M. [W] [G] et Mme [J] [Z] ont engagé la société Nordflam pour des travaux dans leur cuisine et salle de bains, suite à un devis accepté en février 2019. Après avoir constaté des malfaçons, ils ont fait appel à un expert amiable en septembre 2019, puis à un expert judiciaire en février 2020. Le rapport de l’expert a été déposé en décembre 2020. En octobre 2022, M. [G] et Mme [Z] ont assigné Nordflam en justice pour obtenir la résolution du contrat et des dommages-intérêts. L’affaire a été instruite et est prévue pour plaidoiries en mai 2024, avec un jugement attendu en août 2024. Les demandeurs réclament des sommes pour divers travaux de reprise, des frais de relogement, un préjudice moral, ainsi que le remboursement d’un acompte. De son côté, la société Nordflam conteste les demandes et réclame le paiement du solde du marché, affirmant ne pas être responsable des malfaçons alléguées.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
[W] [G]
, [J] [Z]
c/
S.A.S. NORDFLAM
copies et grosses délivrées
le
à Me VANACKER (LILLE)
à Me FOURNIER (LILLE)
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BÉTHUNE
N° RG 22/03641 – N° Portalis DBZ2-W-B7G-HSCQ
Minute: /2024
JUGEMENT DU 26 AOUT 2024
DEMANDEURS
Monsieur [W] [G], demeurant 47 rue Etienne Dolet – 62410 WINGLES
représenté par Me Samuel VANACKER, avocat au barreau de LILLE
Madame [J] [Z], demeurant 47 rue Etienne Dolet – 62410 WINGLES
représentée par Me Samuel VANACKER, avocat au barreau de LILLE
DEFENDERESSE
S.A.S. NORDFLAM, dont le siège social est sis 8 rue Nicéphore Niepce – 59710 PONT A MARCQ
représentée par Me Clément FOURNIER, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Présidente : LEJEUNE Blandine, Juge, siègeant en Juge Unique
Assistée lors des débats de SOUPART Luc, greffier principal.
DÉBATS:
Vu l’ordonnance de clôture en date du 10 Avril 2024 fixant l’affaire à plaider au 21 Mai 2024 à l’audience de juge unique.
A la clôture des débats en audience publique, l’affaire a été mise en délibéré et les parties ont été avisées que le jugement serait mis à la disposition au Greffe au 26 Août 2024.
Le tribunal après avoir délibéré, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort.
Suivant devis établi le 29 janvier 2019 et accepté le 6 février 2019, M. [W] [G] et Mme [J] [Z] confié à la société Nordflam a réalisation de travaux dans la cuisine et la salle de bains de leur domicile.
Évoquant diverses mal-façons et non-conformités contractuelles, M. [G] et Mme [Z] on fait intervenir M. [E], en qualité d’expert amiable, lequel a établi une note technique en date du 3 septembre 2019.
Par ordonnance de référé en date du 11 février 2020, le président du tribunal judiciaire de Lille a confié la réalisation d’une expertise judiciaire à M. [C] [N].
L’expert a déposé son rapport le 20 décembre 2020.
Par acte de commissaire de justice en date du 10 octobre 2022, Mme [J] [Z] et M. [W] [G] ont assigné la société NORDFLAM devant le tribunal aux fins de résolution du contrat et de paiement de dommages-intérêts au titre de travaux de reprise.
La société NORDFLAM a comparu à l’instance.
L’instruction de la procédure a été confiée au juge de la mise en état qui a ordonné sa clôture le 10 avril 2024 et qui a fixé l’affaire pour plaidoiries à l’audience des débats du 21 mai 2024 devant le juge unique. A l’issue des débats, le prononcé de la décision a été reporté pour plus ample délibéré au 26 août 2024.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 30 novembre 2023 Mme [J] [Z] et M. [W] [G] demandent au tribunal de :
-les juger recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions;
-juger que la société NORDFLAM a gravement manqué à ses obligations contractuelles;
-prononcer la résolution judiciaire du contrat conclu avec la société NORDFLAM;
-condamner la société NORDFLAM à leur restituer la somme de 2 433, 80 euros TTC au titre de
l’acompte versé en début de chantier;
-condamner la société NORDFLAM à leur payer, au titre des travaux de reprise et des conséquences
financières y afférentes, les sommes suivantes :
– pour le carrelage (cuisine) :
– 3 070 euros au titre des travaux de reprise (dépose et pose d’un nouveau carrelage dans les règles de l’art,
conforme au DUT) ;
– 1 000 euros au titre des frais de relogement durant la semaine des travaux de reprise du carrelage;
– pour la plâtrerie (cuisine et salle de bain):
– 2 990 euros au titre des travaux de reprise (dépose et pose des cloisons, évacuation, faux plafond) en ce
compris la mise en place des barrières d’étanchéité sur la partie basse des plaques de plâtre ;
– déménagement et réaménagement : 750 euros TTC ;
– dépose et repose de la cuisine : 660 euros TTC ;
– nettoyage de fin de chantier : 2400 euros TTC :
-condamner la société NORDFLAM à leur payer la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral subi,
ainsi que la somme de 1 000 euros pour trouble de jouissance;
condamner la société NORDFLAM à leur payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de
l’article 700 du code de procédure civile;
-condamner la société NORDFLAM aux entiers frais et dépens de la présente instance, en ce
compris le coût de l’expertise judiciaire, définitivement taxée à 2944, 07 euros;
-rappeler que l’exécution provisoire du jugement à intervenir est de droit.
