Conflit locatif : enjeux de renouvellement et d’état des lieux dans un bail commercial

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Conflit locatif : enjeux de renouvellement et d’état des lieux dans un bail commercial
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Constitution du bail commercial

Le 25 octobre 1999, un bail commercial a été établi entre Monsieur et Madame [W] et la SARL Société des Deux Cerises, qui a été remplacée par la société [Localité 4] Paradis. Ce bail, d’une durée de 9 ans, a débuté le 1er janvier 2010 avec un loyer annuel initial de 40 899,76 francs.

Demande de renouvellement du bail

Le 7 août 2019, la société [Localité 4] Paradis a sollicité le renouvellement du bail à partir du 1er avril 2020. Les bailleurs ont accepté ce renouvellement le 25 octobre 2019, fixant un nouveau loyer annuel hors taxes et hors charges de 14 000 €.

Jugement sur le loyer renouvelé

Le 12 décembre 2023, le juge des loyers commerciaux de Paris a statué que le montant du loyer pour le bail renouvelé serait de 10 269 € à compter du 1er avril 2020.

Assignation en référé

Le 28 mars 2024, les consorts [W] ont assigné la société [Localité 4] Paradis devant le tribunal judiciaire de Paris, demandant la réalisation d’un état des lieux, un diagnostic de performance énergétique, et la régularisation d’un contrat de bail commercial écrit.

Demandes des consorts [W]

Lors de l’audience du 30 septembre 2024, les consorts [W] ont demandé au juge des référés d’autoriser l’ouverture de la porte du local par un serrurier, d’ordonner la régularisation d’un acte de renouvellement écrit sous astreinte, de débouter la société [Localité 4] Paradis de ses demandes, et de condamner cette dernière à leur verser 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Réponse de la société [Localité 4] Paradis

La société [Localité 4] Paradis a demandé au juge des référés de débouter les consorts [W] et de les condamner à lui verser 5 000 € en dommages-intérêts et 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Motivation du juge des référés

Le juge a rappelé que pour ordonner des mesures en référé, il faut démontrer l’urgence. Les consorts [W] n’ont pas prouvé l’urgence de leurs demandes, le bail ayant été renouvelé sans contestation sérieuse. De plus, il n’est pas obligatoire d’établir un état des lieux lors du renouvellement d’un bail commercial.

Décision sur les demandes des consorts [W]

Les consorts [W] ont été déboutés de leurs demandes, le juge n’ayant pas constaté d’urgence ni de nécessité d’établir un état des lieux ou de régulariser le renouvellement par écrit.

Demande reconventionnelle de dommages et intérêts

La société [Localité 4] Paradis a demandé des dommages-intérêts, mais le juge a estimé que le caractère infondé des demandes des consorts [W] ne suffisait pas à prouver un abus de droit.

Condamnation aux dépens

Les consorts [W], en tant que parties perdantes, ont été condamnés aux dépens, et la société [Localité 4] Paradis a reçu une indemnité de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Conclusion de la décision

Le tribunal a débouté les consorts [W] de leurs demandes, a débouté la société [Localité 4] Paradis de sa demande de dommages et intérêts, et a statué sur les dépens et l’indemnité à verser à la société [Localité 4] Paradis. La décision est exécutoire à titre provisoire.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

28 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n°
24/52880
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/52880 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4N2T

N° : 11

Assignation du :
28 Mars 2024

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 28 octobre 2024

par Lucie LETOMBE, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Pascale GARAVEL, Greffier.
DEMANDEURS

Madame [U] [W] née [J]
chez société JMD
[Adresse 1]
[Localité 3]

Monsieur [O] [W]
chez JMD
[Adresse 1]
[Localité 3]

Monsieur [B] [W]
chez JMD
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentés par Me Sandrine LEBAR, avocat au barreau de PARIS – #E0058

DEFENDERESSE

La S.A.R.L. [Localité 4] PARADIS
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Me Jean-luc GUETTA, avocat au barreau de PARIS – #C1184

DÉBATS

A l’audience du 30 Septembre 2024, tenue publiquement, présidée par Lucie LETOMBE, Juge, assistée de Pascale GARAVEL, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

EXPOSE DU LITIGE

Le 25 octobre 1999, un bail commercial, portant sur le local sis [Adresse 2] à [Localité 4], a été consenti par Monsieur et Madame [W] à la SARL Société des Deux Cerises, aux droits de laquelle vient la société [Localité 4] Paradis, pour une durée de 9 années à compter du 1er janvier 2010 et moyennant le loyer annuel initial de 40 899,76 francs.

Par acte du 7 août 2019, la société [Localité 4] Paradis a demandé le renouvellement du bail à compter du 1er avril 2020, et les bailleurs ont accepté le 25 octobre 2019 le principe du renouvellement du bail moyennant un nouveau loyer annuel hors taxes et hors charges de 14 000 € à compter du 1er avril 2020.

Par jugement du 12 décembre 2023, le juge des loyers commerciaux de Paris a fixé à la somme de 10 269 € le montant du loyer du bail renouvelé à compter du 1er avril 2020.

