Conflit relatif à l’exécution d’un contrat de travaux : enjeux de conformité et de responsabilité contractuelle

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Conflit relatif à l’exécution d’un contrat de travaux : enjeux de conformité et de responsabilité contractuelle

Contexte de l’affaire

M. [Z] [O] a engagé la Sarl TGM pour des travaux de menuiserie en PVC et aluminium, ainsi que pour des volets roulants, pour un montant total de 10.933,14 euros TTC, avec un acompte de 3.000 euros versé le 28 juin 2016.

Réclamations et modifications de contrat

Le 28 septembre 2016, M. [O] a signalé des défauts et non-conformités dans les travaux réalisés. Suite à une annulation partielle de commande le 14 décembre 2016, le montant total des travaux a été réduit à 7.572,41 euros, facturé le 13 février 2017.

Procédures judiciaires

La Sarl TGM a saisi le tribunal d’instance de Montauban le 9 avril 2018 pour obtenir le paiement du solde de 4.572,41 euros. Le tribunal a ordonné une expertise, dont le rapport a été déposé le 25 novembre 2020.

Jugement du tribunal judiciaire

Le 4 octobre 2022, le tribunal judiciaire a condamné M. [O] à payer 4.409,67 euros à la Sarl TGM, ainsi que 1.500 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive, tout en déboutant M. [O] de ses demandes. M. [O] a interjeté appel le 27 octobre 2022.

Ordonnance de mise en état

Le 23 mai 2024, le magistrat a statué sur la recevabilité des demandes, précisant que le conseiller de la mise en état ne pouvait pas se prononcer sur certaines fins de non-recevoir et a partagé les dépens de l’incident entre les parties.

Demandes de M. [O] en appel

M. [O] a demandé la réforme du jugement, contestant la prescription de l’action et la force probante du rapport d’expertise, tout en réclamant une nouvelle expertise et des dommages et intérêts de 29.802,03 euros.

Réponse de la Sarl TGM

La Sarl TGM a demandé la confirmation du jugement, arguant que la demande de résolution du contrat était prescrite et irrecevable, tout en réclamant des dommages et intérêts pour résistance abusive.

Examen de la recevabilité de la demande de résolution

La cour a examiné la recevabilité de la demande de résolution du contrat, concluant qu’elle était complémentaire à la demande de dommages et intérêts et que la prescription n’était pas acquise.

Analyse des défauts et expertise

Le rapport d’expertise a révélé des défauts mineurs, sans gravité suffisante pour justifier la résolution du contrat. M. [O] a contesté la qualité de l’expertise, mais la cour a jugé que l’expert avait accompli sa mission de manière adéquate.

Créances réciproques

M. [O] a réclamé des dommages et intérêts pour des malfaçons, tandis que la Sarl TGM a demandé le paiement du solde de la facture. La cour a constaté que M. [O] devait encore 4.572,41 euros après déduction de l’acompte.

Décisions finales de la cour

La cour a confirmé le jugement du 4 octobre 2022, en précisant que les intérêts légaux devaient courir à partir de la mise en demeure du 17 novembre 2017. Elle a également rejeté la demande de résolution du contrat et d’une nouvelle expertise, tout en condamnant M. [O] aux dépens d’appel.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quel est le cadre juridique de la résolution d’un contrat en cas d’inexécution ?

La résolution d’un contrat est régie par les dispositions des articles 1184 et suivants du Code civil, qui stipulent que la résolution ne peut être prononcée qu’en cas d’inexécution suffisamment grave des obligations contractuelles.

Selon l’article 1184 du Code civil, « la résolution de la convention peut être demandée en justice lorsque l’inexécution est suffisamment grave ».

Il incombe à la partie qui invoque la résolution de prouver la gravité de l’inexécution. Dans le cas présent, le tribunal a constaté que les défauts relevés par l’expert judiciaire étaient mineurs et ne justifiaient pas la résolution du contrat.

En effet, l’expert a noté que les défauts constatés étaient principalement des réglages à effectuer, ce qui ne constitue pas une inexécution suffisamment grave pour entraîner la résolution du contrat.

Quelles sont les conséquences de la prescription sur les demandes en justice ?

