Conflit sur la recevabilité des demandes en matière de décompte de travaux : enjeux de notification et délais de contestation.

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Conflit sur la recevabilité des demandes en matière de décompte de travaux : enjeux de notification et délais de contestation.

Contexte de l’affaire

La SAS DERICHEBOURG ENERGIE a été engagée par la SCCV [Localité 6] 2 pour réaliser des travaux d’électricité dans le cadre d’une opération immobilière, avec un montant forfaitaire de 570 000 euros TTC. La maîtrise d’œuvre a été confiée à la société URB1N, et la réception définitive des travaux a eu lieu le 1er février 2021.

Échanges et contestations

Après la réception des travaux, la société URB1N a transmis plusieurs décomptes à la SAS DERICHEBOURG ENERGIE, qui a contesté ces états de compte par courriel en janvier 2022, formulant une contre-proposition. La SCCV [Localité 6] 2 a rejeté ces contestations, arguant qu’elles étaient tardives.

Procédure judiciaire

Face à l’absence d’accord, la SAS DERICHEBOURG ENERGIE a assigné la SCCV [Localité 6] 2 en justice pour obtenir le paiement du solde de son marché et des dommages et intérêts. Un juge de la mise en état a proposé une médiation, que la SCCV a refusée.

Demandes des parties

La SCCV [Localité 6] 2 a demandé au juge de déclarer irrecevables les demandes de la SAS DERICHEBOURG ENERGIE, tout en réclamant des frais sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. En réponse, la SAS DERICHEBOURG ENERGIE a demandé le rejet de cette irrecevabilité et a souhaité que les parties soient renvoyées à conclure sur le fond.

Arguments juridiques

La SCCV [Localité 6] 2 soutient que la SAS DERICHEBOURG ENERGIE n’a pas contesté le décompte dans le délai imparti, le rendant définitif. En revanche, la SAS DERICHEBOURG ENERGIE argue que la SCCV n’a pas respecté le formalisme requis pour la notification du décompte, ce qui empêche la forclusion de sa demande.

Décision du juge

Le juge a conclu que la SCCV [Localité 6] 2 n’avait pas notifié le décompte général conformément aux exigences contractuelles, ce qui signifie que le délai de contestation n’avait pas commencé à courir. Par conséquent, les demandes de la SAS DERICHEBOURG ENERGIE ont été jugées recevables, et la SCCV a été déboutée de sa demande d’irrecevabilité et condamnée aux dépens.

Calendrier de la procédure

Le calendrier de la procédure a été rappelé, avec une mise en état prévue pour le 21 février 2025 et une plaidoirie fixée au 15 avril 2025 à 14 heures.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelles sont les conditions de recevabilité des demandes en matière de contestation de décompte dans le cadre d’un marché public ?

La recevabilité des demandes en matière de contestation de décompte dans le cadre d’un marché public est régie par plusieurs dispositions du Code de procédure civile, notamment les articles 789 et 122.

L’article 789 précise que le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir, ce qui inclut les demandes de contestation de décompte.

Il est important de noter que, selon l’article 122, une fin de non-recevoir peut être soulevée pour faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour des motifs tels que le défaut de droit d’agir ou le non-respect des délais.

Dans le cas présent, la SCCV [Localité 6] 2 soutient que la SAS DERICHEBOURG ENERGIE n’a pas contesté le décompte dans le délai de 30 jours prévu par le cahier des clauses générales.

Cependant, la SAS DERICHEBOURG ENERGIE argue que la SCCV n’a pas respecté le formalisme requis pour la notification du décompte, ce qui empêche le délai de contestation de commencer à courir.

Ainsi, la question de la recevabilité des demandes dépendra de l’examen des conditions de notification et des délais prévus dans le contrat.

Quels sont les effets de la notification d’un décompte général dans le cadre d’un marché de travaux ?

La notification d’un décompte général dans le cadre d’un marché de travaux a des effets juridiques significatifs, notamment en ce qui concerne le droit de l’entrepreneur de contester ce décompte.

Selon l’article 22 du cahier des clauses générales, le maître d’ouvrage doit notifier le décompte général à l’entreprise dans un délai de 30 jours suivant la réception du mémoire définitif.