Par acte du 28 mars 2024, Madame [U] [W], Monsieur [B] [W], et Monsieur [O] [W] ont fait assigner la société [Localité 4] Paradis devant le président du tribunal judiciaire de Paris statuant en référés aux fins de voir ordonner la réalisation d’un état des lieux loués, d’un diagnostic de performance énergétique, et la régularisation d’un contrat de bail commercial écrit par le preneur.

Par conclusions déposées à l’audience et soutenues oralement par leur conseil à l’audience du 30 septembre 2024, les consorts [W] demandent au juge des référés :
– les autoriser, en présence d’un commissaire de justice, à faire ouvrir par un serrurier la porte du local situé [Adresse 2] à [Localité 4], loué à la société [Localité 4] Paradis, et ceux avec l’aide de la force publique, afin de réaliser un état des lieux,
– ordonner à la société [Localité 4] Paradis de régulariser un acte de renouvellement écrite, et ce sous astreintes de 100 € par jour à compter de la signification de la décision,
– débouter la société [Localité 4] Paradis de ses demandes,
– condamner la société [Localité 4] Paradis à lui payer la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du même code.

Par conclusions déposées à l’audience et soutenues oralement par son conseil, la société [Localité 4] Paradis demande au juge des référés de débouter les consorts [W] leurs demandes, et de les condamner à lui verser les sommes de 5 000 € à titre de dommages-intérêts et de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation, aux écritures déposées et développées oralement à l’audience, et à la note d’audience.

L’affaire a été mise en délibéré au 28 octobre 2024, date de la présente ordonnance.

MOTIVATION

Sur la demande principale

Aux termes de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

Lorsqu’il n’existe aucune contestation sérieuse, le juge des référés peut ordonner toute mesure qui s’impose ; lorsqu’il existe au contraire un différend, il peut prendre uniquement les mesures conservatoires nécessaires à la sauvegarde des droits des parties.

Dans tous les cas, l’intervention du juge des référés suppose, en application de cette disposition, de démontrer l’urgence ; celle-ci relève de l’appréciation souveraine du juge des référés et s’apprécie à la date à laquelle il statue.

En application de l’article L.145-40-1 du code de commerce, « lors de la prise de possession des locaux par le locataire en cas de conclusion d’un bail, de cession du droit au bail, de cession ou de mutation à titre gratuit du fonds et lors de la restitution des locaux, un état des lieux est établi contradictoirement et amiablement par le bailleur et le locataire ou par un tiers mandaté par eux. L’état des lieux est joint au contrat de location ou, à défaut, conservé par chacune des parties.
Si l’état des lieux ne peut être établi dans les conditions prévues au premier alinéa, il est établi par un huissier de justice, sur l’initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire.
Le bailleur qui n’a pas fait toutes diligences pour la réalisation de l’état des lieux ne peut invoquer la présomption de l’article 1731 du code civil. »

Le bail commercial peut prendre n’importe quelle forme, le statut des baux commerciaux n’imposant pas l’écrit. En application de l’article 1714 du code civil, le bail peut être verbal.

Au cas présent, les demandeurs ne démontrent pas le caractère urgent de leurs demandes, le contrat de bail commercial ayant été renouvelé le 1er avril 2020, et ne versent aucune pièce laissant supposer, comme ils le soutiennent, que le locataire ferait un usage des lieux loués non conforme au bail.

En outre, il ne ressort pas de l’article L.145-40-1 du code de commerce susvisé qu’un état des lieux doit être obligatoirement établi par les parties lors du renouvellement d’un contrat de bail commercial.

Enfin, aucune disposition textuelle n’impose aux parties de régulariser par écrit le renouvellement d’un contrat de bail commercial, étant précisé qu’en l’espèce, le contrat de bail liant les parties a été renouvelé aux mêmes conditions à compter du 1er avril 2020.

Dès lors, les consorts [W] seront déboutés de leurs demande formées contre la défenderesse.

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts

Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

L’exercice d’une action en justice constitue en principe un droit qui ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol.

La défenderesse sollicite la condamnation des demandeurs à lui verser la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts, estimant l’action formée à son encontre non fondée, et en raison de la multiplication des actions engagées à son encontre.

Toutefois, le caractère infondé des demandes des consorts [W] ne suffit pas à caractériser un abus de droit de leur part, et à défaut de démonstration d’une mauvaise foi ou d’une intention malicieuse ou vexatoire dans l’exercice de leur action, la société [Localité 4] Paradis sera déboutée de cette demande.

Sur les demandes accessoires

Les consorts [W], parties perdantes, seront condamnés aux dépens, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

Il convient en outre d’allouer à la société [Localité 4] Paradis une indemnité au titre des dispositions de l’article 700 du même code d’un montant de 1 500€.

PAR CES MOTIFS,

Statuant en référé, par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort,
Déboutons Madame [U] [W], Monsieur [B] [W], et Monsieur [O] [W] de leurs demandes ;

Déboutons la société [Localité 4] Paradis de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamnons Madame [U] [W], Monsieur [B] [W], et Monsieur [O] [W] aux dépens ;

Condamnons Madame [U] [W], Monsieur [B] [W], et Monsieur [O] [W] à payer à la société [Localité 4] Paradis la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Disons n’y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Fait à Paris le 28 octobre 2024

Le Greffier, Le Président,

Pascale GARAVEL Lucie LETOMBE


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