La prescription est régie par les articles 2224 et suivants du Code civil. L’article 2224 précise que « le délai de prescription court à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

Dans le cas présent, M.[O] soutient que sa demande de résolution du contrat n’est pas prescrite, car il a formulé une demande reconventionnelle en première instance qui aurait interrompu le délai de prescription.

L’article 2241 du Code civil stipule que « la demande en justice interrompt le délai de prescription ». Ainsi, si M.[O] a effectivement introduit une demande en justice avant l’expiration du délai de prescription, cela pourrait avoir pour effet d’interrompre ce délai.

La cour a jugé que la demande de résolution présentée pour la première fois le 24 janvier 2023 était recevable, car la prescription n’était pas acquise.

Comment se détermine la force probante d’un rapport d’expertise judiciaire ?

La force probante d’un rapport d’expertise judiciaire est déterminée par la manière dont l’expert a accompli sa mission, en respectant les principes d’objectivité, de conscience et d’impartialité.

L’article 202 du Code de procédure civile précise que « l’expert doit faire rapport de manière objective et impartiale ». Dans le cas présent, M.[O] conteste la force probante du rapport d’expertise de M.[J], arguant que l’expert n’a pas accompli sa mission de manière adéquate.

Cependant, la cour a constaté que l’expert avait bien décrit les défauts constatés et en avait évalué le coût des travaux nécessaires pour y remédier. Le simple fait que M.[O] ait refusé de permettre à la société TGM de procéder aux réglages préconisés ne suffit pas à caractériser un défaut d’objectivité.

Ainsi, la cour a jugé que le rapport d’expertise de M.[J] avait une force probante suffisante pour fonder sa décision.

Quelles sont les implications des demandes de dommages et intérêts dans le cadre d’un litige contractuel ?

Les demandes de dommages et intérêts dans le cadre d’un litige contractuel sont régies par les articles 1147 et 1231-1 du Code civil, qui prévoient que le débiteur d’une obligation est tenu de réparer le préjudice causé par son inexécution.

L’article 1147 stipule que « le débiteur est tenu de réparer le préjudice causé par son inexécution, sauf s’il prouve que cette inexécution est due à une cause étrangère ».

Dans le cas présent, M.[O] a demandé des dommages et intérêts d’un montant de 29.802,03 euros, mais la cour a constaté que les seuls défauts constatés par l’expert judiciaire étaient d’une valeur de 162,74 euros.

Les pièces produites par M.[O] n’ont pas été soumises à l’expert judiciaire et n’ont pas été constatées de manière contradictoire, ce qui a conduit la cour à conclure que les demandes de M.[O] étaient excessives et non fondées.

Quelles sont les conséquences des frais irrépétibles dans le cadre d’une procédure judiciaire ?

Les frais irrépétibles sont régis par l’article 700 du Code de procédure civile, qui prévoit que « la partie perdante peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles ».

Dans le cas présent, la cour a condamné M.[O] à payer à la société TGM une indemnité de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, en raison de sa position dans le litige et de son comportement déloyal.

La cour a estimé que la société TGM avait subi un préjudice distinct du seul retard de paiement, en raison du comportement de M.[O] qui a refusé de participer à l’expertise et a présenté des demandes sans rapport avec les conclusions de l’expert judiciaire.

Ainsi, la décision de la cour de condamner M.[O] à payer des frais irrépétibles est justifiée par les circonstances du litige et le comportement de la partie perdante.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

11 décembre 2024
Cour d’appel de Toulouse
RG
22/03792
11/12/2024

ARRÊT N° 390/24

N° RG 22/03792

N° Portalis DBVI-V-B7G-PCCK

NA – SC

Décision déférée du 04 Octobre 2022

TJ de MONTAUBAN – 22/00337

AF. RIBEYRON

[Z] [O]

C/

S.E.L.A.R.L. TGM

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le 11/12/2024

à

Me Fabienne FINATEU

Me Thierry EGEA

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

*

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

*

ARRÊT DU ONZE DECEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE

*

APPELANT

Monsieur [Z] [O]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Fabienne FINATEU, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

S.E.L.A.R.L. TGM

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Thierry EGEA de la SELARL LEVI – EGEA – LEVI, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 octobre 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant N. ASSELAIN, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. DEFIX, président

N. ASSELAIN, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffière : lors des débats M. POZZOBON

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par N. ASSELAIN, conseiller, pour le président empêché et par M. POZZOBON, greffière

EXPOSE DU LITIGE ET PROCEDURE

Suivant devis accepté le 28 juin 2016, M. [Z] [O] a confié à la Sarl TGM des travaux de fourniture et de pose de menuiseries en PVC et aluminium et de volets roulants pour un montant de 10.933,14 euros TTC, et a versé un acompte de 3.000 euros.

