Conflits entre associés : 12 avril 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/16277

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Conflits entre associés : 12 avril 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/16277

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT SUR REQUETE

DU 12 AVRIL 2023

N° 2023/ 156

PROCÉDURE GRACIEUSE

N° RG 22/16277

N° Portalis DBVB-V-B7G-BKOEU

[D] [Y]

C/

MINISTERE PUBLIC

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Frédéric GROSSO

Notification à l’appelant par LRAR le 12 avril 2023

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance n°20/00084060 du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE en date du 28 Octobre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n°18/05742

DEMANDEUR

Monsieur [D] [Y]

administrateur provisoire de la copropriété de l’immeuble National sise [Adresse 2]

représenté par Me Frédéric GROSSO, avocat au barreau de MARSEILLE

* * *

MINISTERE PUBLIC

près la cour d’appel d’AIX EN PROVENCE, Palais Monclar 13100 AIX EN PROVENCE

Non comparante, ayant déposé un avis le 1er février 2023

Notification à l’appelant par LRAR le 12 avril 2023

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 20 mars 2023 en Chambre du Conseil devant la Cour composée de  Monsieur Philippe COULANGE, Président, qui a rendu compte des plaidoiries devant :

Monsieur Philippe COULANGE, Président.

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

qui ont délibéré

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.

Greffier lors des débats : Madame Maria FREDON

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 avril 2023, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

M. [D] [Y], expert immobilier, a été désigné comme administrateur provisoire de 63 copropriétés dont la copropriété de l’immeuble National sise [Adresse 2] en application des dispositions de l’article 29-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Par ordonnance de remplacement d’administrateur provisoire rendue le 28 octobre 2022, le magistrat chargé du contrôle des expertises a mis fin à la mission confiée à M. [D] [Y] et désigné à sa place la SCP [P] [U] prise en la personne de Maître [H] [W], [Adresse 1].

Par déclaration au greffe en date du 17 novembre 2022, M. [D] [Y] a interjeté appel de cette décision rendue en matière gracieuse. Il précise que l’appel tend à l’annulation et à défaut la réformation de l’ordonnance entreprise et prétend n’avoir pas bénéficié d’un débat loyal devant le magistrat chargé du contrôle des expertises et n’avoir pas eu connaissance des réquisitions du Ministère Public dont l’avis avait été sollicité par le magistrat chargé du contrôle des expertises.

A l’appui de son recours, il fait valoir :

– qu’il n’a commis aucun manquement

– qu’il n’a pu s’expliquer de façon complète devant le magistrat chargé du contrôle des expertises n’ayant eu aucun délai pour préparer son intervention.

– que les missions qui lui ont été confiées ont été accomplies avec diligence et sérieux.

– que plusieurs des missions confiées étaient déjà achevées au moment où il a été dessaisi.

Le dossier a été communiqué au Parquet Général le 13 décembre 2022, lequel par conclusions du 1er février 2023, a estimé que l’appel intervenu en matière gracieuse était bien recevable et a proposé à la Cour de déclarer nulle la décision entreprise, de mettre fin à la mission de M. [D] [Y] et de désigner un nouvel administrateur provisoire.

L’affaire enrôlée sous le numéro 22 / 16277 a été appelée devant la chambre civile 1-5 puis a été transférée à la chambre 1-8 en raison d’une nouvelle répartition des contentieux de la Cour d’appel en vigueur depuis le 1er janvier 2023. Elle est venue à l’audience du 20 mars 2023 et a été mise en délibéré au 12 avril 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que M. [D] [Y], administrateur d’immeubles et syndic de copropriété, est inscrit comme expert près la Cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE depuis l’année 2013, sur la liste des probatoires puis sur la liste principale depuis l’année 2016;

Que ses compétences lui ont valu non seulement d’être inscrit sur la liste des experts dans la rubrique ‘ immobilier ‘ mais aussi désigné à de nombreuses reprises durant la dernière décennie et en particulier dans les 63 copropriétés dont fait partie celle rappelée ci-dessus, copropriétés rencontrant toutes des difficultés d’administration en raison de problèmes de trésorerie récurrents ou de travaux à financer et à exécuter en raison de faiblesses de la structure de l’immeuble constituant la copropriété;.

Qu’il ressort des éléments du dossier que l’intervention de M. [D] [Y] a cristallisé le mécontentement de nombreux copropriétaires, les uns reprochant à l’expert de ne pas en faire assez quand d’autres lui reprochaient d’en faire trop et d’avoir d’une façon générale un fonctionnement trop solitaire;

Que des lettres de mécontentement des copropriétaires ou de leur conseil sont ainsi parvenues au magistrat chargé du contrôle des expertises lequel, après avoir entendu l’intéressé qui a signé un procès-verbal d’audition en date du 10 octobre 2022, a décidé, par ordonnance rendue le 28 octobre 2022, de dessaisir l’expert dans la totalité des missions qui lui avaient été confiées désignant pour le remplacer un administrateur judiciaire;

Mais attendu qu’il apparaît que le magistrat chargé du contrôle des expertises, qui avait recueilli l’avis du Parquet près le Tribunal Judiciaire de MARSEILLE, a omis de notifier l’avis de celui-ci à M. [D] [Y];

Que ce point a été spécialement vérifié par les magistrats du Parquet Général qui dans leurs conclusions écrites demandent expressément à la Cour de déclarer nulle la décision entreprise, d’évoquer l’affaire et de désigner un nouvel administrateur provisoire après avoir mis fin à la mission de M. [D] [Y];

