Conflit locatif en période de crise sanitaire : enjeux de loyers et de résiliation de bail

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Conflit locatif en période de crise sanitaire : enjeux de loyers et de résiliation de bail

DÉBATS

A l’audience du 16 septembre 2024, il a été annoncé aux avocats des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2024.

JUGEMENT

Le jugement a été rendu par mise à disposition au greffe, de manière contradictoire et en premier ressort. La SCI MEY 5 a donné à bail commercial à la SAS BART des locaux pour une durée de neuf ans à compter du 1er août 2014, avec des loyers annuels de 64.500 euros et 23.500 euros respectivement pour deux baux distincts. En raison de la crise sanitaire liée au Covid-19, la SAS BART n’a pas payé les loyers des trimestres 2020 et 2021.

NÉGOCIATIONS ET REFUS

La SAS BART a demandé par email le 19 novembre 2020 une négociation sur le montant du loyer, mais la SCI MEY 5 a refusé d’accorder des franchises de loyers, proposant seulement un rééchelonnement. En mars 2022, la SCI MEY 5 a délivré des commandements de payer pour des dettes locatives, entraînant une assignation de la SAS BART devant le tribunal judiciaire de Paris.

DEMANDES DE LA SAS BART

La SAS BART a demandé la nullité des commandements de payer, la suspension des baux pendant les périodes de fermeture, et le remboursement des sommes versées durant ces périodes. Elle a également sollicité des délais pour s’acquitter de sa dette locative et a demandé des indemnités pour les frais de justice.

RÉPONSE DE LA SCI MEY 5

La SCI MEY 5 a demandé le rejet des demandes de la SAS BART, affirmant que les commandements de payer étaient valides et que la SAS BART devait ses loyers malgré la crise sanitaire. Elle a également demandé l’expulsion de la SAS BART et le paiement des sommes dues.

CONCLUSIONS ET AUDIENCE

Les conclusions de la SAS BART ont été notifiées en juin 2024, suivies par celles de la SCI MEY 5 en février 2024. L’audience de plaidoirie a eu lieu le 16 septembre 2024, et la décision a été mise en délibéré pour le 10 décembre 2024.

MOTIVATION DU TRIBUNAL

Le tribunal a rappelé que les demandes de nullité des commandements de payer étaient rejetées, considérant que ceux-ci avaient été délivrés de bonne foi. Il a également statué que la SAS BART était tenue de payer les loyers, même en raison des mesures sanitaires, et que les clauses résolutoires étaient acquises.

CONDAMNATIONS

La SAS BART a été condamnée à payer les sommes dues au titre des loyers, ainsi qu’à des indemnités d’occupation. Le tribunal a fixé des montants pour ces indemnités et a rejeté la demande d’installation de compteurs d’eau individualisés. La SAS BART a également été condamnée aux dépens et à verser une somme pour les frais de justice.

CONCLUSION

Le tribunal a ordonné l’expulsion de la SAS BART des locaux concernés et a rappelé que l’exécution provisoire du jugement était de droit.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelle est la validité des commandements de payer délivrés par la SCI MEY 5 ?

Les commandements de payer délivrés par la SCI MEY 5 le 3 mars 2022 sont considérés comme valides. Selon l’article L.145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux.

Ce commandement doit mentionner ce délai, à peine de nullité. En l’espèce, les commandements de payer ont été délivrés de bonne foi, et la SAS BART n’a pas justifié d’aucun paiement dans le délai de mise en demeure.

Ainsi, la demande de nullité des commandements signifiés le 3 mars 2022 formée par la SAS BART a été rejetée, confirmant la validité de ces actes.

La SAS BART peut-elle invoquer la force majeure pour ne pas payer les loyers ?

Non, la SAS BART ne peut pas invoquer la force majeure pour s’exonérer de son obligation de paiement des loyers. Selon l’article 1218 du code civil, la force majeure est un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat.

Cependant, il est constant que le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure.

Dans le cas présent, l’impossibilité d’exercer une activité en raison des mesures gouvernementales liées à la crise sanitaire ne peut exonérer le locataire du paiement des loyers.

Quelles sont les conséquences de l’acquisition des clauses résolutoires ?

L’acquisition des clauses résolutoires a pour conséquence la résiliation de plein droit des baux concernés. Selon l’article L.145-41 du code de commerce, un contrat de bail commercial peut contenir une clause prévoyant la résiliation de plein droit, qui ne produit effet qu’un mois après un commandement de payer ou une sommation d’exécuter infructueux.

En l’espèce, la SAS BART ne justifiant d’aucun paiement dans le délai de mise en demeure, la clause résolutoire est acquise au 4 mars 2022 pour les deux baux.

Cela entraîne l’expulsion de la SAS BART des locaux loués, ainsi que la possibilité pour le bailleur de récupérer les lieux avec le concours de la force publique si nécessaire.

La SAS BART a-t-elle droit à des délais de paiement ?

Non, la SAS BART n’a pas droit à des délais de paiement. Selon l’article L.145-41 du code de commerce, les juges peuvent accorder des délais de paiement, mais cela doit être fait en tenant compte de la situation du débiteur et des besoins du créancier.

En l’espèce, la SAS BART n’a pas produit d’éléments permettant d’appréhender sa situation comptable et financière, ce qui a conduit le tribunal à rejeter sa demande de délai de grâce.