Dans un courrier de réclamation du 28 septembre 2016, M.[O] a reproché au menuisier différents défauts et non-conformités.

A la suite d’un courrier de M.[O] du 14 décembre 2016, annulant sa commande de travaux concernant le galandage et le volet roulant du salon, le montant total des travaux a été ramené à la somme totale de 7.572,41 euros, facturée le 13 février 2017.

Par acte d’huissier délivré le 9 avril 2018, la Sarl TGM a saisi le tribunal d’instance de Montauban pour obtenir paiement de la somme de 4.572,41 euros au titre du solde restant dû.

Suivant jugement du 20 février 2019, le tribunal d’instance a confié une mesure d’expertise à M.[H] [J], qui a déposé son rapport le 25 novembre 2020.

Le tribunal judiciaire de Montauban, succédant au tribunal d’instance, a, par jugement du 4 octobre 2022, :

– condamné M.[Z] [O] à payer à la Sarl TGM la somme de 4.409,67 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 9 avril 2018,

– condamné M.[Z] [O] à payer à la Sarl TGM la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts ‘en réparation de la résistance abusive’,

– débouté M.[Z] [O] de ses demandes,

– condamné M.[Z] [O] à payer à la Sarl TGM la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700,1° du code de procédure civile,

– condamné M. [Z] [O] aux dépens, comprenant ceux de l’expertise,

– rappelé que la décision est assortie de l’exécution provisoire.

M.[O] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 27 octobre 2022.

Par ordonnance du 23 mai 2024, le magistrat chargé de la mise en état a:

– dit que le conseiller de la mise en état n’a pas le pouvoir de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées devant lui par la Sarl TGM;

– dit que le conseiller de la mise en état n’a pas le pouvoir de statuer sur la demande de contre expertise présentée devant lui par M.[Z] [O] en raison de son lien étroit avec les questions jugées par le tribunal et soumises à l’examen de la cour;

– partagé par moitié entre les parties les dépens de l’incident;

– débouté les parties de leur demandes respectives au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M.[Z] [O] demande à la cour d’appel, par conclusions notifiées le 20 septembre 2024, au visa des articles 1134, 1147 et 1184 du code civil dans leur rédaction applicable au jour de la signature du marché, et des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile, de:

– réformer le jugement en toutes ses dispositions;

– juger que l’action engagée par M. [O] ne souffre d’aucune prescription,

– juger que le rapport d’expertise judiciaire en date du 25 novembre 2020 n’a aucune force probante ;

– juger que les travaux réalisés par la société TGM souffrent de désordres, malfaçons et non-conformités ;

– juger que le contrat sera résolu aux torts exclusifs de la société TGM ;

– débouter la société TGM de sa demande d’irrecevabilité, la demande de résolution du contrat n’étant pas une demande nouvelle en cause d’appel ;

– ordonner la désignation d’un expert judiciaire avec pour mission d’examiner les désordres, malfaçons, non façons, non conformités contractuelles énoncés dans le constat d’huissier du 3 mai 2018 et dans le rapport de M.[W] du 27 octobre 2022, en rechercher la cause des désordres et déterminer les moyens d’y remédier;

– condamner la société TGM au paiement de la somme de 29.802,03 euros TTC à titre de dommages et intérêts ;

– débouter la société TGM de sa demande de dommages et intérêts en réparation de la résistance abusive ;

– débouter la société TGM de sa demande tendant à faire courir à compter de la première mise en demeure les intérêts légaux ;

– condamner la société TGM au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens y compris les frais d’expertise judiciaire.