Que cette omission qui fait évidemment grief à M. [D] [Y], lequel n’a pu défendre sa position ou l’aurait peut-être défendue différemment s’il avait connu la position du parquet, constitue une violation grave au principe de la contradiction que le magistrat doit respecter lui-même et justifie que soit prononcée la nullité de l’ordonnance rendue le 28 octobre 2022 par le magistrat chargé du contrôle des expertises;

Attendu qu’il convient de procéder à l’évocation du dossier et de statuer sur la désignation de l’administrateur provisoire devant continuer les missions confiées à M. [D] [Y], la question du principe de la désignation d’un administrateur provisoire dans ces copropriétés en difficulté rencontrant toutes des difficultés d’administration en raison de problèmes de trésorerie récurrents ou de travaux à exécuter en raison de faiblesses de la structure de l’immeuble constituant la copropriété ne faisant pas débat;

Attendu qu’il n’est pas inutile de rappeler que la mission de la Cour ne consiste pas à se prononcer d’une façon générale sur les mérites professionnels de M. [D] [Y] dont le dossier en tant qu’expert sera examiné en temps opportun par la commission de réinscription des experts puisque celui-ci a sollicité le renouvellement de son inscription sur la liste des experts près la Cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE;

Que le rôle de la Cour consiste, puisque le principe même de la désignation d’un administrateur provisoire dans ces copropriétés en difficulté n’est contesté par personne, à déterminer quel est le professionnel le plus à même de d’achever les missions d’administration engagées dans l’intérêt de la collectivité immobilière en cause;

Qu’il ressort du dossier soumis à la Cour que, quelles que soient les compétences réelles de M. [D] [Y], le mécontentement de très nombreux copropriétaires, la décision du magistrat chargé du contrôle des expertises et les vives prises à partie à la suite d’articles de presse défavorables à l’intéressé rendent impossible de le désigner à nouveau, malgré sa demande, dans cette mission d’administration de la copropriété en question;

Que la mission d’administrer une copropriété est en effet une mission judiciaire qui suppose d’être accomplie dans la sérénité, à l’abri des invectives et de pressions de toutes sortes et avec le recul nécessaire;

Qu’il apparaît que [P] [U], prise en la personne de Maître [H] [W], qui depuis plusieurs mois assure effectivement la mission d’administration en remplacement de M. [Y] et connaît maintenant en profondeur le fonctionnement de la copropriété de l’immeuble National sise [Adresse 2], est la structure la plus adaptée pour poursuivre la mission initialement confiée à M. [D] [Y];

Attendu qu’il y a lieu en conséquence de mettre fin à la mission de M. [D] [Y] qui n’apporte aucun élément à la Cour pour démontrer que la mission qui lui a été confiée serait achevée et de désigner pour le remplacer [P] [U], prise en la personne de Maître [H] [W];

Attendu que les dépens de l’instance d’appel seront supportés par l’Etat;

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt rendu en matière gracieuse par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,

Vu les réquisitions du Ministère Public en date du 1er février 2023,

ANNULE l’ordonnance rendue le 28 octobre 2022 par le magistrat chargé du contrôle des expertises au Tribunal Judiciaire de MARSEILLE;

Evoquant,

MET FIN à la mission confiée à M. [D] [Y] et ORDONNE la reddition des comptes s’il n’y a pas déjà été procédé;

DESIGNE en qualité d’administrateur provisoire du syndicat des copropriétaires de la copropriété de l’immeuble National sise [Adresse 2];

[P] [U] prise en la personne de Maître [H] [W]

[Adresse 1]

Avec pour mission de :

* prendre les mesures nécessaires au rétablissement du fonctionnement normal de la copropriété

A cette fin, lui sont confiés tous les pouvoirs du syndic et tous les pouvoirs de l’assemblée générale des copropriétaires, à l’exception de ceux prévus aux a et b de l’article 267 (soit les décisions relatives aux actes d’acquisition immobilière et actes de diskposition aux autres que ceux visés à l’article 25 d et la modification, ou éventuellement l’établissement, du règlement de copropriété dans la mesure où il concerne la jouissance, l’usage et l’administration des parties communes, qui restent soumis à la règle de la majorité des membres du syndicat représentant au moins deux tiers des voix), ainsi que ceux du conseil syndical.

* au plus tard à l’issue des six premiers mois de sa mission, rendre un rapport intermédiaire présentant les mesures à adopter pour redresser la situation financière du syndicat,

* dans un délai de deux mois à compter de sa nomination, procéder aux mesures de publicité pour permettre aux créanciers de produire les éléments nécessaires à l’évaluation du montant de leurs créances,

* après vérification des créances déclarées, établir et publier la liste des créances déclarées,

* établir un plan d’apurement des dettes, d’une durée maximale de cinq ans, qui comporte un échéancier des versements auprès des créanciers du syndicat des copropriétaires, et une évaluation de la somme des créances irrécouvrables du syndicat des copropriétaires,

* notifier ce plan d’apurement aux créanciers et au conseil syndical,

* saisir le juge d’une demande d’homologation du plan, passé un délai de deux mois à compter de la notification du plan sans contestation devant le juge,

* le cas échéant, conclure avec les copropriétaires des échéanciers individualisés de remboursement de leurs dettes vis-à-vis du syndicat, dès lors qu’il ne compromettent pas la réalisation du plan d’apurement,

* le cas échéant, proposer au représentant de l’Etat dans le département d’initier un plan de sauvegarde en application de l’article L.615-1 du code de la construction et de l’habitation, conformément aux disposition de l’article 29-10,

* le cas échéant, liquider les dettes du syndicat s’il fait l’objet d’une expropriation ou d’une dissolution,

DIT que les dépens seront supportés par l’Etat.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

 


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