Conflit relatif à la régularité des cotisations sociales et à la contestation d’une contrainte de paiement

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Conflit relatif à la régularité des cotisations sociales et à la contestation d’une contrainte de paiement

Affiliation de Madame [B] [E] [N]

Madame [B] [E] [N] a été affiliée au régime de la Caisse Autonome de Retraite et de Prévoyance, des Infirmiers, Masseurs-Kinésithérapeutes, Pédicures-Podologues Orthopédistes et Orthoptistes (CARPIMKO) du 1er juillet 1993 au 1er juillet 2001, puis à partir du 1er janvier 2006.

Contrainte émise par la CARPIMKO

Le 6 avril 2023, la CARPIMKO a émis une contrainte à l’encontre de Madame [B] [E] [N] pour le paiement de 31 432,83 euros, correspondant à des cotisations et contributions sociales, ainsi qu’à des majorations de retard pour les années 2020 et 2021. Cette contrainte a été signifiée par acte d’huissier le 30 juin 2023.

Opposition à la contrainte

Madame [E] [N] a formé une opposition à cette contrainte par lettre recommandée, reçue le 19 juillet 2023, en contestant la taxation d’office appliquée par la CARPIMKO, arguant que celle-ci ne correspondait pas à ses revenus déclarés et qu’elle avait cessé son activité depuis le 31 décembre 2021. L’affaire a été retenue pour audience le 16 novembre 2023.

Arguments de la CARPIMKO

Lors de l’audience, la CARPIMKO a demandé au tribunal de déclarer irrecevable le recours de Madame [E] [N], et à titre subsidiaire, de valider la contrainte pour un montant révisé de 9028,62 euros. Elle a soutenu que le recours était forclos selon l’article R.133-3 du code de la sécurité sociale, précisant avoir recalculé les cotisations dues.

Arguments de la Défense

En défense, Madame [E] [N] a maintenu son opposition, demandant l’annulation de la contrainte. Elle a contesté les calculs de la CARPIMKO, affirmant que ses revenus annuels avaient baissé pendant la période COVID, se situant entre 24 000 et 26 000 euros.

Recevabilité de l’opposition

Le tribunal a examiné la recevabilité de l’opposition, constatant que celle-ci avait été formée dans les délais prévus par l’article R.133-3 du code de la sécurité sociale, rejetant ainsi la fin de non-recevoir soulevée par la CARPIMKO.

Analyse de l’opposition à contrainte

Le tribunal a rappelé que la contrainte émise par la CARPIMKO a tous les effets d’un jugement en l’absence d’opposition. Il a également noté que les cotisations dues par Madame [E] [N] avaient été calculées conformément aux barèmes en vigueur, tenant compte des revenus déclarés pour les années 2020 et 2021.

Montant des cotisations dues

La CARPIMKO a présenté un décompte des cotisations réclamées, indiquant que Madame [E] [N] restait redevable de 4 815,07 euros pour 2020 et de 4 213,55 euros pour 2021, totalisant ainsi 9 028,62 euros. Madame [E] [N] n’a pas prouvé que cette somme n’était pas justifiée.

Décision du Tribunal

Le tribunal a déclaré recevable l’opposition à contrainte, mais a rejeté celle-ci, validant la contrainte émise par la CARPIMKO pour un montant révisé de 9 028,62 euros. Madame [E] [N] a été condamnée à payer cette somme ainsi que les frais de signification et aux entiers dépens.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

31 octobre 2024
Tribunal judiciaire d’Évreux
RG
23/00391
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE D’ÉVREUX
POLE SOCIAL

CONTENTIEUX GENERAL

MINUTE N° : 519/24
RG N° : N° RG 23/00391 – N° Portalis DBXU-W-B7H-HM57
NAC : Demande d’annulation d’une mise en demeure ou d’une contrainte

JUGEMENT DU 31 Octobre 2024

DEMANDEUR

CARPIMKO, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Laurent TAFFOU, avocat au barreau d’EURE

DÉFENDEUR

Madame [B] [H] [E] épouse [N], demeurant [Adresse 2]

comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

PRESIDENT : François BERNARD, magistrat

ASSESSEURS : Jérémy CORBILLON
Jean-Luc PIEDNOIR

GREFFIER lors des débats et de la mise à disposition : Nathalie MUZAS

DÉBATS :

En audience publique du 05 Septembre 2024

JUGEMENT :

Prononcé par mise à disposition au greffe par application de l’article 453 du code de procédure civile, contradictoirement , en premier ressort.

