Conflit contractuel relatif à l’exécution des travaux de déconstruction et ses conséquences financières

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Conflit contractuel relatif à l’exécution des travaux de déconstruction et ses conséquences financières

La SCCV Angevine de Construction a engagé la SAS Charier TP Sud pour des travaux de déconstruction et de désamiantage d’un programme immobilier à [Localité 6], pour un montant de 287 947,20 euros TTC. Les travaux ont eu lieu de mars à septembre 2019. La SAS Charier TP Sud a réclamé le paiement de deux factures impayées totalisant 13 818,90 euros TTC, mais sa demande de provision a été rejetée par le juge des référés en avril 2021 en raison d’une contestation sérieuse. En juin 2021, la SAS Charier TP Sud a assigné la SCCV Angevine de Construction pour obtenir le paiement du solde, d’une clause pénale et d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La SAS Charier TP Sud affirme que les devis ont été acceptés et que les travaux ont été réalisés sans réserve. Elle précise qu’un bâtiment n’a pas été démoli, mais qu’elle ne réclame plus de paiement pour cette prestation. Elle conteste également la nécessité de bâcher des murs privatifs et justifie la présence de fondations laissées en place par des contraintes techniques.

De son côté, la SCCV Angevine de Construction demande le rejet des demandes de la SAS Charier TP Sud, soutenant que les travaux n’ont pas été achevés conformément aux devis et au CCTP, et qu’elle a subi des dommages en raison de cette inachèvement. Elle réclame des dommages-intérêts et conteste la responsabilité de la SAS Charier TP Sud pour des désordres sur le réseau électrique. La SCCV Angevine de Construction argue également que la clause pénale ne figure pas dans le devis accepté.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 octobre 2024
Tribunal judiciaire d’Angers
RG
21/01087
07 Octobre 2024

AFFAIRE :
S.A.S. CHARIER TP SUD

C/
S.C.C.V. ANGEVINE DE CONSTRUCTION

N° RG 21/01087 – N° Portalis DBY2-W-B7F-GSBW

Assignation :07 Juin 2021

Ordonnance de Clôture : 21 Mai 2024

Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

TRIBUNAL JUDICIAIRE D’ANGERS

1ère Chambre

JUGEMENT

JUGEMENT DU SEPT OCTOBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

DEMANDERESSE :

S.A.S. CHARIER TP SUD
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentant : Maître Charline LE BRUN, avocat postulant au barreau d’ANGERS – Représentant : Maître Jean-Christophe SIEBERT, avocat plaidant au barreau de NANTES

DÉFENDERESSE :

S.C.C.V. ANGEVINE DE CONSTRUCTION
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentant : Maître Antoine BARRET de la SCP BARRET & MENANTEAU – AVOCATS & CONSEILS, avocats au barreau d’ANGERS

EVOCATION :

L’affaire a été évoquée à l’audience du 03 Juin 2024,

Composition du Tribunal :
Président : Luis GAMEIRO, Vice-Président, statuant comme JUGE UNIQUE

Greffier, lors des débats et du prononcé : Séverine MOIRÉ.

A l’issue de l’audience, le Président a fait savoir aux parties que le jugement serait rendu le 02 septembre 2024. La décision a été prorogée au 07 Octobre 2024

JUGEMENT du 07 Octobre 2024
rendu à cette audience par mise à disposition au Greffe (en application
de l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile)
par Luis GAMEIRO, Vice-Président,
contradictoire
signé par Luis GAMEIRO, Vice-Président, et par Séverine MOIRÉ, Greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE

La SCCV Angevine de Construction a confié les travaux de déconstruction désamiantage du programme immobilier « Terrasse de Loire » situé sur la commune de [Localité 6] (49), à la SAS Charier TP Sud, pour un montant de 287 947,20 euros TTC, ce en vertu d’un devis du 6 février 2019 et d’un devis complémentaire du 16 mai 2019.