Ainsi, la SAS BART est tenue de s’acquitter des sommes dues sans délai supplémentaire.

Quelles sont les implications de la clause pénale dans les baux ?

La clause pénale stipule que toute somme due par le preneur au titre des charges, clauses et conditions du bail sera automatiquement augmentée de 10% si le paiement n’intervient pas dans le délai de dix jours suivant la mise en demeure.

Cependant, cette clause a été jugée manifestement excessive, car elle cumule une majoration significative avec un délai très court. En conséquence, le tribunal a décidé de réduire le montant forfaitaire de l’indemnité contractuelle à un euro pour chacun des baux.

Cela signifie que la SAS BART ne sera pas soumise à une pénalité excessive, mais devra tout de même s’acquitter des sommes dues.

Quelles sont les conséquences de l’indemnité d’occupation pour la SAS BART ?

L’indemnité d’occupation est due par la SAS BART pour la jouissance des locaux après l’expiration de son titre d’occupation. Selon le droit, celui qui se maintient sans droit dans des lieux après l’expiration de son titre d’occupation commet une faute quasi-délictuelle, ouvrant droit pour le propriétaire à une indemnité d’occupation.

Dans ce cas, l’indemnité d’occupation a été fixée à 8.595 euros hors taxe par mois pour les locaux situés au rez-de-chaussée, et à 2.950 euros hors taxe par mois pour les locaux situés au 1er étage, à compter du 4 mars 2022 jusqu’à la libération effective des lieux.

Cela implique que la SAS BART devra payer ces montants pour la période d’occupation illégale des locaux.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 décembre 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG
22/04241
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:

18° chambre
1ère section

N° RG 22/04241
N° Portalis 352J-W-B7G-CWSZ3

N° MINUTE : 4

contradictoire

Assignation du :
04 Avril 2022

JUGEMENT
rendu le 10 Décembre 2024

DEMANDERESSE

Société BART (SAS)
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Maître Gilles GODIGNON SANTONI de la SELARL DOLLA – VIAL & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0074

DÉFENDERESSE

Société MEY 5 (société civile)
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Maître Valérie PANEPINTO de la SCP SCP GUILLEMAIN PANEPINTO, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0102

Décision du 10 Décembre 2024
18° chambre 1ère section
N° RG 22/04241 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWSZ3

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Monsieur Jean-Christophe DUTON, Vice-président, statuant en juge unique,

assisté de Monsieur Christian GUINAND, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 16 Septembre 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2024.

JUGEMENT

Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

Par acte sous seing privé du 1er août 2014, la SCI MEY 5 a donné à bail commercial à la SAS BART, des locaux sis [Adresse 1] dans le [Localité 2], situés au rez-de-chaussée aux 1er et 2ème sous-sols, pour une durée de neuf années, à compter du 1er août 2014, moyennant un loyer annuel de 64.500 euros. La destination est la suivante : restauration – bar – brasserie – salon de thé – piano Bar – vente de produits sur place et/ou à emporter (AOC, terroirs, agriculture biologique, produits naturels etc.) – vente de services ayant un lien avec la thématique de la forme – galerie d’art.

Par acte sous seing privé en date du 1er août 2014, la SCI MEY 5 a également donné à bail commercial à la SAS BART, des locaux sis [Adresse 1] dans le [Localité 2], situés au 1er étage, pour une durée de neuf années, à compter du 1er août 2014, moyennant un loyer annuel de 23.500 euros. La destination dudit bail est la suivante: à usage de bureaux.

Dans le contexte de la crise sanitaire relative au Covid 19, la SAS BART n’a pas réglé des loyers du 2ème trimestre 2020, et des 1er et 2ème trimestres 2021.

Par courrier électronique du 19 novembre 2020, la SAS BART a sollicité auprès du bailleur l’ouverture de négociation concernant le montant du loyer, eu égard aux restrictions administratives, dans le contexte de la crise sanitaire.

Par courrier électronique du 4 décembre 2020, la SCI MEY 5 a refusé à la SAS BART d’accorder des franchises de loyers, mais s’est dite ouverte à un éventuel rééchelonnement desdits loyers.

Par actes extra-judiciaires distincts du 3 mars 2022, la SCI MEY 5 a fait délivrer à la SAS BART deux commandements de payer visant la clause résolutoire :
le premier relatif au bail portant sur le rez-de-chaussée et les 1er et 2ème sous-sols, ayant pour cause la somme de 67.518,14 euros au titre des dettes locatives (2ème trimestre 2020, et 1er et 2ème trimestres 2021) et 218,83 euros au titre du commandement ; le second relatif au bail portant sur le 1er étage, ayant pour cause la somme de 23.796,51 euros au titre des dettes locatives (2ème trimestre 2020, et 1er et 2ème trimestres 2021) et 365,73 euros au titre du commandement.
Par exploit d’huissier du 4 avril 2022, la SAS BART a fait assigner la SCI MEY 5 devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de :

