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La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE, opérant sous le nom commercial ECODIS, se spécialise dans les produits écologiques. Mme [L] [E]-[C], agent commercial depuis 2015, a signé un mandat avec cette société en novembre 2016 pour représenter ses produits au Luxembourg. À partir de 2019, des tensions sont apparues, Mme [E]-[C] accusant la société de ne pas respecter ses engagements, notamment en matière d’exclusivité et de paiement de commissions. En mars 2020, la société a contesté le statut d’agent commercial de Mme [E]-[C] et a exprimé son intention de mettre fin à leur collaboration. Après une notification de rupture de contrat par Mme [E]-[C] en octobre 2020, celle-ci a réclamé des paiements pour commissions et une indemnité de rupture, mais la société n’a pas répondu. En septembre 2021, Mme [E]-[C] a assigné la société en justice. Le tribunal a débouté Mme [E]-[C] de ses demandes en avril 2023, la condamnant à payer des frais à la société. Mme [E]-[C] a fait appel. Dans ses écritures, elle demande l’infirmation du jugement et des paiements pour commissions et indemnités. La société ECODIS demande la confirmation du jugement initial et le rejet des demandes de Mme [E]-[C]. La cour a confirmé certaines décisions tout en infirmant d’autres, condamnant la société à verser des sommes à Mme [E]-[C] pour des commissions et une indemnité de rupture, tout en rejetant d’autres demandes.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°368
N° RG 23/02578 – N° Portalis DBVL-V-B7H-TW5F
(Réf 1ère instance : 2021001477)
Mme [L] [E]-[C]
C/
S.A.S. SOCIETE DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me LHERMITTE
Me [Localité 2]
Copie délivrée le :
à :
TC [Localité 4]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Julie ROUET, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 01 Juillet 2024 devant Madame Fabienne CLEMENT, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Octobre 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
Madame [L] [E]-[C] – Agent commercial –
née le 07 Mars 1961 à [Localité 3]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Nicolas LITAIZE de la SCP JOFFROY-LITAIZE-LIPP, Plaidant, avocat au barreau de NANCY
INTIMÉE :
S.A.S. SOCIETE DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE (ECODIS), Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de VANNES sous le numéro 429 216 310, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 5]
[Adresse 5]
Représentée par Me Gwenaelle STEPHAN de la SELEURL CABINET STEPHAN, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
Représentée par Me Luc BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES
La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE, exerçant sous le nom commercial ECODIS est spécialisée dans la conception et la commercialisation de produits écologiques auprès de magasins spécialisés, sites marchands et artisans.
Mme [L] [E]-[C] exerce une activité d’agent commercial depuis 2015.
Mme [E]-[C] et la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE ont convenu en novembre 2016 de travailler ensemble aux fins de donner mandat à Mme [E]-[C] de présenter les produits ECODIS au Luxembourg.
A compter de 2019 les relations se sont tendues entre les partenaires, Mme [E]-[C] reprochant à la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE de ne pas respecter ses engagements concernant notamment son exclusivité, le retrait de clients de son portefeuille (OUNI, AUCHAN, et WISHBOX /HYLIGHTS) et des difficultés dans le réglement de ses commissions.
Elle en a informé la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE à plusieurs reprises en 2019 et 2020.
Le 24 mars 2020, en réponse la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE a fait valoir qu’elle agissait en qualité d’apporteur d’affaires et non d’agent commercial, qu’elle ne pouvait revendiquer aucune exclusivité sur ses clients historiques et que son travail était insuffisant. Elle lui signalait aussi qu’elle désirait mettre un terme à leur relations et qu’elle la reconctacterait à cette fin.
Le 10 octobre 2020 à la suite de plusieurs courriers restés sans réponse, Mme [E]-[C] a notifié à la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE la rupture des relations commerciales à l’issue d’un préavis de 3 mois à compter de la réception de la lettre.
Le 8 février 2021, le conseil de Mme [E]-[C] a mis en demeure la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE de régler à cette dernière :
– 755,45 euros HT au titre de commissions dues pour l’année 2019 ;
– 6.304,72 euros HT au titre de commissions dues pour l’année 2020 ;
– 10.807,38 euros HT au titre de l’indemnité de rupture.