Les prestations de déconstruction désamiantage ont débuté au mois de mars 2019 et se sont achevées au mois de septembre 2019.

La SAS Charier TP Sud a réclamé le paiement de deux factures impayées pour un total de 13 818,90 euros TTC. Elle a assigné la SCCV Angevine de Construction en paiement d’une provision devant le juge des référés mais par ordonnance de référé du 1er avril 2021, cette demande a été rejetée au motif qu’il existait une contestation sérieuse.

Par acte d’huissier de justice en date du 7 juin 2021, la SAS Charier TP Sud a fait assigner la SCCV Angevine de Construction devant le présent tribunal aux fins de la voir condamner au paiement du solde, outre une clause pénale et une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions récapitulatives communiquées par voie électronique le 23 novembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses prétentions, moyens et arguments, la SAS Charier TP Sud demande au tribunal, au visa des articles 1194 et 1231-1 du code civil, de déclarer sa demande recevable et bien fondée et en conséquence de :

– rejeter la demande d’expertise sollicitée par la société Angevine de Construction ;

– condamner la société Angevine de Construction au paiement de la somme de 10 632,90 euros TTC outre intérêts au taux contractuel (trois fois le taux légal) à compter du 15 octobre 2019 pour la somme de 8 159,70 euros et à compter du 15 novembre 2019 pour la somme de 5 659,20 euros ;

– condamner la société Angevine de Construction au paiement de la somme de 2 072,83 euros TTC correspondant au montant de la clause pénale ;

– rejeter les demandes reconventionnelles de la société Angevine de Construction ;

– condamner la société Angevine de Construction à lui payer la somme de 4 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

La SAS Charier TP Sud soutient que les deux devis ont été acceptés par la SCCV Angevine de Construction et que les parties ne sont liées que par ces deux devis, et non par un cahier des clauses techniques particulières (CCTP) qui n’est pas une pièce contractuelle. Elle affirme que ses prestations ont bien été réalisées et n’ont fait l’objet d’aucune réserve ou contestation. Elle précise que ses prestations ont fait l’objet d’un chiffrage forfaitaire par bâtiment, sans précision des quantités.

La SAS Charier TP Sud observe que l’un des bâtiments, à savoir le transformateur électrique, n’a pas été démoli et qu’elle ne demande plus la condamnation de la société Angevine de Construction au paiement de cette prestation.

Elle considère qu’elle n’avait pas à procéder à un bâchage des murs après démolition dans la mesure où il ne s’agit pas de murs mitoyens mais de murs privatifs.

La SAS Charier TP Sud soutient que si des fondations ont été laissées en place, c’est seulement en limite de voiries et à cause de la présence de conduites de gaz en service sous les trottoirs.

*

Dans ses dernières conclusions récapitulatives communiquées par voie électronique le 27 juillet 2023, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses prétentions, moyens et arguments, la SCCV Angevine de Construction demande au tribunal, au visa des articles 1231 et suivants du code civil, de :

– débouter la société Charier TP Sud de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

– constater l’inachèvement des travaux au regard du devis du 6 février 2019 et du CCTP de référence, la non-réalisation du chantier dans les règles de l’art et la dispenser du solde du marché de travaux objet du présent litige ;

– condamner la société Charier TP Sud à lui régler la somme de 84 461,80 euros TTC à titre de dommages-intérêts en réparation des dommages subis à raison du non-achèvement du chantier et des dommages causés aux tiers, outre intérêts au taux légal à compter de la signification des écritures valant sommation de payer ;

Pour le surplus et avant-dire droit,
– désigner tel expert qu’il plaira avec pour mission de chiffrer le préjudice subi par la société Angevine de Construction résultant directement du retard apporté à l’exécution des travaux confiés à la société Charier TP Sud, fixé par M. [F], économiste de la construction à la durée de 20 jours ouvrés, avec les prescriptions habituellement retenues par le tribunal ;

Dans tous les cas,
– condamner la société Charier TP Sud à la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à supporter les frais et dépens de la procédure, qui incluront les frais du constat de Me [X] à hauteur de 309,20 euros TTC.