A titre principal,
DIRE NULS ET DE NUL EFFET, et en tout état de cause mal fondés, les commandements délivrés le 3 mars 2022 par la Société MEY 5 ainsi que l’ensemble des actes subséquents ;
DIRE ET JUGER que les deux baux sont suspendus au cours de la période du 15 mars 2020 au 2 juin 2020, puis du 29 octobre 2020 au 19 mai 2021 ;
DIRE ET JUGER que privé de l’usage de ses locaux, c’est légitimement que la société BART s’est abstenue de régler les loyers et charges pendant les périodes de fermeture susvisées ;
DIRE et JUGER que la société BART a subi une perte juridique de la chose louées pendant les périodes de fermeture ;
DIRE ET JUGER que la société BART n’est redevable d’aucune somme pendant les périodes de fermeture, soit pour la période du 15 mars 2020 au 2 juin 2020, puis du 29 octobre 2020 au 19 mai 2021 ;
CONDAMNER la Société MEY 5 à payer à la Société BART une somme de 24.459,90 euros au titre du remboursement des sommes indument versées pendant la période de fermeture du 29 octobre au 31 décembre 2020 ;
En tant que de besoin,
DEBOUTER la Société MEY 5 de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
A titre subsidiaire,
ACCORDER à la société BART 24 mois de délais pour s’acquitter de sa dette locative
SUSPENDRE pendant cette période, les effets de la clause résolutoire,
En tout état de cause,
CONDAMNER la Société MEY à payer à la Société BART une somme de 5.000 € au titre de 1’article 700 du CPC
CONDAMNER1a Société MEY 5 aux entiers dépens
RAPPELER que l’exécution provisoire est de droit.

Par conclusions notifiées par RPVA le 5 juin 2024, la SAS BART demande au tribunal judiciaire de Paris de :

A titre principal,

dire nuls et de nul effet, et en tout état de cause mal fondés, les commandements délivrés le 3 mars 2022 par la SCI MEY 5 ainsi que l’ensemble des actes subséquents ;
dire et juger que les deux baux sont suspendus au cours de la période du 15 mars 2020 au 2 juin 2020, puis du 29 octobre 2020 au 19 mai 2021 ;
dire et juger que privée de l’usage de ses locaux, c’est légitimement qu’elle s’est abstenue de régler les loyers et charges pendant les périodes de fermeture susvisées ;
dire et juger qu’elle a subi une perte juridique de la chose louées pendant les périodes de fermeture ;
dire et juger qu’elle n’est redevable d’aucune somme pendant les périodes de fermeture, soit pour la période du 15 mars 2020 au 2 juin 2020, puis du 29 octobre 2020 au 19 mai 2021 ;
condamner la SCI MEY 5 à lui payer une somme de 24.459,90 euros, au titre du remboursement des sommes indument versées pendant la période de fermeture du 29 octobre au 31 décembre 2020 ;
constater qu’elle a réglé la totalité des sommes dues faisant l’objet des commandements de payer des 9 novembre 2023 et 7 février 2024 ;
débouter la SCI MEY 5 de toutes ses demandes ;
A titre subsidiaire,

limiter le montant des pénalités de retard éventuellement dues à la somme de 1 euro ;
lui accorder à 24 mois de délais pour s’acquitter de sa dette locative et suspendre pendant cette période, les effets de la clause résolutoire ;

En tout état de cause,

condamner la SCI MEY 5 à lui payer une somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamner la SCI MEY 5 aux entiers dépens ;
rappeler que l’exécution provisoire est de droit.

Au soutien de ses prétentions, la SAS BART énonce:
que les commandements de payer du 3 mars 2022 sont nuls, en ce que le bailleur n’a pas respecté son obligation de bonne foi, pour s’être vigoureusement opposé à lui accorder une franchise, et avoir présenté comme seule proposition le fait de vouloir récupérer les locaux du 1er étage, locaux dans lesquels elle a financé de nombreux travaux ; que les loyers ne sont pas dus pendant la période de crise sanitaire puisque les décrets relatifs à la fermeture des restaurants ainsi que les mesures de confinement ordonnées s’apparentent à un cas de force majeure emportant la suspension du contrat ; qu’elle peut en outre se prévaloir d’une exception d’inexécution dans la mesure où le bailleur n’a pas respecté ses obligations de délivrance et de jouissance paisible et qu’elle a subi une perte juridique de la chose louée au sens de l’article 1722 du code civil ; que dès lors, les loyers indûment versés doivent être remboursés ; qu’en décembre 2023, elle a réglé la totalité des sommes dues, ce que reconnait du reste expressément le bailleur dans son commandement du 7 février 2024 ; que les commandements de payer postérieurs ont été régularisés dans le délai prescrit ; que la preuve de l’origine de la prétendue surconsommation d’eau n’est pas démontrée par le bailleur qui ne verse aucune pièce au soutien de ses allégations ;qu’en vertu de l’article 1231-5 du code civil le juge peut modérer une clause pénale excessive, ce qui est le cas en l’espèce d’une pénalité de retard de 10% ;que s’agissant du délai de grâce et de la suspension des effets de la clause résolutoire, elle rappelle qu’elle n’a généré aucun chiffre d’affaires durant la période de crise sanitaire ; qu’elle a été contrainte de contracter un prêt garanti par l’Etat dont le remboursement s’effectue sur 4 ans et qui affecte sa situation de trésorerie ; que le créancier, dont les associés sont des investisseurs professionnels et fortunés a été intransigeant avec le preneur en refusant de lui accorder la moindre franchise de loyers.
Par conclusions notifiées par RPVA le 19 février 2024, la SCI MEY 5 demande au tribunal judiciaire de Paris de :

