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Contexte de l’affaireMadame [F] et Madame [H] vivent dans une maison divisée en trois logements, adjacente à la propriété de Madame [Z] et Monsieur [I]. Elles ont engagé une procédure judiciaire contre leurs voisins pour mettre fin à un trouble du voisinage, invoquant une atteinte à leur vie privée. Procédure judiciaireLe 8 février 2024, Madame [H] et Madame [F] ont assigné Madame [Z] et Monsieur [I] devant le tribunal judiciaire de Draguignan. L’affaire a été renvoyée à plusieurs reprises, avec une audience fixée au 11 septembre 2024. Les demanderesses ont sollicité la suppression de caméras de surveillance et des dommages-intérêts pour les nuisances subies. Arguments des demanderessesLes demanderesses affirment être dérangées par les aboiements de chiens et la présence d’excréments dans leur jardin, ainsi que par deux caméras de surveillance orientées vers leur habitation. Elles ont tenté de résoudre le problème à l’amiable, mais sans succès, et ont déposé des mains courantes auprès des autorités. Arguments des défendeursMadame [Z] et Monsieur [I] contestent les accusations, affirmant que l’une des caméras est factice et que l’autre ne filme pas la propriété des demanderesses. Ils demandent à leur tour d’être indemnisés pour préjudice moral et les frais de justice. Éléments de preuveLes demanderesses ont produit des constats et des déclarations pour prouver la présence des caméras et les nuisances. Les défendeurs ont également fourni des preuves, y compris un constat d’huissier, indiquant que les caméras ne filment pas la propriété des demanderesses. Décision du tribunalLe tribunal a statué que les demanderesses n’ont pas prouvé l’existence d’une atteinte à leur vie privée ni d’un préjudice. Elles ont été déboutées de leurs demandes, tout comme Madame [Z] concernant sa demande de dommages-intérêts. Les demanderesses ont été condamnées aux dépens de l’instance. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DRAGUIGNAN
4ème chambre civile
Contentieux civil général de proximité
JUGEMENT
Chambre 4
N° RG 24/01334 – N° Portalis DB3D-W-B7I-KE4S
MINUTE N°
JUGEMENT
DU 06 Novembre 2024
[H], [F] c/ [Z], [I]
COPIES DÉLIVRÉES LE 06 Novembre 2024 :
1 copie exécutoire à ;
– Maître Philippe CAMPOLO de la SELAS ATEOS, Maître Alexandra GRANIER de la SELARL SELARLU CABINET ALEXANDRA GRANIER
1 copie dossier
DÉBATS :
A l’audience publique du 11 Septembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 06 Novembre 2024, les parties ayant été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe
COMPOSITION DE LA JURIDICTION :
Lors des débats et qui a délibéré :
Président : M. Eric BONALDI, Magistrat à titre temporaire
assisté lors des débats par Madame Stéphanie STAINIER, Greffier
et lors du prononcé par Madame Stéphanie STAINIER qui a signé la minute avec le président
PRONONCÉ : par mise à disposition au greffe le 06 Novembre 2024
ENTRE :
DEMANDERESSES:
Madame [O] [H]
[Adresse 1]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Rep/assistant : Maître Alexandra GRANIER de la SELARL SELARLU CABINET ALEXANDRA GRANIER, avocats au barreau de DRAGUIGNAN
Madame [C] [F]
[Adresse 1]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Rep/assistant : Maître Alexandra GRANIER de la SELARL SELARLU CABINET ALEXANDRA GRANIER, avocats au barreau de DRAGUIGNAN
DEFENDEURS:
Madame [N] [Z]
[Adresse 1]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Rep/assistant : Maître Philippe CAMPOLO de la SELAS ATEOS, avocats au barreau de DRAGUIGNAN
Monsieur [V] [I]
né le [Date naissance 2] 1999 à [Localité 4]
[Adresse 1]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Rep/assistant : Maître Philippe CAMPOLO de la SELAS ATEOS, avocats au barreau de DRAGUIGNAN
Madame [F] et Madame [H] résident dans une bâtisse qui est divisée en trois logements, elles résident sur la parcelle, limitrophe de celle occupée par Madame [Z] et Monsieur [I] ;
Par assignation en date du 08/02/2024, Mme [H] [O] et Mme [F] [C] ont attrait Mme [Z] [N] et M. [E] [V] par devant le tribunal Judiciaire de DRAGUIGNAN aux fins d’entendre, sur le fondement des dispositions des articles 9, et I240 du code civil, mettre fin à un trouble du voisinage constitutif d’une atteinte à la vie privée ;
A l’audience initiale les parties sont assistées par leurs avocats respectifs, et l’affaire renvoyée à plusieurs reprises à la demande d’au moins l’une des parties pour être fixée à plaider au 11/09/2024 ;
A cette dernière audience les demanderesses, qui justifient avoir préalablement saisi le conciliateur de Justice, ce dernier ayant convoqué les parties le 02/07/2021, par la voie de leur conseil soutiennent leurs écritures, au visa desquelles il est expressément renvoyé pour de plus amples information, et au terme desquelles elles sollicitent :
JUGER la demande recevable et bien fondée,
Et en conséquence,
CONDAMNER solidairement Mme [N] [Z] et Monsieur [V] [I] à retirer sous astreintes tout dispositif de type caméra de surveillance portant sur le fonds de Mesdames [F] et [H], sous astreinte de 300 € par jour de retard à compter du 8eme jour suivant la signification de la décision à intervenir
CONDAMNER les requis à payer aux requérantes la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour les nuisances subies et la violation de la vie privée,
JUGER n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
CONDAMNER les requis au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du CPC, ainsi qu’aux entiers dépens en ce compris les frais des constats du commissaire de justice pour un montant de 680 € ;
A l’appui de leurs demandes elles soutiennent qu’elles sont victimes :
– des aboiements intempestifs de leurs deux chiens, et de la présence d’excréments dans leur jardin en raison de l’absence de clôture entre les parcelles permettant aux deux chiens de divaguer librement,
-de la mise en place de 2 caméras de surveillance orientées directement sur leur habitation.