La SCCV Angevine de Construction soutient que le CCTP du 18 janvier 2019 régit les relations entre les parties dans la mesure notamment où il est antérieur au devis définitif qu’elle a accepté le 6 février 2019 pour la somme de 282 000 euros TTC.

Elle fait valoir que la notion de marché à forfait interdit de modifier unilatéralement les termes du contrat et considère que la SAS Charier TP Sud lui a abusivement facturé des travaux supplémentaires.

La SCCV Angevine de Construction affirme que la réception du chantier n’a jamais eu lieu en raison du départ de la société Charier TP Sud avant la fin des travaux.

Elle considère que la SAS Charier TP Sud est bien la seule responsable des désordres occasionnés au réseau électrique de la ville de [Localité 6] et qui lui ont été facturés pour un montant de 25 793,37 euros.

La SCCV Angevine de Construction soutient que le retard engendré par la non-réalisation de certains travaux par la SAS Charier TP Sud est de 20 jours ouvrés, de sorte que la livraison des appartements construits sur le site a dû être reportée d’autant, entraînant un décalage de la perception des prix de vente et par conséquent des intérêts supplémentaires à acquitter.

S’agissant de la clause pénale, la SCCV Angevine de Construction s’oppose à son paiement en soulignant qu’elle ne figure pas sur le devis qu’elle a accepté alors qu’elle n’est pas commerçante.

*

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2024, conformément à l’avis de clôture et de fixation adressé aux parties le 21 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les demandes en paiement émanant de la SAS Charier TP Sud au titre des factures impayées et de la clause pénale :

L’article 1103 du code civil énonce que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L’article 1104 du même code dispose que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Cette disposition est d’ordre public.

L’article 1217 du même code prévoit que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :

– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;

– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;

– obtenir une réduction du prix ;

– provoquer la résolution du contrat ;

– demander réparation des conséquences de l’inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

L’article 1219 du même code énonce qu’une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

L’article 1231 dispose qu’à moins que l’inexécution soit définitive, les dommages et intérêts ne sont dus que si le débiteur a préalablement été mis en demeure de s’exécuter dans un délai raisonnable.

Enfin, l’article 1231-1 du même code mentionne que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

Au cas d’espèce, les parties sont liées par un devis du 6 février 2019 et accepté par la SCCV Angevine de Construction le 8 février 2019 pour un montant total de 282 000 euros TTC, complété par un devis du 16 mai 2019 de 5 947, 20 euros.

Les parties sont en désaccord s’agissant de l’application ou non du cahier des clauses techniques particulières du 18 janvier 2019 dans leur rapport entre elles.

Il est rappelé que le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) est un document contractuel regroupant les clauses techniques détaillant les travaux ou prestations à réaliser. Le CCTP sert ainsi à expliciter les besoins et suivre l’exécution du marché.

Compte tenu de l’importance du chantier en question, la SAS Charier TP Sud ne peut pas sérieusement indiquer qu’un tel document, qui définit précisément la commande, ne régirait pas les parties.
D’ailleurs la SAS Charier TP Sud ne répond pas à l’argumentation de la SCCV Angevine de Construction selon laquelle elle avait établi un devis initial de 255 888 euros TTC le 10 octobre 2018 avant de prévoir un devis actualisé, postérieurement à la publication du CCTP en date du 18 janvier 2019, pour une somme de 282 000 euros TTC.
De plus, l’assistant du maître d’ouvrage, Monsieur [B], atteste le 15 février 2021 que le devis de l’entreprise CHARIER a bien été élaboré à l’aide du CCTP démolition rédigé par la maîtrise d’oeuvre SABH.
Enfin, la SAS Charier TP Sud n’explique pas sur quel document elle se baserait pour l’exécution de ses travaux, étant ajouté que son devis mentionne uniquement la liste des prestations sans détail quant à leur exécution pratique.