débouter la SAS BART de ses demandes ;
A titre reconventionnel ,
constater l’acquisition de la clause résolutoire par l’effet du commandement signifié le 3 mars 2022, à compter du 3 avril 2022 pour le bail portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols ;
constater l’acquisition de la clause résolutoire par l’effet du commandement signifié le 3 mars 2022, à compter du 3 avril 2022 pour le bail portant sur les locaux situés au 1er étage ;
subsidiairement et dans l’hypothèse où passée la date du 7 mars 2024, les causes du commandement de payer signifié le 7 février 2024 demeuraient impayées, constater l’acquisition de la clause résolutoire par l’effet du commandement de payer signifié le 7 février 2024, à compter du 7 mars 2024 pour le bail portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols  et/ou pour le bail portant sur les locaux situés au 1er étage ;
Subsidiairement,
prononcer la résiliation judiciaire du bail, portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols, en date du 1er août 2014 aux torts de la SAS BART du chef de défaut de paiement des loyers, charges, taxes dont elle est redevable ;
prononcer la résiliation judiciaire du bail, portant sur les locaux situés au 1er étage, en date du 1er août 2014 aux torts du preneur du chef de défaut de paiement des loyers, charges, taxes dont elle est redevable.

En toutes hypothèses,
ordonner l’expulsion de la SAS BART, ainsi que celle de tous occupants de son chef, des locaux, rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols, d’une part et 1er étage, d’autre part, sis [Adresse 1] avec le concours de la force publique si besoin est ;
ordonner la séquestration des biens et facultés mobilières se trouvant dans les lieux, soit dans l’immeuble, soit dans un garde-meubles, au choix du défendeur, aux frais, risques et périls de la locataire ;
condamner la SAS BART au paiement de la somme de 67.518,14 euros TTC (bail rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols), à parfaire, au titre des loyers et accessoires dus, assortie des intérêts au taux légal, à compter du 3 mars 2022, outre capitalisation ;
condamner la SAS BART au paiement de la somme de 23.796,51 euros TTC (bail 1er étage), à parfaire, au titre des loyers et accessoires dus, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2022, outre capitalisation ;
condamner la SAS BART au paiement de la somme de 6.751,81 euros, à parfaire, au titre de la pénalité contractuelle de 10 % (bail rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sol), sur la somme susvisée de 67.518,14 euros due par l’effet du commandement du 3 mars 2022 ;
condamner la SAS BART au paiement de la somme de 2.379,65 euros, à parfaire, au titre de la pénalité contractuelle de 10 % (bail 1er étage), sur la somme susvisée de 23.796,51 euros due par l’effet du commandement du 3 mars 2022 ;
la condamner au paiement de la somme complémentaire de 10.743,44 euros TTC (bail 1er étage), à parfaire, au titre des loyers et accessoires et pénalité contractuelle de 10 % dus, assortie des intérêts au taux légal, à compter du 7 février 2024, outre capitalisation ;
la condamner au paiement de la somme complémentaire de 28.435,42 euros TTC (bail rez-de-chaussée, 1er sous-sol et 2ème sous-sol), à parfaire, au titre des loyers et accessoires dus, assortie des intérêts au taux légal, à compter du 7 février 2024, outre capitalisation ;
la condamner au paiement de la somme complémentaire de 1.041,14 TTC (bail rez-de-chaussée, 1er sous-sol et 2ème sous-sol et bail 1er étage), à parfaire, au titre de la pénalité contractuelle de 10 % (causes du commandement du 9 novembre 2023) et du coût du commandement de payer du 9 novembre 2023, assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 février 2024, outre capitalisation ;
la condamner d’autre part au paiement d’indemnités d’occupation correspondant aux loyers contractuels charges et accessoires en sus, pour les deux baux, à compter du 4 avril 2022, et subsidiairement à compter du prononcé de la résiliation judiciaire, jusqu’à la libération effective des lieux ;

la condamner, à ses frais, à installer un compteur d’eau individualisé au titre du bail du rez-de-chaussée, 1er sous-sol et 2ème sous-sol, d’une part et au titre du bail du 1er étage, d’autre part. La condamner, également à ses frais, à souscrire un contrat d’abonnement y afférent au titre du bail du rez-de-chaussée, 1er sous-sol et 2ème sous-sol, d’une part et au titre du bail du 1er étage, d’autre part. Le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé le délai de quinze jours à compter de la signification du jugement à intervenir.
Très subsidiairement,