M.[O] soutient que sa demande de résolution du contrat aux torts exclusifs de la société TGM est complémentaire et tend aux mêmes fins que sa demande en paiement de dommages et intérêts, et qu’elle est l’accessoire de sa demande fondée sur la responsabilité contractuelle de droit commun. Il invoque également l’intervention de M.[W] en qualité d’expert amiable, caractérisant une évolution du litige. Il ajoute que cette demande n’est pas prescrite, sa demande reconventionnelle présentée en première instance tendant à l’organisation d’une expertise ou subsidiairement au paiement de dommages et intérêts ayant interrompu le délai de prescription. Sur le fond, M.[O] soutient que le rapport d’expertise de M.[J] est dépourvu de force probante, l’expert n’ayant pas accompli sa mission avec conscience, objectivité et impartialité, ni exécuté la mission qui lui était confiée. Il soutient que les travaux réalisés par la société TGM sont entachés de malfaçons, désordres et non-conformités, et se prévaut d’un constat d’huissier du 3 mai 2018 et d’un rapport d’expertise de M.[W] du 26 octobre 2022. Il produit deux devis de réparations à hauteur de 29.802,03 euros.

La société TGM, appelante incidente, demande à la cour d’appel, par conclusions notifiées le 17 septembre 2024, au visa des articles 1103, 1231-1, et 1240 du code civil, et de l’article 564 du code de procédure civile , de:

– confirmer le jugement, sauf s’agissant du point de départ des intérêts légaux et du montant des dommages et intérêts alloués en réparation de la résistance abusive;

– juger que les intérêts légaux commenceront à courir à compter de la première mise en demeure en date du 17 novembre 2017;

– condamner M.[O] au paiement d’une somme de 3.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la résistance abusive;

Y ajoutant,

A titre principal,

– déclarer prescrite la demande en résolution du contrat formulée par M. [O],

A titre subsidiaire,

– déclarer irrecevable car nouvelle la demande de résolution du contrat aux torts exclusifs de la société TGM,

En tout état de cause,

– débouter M.[O] de sa demande d’expertise judiciaire ;

– condamner M.[O] au paiement d’une somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile s’agissant de la procédure d’appel.

La société TGM indique avoir vainement proposé à M.[O], avant de saisir le tribunal pour obtenir paiement, de venir reprendre les malfaçons invoquées, et avoir pris l’engagement lors des opérations d’expertise de réaliser les réglages préconisés, ce que M.[O] a refusé. Elle soutient que la demande de résolution du contrat est une demande nouvelle irrecevable, et ajoute que la demande en résolution, formulée pour la première fois le 24 janvier 2023, est prescrite. Elle rappelle que M.[O] n’a pas communiqué à l’expert les pièces sollicitées par celui-ci, et indique que les désordres qu’il allègue aujourd’hui n’ont jamais été portés à l’attention de l’expert judiciaire lors des réunions d’expertise, et n’ont donc jamais pu être constatés contradictoirement. Elle fait valoir que la pose de la porte de garage ne fait pas partie des travaux facturés le 13 février 2017, et que cette porte a été dégradée lors d’un cambriolage. Elle indique que nombre des prétendues malfaçons ou non conformités mentionnées par le rapport non contradictoire de M.[W] sont sans lien avec les travaux de la société TGM, ou ont déjà été étudiées par l’expert, qui n’a préconisé que quelques réglages.

La clôture de la mise en état a été prononcée le 24 septembre 2024.

MOTIFS

M.[O], appelant, demande simultanément la résolution du contrat, l’organisation d’une nouvelle expertise, et le paiement de dommages et intérêts.

La société TGM demande confirmation du jugement en ce qu’il a condamné M.[O] à lui payer la somme de 4.409,94 euros.

* Sur la résolution du contrat et l’organisation d’une nouvelle expertise

– sur la recevabilité de la demande de résolution

M.[O] demande devant la cour d’appel la résolution du contrat aux torts exclusifs de la société TGM.

La société TGM conclut à l’irrecevabilité de cette demande, en invoquant à titre principal sa prescription, et à titre subsidiaire son caractère nouveau en cause d’appel.

La cour ne peut statuer sur la prescription d’une demande que si elle est à même de connaître de cette demande, de sorte que la recevabilité de la demande doit d’abord être examinée au regard des articles 564 et suivants du code de procédure civile.

M.[O] soutient que sa demande de résolution du contrat aux torts exclusifs de la société TGM est complémentaire et tend aux mêmes fins que sa demande en paiement de dommages et intérêts, et qu’elle est l’accessoire de sa demande fondée sur la responsabilité contractuelle de droit commun. Il invoque également l’intervention de M.[W] en qualité d’expert amiable, caractérisant une évolution du litige.