Elles indiquent que :
Depuis 2019, elles ont tenté d’en discuter librement avec leurs voisins, leur demandant de tenir en laisse leurs chiens, mais aucune solution n’a pu être trouvée, ces derniers proférant des insultes en réponse.
– Elles n’ont eu d’autres ressources que de déposer des mains courantes, les 04/06 et 15/06/2020 auprès de la police municipale de [Localité 3] et de la gendarmerie ;
– Les arguments adverses sont donc totalement irrecevables et l’atteinte à la vie privée est établie par la seule présente de caméras qui comme le constatait le premier commissaire de justice, sont bien en place et orientées vers le fonds des demanderesses.
Mme [Z] [N] et M. [E] [V], quant à eux, par la voie de leur avocat soutiennent leurs écritures en réponse, au visa desquelles il est expressément renvoyé pour de plus amples informations, et par lesquelles ils sollicitent :
DEBOUTER Mesdames [F] [C] et [H] [O] de l’ensemble de leurs demandes fins et conclusions.
CONDAMNER SOLIDAIREMENT Mesdames [F] et [H] à verser à [Z] [N] la somme de 3 000 euros à titre de préjudice moral.
CONDAMNER SOLIDAIREMENT Mesdames [F] et [H] à verser aux concluants la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens en ce compris le coût du constat d’huissier du 13 mars 2024.
A l’appui ils soutiennent que :
– Juste au-dessus de l’entrée se trouve une première caméra factice puisque non recordée au réseau éclectique comme le montrent les câbles en attente à l’intérieur de la maison ; installation factice visant à dissuader toute intrusion extérieure de personne mal intentionnée visible depuis l’extérieur et possédant une veille pour accroitre la croyance d’une véritable caméra.
– ll ne peut être déduit de l’absence d’indication par les concluants du caractère factice de cette caméra dans la mesure où l’effet dissuasif repose exactement sur la croyance et l’apparence d’une installation réelle.
– Aucune atteinte à la vie privée ne peut être invoquée car il n’y a aucune capture d’image ; au surplus, la première caméra de vidéo-surveillance de type vision large 360° à mouvements rotatifs n’a jamais été mis en fonctionnement comme en atteste le constat dressé par commissaire de justice
La seconde caméra ne visionne pas du tout la propriété de Mesdames [F] et [H] ; pour éviter toute contestation, cette caméra a d’ailleurs été réglée par la police municipale comme Ie reconnaît Madame [F] elle-même ; il résulte en outre du procès-verbal de constat dressé le 13 mars 2024 par commissaire de justice que cette caméra ne permet aucunement de visionner la propriété de Mesdames [F] et [U] ;
Compte tenu de la nature de l’affaire et de la représentation des parties, il sera statué par décision contradictoire et en premier ressort ;
Les parties sont informées de la date du délibéré fixée au 06/11/2024
Sur la demande principale
Il y a lieu de rappeler les dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, qui énonce qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
– S’agissant du trouble inhérent aux excréments
L’article 1253 du code civil prévoit que le propriétaire, le locataire, l’occupant sans titre, le bénéficiaire d’un titre ayant pour objet principal de l’autoriser à occuper ou à exploiter un fonds, le maître d’ouvrage ou celui qui en exerce les pouvoirs qui est à l’origine d’un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage est responsable de plein droit du dommage qui en résulte.
En l’espèce, Il est produit aux débats, différentes attestations conformes aux dispositions des articles 200, 203 du NCPC et 441-7 du CPP ainsi qu’ un constat établi par commissaire de Justice en date du 06/07/2021 par lequel est relevé que différents excréments d’animaux sont présents sur le jardin des demanderesses ; toutefois il n’est pas établi, que ces mêmes déjections, constatées par ailleurs il y a 3 ans, sont imputables aux chiens détenus par Mme [Z] [N] et M. [E] [V], ce d’autant que le terrain sur lequel les déjections se trouvent n’est pas clos et demeure en accès libre à d’autre animaux ; par suite, Mme [H] [O] et Mme [F] [C], n’ayant pas démontré l’imputabilité des faits aux défendeurs, seront déboutées de leur demande sur ce point ;
– S’agissant de l’atteinte à la vie privée
L’article 9 du code civil dispose que chacun a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée : ces mesures peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé.