Dans l’hypothèse où, contre toute attente, des délais seraient accordés avec suspension des effets de la clause résolutoire, juger faute de paiement en son entier et à bonne date d’une seule des échéances prévues au jugement à intervenir, ainsi que des loyers et accessoires courants à leur échéance contractuelle, pour les deux baux :
la déchéance du terme sera encourue, la totalité de la dette devenant immédiatement exigible ;
la clause résolutoire sera acquise et la bailleresse autorisée à poursuivre l’expulsion de la locataire, ainsi que celle de tous occupants de son chef dans les conditions visées ci-dessus ;
En tout état de cause,
condamner, la SAS BART au paiement d’une somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, en ce , compris le coût des commandements de payer du 3 mars 2022, du 9 novembre 2023 et du 7 février 2024 avec distraction au profit de Maître Valérie Panepinto, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Rappeler en tant que de besoin que l’exécution provisoire du jugement à intervenir est de droit.
Les conclusions ont été notifiées aux créanciers inscrits.
Au soutien de ses prétentions, la SCI MEY 5 énonce :
que le preneur ne saurait s’exonérer de ses obligations au paiement des loyers; qu’en effet, il est constant que la mesure générale et temporaire d’interdiction de recevoir du public n’entraîne pas la perte de la chose louée et n’est pas constitutive d’une inexécution, par le bailleur de son obligation de délivrance ; que par ailleurs, un débiteur ne peut s’exonérer d’une obligation contractuelle de somme d’argent en invoquant un cas de force majeure ; qu’elle a respecté son obligation de bonne foi, en essayant de maintenir un dialogue avec la SAS BART en lui faisant des propositions équilibrées et raisonnables ; que la mauvaise foi ne saurait être déduite de son seul refus d’accepter une exonération totale de loyer, étant rappelé qu’elle doit également faire face à d’importantes charges ;

que les locaux situés au 1er étage, sont à usage exclusif de bureaux et de ce fait n’ont subi aucune fermeture administrative ; qu’elle rappelle que des aides et mesures de soutien ont été mises en place par le gouvernement pour permettre aux entreprises subissant des fermetures administratives de régler leurs charges, que la preneuse n’a pas dû manquer de solliciter et d’obtenir ; que s’agissant des délais de paiement, le preneur ne verse aux débats aucun élément comptable justifiant de sa situation financière, ce qui suffit en soi à écarter la demande de délais formée, étant rappelé que le preneur a pu bénéficier des mesures de soutien aux entreprises consenties par le gouvernement ; qu’il a déjà obtenu de facto d’importants délais de paiement, en s’abstenant de payer les sommes contractuellement dues ; que les deux commandements de payer du 3 mars 2022 étant demeurés infructueux à leur échéance et ne pouvant être jugés nuls, la bailleresse est fondée à voir constater l’acquisition des deux clauses résolutoires ;qu’il conviendra de faire application de l’article 7 « clause pénale » des baux qui stipule dans chacun d’entre eux que : « Toute somme due par le preneur au titre des charges, clauses et conditions du présent bail sera automatiquement augmentée de 10% si le paiement n’intervient pas dans le délai de dix jours suivant la mise en demeure effectuée par le bailleur, soit par acte extrajudiciaire, soit par lettre recommandée comportant accusé de réception» ;que la mise en place de compteurs d’eau individualisés, pour les deux baux, avec abonnements individuels au nom de la SAS BART s’impose, étant observé qu’il s’agit d’une obligation figurant au bail ;
La clôture a été prononcée le 6 juin 2024.

Par conclusions notifiées par RPVA le 6 SEPTEMBRE 2024, la SCI MEY 5 a déposé des conclusions post-clôture actualisant exclusivement la partie de son « Par ces motifs » intitulée « En toutes hypothèses » comme indiqué entre crochets :

En toutes hypothèses,
ordonner l’expulsion de la SAS BART, ainsi que celle de tous occupants de son chef, des locaux, rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols, d’une part et 1er étage, d’autre part, sis [Adresse 1] avec le concours de la force publique si besoin est ;
ordonner la séquestration des biens et facultés mobilières se trouvant dans les lieux, soit dans l’immeuble, soit dans un garde-meubles, au choix du défendeur, aux frais, risques et périls de la locataire ;
condamner la SAS BART au paiement de la somme de 67.518,14 euros TTC (bail rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols), à parfaire, au titre des loyers et accessoires dus, assortie des intérêts au taux légal, à compter du 3 mars 2022, outre capitalisation ;
condamner la SAS BART au paiement de la somme de 23.796,51 euros TTC (bail 1er étage), à parfaire, au titre des loyers et accessoires dus, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2022, outre capitalisation ;
condamner la SAS BART au paiement de la somme de 6.751,81 €, à parfaire, au titre de la pénalité contractuelle de 10 % (bail rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sol), sur la somme susvisée de 67.518,14 euros due par l’effet du commandement du 3 mars 2022 ;
condamner la SAS BART au paiement de la somme de 2.379,65 euros, à parfaire, au titre de la pénalité contractuelle de 10 % (bail 1er étage), sur la somme susvisée de 23.796,51 euros due par l’effet du commandement du 3 mars 2022 ;
[ la condamner au paiement de la somme complémentaire de 1.817,86 euros TTC ([10.743,44 € + 28.435,42 € + 1.041,14 €] – 38.402,14 €) (solde restant dû sur les causes du commandement de payer du 7 février 2024 aux titres des deux baux), assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 février 2024, outre capitalisation ;
la condamner au paiement de la somme complémentaire de 74,67 euros TTC ([9.766,77 € + 28.710,04 €] – 9.766,77 € – 28.635,37 €) (solde restant dû sur les causes des commandements de payer du 16 avril 2024 aux titres des deux baux), assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2024, outre capitalisation ;
la condamner au paiement de la somme complémentaire de 4.021,99 euros (1.074,34 € + 2.843,54 € + 104,11 €), au titre de la pénalité contractuelle de 10 %, par l’effet du commandement de payer du 7 février 2024, assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 février 2024, outre capitalisation ;
la condamner au paiement de la somme complémentaire de 3.847,67 euros (976,67 € + 2.871 €), au titre de la pénalité contractuelle de 10 %, par l’effet des commandements de payer du 16 avril 2024, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2024, outre capitalisation ;
la condamner au paiement de la somme complémentaire de 31.360,70 euros TTC (bail rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sol), à parfaire, au titre du 3ème trimestre 2024, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2024, outre capitalisation ;
la condamner au paiement de la somme complémentaire de 10.918,89 euros TTC (bail 1er étage), à parfaire, au titre du 3ème trimestre 2024, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2024, outre capitalisation ; ]
la condamner d’autre part au paiement d’indemnités d’occupation correspondant aux loyers contractuels charges et accessoires en sus, pour les deux baux, à compter du 4 avril 2022, subsidiairement à compter du 7 mars 2024 et encore plus subsidiairement, à compter du 16 mai 2024. Plus subsidiairement, à compter du prononcé de la résiliation judiciaire, jusqu’à parfait délaissement ;
la condamner, à ses frais, à installer un compteur d’eau individualisé au titre du bail du rez-de-chaussée, 1er sous-sol et 2ème sous-sol, d’une part et au titre du bail du 1er étage, d’autre part. La condamner, également à ses frais, à souscrire un contrat d’abonnement y afférent au titre du bail du rez-de-chaussée, 1er sous-sol et 2ème sous-sol, d’une part et au titre du bail du 1er étage, d’autre part. Le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé le délai de quinze jours à compter de la signification du jugement à intervenir.
L’audience de plaidoirie s’est tenue le 16 septembre 2024.
La décision a été mise en délibéré au 10 décembre 2024.