La société TGM soutient que la demande de résolution du contrat est une demande nouvelle irrecevable, M.[O] n’ayant jamais sollicité la résolution du contrat dans ses conclusions de première instance.

M.[O] demandait au tribunal, dans ses conclusions de première instance, de:

‘- débouter la société TGM de ses demandes,

– la condamner à lui payer la somme de 13.647,39 euros et subsidiairement, la somme de 9.074,98 euros,

– en ce dernier cas, débouter la societe TGM de ses autres demandes’.

M.[O] soulevait à titre principal l’exception d’inexécution à l’appui de ses demandes tendant au rejet des prétentions de la société TGM et au paiement de dommages et intérêts, et demandait subsidiairement la compensation des dettes réciproques.

L’action en résolution, qui a pour objet de mettre à néant le contrat, et emporte restitution des prestations réciproques, ne tend pas aux mêmes fins que l’action en responsabilité, qui laisse subsister le contrat. Elle ne tend pas non plus aux mêmes fins que l’exception d’inexécution, soulevée par un débiteur pour suspendre l’exécution de sa propre obligation, qui n’est qu’un moyen de défense provisoire opposé à une demande d’exécution.

Mais elle constitue une demande reconventionnelle se rattachant aux prétentions originaires par un lien suffisant, et est recevable en appel par application de l’article 567 du code de procédure civile.

La société TGM soutient d’autre part que la demande est prescrite par application de l’article 2224 du code civil, dès lors que la facture a été établie le 13 février 2017, et que la demande en résolution a été formulée pour la première fois devant la cour d’appel, par conclusions notifiées le 24 janvier 2023.

M.[O] soutient que la demande reconventionnelle qu’il a présentée à l’audience du 16 janvier 2019, devant le tribunal d’instance de Montauban, tendant à l’organisation d’une expertise et subsidiairement au paiement de 14.010,40 euros à titre de dommages et intérêts, a interrompu le délai de prescription.

Le délai de prescription ne court, par application de l’article 2224 du code civil, qu’à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Conformément à l’article 2241 du code civil, la demande en justice interrompt le délai de prescription.

En l’espèce, même si l’action en résolution, qui a pour objet de mettre à néant le contrat, ne tend pas aux mêmes fins que l’action en responsabilité, qui laisse subsister le contrat, ces deux actions procèdent d’une même relation contractuelle. Or, si, en principe, l’interruption de la prescription ne peut s’étendre d’une action à l’autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d’une même instance, concernent l’exécution de la même relation contractuelle ( Soc 3 mai 2016, 14-16.633). L’effet interruptif de prescription attaché à la demande tendant au paiement de dommages et intérêts, le cas échéant après expertise, formulée par M.[O] à l’audience du 16 janvier 2019, s’étend donc à l’action en résolution, qui procède de la même cause.

La demande de résolution présentée pour la première fois le 24 janvier 2023 est donc recevable, la prescription n’étant pas acquise.

– sur le fond et la demande d’organisation d’une nouvelle expertise

En application de l’article 1184 du code civil, en vigueur à la date de conclusion du contrat, devenu l’article 1224 du code civil, la résolution ne peut être prononcée en justice qu’en cas d’inexécution suffisamment grave.

Il incombe à la partie qui l’invoque de démontrer la gravité de l’inexécution dont elle se prévaut.

Il résulte du rapport d’expertise judiciaire de M.[J], déposé le 25 novembre 2020, que les seuls défauts constatés par l’expert concernent des réglages à réaliser sur le volet roulant dans la chambre 3, l’habillage des tapées de deux fenêtres à effectuer dans les toilettes et la salle de bains, l’étanchéité périphérique de la fenêtre oscillo-battante d’une autre salle de bains, la mise en jeu de la porte d’entrée ainsi que celle du volet roulant de l’entrée et des réglages de ce volet roulant.

L’expert a indiqué que les six volets roulants posés par la société TGM, comme les fenêtres installées, fonctionnent.

Il a relevé que M. [O] s’est opposé à ce que la société TGM procède aux réglages et vérifications préconisés, chiffrés à la somme de 162,74 euros selon devis du 30 juin 2020. Il a précisé que malgré ses demandes réitérées, M.[O] ne lui avait pas présenté de devis de remédiation, ni adressé les pièces sollicitées, et notamment le constat d’huissier du 3 mai 2018.

