Conflit relatif à la responsabilité contractuelle dans le cadre de travaux de rénovation et de construction, mettant en lumière les obligations des parties et la nécessité d’une expertise pour établir les désordres allégués.

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Conflit relatif à la responsabilité contractuelle dans le cadre de travaux de rénovation et de construction, mettant en lumière les obligations des parties et la nécessité d’une expertise pour établir les désordres allégués.

Madame [S] [V] a engagé la S.A.R.L. ARCHITECTURE A.2B pour la rénovation de sa maison, incluant la construction d’un garage, avec des travaux réalisés par plusieurs entreprises. Les travaux ont été réceptionnés le 14 décembre 2022. Suite à des réserves non levées et des désordres constatés, Madame [S] [V] a assigné la S.A.R.L. ARCHITECTURE A.2B en référé le 12 avril 2024, demandant la reprise des travaux, l’autorisation de faire appel à une autre entreprise, l’organisation d’une expertise, et le paiement de 1 500 € pour les frais de justice. Elle a ensuite appelé d’autres entreprises et artisans à comparaître pour les mêmes raisons.

Dans ses conclusions, elle a maintenu ses demandes, augmentant le montant réclamé à 2 000 € et ajoutant une demande de provision de 3 024 € pour des travaux supplémentaires. La S.A.R.L. ARCHITECTURE A.2B a contesté les demandes, affirmant que sa mission ne couvrait pas certains travaux et que les griefs de Madame [S] [V] n’étaient pas fondés. La S.A.R.L. [Z] HERVE a également contesté les allégations de désordres et a demandé le rejet des demandes de Madame [S] [V].

Le juge des référés a ordonné une expertise pour évaluer les désordres et les responsabilités, avec des instructions précises pour l’expert. Madame [S] [V] doit consigner 4 000 € pour les honoraires de l’expert avant le 10 décembre 2024, et l’expert doit remettre son rapport avant le 31 décembre 2025. Les autres demandes ont été rejetées.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Nantes
RG
24/00417
N° RG 24/00417 – N° Portalis DBYS-W-B7I-M5OZ

Minute N° 2024/881

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

du 10 Octobre 2024

—————————————–

[S] [V]

C/

S.A.R.L. ARCHITECTURE A.2B
E.U.R.L. [O] [I]
S.A.R.L. [N] TP
[W] [C]
S.A.R.L. [Z] Hervé

—————————————

copie exécutoire délivrée le 10/10/2024 à :

Me Stéphanie GUILLOTIN – 277
copie certifiée conforme délivrée le 10/10/2024 à :

la SARL CHROME AVOCATS – 322
Me Stéphanie GUILLOTIN – 277
la SELARL LRB (Saint-Nazaire)
Expert
dossier

MINUTES DU GREFFE

DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES

(Loire-Atlantique)

_________________________________________

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
_________________________________________

Président : Pierre GRAMAIZE

Greffier : Eléonore GUYON

DÉBATS à l’audience publique du 19 Septembre 2024

PRONONCÉ fixé au 10 Octobre 2024

Ordonnance réputée contradictoire, mise à disposition au greffe

ENTRE :

Madame [S] [V],
demeurant [Adresse 11]
[Localité 9]
Rep/assistant : Me Stéphanie GUILLOTIN, avocat au barreau de NANTES

DEMANDERESSE

D’UNE PART

ET :

S.A.R.L. ARCHITECTURE A.2B (RCS LA ROCHE SUR YON 452 995 426),
dont le siège social est sis [Adresse 12]
[Localité 14]
Rep/assistant : Maître Pierrick HAUDEBERT de la SARL CHROME AVOCATS, avocats au barreau de NANTES

E.I.R.L. [O] [I] (SIREN 538 338 864),
dont le siège social est sis [Adresse 7]
[Adresse 18]
Rep légal : M. [O] [I] (Gérant)
Non comparant

S.A.R.L. [N] TP (RCS NIORT n° 414043273),
dont le siège social est sis [Adresse 19]
[Adresse 4]
[Localité 13]
Non comparante