MOTIVATION

A titre liminaire, le tribunal rappelle qu’en application de l’article 4 du code de procédure civile, les demandes tendant à “dire”, ”juger” et “constater” ne constituent pas des prétentions en ce qu’elles ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi, ces demandes n’étant que le rappel des moyens invoqués.

Sur la validité des commandements de payer
Aux termes de l’article L.145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Il est constant que sont privés d’effet les commandements de payer visant la clause résolutoire, qui, quoique répondant aux conditions légales, sont délivrés de mauvaise foi par le bailleur, soit dans des circonstances démontrant sa volonté d’exercer déloyalement sa prérogative de mise en jeu de la clause résolutoire.

Il résulte de l’article 2274 du code civil que la bonne foi est toujours présumée et que c’est à celui qui allègue la mauvaise foi de la prouver.

En l’espèce, il ressort du courrier électronique du 14 avril 2020 envoyé par le bailleur que celui-ci a proposé un étalement du loyer du deuxième trimestre 2020 sur neuf mois. Il ressort en outre du courrier électronique du 12 mai 2020 que le bailleur a informé notamment le preneur de l’existence des prêts garantie par l’Etat dont le preneur reconnaît avoir bénéficié. Ces éléments sont de nature à attester de la bonne foi par le bailleur, la circonstance que celui-ci a refusé une franchise de loyer ne saurait à elle seule démontrer une prétendue mauvaise foi dans la délivrance des commandements de payer.

Les commandements de payer signifiés le 3 mars 2022 dont la délivrance n’a pas été entachée par l’atteinte à l’obligation de bonne foi doivent en conséquence être considérés comme valides. La demande de nullité des commandements signifiés le 3 mars 2022 formée par la SAS BART sera donc rejetée.

Sur l’obligation de paiement des loyers

Sur la force majeure

Il résulte de l’article 1218 du code civil qu’il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.

Il est constant que le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure.

En l’espèce, l’impossibilité d’exercer une activité du fait des mesures gouvernementales prises pour lutter contre la propagation du virus covid-19 ne peut exonérer le locataire du paiement des loyers. Ce moyen ne saurait donc prospérer.

Sur l’obligation de délivrance et la perte de la chose

Aux termes de l’article 1722 du code civil, si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail. Dans l’un et l’autre cas, il n’y a lieu à aucun dédommagement.

Il est constant que l’effet de cette mesure générale et temporaire, sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut être, d’une part, imputable au bailleur, de sorte qu’il ne peut leur être reproché un manquement à son obligation de délivrance, d’autre part, assimilé à la perte de la chose, au sens de l’article 1722 du code civil.

En l’espèce, il est relevé d’une part, que les locaux pris à bail sont restés durant la période de crise sanitaire conformes à leur destination et à la disposition du preneur, et d’autre part, que la restriction de l’exploitation ne résultait pas du fait du bailleur, mais de la mesure générale et temporaire poursuivant un objectif sanitaire, de sorte que le preneur ne peut se prévaloir de la perte de la chose au sens de l’article susmentionné. En conséquence, le moyen ne saurait prospérer sur ce fondement.

Il résulte de l’ensemble des développements relatifs à l’obligation de paiement des loyers que le preneur était tenu à une obligation de paiement pendant la crise sanitaire.

Sur l’acquisition des clauses résolutoires
Selon l’article L. 145-41 du code de commerce, un contrat de bail commercial peut contenir une clause prévoyant la résiliation de plein droit si elle ne produit effet qu’un mois après un commandement de payer ou une sommation d’exécuter infructueux, le commandement devant, à peine de nullité, mentionner ce délai. En outre, ce commandement de payer visant la clause résolutoire du bail ne peut produire effet que s’il a été délivré de bonne foi, conformément à l’exigence de l’article 1134 devenu 1104 du code civil, les parties étant tenues, en cas de circonstances exceptionnelles, de vérifier si ces circonstances ne rendent pas nécessaire une adaptation des modalités d’exécution de leurs obligations.
La clause résolutoire insérée dans le bail est d’interprétation stricte.