Mme [Z] et M. [G] évoquent la présence de mal-façons et de non-conformités contractuelles concernant la pose du carrelage en cuisine, et les travaux d’isolation confiés à la société Nordflam.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 13 juin 2023 la société NORDFLAM demande au tribunal de :
-débouter M. et Mme [G] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
-condamner solidairement M. et Mme [G] à lui payer la somme de 7 994,35 euros au titre du
paiement du solde du marché de travaux ;
-condamner solidairement M. et Mme [G] à lui payer la somme de 3 000 euros par application des
dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens de l’instance.
La société Nordflam précise tout d’abord ne pas avoir effectué la prestation de pose du carrelage de la cuisine et estime en conséquence que sa responsabilité contractuelle ne peut être engagée à ce titre. Elle considère par ailleurs que les travaux de plâtrerie ont été réalisés dans les règles de l’art. Elle conclut en conséquence à l’absence d’une inexécution suffisamment grave pour prononcer la résolution judiciaire du contrat.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties à leurs dernières conclusions visées ci-dessus.
A titre liminaire, sur les demandes non constitutives de prétentions
Il résulte de l’application combinée des articles 4, 5 et 768 du Code de procédure civile que le juge n’est tenu de se prononcer que sur les prétentions des parties, telles que présentées dans le dispositif de leurs dernières conclusions.
Il y a lieu de rappeler que la prétention constitue l’objet de la demande. Elle tend à la reconnaissance d’un droit ou à ce que soit tranché un point litigieux.
Ainsi, les demandes non destinées à produire un effet juridique ne constituent pas des prétentions, même si elles sont reprises dans le dispositif des écritures des parties. La juridiction n’est pas tenue d’y répondre, sauf s’il s’agit de moyens repris par ailleurs dans la discussion desdites écritures. Le cas échéant, il y est répondu dans la motivation de la décision, et non au dispositif.
En conséquence, le tribunal n’est pas tenu de trancher, dans son dispositif, les demandes des parties, telles reprises au dispositif de leurs écritures de la manière suivante :
Pour Mme [Z] et M. [G] :
-les juger recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions;
-juger que la société NORDFLAM a gravement manqué à ses obligations contractuelles
S’agissant de moyens repris dans la discussion, à l’exception de celui concernant le caractère recevable de la demande, par ailleurs non contesté, il y sera répondu dans la motivation de la présente décision.
Sur la demande de résolution du contrat
Sur la prestation de pose du carrelage de la cuisine
L’article 9 du Code de procédure civile dispose qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
En l’espèce, Mme [Z] et M. [G] produisent au débat un devis établi par la SAS Nordflam en date du 29 novembre 2019 et accepté le 6 février 2019, ainsi que la facture y afférente en date du 16 mai 2019, comportant une prestation de pose de carrelage. Ils ne contestent pas avoir commandé ledit carrelage auprès d’un tiers, et produisent au débat la facture établie à ce titre auprès de la SARL Luxe et Caractère, exempte de prestation de pose.
La SAS Nordflam n’apporte aucun élément au débat tendant à considérer que la prestation de carrelage qu’elle a facturé et dont elle sollicite le paiement concernerait une autre prestation que celle de la pose du carrelage de la cuisine.
Compte-tenu de ces éléments, il y a lieu de considérer que la SAS Nordflam a procédé à la pose litigieuse.
Sur l’inexécution contractuelle
L’article 1224 du Code civil dispose que la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire, soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.
L’article 1227 dudit Code précise que la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice.
En l’espèce, l’expert judiciaire constate la non-conformité des travaux suivants, aux règles de l’art :
l’existence d’un « flash »
l’absence de joints de carrelage
le surplus de colle et l’absence de finition en cave
l’absence de barrière d’étanchéité en partie basse des cloisons et absence de jour d’1cm
L’expert relève par ailleurs une non-conformité de l’isolant par rapport au devis. La SAS Nordflam, qui indique qu’il s’agissait de s’adapter aux réalités du chantier, n’apporte aucun élément tendant à démontrer qu’elle a informé ses clients et obtenu leur accord avant de procéder à cette modification des matériaux utilisés.
L’expert judiciaire conclut à la nécessité de déposer l’ensemble des matériaux, et de procéder à une nouvelle pose.
En conséquence, il y a lieu de considérer que la mauvaise exécution, par la SAS Nordflam de ses obligations contractuelles est suffisamment grave pour entraîner la résolution du contrat, laquelle sera prononcée.