Copie délivrée aux parties le :

Copie exécutoire délivrée le :

EXPOSE DU LITIGE
Madame [B] [E] [N] a été affiliée au régime de la Caisse Autonome de Retraite et de Prévoyance, des Infirmiers, Masseurs-Kinésithérapeutes, Pédicures-Podologues Orthopédistes et Orthoptistes (CARPIMKO) du 1er juillet 1993 au 1er juillet 2001, et depuis le 1er janvier 2006.
Le 6 avril 2023, la Caisse Autonome de Retraite et de Prévoyance, des Infirmiers, Masseurs-Kinésithérapeutes, Pédicures-Podologues Orthopédistes et Orthoptistes (CARPIMKO) a émis à l’encontre de Madame [B] [E] [N] une contrainte pour le paiement de la somme de 31 432,83 euros correspondant à des cotisations et contributions sociales, ainsi qu’à des majorations de retard de retard, portant sur les années 2020 et 2021.
La contrainte a été signifiée à Madame [E] [N] par acte d’huissier le 30 juin 2023.
Par lettre recommandée avec accusé réception en date du 12 juillet 2023 reçue le 19 juillet 2023, Madame [E] [N] a formé une opposition à cette contrainte auprès du pôle social du tribunal judiciaire d’Evreux, reprochant à la CARPIMKO d’appliquer une taxation d’office ne correspondant pas aux revenus déclarés et indiquant avoir cessé son activité depuis le 31 décembre 2021.
Après plusieurs renvois, l’affaire a été retenue à l’audience du 16 novembre 2023.
A l’audience, la CARPIMKO, représentée par son avocat développant oralement ses conclusions demande au tribunal de :
Déclarer irrecevable le recours formé par Madame [E] [N] ; A titre subsidiaire,
Valider la contrainte pour un montant révisé de 9028,62 euros et condamner Madame [E] [N] à payer la dite somme; Condamner Madame [E] [N] aux entiers dépens. Elle fait valoir que le recours formé par Madame [E] [N] est forclos au regard de l’article R.133-3 du code de la sécurité sociale prévoyant un délai de quinze jours à compter de la signification de la contrainte. Sur le fond elle indique avoir procédé à un recalcul des cotisations dues.
En défense, Madame [E] épouse [N], maintient son recours et sollicite l’annulation de la contrainte.
Elle fait valoir qu’elle ne comprend pas les calculs retenus par la CARPIMKO. Elle précise qu’elle a informé la caisse que son chiffre d’affaires était compris entre 28000 et 31 000 euros par an, et que pendant les années couvrant la période covid ses revenus annuels ont baissé s’élevant entre 24 000 et 26 000 euros.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l’opposition :
Aux termes de l’article R.133-3 du code de la sécurité sociale, le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou pour les débiteurs domiciliés à l’étranger, au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort de l’organisme créancier par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la notification ou de la signification. L’opposition doit être motivée ; une copie de la contrainte contestée doit lui être jointe. Le secrétariat du tribunal informe l’organisme créancier dans les huit jours de la réception de l’opposition.
Aux termes de l’article 668 du code de procédure civile, sous réserve de l’article 647-1, la date de la notification par voie postale est, à l’égard de celui qui y procède, celle de l’expédition et, à l’égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre.
En l’espèce, force est de constater que la contrainte en date du 6 avril 2023 émise à l’encontre de Madame [E] épouse [N] a été signifiée à cette dernière par acte d’huissier du 30 juin 2023.
Il est constant que Madame [E] épouse [N] a formé opposition à contrainte par courrier du 12 juillet 2023 expédié le 15 juillet 2023.
En application des textes susvisés, la date à prendre en compte afin de déterminer le délai d’opposition à contrainte est le jour de l’expédition du courrier d’opposition.
Dès lors, l’opposition de Madame [E] [N] a été formée dans les délais prévus par l’article R 133-3 du code de la sécurité sociale susvisé et il y a donc lieu de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l’action soulevée par la CARPIMKO.