En l’espèce, le bail stipule dans sa clause résolutoire « à défaut par le preneur d’exécuter une seule des charges et conditions du bail ou encore de payer à son échéance un seul terme de loyer et/ou indemnité d’occupation partiellement ou dans son intégralité, ou encore à défaut de payer tous accessoires du loyer, […] le bail pourra être résilié par le juge un mois après une mise en demeure d’exécuter ou une sommation de payer adressée par acte extrajudiciaire demeurée sans effet pendant ce délai contenant déclaration par le bailleur de son intention d’user du bénéfice de la présente clause, même en cas de paiement ou d’exécution postérieurs à l’expiration du délai du mois.[…] ».

Comme indiqué précédemment, la délivrance des commandements de payer visant ladite clause a été faite de bonne foi.

S’agissant du bail portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols, un commandement visant la clause résolutoire a été signifié le 3 mars 2022 ayant pour cause une dette locative de 67.518,14 euros arrêtée au 1er avril 2021.

La SAS BART ne justifie d’aucun paiement dans le délai de mise en demeure. Il en résulte que la clause résolutoire est acquise au 4 mars 2022 relativement audit bail.

S’agissant du bail portant sur les locaux situés au 1er étage, un commandement visant la clause résolutoire a été signifié le 3 mars 2022 ayant pour cause une dette locative de 23.796,51 euros arrêtée au 1er avril 2021.

La SAS BART ne justifie d’aucun paiement dans le délai de mise en demeure, suite au commandement concerné. Il en résulte que la clause résolutoire est acquise au 4 mars 2022 relativement audit bail.

En conséquence, l’expulsion du preneur doit être ordonnée, ainsi que celle de tous occupants de son chef des locaux situés au rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols, d’une part, et des locaux situés au 1er étage, d’autre part.

Sur les demandes en paiement au titre de la dette locative

Il résulte de l’article 1728 du code civil que le preneur est tenu de payer le prix du bail aux termes convenus.
Ainsi qu’il a été précédemment examiné la SAS BART ne justifie pas du paiement de la somme de 65.518,14 euros au titre de la dette locative arrêtée au 1er avril 2021, s’agissant du bail portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols.
Elle ne justifie pas davantage du paiement de la somme de la somme 23.796,51 euros au titre de la dette locative arrêtée au 1er avril 2021, s’agissant du bail portant sur les locaux situés au 1er étage.
Il y a donc lieu de la condamner au paiement desdites sommes pour chacun des baux concernés.

Sur les délais de paiement

Il résulte de l’article L.145-41 du code de commerce que les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.
Aux termes du 1er alinéa de l’article 1343-5 du code civil le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
En l’espèce, la SAS BART sollicite des délais de paiement sans produire aucun élément permettant d’appréhender sa situation comptable et financière. En conséquence, il y a lieu de rejeter sa demande de délai de grâce.

Sur les indemnités contractuelles au titre de la clause pénale

Aux termes de l’article 1226 ancien du code civil, applicable au bail civil d’espèce, la clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution.

Il est constant que la pénalité stipulée peut se concevoir aussi bien comme un moyen de contraindre les parties à l’exécution de leurs obligations que comme une évaluation conventionnelle anticipée d’un préjudice futur éventuel, elle n’en peut pas moins, dans l’un et l’autre cas, être révisée par le juge s’il constate son caractère disproportionné, soit que la clause pénale soit manifestement dérisoire soit qu’elle soit, à l’inverse, manifestement excessive.

Les deux baux litigieux contiennent chacun une clause intitulée « clause pénale » qui stipule: « Toute somme due par le preneur au titre des charges, clauses et conditions du présent bail sera automatiquement augmentée de 10% si le paiement n’intervient pas dans le délai de dix jours suivant la mise en demeure effectuée par le bailleur, soit par acte extrajudiciaire, soit par lettre recommandée comportant accusé de réception».

Cette clause apparaît manifestement excessive en ce qu’elle cumule à la fois une majoration significative de 10% avec un délai extrêmement court imposé au preneur « 10 jours », soit le tiers du délai légal de mise en demeure.

En conséquence, il y a lieu de réduire le montant forfaitaire au titre de l’indemnité contractuelle pour chacun des baux à un euro, soit la somme globale de deux euros.

Sur l’indemnité d’occupation

Celui qui se maintient sans droit dans des lieux après l’expiration de son titre d’occupation commet une faute quasi-délictuelle qui ouvre droit pour le propriétaire au paiement d’une indemnité d’occupation.

Il est constant que l’indemnité d’occupation est destinée à rémunérer la jouissance des lieux par l’occupant et à réparer le préjudice subi par le bailleur du fait de leur occupation sans droit ni titre ; elle a donc une nature à la fois compensatoire et indemnitaire.

En l’espèce, l’indemnité d’occupation au titre du bail portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée, et 1er et 2ème sous-sols sera souverainement fixée à la somme forfaitaire mensuelle de 8.595 euros hors taxe, à compter du 4 mars 2022 jusqu’à libération effective des lieux occupés.