Il résulte de ce rapport que les défauts dûment constatés, dont la réparation est évaluée à 162,74 euros, ne sont pas d’une gravité suffisante pour justifier la résolution du contrat.

M.[O] conteste la force probante du rapport d’expertise de M.[J], et demande l’organisation d’une nouvelle expertise. Il soutient que l’expert n’a pas accompli sa mission avec conscience, objectivité et impartialité, ni exécuté la mission qui lui était confiée. Il conclut que les travaux réalisés par la société TGM sont entachés de malfaçons, désordres et non-conformités, et se prévaut d’un constat d’huissier du 3 mai 2018 et d’un rapport d’expertise de M.[W] du 26 octobre 2022.

Le seul fait que l’expert ait indiqué que ‘M.[O] évoque toujours de bonnes raisons pour faire obstacle à l’intervention de la Sarl TGM, étant toujours redevable de la somme de 4.572,41 euros à la Sarl TGM’ ne suffit pas à caractériser un défaut d’objectivité privant le rapport de sa force probante.

Contrairement à ce que soutient M.[O], l’expert a d’autre part dûment accompli sa mission, en décrivant les défauts qu’il avait constatés, en en précisant la cause, et en évaluant le coût des travaux propres à y remédier. L’expert avait pour mission de ‘relever et décrire les désordres, malfaçons et inachèvements visés dans l’assignation ou tout document auquel renvoie l’assignation’, soit plus précisément les désordres visés par les conclusions de M.[O], contenant sa demande reconventionnelle tendant à l’organisation d’une expertise. Ces conclusions, développées devant le tribunal d’instance, ne sont pas versées aux débats par M.[O]. En toute hypothèse, à supposer que ces conclusions aient renvoyé au constat d’huissier du 3 mars 2018, il est rappelé que l’expert a vainement tenté d’en obtenir communication auprès de M.[O].

Une nouvelle expertise ne saurait donc être ordonnée pour pallier les carences de M.[O].

M.[O] a d’ailleurs, après le jugement rendu par le tribunal le 4 octobre 2022, confié de nouvelles investigations à M.[N] [W], qui a déposé un rapport le 27 octobre 2022. Ce rapport, non contradictoire, ne peut suffire à fonder la résolution du contrat six ans après son exécution. Mais il s’ajoute aux éléments versés aux débats, qui permettent à la juridiction de statuer sur la demande de dommages et intérêts de M.[O], sans qu’il y ait lieu à nouvelle expertise judiciaire.

En tout état de cause, aucune investigation utile ne peut plus être diligentée huit ans après la fin des travaux.

Les demandes de M.[O] tendant à la résolution du contrat et à l’organisation d’une nouvelle expertise sont donc rejetées.

* Sur les créances réciproques

M.[O] invoque des malfaçons et défauts de conformité au soutien de sa demande tendant au paiement de dommages et intérêts.

La société TGM demande paiement du solde de sa facture.

– dommages et intérêts réclamés par M.[O]

Alors que l’expert judiciaire a évalué à la somme de 162,74 euros, selon devis du 30 juin 2020, les réglages et vérifications préconisés, propres à remédier aux défauts constatés, M.[O] demande paiement d’une somme de 29.802,03 euros, en produisant:

– un constat d’huissier du 3 mai 2018,

– un rapport de M.[W], daté du 27 octobre 2022, ne comportant pas d’évaluation des travaux préconisés,

– et deux devis de M.[F], datés des 23 et 24 janvier 2023.

Aucune de ces pièces n’a été soumise à l’expert judiciaire, et les constatations de l’huissier et de l’expert privé mandaté par M.[O] n’ont pas été effectuées de manière contradictoire, en présence de la société TGM.

Par ailleurs ces pièces ne caractérisent pas d’inexécutions contractuelles complémentaires, non prises en compte par l’expert judiciaire.

L’huissier mandaté par M.[O] est dépourvu des compétences techniques nécessaires à la qualification de désordres ou malfaçons, et prend soin de préciser, concernant les défauts de conformité invoqués, qu’il ne fait que retranscrire les dires de son mandant.