Sur l’opposition à contrainte :
L’article L.244-9 du code de la sécurité sociale dispose que la contrainte décernée par le directeur d’un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard comporte, à défaut d’opposition du débiteur devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l’article L. 211-16 du code de l’organisation judiciaire, dans les délais et selon des conditions fixés par décret, tous les effets d’un jugement et confère notamment le bénéfice de l’hypothèque judiciaire.
Le délai de prescription de l’action en exécution de la contrainte non contestée et devenue définitive est de trois ans à compter de la date à laquelle la contrainte a été notifiée ou signifiée, ou un acte d’exécution signifié en application de cette contrainte.
L’article L.642-1 du code de la sécurité sociale dispose que toute personne exerçant une activité professionnelle relevant de l’Organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales est tenue de verser des cotisations destinées à financer notamment :
1° Les prestations définies au chapitre III du présent titre ;
2° Les charges de compensation incombant à cette organisation en application des articles L. 134-1 et L. 134-2.
Le régime de la pension de retraite reçoit une contribution du fonds institué par l’article L. 135-1 dans les conditions fixées par l’article L. 135-2.
Les charges mentionnées aux 1° et 2° sont couvertes par des cotisations calculées dans les conditions prévues aux articles L. 131-6 à L. 131-6-2 et L. 613-7.
Les cotisations dues par les professionnels libéraux autres que ceux mentionnés à l’article L. 613-7 sont calculées, dans la limite d’un plafond fixé par décret, sur la base de tranches de revenu d’activité déterminées par décret. Chaque tranche est affectée d’un taux de cotisation. Ces cotisations ne peuvent être inférieures à un montant fixé par décret. La cotisation afférente à chaque tranche ouvre droit à l’acquisition d’un nombre de points déterminé par décret.
Un décret fixe le nombre de points attribué aux personnes exonérées de tout ou partie des cotisations en application de l’article L. 642-3.
L’article L.131-6-2 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige dispose que les cotisations des travailleurs indépendants non agricoles autres que ceux mentionnés à l’article L. 613-7 sont dues annuellement. Leurs taux respectifs sont fixés par décret.
Elles sont calculées, à titre provisionnel, sur la base du revenu d’activité de l’avant-dernière année. Pour les deux premières années d’activité, les cotisations provisionnelles sont calculées sur la base d’un revenu forfaitaire fixé par décret après consultation des conseils d’administration des organismes de sécurité sociale concernés. Lorsque le revenu d’activité de la dernière année écoulée est définitivement connu, les cotisations provisionnelles, à l’exception de celles dues au titre de la première année d’activité, sont recalculées sur la base de ce revenu.
Lorsque le revenu d’activité de l’année au titre de laquelle elles sont dues est définitivement connu, les cotisations font l’objet d’une régularisation sur la base de ce revenu.
Par dérogation au deuxième alinéa, sur demande du cotisant, les cotisations provisionnelles peuvent être calculées sur la base du revenu estimé de l’année en cours. Lorsque le revenu définitif est supérieur de plus d’un tiers au revenu estimé par le cotisant, une majoration de retard est appliquée sur la différence entre les cotisations provisionnelles calculées dans les conditions de droit commun et les cotisations provisionnelles calculées sur la base des revenus estimés, sauf si les éléments en la possession du cotisant au moment de sa demande justifiaient son estimation. Le montant et les conditions d’application de cette majoration sont fixés par décret.
Lorsque les données nécessaires au calcul des cotisations n’ont pas été transmises, celles-ci sont calculées dans les conditions prévues à l’article L. 242-12-1.
La CARPIMKO produit aux débats l’appel des cotisations des années 2020 et 2021, la mise en demeure du 29 mars 2022 portant sur les cotisations des années 2020 et 2021 d’un montant total de 31 432,83 euros et l’accusé réception de cette mise en demeure, portant la mention « pli avisé non réclamé ». Ainsi, la contrainte émise le 6 avril 2023 a été régulièrement délivrée.
Il est constant que Madame [E] [N] est affiliée au régime de la Caisse Autonome de Retraite et de Prévoyance, des Infirmiers, Masseurs-Kinésithérapeutes, Pédicures-Podologues Orthopédistes et Orthoptistes, et qu’elle est redevable de cotisations au titre du régime de base provisionnel, du régime complémentaire, de l’avantage social vieillesse, et du régime invalidité décès, en application de l’article L.642-1 du code de la sécurité sociale.
La CARPIMKO verse aux débats un décompte des cotisations réclamées au titre de la contrainte émise tenant compte des revenus déclarés au titre de l’année 2020 (15 214 euros) et de l’année 2021 (10 487 euros) soit :