La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE ne s’est pas exécutée.
Mme [E]-[C] a fait assigner la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE devant le tribunal de commerce de Vannes par acte du 14 septembre 2021 pour :
– Juger que la rupture du contrat d’agent commercial est du fait de la société de Distribution Ecologique de Bretagne ;
– Juger que les relations contractuelles ont pris fin le 15 janvier 2021 ;
– Condamner la société de Distribution Ecologique de Bretagne à lui verser une somme de 1.708,21 euros HT au titre d’un rappel de commissions pour l’année 2019 avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 février 2021 ;
– Condamner la société de Distribution Ecologique de Bretagne à lui verser une somme de 11.516,16 euros HT au titre de commissions dues pour l’année 2020 avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 février 2021 ;
– Condamner la société de Distribution Ecologique de Bretagne à lui verser une somme 16.921,16 euros au titre de l’indemnité de rupture avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 février 2021.
Elle sollicitait aussi une indemnité pour résistance abusive et au titre de l’article 700 du code d procédure civile
Par jugement en date du 7 avril 2023, le tribunal a :
– Débouté Madame [L] [E]-[C] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions, pour les causes sus-énoncées;
-Condamné Madame [L] [E]-[C] à payer à la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE, nom commercial ECODIS, la somme de 1.200,00 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
-Condamné Madame [L] [E]- [C] aux entiers dépens de l’instance;
– Débouté les parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions;
– Arrêté et liquidé les dépens à recouvrer par le Greffe à la somme de 60,22 euros TTC dont TVA 10,04 euros.
Mme [E]-[C] a fait appel du jugement le 28 avril 2023.
L’ordonnance de clôture est en date du 20 juin 2024.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses écritures notifiées le 25 juillet 2023 Mme [E]-[C] demande à la cour au visa des articles L.134-1 et L.134-2 du code de commerce, L.134-12 et L.134-13 du code de commerce de :
– Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Et statuant à nouveau :
– Juger que la rupture du contrat d’agent commercial liant la société de Distribution Ecologique de Bretagne à Madame [C] est du fait de la société de Distribution Ecologique de Bretagne, exerçant sous le nom commercial ;
– Juger que les relations contractuelles ont pris fin le 15 janvier 2021 ;
– Condamner la société de Distribution Ecologique de Bretagne à verser à Madame [C] une somme de 1.052,26 euros HT au titre d’un rappel de commissions pour l’année 2019 avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 février 2021 ;
– Condamner la société de Distribution Ecologique de Bretagne à verser à Madame [C] une somme de 2.268,69 euros HT au titre de commissions dues pour l’année 2020 avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 février 2021 ;
– Condamner la société de Distribution Ecologique de Bretagne à verser à Madame [C] une somme de 3.320,96 euros au titre de l’indemnité de rupture avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 février 2021 ;
– Condamner la société de Distribution Ecologique de Bretagne à verser à Madame [C] une somme de 3.000 euros pour résistance abusive ; –
– Condamner la société de Distribution Ecologique de Bretagne à verser à Madame [C] une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner la société de Distribution Ecologique de Bretagne aux entiers dépens de l’instance.
Dans ses écritures notifiées le 23 octobre 2023 la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE demande à la cour au visa des articles L.134-1 et suivants du code de commerce, de :
– Voir dire et juger la société ECODIS recevable et bien fondée en ses écritures,
Y faisant droit,
-Confirmer le Jugement du tribunal de commerce de Vannes du 07 avril 2023.
En conséquence,
-Débouter Madame [L] [E]- [C] de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions, et plus spécifiquement :
Débouter Madame [E]- [C] de sa demande d’indemnité de rupture au motif que le contrat a été rompu de son fait et en raison d’une faute grave de sa part ;
-Débouter Madame [E]- [C] de sa demande de rappel de commission pour l’année 2019.
A titre subsidiaire :
Si la cour venait à considérer que Madame [L] [E]- [C] est bien fondée à solliciter un rappel de commissions au titre de l’année 2019 pour les clients OUNI, AUCHAN et WISHBOX, en fixer le montant à 1.489 euros HT;
-Débouter Madame [E]- [C] de sa demande de rappel de commission pour l’année 2020.