M.[W], expert mandaté par M.[O], relève en premier lieu des défauts de conformité ainsi résumés:

– la porte d’entrée mise en ‘uvre n’est pas conforme à la facture;

– les volets roulants de l’étage ne sont pas conformes à la facture;

– les coffres des volets roulants de l’étage n’ont pas été mise en ‘uvre;

– les fenêtres mises en ‘uvre à l’étage ne sont pas renforcées.

En ce qui concerne la porte d’entrée, M.[W] indique qu’elle devait s’ouvrir en ‘poussant gauche’, alors qu’elle s’ouvre en ‘poussant droit’, et qu’il aurait dû s’agir d’une porte sans poignée, avec une serrure à bille et un bâton de maréchal, alors que la porte mise en oeuvre a une poignée et une serrure classique.

Ni la facture du 13 février 2017 ni le devis du 10 février 2016 ne portent pourtant mention du côté ‘poussant’, ni des caractéristiques de la serrure ou de la poignée. L’expert judiciaire a par ailleurs constaté que des bâtons de maréchal avaient été posés, et non facturés.

En ce qui concerne les volets roulants, M.[W] indique qu’il s’agit de volets roulants en aluminium isolant ‘censé avoir un R = 0,22″ alors que ‘le R n’est pas de 0,22 mais 0,15 car il est de couleur blanc et non de couleur grise’.

L’expert judiciaire n’a cependant pas été invité par M.[O] à faire de constatations sur ce point, et la seule affirmation de M.[W] est insuffisante pour démontrer la non conformité alléguée.

M.[W] indique que les coffres des volets roulants de l’étage n’ont pas été mis en ‘uvre, mais il résulte des pièces produites qu’ils n’ont été ni commandés, ni facturés.

Enfin, M.[W] indique que les fenêtres mises en ‘uvre à l’étage ne présentent pas de renforts métalliques, mais l’expert judiciaire n’a pas été invité par M.[O] à faire de constatations sur ce point, et la seule affirmation de M.[W], à l’issue d’une visite effectuée plus de six ans après les travaux, en dehors de la présence de la société TGM, est dépourvue de valeur probante.

En ce qui concerne les désordres, M.[W] relève des défauts et malfaçons affectant:

– la porte d’entrée et le volet roulant de la baie vitrée,

– les volets roulants des deux garages,

– les fenêtres de la cuisine, du WC 2, et des deux salles de bains,

– les volets roulants des deux fenêtres de la chambre 1, du bureau, de la chambre 2, de la chambre 3, et de la salle à manger.

Il résulte cependant de la facture du 13 février 2017 que les travaux en cause de la société TGM, réalisés en 2016, n’ont porté ni sur les volets roulants des deux garages, ni sur la fenêtre de la cuisine, ni sur les volets roulants de la salle à manger.

Pour le surplus, les ouvrages réalisés par la société TGM ont été examinés par l’expert judiciaire, qui n’a constaté que des défauts mineurs concernant des réglages à réaliser sur le volet roulant dans la chambre 3, les finitions des habillages des tapées de deux fenêtres à effectuer dans les toilettes et la salle de bains, la finition de l’étanchéité périphérique de la fenêtre oscillo-battante de l’autre salle de bains, la mise en jeu de la porte d’entrée ainsi que celle du volet roulant de l’entrée et des réglages de ce volet roulant. L’expert judiciaire a constaté le bon fonctionnement des fenêtres, les finitions ne concernant que leur aspect visuel, de même qu’il a constaté que les six volets roulants posés en 2016 par la société TGM fonctionnent.

Les conclusions de M.[W], fondées sur une visite des lieux effectuée hors la présence de la société TGM, et plus de six ans après la réalisation des travaux, sont insuffisantes pour établir des malfaçons complémentaires imputables à la société TGM.

Les seuls défauts constatés lors des opérations d’expertise menées contradictoirement par l’expert judiciaire, en présence des deux parties, sont insusceptibles de justifier les travaux objets des deux devis M.[F], datés des 23 et 24 janvier 2023, pour un montant cumulé de 29.802,03 euros. Il apparaît en effet que ces devis concernent pour le premier, d’un montant de 18.144,27 euros, des travaux distincts de ceux confiés à la société TGM en 2016 (pose de coffres de volets roulants, pose de deux portes enroulables, pose de portail), et pour le second, d’un montant de 11.657,76 euros, la fourniture et la pose de quatre fenêtres et d’une porte d’entrée, alors que l’expert judiciaire a constaté le bon fonctionnement des menuiseries, seules des finitions esthétiques des fenêtres et une mise en jeu de la porte et du volant roulant de l’entrée étant préconisées.