Sur les conséquences de la résolution du contrat
L’article 1229 du Code civil dispose que la résolution met fin au contrat. Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles ont procuré l’une à l’autre.
En l’espèce, il est constant que Mme [Z] et M. [G] ont payé la somme de 2.433,80 euros à titre d’acompte pour le chantier dont s’agit.
Compte-tenu de la résolution du contrat, la SAS Nordflam sera condamnée à rembourser cette somme.
Elle sera par ailleurs déboutée de sa demande reconventionnelle au titre du paiement du solde du marché de travaux.
Sur les demandes de dommages-intérêts
L’article 1231-1 du Code civil dispose que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
L’article 1231-2 dudit Code dispose que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé.
Sur les travaux de reprise
Il y a lieu d’indemniser Mme [Z] et M. [G] des frais nécessaires à la dépose des travaux réalisés par la SAS Nordflam tels que chiffrés par l’expert, soit :
-dépose du carrelage et évacuation : 528 euros TTC
-dépose cloison et évacuation : 330 euros TTC
En revanche, il n’y a pas lieu de condamner la SAS Nordflam à payer la réalisation par un tiers de l’intégralité des travaux qui lui avaient été initialement confiés, et dont Mme [Z] et M. [G] se trouvent, par l’effet de la présente décision, dispensés du paiement, à savoir :
-la fourniture et la pose d’un ragréage
-la pose du carrelage
-la cuisine et le faux plafond
-la découpe des barrières d’étanchéité
Il en est de même des prestations qui auraient également dû être effectuées, en cas de respect par la SAS Nordflam de ses obligations contractuelles, à savoir :
-le déménagement et le réaménagement du mobilier
-la dépose et la repose de la cuisine
-le nettoyage du chantier
-le coût de location d’un gîte pendant une semaine
S’agissant de la fourniture du carrelage, il y aura lieu de procéder à la dépose du carrelage initialement commandé par les demandeurs.
A défaut de production d’un devis distinguant le prix de la fourniture de celui de la pose, il y a lieu de leur allouer à ce titre la somme forfaitaire de 800 euros, la facture produite faisant état d’un coût global, pour la fourniture et la pose, d’un montant de 1.040 euros TTC.
En conséquence, la SAS Nordflam sera condamnée à payer à Mme [Z] et M. [G] la somme totale de 1.658 euros de dommages-intérêts au titre des travaux de reprise.
Sur le préjudice de jouissance
Il résulte des pièces produites au débat que Mme [Z] et M. [G] ont, entre la réalisation des travaux au début de l’année 2019, et au moins jusqu’au dépôt du rapport d’expertise judiciaire en date du 20 décembre 2020, vécu dans une habitation dans laquelle des travaux de cuisine et d’isolation avaient été commencé mais non achevés.
Il en résulte un préjudice de jouissance qu’il convient de réparer en leur allouant la somme de 1.000 euros.
Sur le préjudice moral
Les manquements contractuels de la SAS Nordflam ayant contraint Mme [Z] et M. [G] à saisir la présente juridiction leur ont nécessairement causé un préjudice moral qu’il convient de réparer en leur allouant la somme de 500 euros.
Sur l’exécution provisoire et les frais du procès
Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de plein droit par application de l’article 514 du code de procédure civile.
En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une partie. Elle peut également être condamnée à payer à l’autre une somme que le juge détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. A cet égard, le juge tient compte, dans tous les cas, de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
Partie ayant succombé au sens de ces dispositions, la SAS Nordflam sera condamnée aux dépens, en ce inclus les frais afférents à l’expertise judiciaire. Elle sera également condamnée à payer à M. [G] et Mme [Z] la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le Tribunal, statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe et rendu en premier ressort ;
PRONONCE la résolution du contrat conclu entre M. [W] [G] et Mme [J] [Z] d’une part et la SAS Nordflam d’autre part, suivant devis du 29 janvier 2019 accepté le 6 février 2019
CONDAMNE la SAS Nordflam à restituer à M. [W] [G] et Mme [J] [Z] la somme de 2.433,80 euros à titre de l’acompte versé
REJETTE la demande de paiement formulée par la SAS Nordflam au titre du paiement du solde du marché de travaux
CONDAMNE la SAS Nordflam à payer à M. [W] [G] et Mme [J] [Z] la somme de 1.658 euros de dommages-intérêts au titre des travaux de reprise et de leurs accessoires
CONDAMNE la SAS Nordflam à payer à M. [W] [G] et Mme [J] [Z] la somme de 1.000 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice de jouissance
CONDAMNE la SAS Nordflam à payer à M. [W] [G] et Mme [J] [Z] la somme de 500 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice moral
CONDAMNE la SAS Nordflam aux dépens, dont les frais d’expertise judiciaire
CONDAMNE SAS Nordflam à payer à M. [W] [G] et Mme [J] [Z] la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de plein droit par provision.
LE GREFFIER LE PRESIDENT