A titre subsidiaire :
Si la cour venait à considérer que Madame [L] [E]- [C] est bien fondée à solliciter un rappel de commissions au titre de l’année 2020, en fixer le montant à 1.806 euros HT.
Dans tous les cas :
-Condamner Madame [L] [E]- [C] à payer à la société ECODIS une somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Condamner Madame [L] [E]- [C] aux entiers dépens.
Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.
Les relations entre les parties
Mme [E]-[C] et la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE reconnaissent que leurs relations n’ont pas abouti à la régularisation d’un contrat écrit.
Cette particularité ne fait pas obstacle à ce que Mme [E]-[C] puisse présenter les produits ECODIS en tant qu’agent commercial, l’existence d’un contrat écrit n’étant pas une condition de validité du contrat d’agent commercial.
Les contacts entre les parties à compter du mois de novembre 2016 confirment que Mme [E]-[C] travaillait pour la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE comme agent commercial et non comme apporteur d’affaires comme la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE l’affirmera par la suite dans son courrier du 24 mars 2020.
En effet après échanges sur les conditions d’intervention de Mme [E]-[C], M.[B] de la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE lui a fait parvenir le 9 décembre 2016 un projet de contrat d’agent commercial en lui précisant dans son mail de transmission :
Actuellement nous avons quelques clients en direct au Luxembourg qui ont été développés par nos soins, il va de soit qu’ils rentreront dans votre portefeuille client.
Quoiqu’il en soit comme je m’y étais engagé je vous confirme la commission de 8% rétroactive pour les clients suivants :
…
Le projet de contrat précise notamment que :
– l’agent commercial bénéficiera du droit exclusif d’assurer la représentation des produits du mandant au Luxembourg auprès de cette clientèle ;
– l’agent commercial percevra une commission mensuelle de 8 % du chiffre d’affaires encaissé HT.
Mme [E]-[C] n’ a pas signé le contrat qui lui était ainsi proposé.
Le projet ne comporte pas de clause spécifique concernant l’attribution à Mme [E]-[C] des clients historiques de la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE mais les CA 2018 transmis par la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE à Mme [E]-[C] reprennent les clients OUNI, AUCHAN,et WISHBOX /HYLIGHTS.
(pièce 6 [E]).
A ce sujet la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE a signalé à Mme [E]-[C] que les clients OUNI et HYLIGHTS ne commandent que des sacs en coton bio et que le client AUCHAN est un client à part puisqu’il ne lui ait pas proposé de produits catalogue mais des produits spécifiquement faits pour la GMS.
Mme [E]-[C] produit plusieurs documents qui attestent qu’elle a passé des commandes pour OUNI notamment.
Le fait qu’elle ait pu passer ces commandes n’implique pas qu’elle bénéficiait d’une exclusivité sur ce client.
Dans un mail du 23 janvier 2017 la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE indique que pour les anciens clients, Mullebutz, A La Vita, Ouni…, si cela permet de reprendre contact avec eux, ou de faire implanter de nouvelles références, il est évident que les commandes rentreront dans le calcul de la commission de Mme [E]-[C]. La société mandante indique que, TOUTEFOIS, mot en majuscules dans le texte, Mme [E]-[C] n’a toujours pas signé et renvoyé le contrat.
Il apparait ainsi que Mme [E]-[C] a toujours refusé de signer le contrat qui prévoyait une exclusivité pour le Luxembourg et que la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE conditionnait l’inclusion dans les commissions des anciens clients à la signature de ce contrat.
L’attribution de cette exclusivité ne résulte pas des échanges entre les parties, la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE ayant au contraire toujours insisté pour que le contrat soit signé, ce que Mme [E]-[C] a refusé.
Il résulte de courriels en date des 3 juillet 2017, 25 mai 2018 et 17 septembre 2019 que la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE a indiqué à certains clients qu’elle avait un agent commercial sur le Luxembourg, Mme [E]-[C], qui pouvait les renseigner. Ce courriel ne fait pas mention d’une exclusivité.