Concernant les cotisations 2020 : la somme de 9 785 euros outre des majorations de retard à hauteur de 724, 07 euros pour défaut de règlement à la date d’exigibilité, déduction faite de la somme de 5 694 euros au titre de la régularisation de l’année 2020 correspondant au régime de base. Ainsi, Madame [E] épouse [N] reste redevable de la somme de 4 815, 07 euros au titre des cotisations de l’année 2020.
Concernant les cotisations 2021 ; elles ont été recalculées, suite à la production des revenus de la cotisante à hauteur de 9 891 euros et il a été fait application de majorations de retard à hauteur de 494,55 euros pour défaut de règlement à la date d’exigibilité ; a été également déduite la somme de 6 172 euros correspondant aux cotisations 2021 régime de base. Ainsi, Madame [E] épouse [N] reste redevable de la somme 4 213, 55 euros au titre des cotisations de l’année 2021.
Ainsi, la CARPIMKO a appliqué à l’égard de Madame [E] épouse [N] les barèmes en vigueur et les cotisations dues au titre des années 2020 et 2021 ont été calculées pour un total de 9 028,62 euros.
Par ailleurs, Madame [E] épouse [N] ne rapporte pas la preuve de ce que la somme dont le paiement est aujourd’hui réclamé par la CARPIMKO ne serait pas justifié.
Par conséquent, il convient de rejeter l’opposition à contrainte formée par Madame [E] [N] et de valider la contrainte émise le 6 avril 2023 par la CARPIMKO à l’encontre de Madame [E] épouse [N] pour un montant révisé de 9 028,62 euros.
En application des dispositions de l’article R.133-6 du code de la sécurité sociale, Madame [E] épouse [N] sera, en outre, condamnée au paiement des frais de recouvrement, en ce compris les frais de signification.

Sur les dépens :
Madame [E] épouse [N] sera condamnée aux dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS
Le Tribunal,
Déclare recevable l’opposition à contrainte formée par Madame [B] [H] [E] épouse [N] le 15 juillet 2023 ;
Rejette l’opposition formée par Madame [B] [H] [E] épouse [N] ;
Valide la contrainte émise par la CARPIMKO le 6 avril 2023 à l’encontre de Madame [B] [H] [E] épouse [N] pour un montant révisé de 9 028, 62 euros en cotisations sociales ;
Condamne Madame [B] [H] [E] épouse [N] à payer à la CARPIMKO ladite somme ;
Condamne Madame [B] [H] [E] épouse [N] au paiement des frais de signification de la contrainte ;
Condamne Madame [B] [H] [E] épouse [N] aux entiers dépens.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le Président et le Greffier.

Le Greffier Le Président


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