Compte tenu de ce qui précède, il doit être considéré que le cahier des clauses techniques particulières du 18 janvier 2019 régit bien le rapport entre les parties.

Ce cahier des clauses techniques prévoit en son article 7.3 que les travaux de « déconstruction totale » comprennent notamment « les fondations (profondes ou superficielles) dans leur totalité, ou sur une hauteur limitée à 2 mètres de l’arase inférieure des dallages et planchers bas ».

Pour s’opposer au paiement des deux dernières factures de la SAS Charier TP Sud, la SCCV Angevine de Construction fait valoir que les travaux n’ont pas été achevés et qu’au demeurant aucune réception n’a été prononcée.
La SCCV Angevine de Construction fait grief à la SAS Charier TP Sud de :
– ne pas avoir enlevé le transformateur électrique (prestation chiffrée au devis à 3 186 euros TTC) ;
– ne pas avoir bâché les pignons des immeubles voisins (prestation chiffrée au devis à 1 794 euros TTC) ;
– ne pas avoir supprimé certaines fondations.

À l’appui de ses griefs, la SCCV Angevine de Construction produit notamment un constat d’huissier de justice daté du 26 novembre 2020.

Tout d’abord, la SAS Charier TP Sud reconnaît qu’elle n’a pas enlevé le transformateur électrique dont le coût de la prestation s’élevait à 2 655 euros HT. C’est la raison pour laquelle elle n’entend finalement pas solliciter la condamnation à paiement de cette somme. Cette inexécution est par conséquent bien caractérisée.

Ensuite, la SAS Charier TP Sud estime que le bâchage d’une partie des pignons de l’immeuble voisin, qui sert de contrefort provisoire, était inutile.
Pour autant cette prestation avait été facturée dans son devis.
Comme l’indique à juste titre la SCCV Angevine de Construction, en cas de marché à forfait comme c’est le cas en l’espèce, les travaux supplémentaires nécessaires à la réalisation de l’ouvrage relèvent du forfait. La SAS Charier TP Sud ne peut donc par conséquent s’abstenir d’exécuter certaines prestations prévues au devis au seul motif qu’il s’agirait selon elle de prestations inutiles.
Une deuxième inexécution contractuelle est donc bien caractérisée.

S’agissant enfin du maintien de certaines fondations, la SAS Charier TP Sud affirme qu’il a été convenu en cours de chantier de ne conserver que les fondations qui risquaient d’endommager le domaine public et qui étaient hors d’emprise de la construction du bâtiment. Pour autant, il ne produit aucune pièce de nature à appuyer ses dires.
Cette troisième inexécution contractuelle est par conséquent également établie.

Il importe de souligner que la circonstance que la SCCV Angevine de Construction n’ait adressé aucun reproche à la SAS Charier TP Sud au cours des travaux ne saurait exonérer cette dernière de sa responsabilité, et ce d’autant que la réception du chantier n’a jamais été faite.

Au regard de l’importance de ces manquements contractuels, la SCCV Angevine de Construction est fondée à ne pas payer la somme réclamée par la SAS Charier TP Sud au titre des factures impayées, soit 10 632,90 euros.
En conséquence, il y a lieu de rejeter la demande en paiement de la SAS Charier TP Sud au titre des factures impayées.
La SCCV Angevine de Construction étant fondée à se prévaloir de l’exception d’inexécution, il y a également lieu de rejeter la demande de la SAS Charier TP Sud tendant à voir condamner la SCCV Angevine de Construction à la somme de 2 072,83 euros correspondant au montant de la clause pénale.

Sur la demande en paiement présentée par la SCCV Angevine de Construction au titre des travaux de reprise :

Du fait de l’inexécution de certains travaux, la SAS Charier TP Sud a engagé sa responsabilité à l’égard de la SCCV Angevine de Construction, laquelle apparaît bien fondée à solliciter la prise en charge par la SAS Charier TP Sud des travaux de reprise.