Si cette notification n’est pas effectuée dans le délai imparti, l’entreprise peut considérer que le décompte n’a pas été accepté, et elle peut donc contester le montant qui lui a été notifié.

Dans le cas présent, la SAS DERICHEBOURG ENERGIE a contesté le décompte, arguant que la SCCV [Localité 6] 2 n’avait pas respecté les formalités de notification.

En conséquence, le délai de 30 jours pour contester le décompte n’a pas commencé à courir, permettant à la SAS DERICHEBOURG ENERGIE de maintenir sa contestation.

Quelles sont les conséquences d’un refus de médiation dans le cadre d’un litige commercial ?

Le refus de médiation dans le cadre d’un litige commercial peut avoir plusieurs conséquences sur le déroulement de la procédure judiciaire.

Tout d’abord, la médiation est souvent encouragée par les tribunaux comme un moyen de résoudre les conflits de manière amiable et rapide.

Le Code de procédure civile, notamment dans ses articles relatifs à la médiation, souligne l’importance de cette étape pour favoriser la résolution des litiges sans recourir à un procès.

Dans le cas présent, la SCCV [Localité 6] 2 a refusé la médiation proposée par le juge de la mise en état.

Ce refus peut entraîner une prolongation des délais de procédure et des coûts supplémentaires, car les parties devront poursuivre le litige devant le tribunal.

De plus, le refus de médiation peut être perçu négativement par le juge, qui pourrait considérer que la partie qui refuse la médiation n’est pas de bonne foi dans sa volonté de résoudre le conflit.

Quels sont les critères d’attribution des dépens dans le cadre d’une procédure judiciaire ?

Les dépens dans le cadre d’une procédure judiciaire sont régis par l’article 696 du Code de procédure civile, qui précise que les dépens comprennent les frais de justice exposés par les parties pour la conduite de l’instance.

Les dépens peuvent inclure les frais d’huissier, les frais d’expertise, ainsi que les honoraires d’avocat, sous certaines conditions.

En général, la partie qui perd le procès est condamnée à payer les dépens de l’autre partie, sauf décision contraire du juge.

Dans le cas présent, la SCCV [Localité 6] 2 a été déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ce qui signifie qu’elle ne pourra pas obtenir le remboursement de ses frais d’avocat.

De plus, la SCCV [Localité 6] 2 a été condamnée aux dépens de l’incident, ce qui implique qu’elle devra supporter les frais engagés par la SAS DERICHEBOURG ENERGIE pour la défense de ses droits dans cette instance.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

11 décembre 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux
RG
23/08951
N° RG 23/08951 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YMGW

7EME CHAMBRE CIVILE
INCIDENT
RAPPEL DU CALENDRIER DE PROCÉDURE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

54C

N° RG 23/08951
N° Portalis DBX6-W-B7H-YMGW

N° de Minute 2024/

AFFAIRE :

SAS DERICHEBOURG ENERGIE

C/

SCCV [Localité 6] 2

Grosse Délivrée
le :
à
SELARL CMC AVOCATS
SELARL KPDB INTER- BARREAUX

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT

Le ONZE DÉCEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

Nous, Madame BOULNOIS, Vice-Président, Juge de la Mise en état de la 7ème Chambre Civile,

assistée de Monsieur ROUCHEYROLLES, Greffier,

Vu la procédure entre :

DEMANDERESSE

SAS DERICHEBOURG ENERGIE
[Adresse 2]
[Localité 5]

représentée par Me Julie NEDELEC de la SELARL CMC AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX (avocat postulant)
représentée par Me Gilles ROUMENS de la SCPA COURTEAUD-PELLISSIER, avocat au barreau de PARIS (avocat plaidant)

DÉFENDERESSE

SCCV [Localité 6] 2
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Me Pierre FONROUGE de la SELARL KPDB INTER-BARREAUX, avocat au barreau de BORDEAUX (avocat postulant)
représentée par Me Marie DUVERNE-HANACHOWICZ du Cabinet LAMY LEXEL AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON (avocat plaidant)

N° RG 23/08951 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YMGW

Par acte d’engagement en date du 30 novembre 2018, la SARL VIBEY qui paraît ensuite avoir intégré la SAS DERICHEBOURG ENERGIE s’est vu confier par la SCCV [Localité 6] 2 la réalisation de travaux d’électricité pour le lot 13-électricité d’une opération immobilière concernant la construction d’une résidence située au [Adresse 1], pour montant global et forfaitaire de 570 000 euros TTC.

