant été signé dans le cadre d’une instance engagée par M.[X] [T], à laquelle il n’était pas partie afin de trouver une issue à un contentieux remontant à de nombreuses années.La circonstance que l’indemnisation de M.[R] n’a pas été stipulée dans ce protocole ne suffit pas à caractériser une volonté de fraude, d’autant que les parties au protocole ont précisé à l’article 3 que ‘Monsieur [X] [T] et Monsieur [D] [T] s’engagent à faire leur affaire de toute réclamation que pourrait présenter Monsieur [U] [R], notamment du fait de la cession irrégulière des 333 titres de la société CENTRAL DAMREMONT que lui a consentie Monsieur [X] [T] le

17 février 2009 pour la somme de 2540€.’

En revanche, l’effet relatif des contrats n’interdit pas aux tiers d’invoquer la situation de fait créée par les conventions auxquelles ils n’ont pas été partie, si cette situation de fait leur cause un préjudice de nature à fonder une action en responsabilité délictuelle. En l’espèce, le protocole transactionnel constitutif de droit pour la société

ALM Finances par suite de la renonciation de M.[X] [T] à ses droits sur les parts de la société Central [Localité 12], vient contredire les droits qu’il a cédés à M.[R] en 2009. La renonciation à laquelle M.[X] [T] a consenti dans le protocole, sans s’assurer préalablement des conséquences qui en découlaient pour M.[R], est donc source de préjudice pour ce dernier. M.[R] est en conséquence fondé à obtenir l’indemnisation du préjudice que lui occasionne la renonciation de son auteur.

Ainsi qu’il a été dit, les parties aux protocole sont convenues que M. [X] et [D] [T] feront leur affaire personnelle des réclamations de M.[R].

En stipulant dans le protocole que l’indemnité de 150.000 euros est versée à M.[X] [T], et non pas pour une partie directement à M.[D] [T] pourtant également signataire de l’accord, et en laissant le soin au premier de rembourser le second, les parties signataires ont manifestement entendu par ce versement de 150.000 euros indemniser M.[X] [T] de sa renonciation à la totalité des parts de la société Central [Localité 12], celui-ci étant depuis 2007 et jusqu’aux cessions à MM.[R] et [D] [T] en 2009 le seul associé de la société. Après les cessions du 17 février 2009, le capital social de la société Central [Localité 12] s’est trouvé, à une part près, réparti par tiers entre MM. [X] [T], [D] [T] et [R].

Au vu de ces éléments, le préjudice de M.[R] résultant des renonciations auxquelles M.[X] [T] a consenti sera évalué au tiers de cette indemnité. Il convient en conséquence de faire partiellement droit à la demande subsidiaire de M.[R] et de condamner M.[X] [T] à lui verser 50.000 euros de dommages et intérêts, M.[R] étant débouté de ses plus amples demandes en paiement dirigées contre les autres parties au protocole, y compris de celle dirigée contre M.[D] [T], ce dernier ne lui ayant pas cédé les titres, mais ayant acquis dans les mêmes conditions que lui 333 parts de la société Central [Localité 12].

Le jugement sera infirmé en ce sens.

– Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

M. [R] obtenant en définitive partiellement gain de cause, les dépens de première instance et d’appel seront mis à la charge de M.[X] [T], partie perdante. Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné M.[R] aux dépens et au paiement d’indemnités procédurales. La cour condamnera M.[X] [T] à payer à M.[R] une indemnité procédurale de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

Aucune considération d’équité ne justifie de faire une plus ample application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré en ce qu’il a dit nul l’acte introductif d’instance délivré le 15 juin 2018 à M. [H] et en ce qu’il a dit irrecevable l’action de M. [R] ouverte par acte introductif d’instance du 21 mars 2019 à l’encontre de M. [H] pour prescription, en ce qu’il a débouté M.[R] de sa demande fondée sur la responsabilité délictuelle de M.[X] [T], en ce qu’il a condamné M.[R] aux dépens et au paiement d’indemnités procédurales, le confirme en ce qu’il a jugé irrecevables les demandes de nullité des actes sociaux et d’indemnisation et en ce qu’il a débouté M.[R] de son action en responsabilité délictuelle dirigée contre M. [Z] [H], M.[D] [T] et la société ALM Finances,

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à annulation de l’acte introductif d’instance délivré le 15 juin 2018 à M.[H], et déboute M.[H] de sa fin de non recevoir tirée de la prescription en ce qu’elle est fondée sur l’annulation de l’assignation,

Déclare irrecevables les demandes de désignation d’un administrateur provisoire et d’expertise,

Condamne M.[X] [T] à payer à M.Aboulaye [R] la somme de 50.000 euros,

Condamne M.[X] [T] à payer à M.Aboulaye [R] une indemnité de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes les autres demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M.[X] [T] aux dépens de première instance et d’appel.

La greffière,

Liselotte FENOUIL

La Présidente,

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x