Monsieur [W] [C], entrepreneur individuel, exploitant sous le nom
commercial Maçonnerie de [Localité 15] (SIREN n°440 818 334), demeurant [Adresse 3]
[Localité 8]
Non comparant

S.A.R.L. [Z] Hervé,
dont le siège social est sis [Adresse 16],
[Adresse 6]
[Localité 10]
Rep/assistant : Maître Louis NAUX de la SELARL LRB, avocats au barreau de SAINT-NAZAIRE
Rep légal : M. [R] [Z] (Gérant)

DÉFENDEURS

D’AUTRE PART

PRESENTATION DU LITIGE

Madame [S] [V] a confié à la S.A.R.L. ARCHITECTURE A.2B la rénovation de sa maison d’habitation située [Adresse 11] à [Localité 9] avec construction d’un garage, dont les travaux, exécutés respectivement pour le lot terrassement par la société [N] TP, le lot maçonnerie et le mur de clôture par Monsieur [W] [C], le lot menuiseries extérieures extension par l’EIRL [O] [I] et le lot électricité par la société [Z] HERVE, ont été réceptionnés le 14 décembre 2022.

Se plaignant de réserves non levées et désordres dénoncés ainsi que de la réclamation d’un solde d’honoraires injustifiées, Madame [S] [V] a fait assigner en référé la S.A.R.L. ARCHITECTURE A.2B par acte de commissaire de justice du 12 avril 2024 afin de solliciter, au visa des articles 1222, 1792 et suivants du code civil, 145 du code de procédure civile :
– la condamnation sous astreinte de la défenderesse à reprendre l’ouvrage en sécurisant l’installation électrique et en procédant à sa fermeture, à finaliser l’installation de deux portes de garage en les équipant de poignées, en remettant les cales servant de guide et en les motorisant, à remplacer les panneaux de la porte côté jardin qui sont dégradés,
– l’autorisation de faire appel à une autre entreprise aux frais de la défenderesse pour remédier à ces non-façons et malfaçons passé le délai d’un mois à compter de la signification de l’ordonnance,
– l’organisation d’une expertise,
– la condamnation de la défenderesse aux dépens et à lui payer une somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon actes de commissaires de justice des 18 et 20 juin 2024, Madame [S] [V] a appelé en cause la S.A.R.L. [N] TP, Monsieur [W] [C], l’E.I.R.L. [O] [I], la S.A.R.L. [Z] HERVE aux mêmes fins et condamnations s’ajoutant à celle du défendeur initial.

Dans ses dernières conclusions, Madame [S] [V] maintient ses prétentions de condamnation des défendeurs sous astreinte, d’autorisation de faire réaliser les travaux par une entreprise tierce, en portant à 2 000 € sa demande fondée contre les défendeurs solidairement en application de l’article 700 du code de procédure civile, et subsidiairement d’expertise, y ajoutant une demande de condamnation solidaire des sociétés ARCHITECTURE A.2B, [Z] HERVE et de Monsieur [C] au paiement d’une somme de 3 024 € de provision à valoir sur le devis de la société MENES ENERGIE, en faisant notamment valoir que :
– sa demande d’exécution de travaux sous astreinte est fondée sur les articles 1792, 1792-2 et 1217, 1231-1 du code civil, dès lors que la société ARCHITECTURE A.2B a incontestablement engagé sa responsabilité contractuelle en ce qu’elle a une mission complète de direction et surveillance des travaux et qu’il en est de même des artisans qui n’ont pas fini les travaux ou dont les ouvrages sont affectés de désordres caractérisés par un procès-verbal de commissaire de justice,
– l’urgence est caractérisée par le risque de surtension électrique et le délai inadmissible d’exécution,
– à défaut, elle doit être autorisée à faire réaliser les travaux en exécution de l’article 1222 du code civil, en soulignant qu’elle a déjà obtenu un devis de la société MENES ENERGIES,
– la réalisation d’un regard entrait bien dans les prestations à réaliser,
– le devis de la société MENES ENERGIES établit la nécessité des reprises,
– elle est légitime subsidiairement à réclamer une expertise pour déterminer les responsabilités de chacun qui contestent à tort leur mise en cause,
– la demande de condamnation au paiement du solde d’honoraires de la société ARCHITECTURE A.2B est irrecevable et mal fondée, compte tenu de multiples contestations qu’elle oppose de manière détaillée.