La maîtrise d’œuvre a été confiée à la société URB1N.

La réception définitive des travaux a eu lieu le 1er février 2021.

Par courriel du 08 octobre 2021, le maître d’œuvre a transmis à la SAS DERICHEBOURG ENERGIE un décompte des travaux puis un nouveau décompte le 05 novembre 2021.

Par courriel du 24 janvier 2022, la société DERICHEBOURG ENERGIE a contesté cet état de compte et a formulé une contre-proposition.

Par courrier du 28 février 2022, le maître d’ouvrage lui a répondu en rejetant les contestations et lui indiquant qu’elle avait contesté tardivement le décompte.

Par courrier du 30 août 2022, la SAS DERICHEBOURG ENERGIE, indiquant que les discussions n’avaient pas abouti, a notifié au maître d’œuvre URB1N un « projet de décompte final ».

Faute d’accord, suivant acte signifié le 25 octobre 2023, la SAS DERICHEBOURG ENERGIE a fait assigner au fond la SCCV [Localité 6] 2 aux fins de la voir condamnée à lui payer le solde de son marché outre des dommages et intérêts.

Par courrier en date du 05 décembre 2023, le juge de la mise en état a demandé aux parties si elles étaient d’accord pour envisager une mesure de médiation judiciaire.

La SCCV [Localité 6] 2 a refusé le recours à la médiation.

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 21 mars 2024 et 03 octobre 2024, la SCCV [Localité 6] 2 demande au juge de la mise en état de déclarer irrecevables car forcloses les demandes de la société DERICHEBOURG ENERGIE et de la condamner à lui payer à la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre de la condamner aux entiers dépens de l’instance.

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 02 octobre 2024 et le 03 octobre 2024, la SAS DERICHEBOURG ENERGIE demande au juge de la mise en état de débouter la SCCV [Localité 6] 2 de sa demande d’irrecevabilité et de ses demandes formulées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, de « renvoyer les parties à conclure sur le fond » et de réserver les dépens.

MOTIFS :

L’article 789 du code de procédure civile dispose que :
« Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
1° Statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et les incidents mettant fin à l’instance
Les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu’ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge ;
(…)
6°Statuer sur les fins de non-recevoir.

Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile :
« Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».

La SCCV [Localité 6] 2 fait valoir que la SAS DERICHEBOURG ENERGIE n’a pas contesté le décompte qu’elle considère comme un décompte général définitif dans le délai de 30 jours prévu au cahier des clauses générales et qu’en conséquence, celui-ci est devenu définitif et ne peut plus être contesté.

La SAS DERICHEBOURG ENERGIE fait valoir que la SCCV [Localité 6] 2 n’a pas respecté le formalisme prévu au cahier des clauses générales, qu’ainsi aucun projet de décompte général ne lui a été notifié et qu’aucun décompte général définitif n’a été établi.

Le cahier des clauses générales de la société CAPELLI dont il n’est pas contesté qu’il concerne ce projet prévoit que les pièces constituant le marché sont :
« le cahier des clauses particulières (CCP) et ses annexes
le présent cahier des clauses générales (CCG)
les descriptifs des travaux de l’ensemble des corps d’état (CCTP)
(…)
les premiers documents prévalant sur les suivants ».

L’article 22 du CCG relatif au règlement des comptes indique :
« 22.1 Présentation du mémoire définitif par l’Entreprise : Le mémoire définitif des travaux devra être présenté par l’Entreprise au Maître d’Œuvre dans un délai de quarante-cinq (45) jours, à compter de la date de réception ou de la date de la résiliation de son marché. L’Entreprise devra notifier simultanément le mémoire définitif au Maître d’Ouvrage.
Si le D.O.E et les résultats des essais règlementaires et contractuels ne devaient avoir été remis dès avant ce délai de 45 jours, le mémoire devra nécessairement être accompagné de ces documents. Si tel ne devait pas être le cas, le mémoire éventuellement corrigé ne pourra donner lieu à aucun paiement.