L’indemnité d’occupation au titre du bail portant sur les locaux situés au 1er étage sera souverainement fixée à la somme forfaitaire mensuelle de 2.950 euros hors taxe, à compter du 4 mars 2022 jusqu’à libération effective des lieux occupés.

En conséquence, il y a lieu de condamner la SAS BART au paiement desdites indemnités.

Sur l’installation d’un compteur d’eau individualisé au titre des baux litigieux

Aux termes de l’article 1101 ancien du code civil, applicable aux baux litigieux, le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose. 

En l’espèce, il ne ressort d’aucune stipulation expresse figurant dans les baux litigieux une obligation d’installer un compteur individuel et de souscrire un abonnement individuel qui incomberait au preneur, le bailleur n’invoquant au demeurant aucune clause au soutien de son allégation. En conséquence, sa demande sera rejetée.

Sur les autres demandes

L’article 696 du code de procédure civile prévoit que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, la SAS BART ayant succombé dans ses demandes sera condamné aux entiers dépens, en ce, inclus le coût des commandements de payer signifiés le 3 mars 2022 avec distraction au profit de Maître Valérie Panepinto, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’article 700 du code de procédure civile prévoit que la partie condamnée aux dépens ou qui perd son procès peut être condamnée à payer à l’autre partie au paiement d’une somme destinée à compenser les frais exposés pour le procès et non compris dans les dépens. Dans ce cadre, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique des parties.

En l’espèce, la SAS BART sera condamnée à payer à la SCI MEY 5 la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe à la date du délibéré ;

Rejette la demande de nullité des commandements de payer signifiés le 3 mars 2022 formée par la SAS BART ;
Constate l’acquisition de la clause résolutoire au 4 mars 2022 relativement au bail conclu entre la SAS BART et la SCI MEY 5 portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée et aux 1er et 2ème sous-sols dépendant d’un immeuble sis [Adresse 1] dans le [Localité 2] ;
Constate l’acquisition de la clause résolutoire au 4 mars 2022 relativement au bail conclu entre la SAS BART et la SCI MEY 5 portant sur les locaux situés au 1er étage dépendant d’un immeuble sis [Adresse 1] dans le [Localité 2], situés au rez-de-chaussée aux 1er et 2ème sous-sols ;
Ordonne, à défaut de restitution volontaire, dans le délai d’un mois suivant la signification du présent jugement, l’expulsion de la SAS BART des locaux situés d’une part, au rez-de-chaussée et aux 1er et 2ème sous-sols et d’autre part, au 1er étage de l’immeuble sis [Adresse 1] dans le [Localité 2] , ainsi que  de tout occupant de son chef, avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;
Dit que le sort des meubles sera régi conformément aux articles L. 433-1 et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;
Condamne la SAS BART à payer à la SCI MEY 5 la somme de 65.518,14 euros au titre de la dette locative arrêtée au 1er avril 2021 relative au bail portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée, 1er et 2ème sous-sols dépendant d’un immeuble sis [Adresse 1] dans le [Localité 2] ;
Condamne la SAS BART à payer à la SCI MEY 5 la somme de 23.796,51 euros au titre de la dette locative arrêtée au 1er avril 2021 relative au bail portant sur les locaux situés au 1er étage dépendant d’un immeuble sis [Adresse 1] dans le [Localité 2] ;
Dit que chacune des sommes susmentionnées produiront intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2022, et que les intérêts seront capitalisés, conformément à l’article 1343-2 du code civil ;
Rejette la demande de délai de paiement formée par la SAS BART ;
Condamne la SAS BART à payer à la SCI MEY 5 la somme de 1 euro au titre des indemnités contractuelles relatives au bail portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée et aux 1er et 2ème sous-sols sis [Adresse 1] dans le [Localité 2].
Condamne la SAS BART à payer à la SCI MEY 5 la somme de 1 euro au titre des indemnités contractuelles relatives au bail portant sur les locaux situés au 1er étage sis [Adresse 1] dans le [Localité 2] ;
Fixe l’indemnité d’occupation au titre du bail portant sur les locaux situés au rez-de-chaussée, et 1er et 2ème sous-sols à la somme forfaitaire mensuelle de 8.595 euros hors taxe, à compter du 4 mars 2022 jusqu’à libération effective des lieux occupés ;
Fixe l’indemnité d’occupation au titre du bail portant sur les locaux situés au 1er étage la somme forfaitaire mensuelle de 2.950 euros hors taxe, à compter du 4 mars 2022 jusqu’à libération effective des lieux occupés ;
Condamne la SAS BART à payer à la SCI MEY 5 lesdites indemnités ;
Rejette la demande de la SCI MEY 5 tendant à l’installation de compteurs d’eau individualisés à la charge de la SAS BART et à la souscription d’abonnements individuels ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne la SAS BART aux entiers dépens en ce, inclus le coût des commandements de payer signifiés le 3 mars 2022 avec distraction au profit de Maître Valérie Panepinto, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS BART à payer à la SCI MEY 5 la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que l’exécution provisoire est de droit.

Fait et jugé à Paris le 10 Décembre 2024.

Le Greffier Le Président

Christian GUINAND Jean-Christophe DUTON


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