La S.A.R.L. ARCHITECTURE A.2B conclut au débouté de la demanderesse, subsidiairement à la condamnation in solidum des autres défendeurs à la garantir de toute condamnation, à l’ajout de la mission d’apurement des comptes en cas d’expertise, à la condamnation reconventionnelle de la demanderesse à lui payer par provision une somme de 2 520 € au titre de sa facture impayée avec intérêts au taux de base bancaire augmenté de 3 points à compter de la date d’échéance de la facture, et en tout état de cause au paiement de la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens, en répliquant que :
– sa mission ne comprenait pas d’intervention sur le regard litigieux,
– la garantie décennale n’est pas mobilisable, dès lors que les travaux n’ont fait l’objet que d’une réception partielle,
– Madame [V] reste lui devoir 2 520 € sur ses honoraires forfaitaires, alors que les missions ont été intégralement exécutées et que les griefs adverses ne sont pas fondés.

La S.A.S. [Z] HERVE conclut au débouté de la demanderesse avec condamnation à lui payer une somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, en relevant que :
– la surtension électrique alléguée n’a été documentée ni dans sa causalité, ni dans sa fréquence, ni dans son intensité et un constat d’huissier n’est pas suffisant pour démontrer l’existence d’une surtension,
– le boîtier électrique installé dans le regard a été noyé dans un gel permettant son étanchéité,
– le devis tardivement produit n’établit pas non plus la preuve de l’existence d’une surtension et se contente de chiffrer des travaux demandés,
– il n’y a ni dommage imminent, ni trouble manifestement illicite,
– la demande en paiement d’une provision se heurte à des contestations sérieuses, sachant que le lot électricité n’a pas été réceptionné et qu’il n’y a pas d’urgence,
– il n’y a pas de motif légitime à la demande d’expertise, puisque l’existence d’un désordre n’est pas établie.

La S.A.R.L. [N] TP, citée à sa comptable, Monsieur [W] [C], cité par acte conservé à l’étude de commissaire de justice après vérification de son domicile, et Monsieur [O] [I], cité par acte conservé à l’étude de commissaire de justice après vérification de son domicile, n’ont pas comparu.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d’exécution de travaux sous astreinte :

La demande d’astreinte, qui ne précise ni montant, ni délai et ni durée est d’une recevabilité douteuse.

En tout état de cause, la demande d’exécution forcée de travaux ne repose pas sur une obligation non sérieusement contestable, dès lors que son fondement est on ne peut plus flou et qu’elle ne peut pas relever de la garantie de parfait achèvement, puisqu’il n’y a pas de réserves assorties au procès-verbal de réception partielle, que les doléances ne sont pas établies par un constat contradictoire, et que les éléments de preuve produits ne sont pas suffisants pour démontrer une faute, une inexécution ou un manquement de quiconque.

Cette demande sera donc rejetée en l’état.

Sur la demande d’autorisation d’exécution de travaux :

Si la demanderesse peut, de sa propre initiative et suivant mise en demeure préalable, faire procéder à l’exécution de travaux prévus au devis, la demande d’autorisation d’effectuer les travaux ne correspond pas à des prestations initialement prévues précisément identifiées et non exécutées, mais à des reprises de désordres ou malfaçons allégués.

La demande n’apparait donc pas pertinemment fondée.

Sur la demande de provision sur devis :

Madame [S] [V] produit un devis de travaux d’électricité, pièce qui ne saurait démontrer une obligation de l’un des défendeurs ou de plusieurs à prendre en charge les travaux chiffrés, dont rien ne permet de dire qu’ils justifient une condamnation au titre de leur responsabilité.

Si un procès-verbal de constat de commissaire de justice laisse supposer l’existence de désordres, celui-ci ne peut pas plus faire la preuve d’une responsabilité ou d’une garantie des entreprises et du maître d’œuvre.

La demande de provision se heurte donc à une contestation sérieuse.

Sur la demande reconventionnelle en paiement de provision sur solde d’honoraires :

Il n’est pas contesté que Madame [S] [V] reste redevable d’un solde d’honoraires modeste par rapport au montant total facturé.