En l’espèce, les demanderesses produisent un constat établi par commissaire de Justice en date du 30/05/2023, ainsi qu’ une déclaration de main-courante du 02/08/2022 ; il résulte de l’examen du constat et plus particulièrement des clichés photographiques annexés au constat, que Mme [Z] [N] et M. [E] [V] disposent sur leur terrasse, séparée de celle des demanderesses par un mur mitoyen, d’un système de camera mobile à balayage fixée en façade ;
De même il est établi, au vu de ces mêmes clichés photographiques, que Mme [Z] [N] et M. [E] [V] ont, procédé à la pose d’une seconde camera, disposée sur le mur de l’appentis placé sur la terrasse ;
Toutefois et d’une part, il demeure constant que les constations ainsi réalisées par le commissaire de Justice depuis le fonds occupé par ses clientes, compte tenu de l’impossibilité, pour lui, d’accéder aux moniteurs de réception du système, ne permettent pas d’établir que ces 2 caméras filment ou d’enregistrent la partie privée appartenant aux demanderesses ;
D’autre part, les défendeurs produisent, notamment, un procès-verbal déposé le 13/03/2024 par un commissaire de Justice qui indique s’être rendu au domicile de Mme [Z] [N] et M. [E] [V] que ” les propriétaires de la maison mise en cause acceptent de nous faire entrer dans leur habitation et nous montrent via l’application SMARTPHONE que la caméra N° 2 est bien fixe et qu’elle ne filme que leur terrasse ” ; s’agissant de la caméra N°1 le constat précise que cette dernière est ” factice puisque non raccordée au réseau électrique comme le montrent les câbles en attente à l’intérieur de la maison ” ;
Il ressort de l’ensemble de ces éléments que, compte tenu de la configuration technique de la caméra N°1 litigieuse, de son angle de vue maximal qui se situe en limite de la propriété des défendeurs ainsi que du paramétrage de l’application de vidéosurveillance utilisée par les défendeurs, qui appose des caches sur les zones situées sur la voie publique et la propriété voisine, et de la présente de la camera N° 2 dépourvue, quant à elle, de branchement ; par suite et au vu des éléments versés par les demanderesses , peu probants car uniquement déclaratifs, il n’est pas démontré, que l’entrée de la propriété ou le jardin de Mme [H] [O] et Mme [F] [C] soient filmés par les caméras litigieuses ou soient à tout le moins susceptibles de l’être.
L’atteinte à la vie privée alléguée, en violation des dispositions protectrices de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et de l’article 9 du code civil n’est ainsi nullement prouvée, de sorte qu’aucun trouble manifestement illicite n’est établi, pas plus qu’un risque certain d’atteinte à la vie privée permettant de caractériser un dommage ;
Il convient de débouter Mme [H] [O] et Mme [F] [C] de leurs demandes ;
Sur la demande de dommages et intérêts
Il résulte de l’article 1240 du code civil, que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
En l’espèce, faute pour les demanderesses de démontrer l’existence d’une quelconque atteinte à leur vie privée, ne rapportent pas, de fait, la preuve d’un préjudice.
En conséquence, elles seront donc déboutées de leur demande de dommages et intérêts.
Sur la demande reconventionnelle en dommages intérêts pour préjudice moral
Madame [Z] sollicite la condamnation solidaire des demanderesses à lui régler la somme de 3 000€ au titre de dommages intérêts pour préjudice moral ; toutefois elle ne produit aucun justificatif probant à l’appui de sa demande permettant d’établir l’existence d’un préjudice directement lié à la présente procédure ; par suite elle sera déboutée ;
Sur les demandes accessoires
– Sur l’article 700 du code de procédure civile
Il résulte des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile que, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou à défaut la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations dire qu’il n’y a pas lieu à condamnation.
En l’espèce les circonstances et les faits de la cause mais aussi de l’équité commandent de dispenser Mme [H] [O] et Mme [F] [C] du paiement des frais irrépétibles exposés par Mme [Z] [N] et M. [E] [V]
– Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ;
Mme [H] [O] et Mme [F] [C] qui succombent sont condamnées solidairement aux entiers dépens de l’instance en ce compris le coût du constat d’huissier du 13 mars 2024 ;
Le tribunal, statuant publiquement, après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe contradictoire et en premier ressort,
DEBOUTE Mme [H] [O] et Mme [F] [C] de leurs demandes ;
DEBOUTE Mme [Z] [N] de sa demande de dommages intérêts pour préjudice moral ;
DEBOUTE Mme [Z] [N] et M. [E] [V] de leur demande s’agissant des frais irrépétibles ;
CONDAMNE SOLIDAIREMENT Mme [H] [O] et Mme [F] [C] aux entiers dépens de l’instance en ce compris le coût du constat d’huissier du 13 mars 2024.
Ainsi jugé aux jour, mois et date su-mentionnés
LE GREFFIER LE JUGE