Si le marché comporte une clause de révision des prix, la situation de révision devra être présentée dans un délai de quarante-cinq (45) jours après la parution des coefficients de révision du mois de réception.
L’Entreprise est liée par les indications figurant au mémoire, sauf sur le montant définitif des intérêts moratoires.
Le Maître d’Œuvre examine le mémoire définitif et établit sans délai le décompte général des sommes dues en exécution du marché. Il remet ce décompte au Maître d’Ouvrage.
Le Maître d’Ouvrage notifie à l’Entreprise ce décompte général dans un délai de trente jours (30) jours à dater de la réception du mémoire définitif.
Si le décompte n’est pas notifié par le Maître d’Ouvrage dans ce délai, ce dernier ne sera réputé avoir accepté le mémoire définitif remis au Maître d’Œuvre qu’après que l’Entreprise aura adressé au Maître d’Ouvrage une nouvelle mise en demeure et que cette dernière sera restée sans réponse pendant un délai de 21 jours. La réponse du Maître d’Ouvrage pourra être adressée par la forme recommandée avec accusé de réception ou par télécopie ou par courriel.
L’Entreprise dispose de 30 jours à compter de la notification du Décompte Général pour présenter, par écrit, son acceptation ou ses observations éventuelles au Maître d’œuvre et pour en aviser simultanément le Maître d’Ouvrage
(…) ».

En l’espèce, par courriel du 08 octobre 2021, la société URB1N, maître d’oeuvre, a transmis à la SAS DERICHEBOURG ENERGIE un « tableau de bilan comptable valant DGD » puis le 05 novembre 2021 un « bilan comptable valant DGD mis à jour ».

Par courriel du 24 janvier 2022, la société DERICHEBOURG ENERGIE a répondu en transmettant une « proposition de DGD » et a refusé la proposition du maître d ‘œuvre.

Par courrier du 28 février 2022, la SCCV [Localité 6] 2 par l’intermédiaire de la société CAPELLI a rejeté les contestations et a mis en demeure la SAS DERICHEBOURG ENERGIE de lui transmettre sa « facture de situation de travaux n°16 valant DGD ».

Il n’est versé au débat aucun échange de courriers ou de mails intervenus ensuite jusqu’au courrier du 30 août 2022 dans lequel la SAS DERICHEBOURG ENERGIE notifiait au maître d ‘œuvre un « projet de décompte final ».

Il en résulte que le maître de l’ouvrage, la SCCV [Localité 6] 2, n’a pas notifié à la SAS DERICHEBOURG ENERGIE un décompte général des sommes dues en exécution du marché qui lui aurait été transmis par le maître d’œuvre, conformément à ce qui était prévu à l’article 22.1 du CCG.

Ainsi, le délai de 30 jours accordé à l’entreprise pour contester le décompte n’a pas commencé à courir et la SAS DERICHEBOURG ENERGIE peut toujours contester le décompte. En conséquence, elle n’est pas forclose en sa demande qui est recevable.

La SCCV [Localité 6] 2 sera déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et elle sera condamnée aux dépens de l’incident.

PAR CES MOTIFS :

Nous, juge de la mise en état,

REJETONS la fin de non-recevoir soulevée par la SCCV [Localité 6] 2 et DÉCLARONS recevables les demandes de la SAS DERICHEBOURG ENERGIE.

DÉBOUTONS la SCCV [Localité 6] 2 de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNONS la SCCV [Localité 6] 2 aux dépens de l’incident.

RAPPELONS le calendrier de procédure Mise en état :

OC 21/02/2025
PLAIDOIRIE 15/04/2025 à 14 HEURES (COLLÉGIALE)

La présente décision est signée par Madame BOULNOIS, Vice-Président, Juge de la Mise en état de la 7ème Chambre Civile, et par Monsieur ROUCHEYROLLES, Greffier.

LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ETAT


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