Rien ne permet par conséquent d’évaluer les dommages et intérêts alloués à M.[O] à une somme supérieure à celle retenue par l’expert judiciaire et le tribunal, soit la somme de 162,74 euros.

– créance invoquée par la société TGM

En suite de la demande de M.[O] formée par lettre du 14 décembre 2016, annulant la commande de travaux concernant le galandage et le volet roulant du salon, le montant total des travaux a été ramené à la somme totale de 7.572,41 euros, facturée le 13 février 2017. Seuls les travaux exécutés ont été facturés.

Après déduction de l’acompte versé de 3.000 euros, M.[O] demeure redevable de la somme de 4.572,41 euros.

En considération de ces éléments, c’est à juste titre que le tribunal a condamné M.[O] à payer à la société TGM, après compensation des dettes réciproques, la somme principale de 4.409,67 euros.

En revanche le jugement est infirmé en ce qu’il a dit que cette somme devait être augmentée des intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 9 avril 2018.

La cour, statuant à nouveau, dit que les intérêts au taux légal doivent courir, par application de l’article 1153 du code civil, devenu l’article 1231-6 du code civil, à compter de la mise en demeure de payer du 17 novembre 2017, conformément à la demande de la société TGM.

* Sur les demandes accessoires

Le tribunal a mis à la charge de M.[O] une indemnité complémentaire de 1.500 euros en réparation du préjudice causé à la société TGM par l’attitude déloyale de M.[O].

M.[O] demande réformation du jugement sur ce point, de même que la société TGM, qui demande paiement d’une indemnité portée à 3.500 euros.

Il apparaît que la société TGM a subi du fait du comportement de M.[O] un préjudice distinct du seul retard de paiement compensé par les intérêts moratoires.

Alors en effet que la société TGM a accepté, à la demande de M.[O], de modifier le devis qu’il avait dûment accepté le 28 février 2016, sans demander indemnisation du préjudice résultant pour elle de la perte de marge, et alors qu’elle a proposé avant tout procès de procéder aux réglages sollicités par M.[O], celui-ci a persisté à refuser tout paiement de la somme restant due, manifestement supérieure au coût des finitions nécessaires. M.[O] a ensuite omis de participer effectivement à la mesure d’expertise qu’il avait lui-même sollicitée, en ne fournissant pas à l’expert, malgré ses demandes réitérées, les pièces que celui-ci demandait. Il a également présenté des demandes sans commune mesure avec les conclusions de l’expert judiciaire, dont il a encore doublé le montant devant la cour d’appel, en invoquant des dommages sans rapport avec les travaux facturés et impayés. Il en est résulté pour la société TGM, contrainte de consacrer au litige un temps injustifié, un préjudice immatériel dont elle est fondée à demander réparation.

Ce préjudice a été justement évalué par le tribunal à la somme de 1.500 euros.

Le jugement est confirmé sur ce point.

Le jugement déféré doit également être confirmé en ce qu’il a mis à la charge de M.[O], partie perdante, les dépens de première instance, en ce compris le coût de l’expertise judiciaire, outre une indemnité allouée à la société TGM au titre des frais irrépétibles de première instance.

M.[O], qui perd son procès en appel, doit également supporter les dépens d’appel, et régler à la société TGM une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 4 octobre 2022, sauf en ce qu’il a fixé le point de départ des intérêts au taux légal de la somme de 4.409,67 euros à la date de l’assignation du 9 avril 2018 ;

Statuant à nouveau sur ce chef de décision infirmé et y ajoutant,

Dit que les intérêts au taux légal de la somme de 4.409,67 euros doivent courir à compter de la mise en demeure du 17 septembre 2017 ;

Déclare recevable la demande de résolution du contrat, mais la rejette au fond ;

Dit n’y avoir lieu à nouvelle expertise ;

Condamne M.[O] aux dépens d’appel ;

Condamne M.[O] à payer à la société TGM la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

La greffière P/ Le président

M. POZZOBON N. ASSELAIN

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