Or en invoquant de multiples manquements du maître d’œuvre, dont seule une expertise permettra de vérifier la pertinence, elle oppose une exception de non exécution de nature à faire échec à la demande en paiement de la provision sur le solde des honoraires, de sorte qu’il convient de débouter la S.A.R.L. ARCHITECTURE A.2B de sa demande reconventionnelle.

Sur la demande d’expertise :

Madame [S] [V] présente des copies des documents suivants :
– contrat d’architecte du 24/01/19,
– descriptif et estimatif du projet,
– procès-verbal de réception du 14/12/22,
– factures ARCHITECTURE A.2B,
– courriers,
– procès-verbal de constat de commissaire de justice du 22/01/24,
– facture MACONNERIE DE LA DIVATTE [W] [C],
– marché de travaux [N] TP,
– devis descriptif et quantitatif [N] TP,
– devis MENES ENERGIES.

Il résulte des pièces produites et des explications données que les causes et conséquences des désordres dont se plaint Madame [S] [V] relatifs aux travaux exécutés chez elle sont en litige.

L’avis d’un technicien du bâtiment permettra d’aider à résoudre le litige et d’éclairer le tribunal s’il est saisi d’une demande.

Il existe donc un motif légitime justifiant l’organisation d’une expertise de nature à établir la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution de ce litige en vertu des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile.

La S.A.S. [Z] HERVE ne saurait obtenir sa mise hors de cause, alors qu’elle a effectué des travaux d’électricité dont la qualité est discutée, et que la sécurité de l’installation est mise en doute avec à l’appui un constat de commissaire de justice et un devis de reprise des travaux, dont seul l’avis de l’expert permettra de vérifier s’ils sont pertinents ou non.

Sur les frais :

Il est en l’état impossible de déterminer une partie perdante, de telle sorte que chaque partie gardera ses dépens à sa charge. Il est équitable de ne fixer aucune indemnité en application de l’article 700 du code de procédure civile.

DECISION

Par ces motifs, Nous, juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort,

Ordonnons une expertise confiée à

Monsieur [F] [K],
expert près la cour d’appel de Rennes,
demeurant [Adresse 5],
Tél : [XXXXXXXX01], Port. : [XXXXXXXX02],
Mèl : [Courriel 17]

avec mission de :

* prendre connaissance des pièces du dossier, se faire communiquer tous documents utiles, recueillir l’avis des parties, entendre tout sachant, au besoin rédiger un pré-rapport,

* se rendre sur les lieux, visiter l’immeuble, décrire son état général, en précisant s’il présente des désordres ou dégradations en rapport avec les éléments allégués dans l’assignation, la date où ils sont apparus, leur origine et leurs conséquences, et préciser s’ils affectent la solidité de l’ouvrage ou le rendent impropre à sa destination,

* rechercher les causes des désordres en précisant notamment si elles relèvent d’un vice de matériaux ou matériels, d’une erreur de conception ou de pose ou de mise en œuvre, d’une mauvaise exécution de travaux ou d’entretien, d’un non respect de normes en indiquant lesquelles, ainsi qu’à quelles dates des manquements peuvent être relevés et à qui ils sont imputables,

* rechercher si des réserves ont été émises et à quelle date,

* décrire les travaux propres à remédier aux désordres et conséquences diverses, préciser leur nature et estimer leur coût, en distinguant ceux qui pourraient s’avérer urgents,

* donner son avis sur les préjudices subis,

* proposer un compte entre les parties,

* formuler toutes observations techniques utiles à la solution du litige,

Disons que Madame [S] [V] devra consigner au greffe avant le 10 décembre 2024, sous peine de caducité, une somme de 4 000,00 € à valoir sur les honoraires de l’expert,

Disons que l’expert devra déposer son rapport au greffe avant le 31 décembre 2025,

Rejetons toutes autres prétentions plus amples ou contraires

Laissons provisoirement les dépens à la charge de chaque partie qui les a exposés.

Le Greffier, Le Président,

Eléonore GUYON Pierre GRAMAIZE


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