Les travaux de reprise sont évalués par la SCCV Angevine de Construction à la somme totale de 58 668,43 euros TTC.
Elle produit plusieurs devis et factures à l’appui de sa demande.

Ces devis, qui apparaissent limités à la reprise des travaux, seront retenus.

Par voie de conséquence, il y a lieu de condamner la SAS Charier TP Sud à payer à la SCCV Angevine de Construction la somme de 58 668,43 euros TTC au titre des travaux de reprise.
Cette somme portera intérêts à compter de la présente décision, par application de l’article 1231-7 du code civil, puisqu’il s’agit d’une décision de condamnation et non pas une décision constatant le non paiement d’une obligation contractuelle de somme d’argent.
Aussi, la SCCV Angevine de Construction sera déboutée en sa demande tendant à dire que les intérêts sur la condamnation à paiement seront dus à compter de la signification de ses conclusions.

Sur la demande en paiement présentée par la SCCV Angevine de Construction au titre de l’endommagement du réseau électrique :

La SCCV Angevine de Construction réclame à la SAS Charier TP Sud une somme totale de 25 704 euros au titre de la remise en état d’un ouvrage électrique qui aurait été endommagé par celle-ci.
Elle explique qu’elle a été interpellée, à la fin de l’année 2020, par la ville de [Localité 6], puis la société CITEOS chargée du réseau électrique par la municipalité, au sujet de l’endommagement du réseau électrique à l’occasion des travaux effectués par la SAS Charier TP Sud.
La SCCV Angevine de Construction produit en particulier un courrier de CITEOS daté du 21 septembre 2021 dont il ressort que le 27 décembre 2019 un bâtiment a été démoli alors qu’un mobilier d’éclairage public, alimenté électriquement, se trouvait sur la façade de celui-ci. La démolition du bâtiment a eu pour conséquence de court-circuiter l’armoire de commande, mettant le quartier complet dans le noir. Les services d’éclairage public sur le quartier et les équipes CITEOS sont intervenus à quatre reprises et ont notamment déroulé plus de 100 m de câbles provisoires hors-sol pour réalimenter l’éclairage public concerné. De plus, le 5 janvier 2021 une nouvelle dégradation de l’éclairage public a eu lieu dans le cadre du projet de résidence « [5] ». Un câble souterrain d’éclairage public a été sectionné. La remise en état s’élève à 4365,03 euros HT. S’agissant de la remise en état de l’éclairage public toujours alimenté provisoirement depuis le 27 décembre 2019, la remise en état élève à 17 129,44 euros HT.

La SAS Charier TP Sud conteste toute responsabilité, précisant qu’il ne peut pas lui être imputé des sinistres survenus les 27 décembre 2019 et 5 janvier 2021 alors qu’elle a cessé ses prestations en septembre 2019.

A l’appui de sa demande, la SCCV Angevine de Construction verse aux débats un courrier électronique d’un dirigeant de la SAS Charier TP Sud daté du 21 janvier 2020, et non pas 2021 comme indiqué à tort par la défenderesse, dont elle estime qu’elle prouve une reconnaissance de responsabilité. Ce mail mentionne que « cet éclairage public était présent sur le bâtiment démoli. Nous avons bien fait nos demandes de DICT idiquant bien la démolition du bâtiment et les dates d’intervention.
Personne n’a pris contact avec nous ou le maître d’ouvrage (qui avait fait les DT) concernant la conservation de cet éclairage ».
Ce courrier électronique constitue une réponse à une demande de C2L immobilier qui a évoqué un problème d’éclairage public, pour le dossier « les terrasses de Loire » et qui demandait de lui indiquer sur le plan ou avec une photo où se trouvait le problème et quelle était sa nature.

En l’absence d’autres précisions et d’autres éléments ce courrier électronique ne constitue pas une reconnaissance de ce que la SAS Charier TP Sud aurait une quelconque responsabilité dans le sinistre daté du 27 décembre 2019.
Ce courriel daté du 21 janvier 2020 ne saurait bien évidemment pas établir la moindre reconnaissance de responsabilité concernant le sinistre survenu près d’un an après, le 5 janvier 2021.

Compte tenu de tout ce qui précède, la demande de la SCCV Angevine de Construction tendant à la condamnation de la SAS Charier TP Sud à la somme totale de 25 793,37 euros, au titre du rétablissement provisoire de l’électricité dans les quartiers sinistrés et des travaux définitifs pour la remise en état de l’ouvrage électrique, sera rejetée.

Sur la demande tendant à ce que soit ordonnée une expertise :

La SCCV Angevine de Construction soutient que la non-réalisation de certaines prestations par la SAS Charier TP Sud est à l’origine d’une livraison tardive, de 20 jours ouvrés, des appartements construits.
Elle affirme que ce retard signifie nécessairement que la livraison des appartements construits a dû être reportée d’autant. Elle évoque avoir subi un retard dans la perception du prix de vente et avoir payé des intérêts bancaires supplémentaires.

Elle sollicite l’organisation d’une expertise judiciaire afin d’évaluer son préjudice.

Comme le relève à juste titre la SAS Charier TP Sud, la SCCV Angevine de Construction n’apporte aucun élément de preuve du préjudice allégué.
Même à supposer acquis le retard pris par la SAS Charier TP Sud dans la réalisation de sa prestation, il appartient à la SCCV Angevine de Construction de produire toutes pièces utiles de ce que ce retard a conduit, de manière effective, à un retard dans la livraison des appartements construits qui n’avait pas été anticipé.

En outre, la SAS Charier TP Sud produit des articles de presse des 11 mars 2019 et 25 juin 2020 dont il ressort que le chantier de construction « accuse un peu de retard » puisque « la crise sanitaire est passée par là ».
La teneur de ces documents n’est pas contestée par la SCCV Angevine de Construction.

Ainsi, il apparaît que le contexte sanitaire a eu un impact certain sur la livraison des logements.

En définitive, faute pour la SCCV Angevine de Construction de démontrer que la SAS Charier TP Sud est à l’origine d’un quelconque préjudice financier lié au retard dans la livraison des logements, la demande d’expertise ne peut qu’être rejetée.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de la SCCV Angevine de Construction la totalité de ses frais irrépétibles. Il convient ainsi de condamner la SAS Charier TP Sud à payer à la SCCV Angevine de Construction la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La SAS Charier TP Sud, qui succombe principalement en ses prétentions, sera déboutée de sa demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens :

Conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens, doivent être supportés par la SAS Charier TP Sud qui succombe principalement en ses prétentions.
Il y a lieu de rejeter la demande de la SCCV Angevine de Construction tendant à dire que les dépens comprendront le coût du constat d’huissier de Maître [X] du 26 novembre 2020 d’un montant de 309,20 euros TTC.
En effet, l’article 695 du code de procédure civile, qui dresse la liste limitative des frais compris dans les dépens, n’intègre pas le coût lié aux constats établis par un huissier de justice non désigné à cet effet par décision de justice. Une telle dépense ne peut être indemnisée que dans le cadre de la demande au titre des frais irrépétibles. 

Sur l’exécution provisoire :

L’article 514 du code de procédure civile, dans sa version applicable au présent litige, pose la règle selon laquelle les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.

L’article 514-1 du même code prévoit que le juge peut écarter l’exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire.
Il statue, d’office ou à la demande d’une partie, par décision spécialement motivée.
Par exception, le juge ne peut écarter l’exécution provisoire de droit lorsqu’il statue en référé, qu’il prescrit des mesures provisoires pour le cours de l’instance, qu’il ordonne des mesures conservatoires ainsi que lorsqu’il accorde une provision au créancier en qualité de juge de la mise en état.

Dans la présente espèce, il n’est justifié d’aucun élément de nature à déroger au principe selon lequel les décisions de première instance sont exécutoires de droit à titre provisoire.
Il y a par conséquent lieu de dire que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

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