Il apparaît ainsi que s’il y a bien eu contrat d’agent commercial consensuel, ce contrat n’a pas été assorti d’une exclusivité. Mme [E]-[C] n’avait donc droit à commissions que sur les transactions qu’elle initiait et sur celles afférentes aux clients qu’elle avait apportés, et non pas sur toute les transactions sur un secteur donné.
L’exécution du mandat
L’évolution des relations entre les parties démontre que Mme [E]-[C] est à l’origine de la rupture des relations.
Par courriel en date du 22 novembre 2019, elle reproche à la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE :
– à partir du deuxième trimestre 2019, le retrait de clients de son portefeuille ce qui porte atteinte à son exclusivité ;
– la vente à un grossiste en Allemagne qui revend à certains de ses clients au Luxembourg et à une centrale d’achat en France, Naturalisa, qui les distribue au Luxembourg ce qui porte également atteinte à son exclusivité ;
– des difficultés pour obtenir son relevé de commissions à fin du trimestre.
Elle a renouvelé ses plaintes qui n’ont reçu de réponse de la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE que le 24 mars 2020.
Dans sa lettre du 10 octobre 2020, Mme [E] [C] reprend ces griefs :
J’assure depuis 2016 la représentation des produits du catalogue ECODIS au Luxembourg.
J’exerce cette activité dans le cadre d’un mandat d’agent commercial et bénéficie de l’exclusivité sur ce territoire.
Je rencontre depuis début 2019 de nombreuses difficultés m’empêchant d’exercer mon mandat dans des conditions normales.
En effet, je m’aperçois que, depuis fin 2019, vous ne répondez plus à aucun de mes courriers, ni mes courriels, qui concernent les clients et je ne reçois plus les accusés de réception des commandes des clients.
Ainsi, j’ai appris que vous les contactiez directement afin que les commandes soient directement échangées entre ECODIS et ses clients, comme PALL CENTER, NATURWELTEN, ALTERNATIVES’
Par ailleurs, plus aucune commission ne m’est versée concernant certains clients depuis janvier 2019, telles que les Sociétés OUNI, WISH BOX/HILIGHTS et AUCHAN.
J’ai également constaté qu’un grossiste allemand, que vous fournissez, revend à certains des clients de mon portefeuille des produits ECODIS à un tarif avantageux, NATURATA, ALAVITA.
De même, certains produits se retrouvant sur les étalages de deux magasins NATURALIA au Luxembourg proviennent de la centrale d’achat en France et donc sans passer par une commande qui m’est présentée.
Enfin, je n’ai plus reçu le moindre relevé de commissions pour l’année 2020 et ne suis donc plus payée.
Je vous ai régulièrement alerté, directement et par le biais de mon avocat, sur cette situation.
Aucune réponse ni règlement de votre part n’a été effectué.
La situation n’est plus tenable.
Je considère que le contrat d’agent commercial qui nous lie est rompu de votre fait.
La rupture prendra effet à l’issue d’un préavis de 3 mois à compter de la réception de la présente.
D’ici là, je vous demande de m’adresser :
– Copie des factures correspondant aux commandes des clients au Luxembourg.
ALAVITA – NATURATA – NATURWELTEN – OUNI – PALL CENTER – CENTRALE D’ACHAT DU PARLEMENT – LES ATELIERS DE CAROLINE – TESTY – LUXAROMES – EIS EPICERIE – ALTERNATIVES – EPICERIE AM DUERF
– Mes relevés de commissions des 3 premiers trimestres de l’année 2020.
A l’issue du préavis, j’établirai le montant de l’indemnité de rupture qui m’est due, conformément aux dispositions de l’article L.1134-12 du Code de Commerce, et qui ne pourra être inférieure à l’équivalent de deux années de commissions.
Par lettre du 24 mars 2020, la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE a indiqué qu’elle désirait mettre fin à sa relation et qu’elle contacterait Mme [C] à cette fin. Il n’est pas justifié que tel ait été le cas.
La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE ne démontre pas qu’elle aurait recontacté Mme [E]-[C] aux fins de définir les modalités de leur rupture et ainsi pris l’initiative de mettre fin définitivement aux relations commerciales.
Il est donc admis que la relation contractuelle s’est achevée le 15 janvier 2021 à la fin du préavis, à l’initiative de Mme [E]-[C].
Les manquements
L’article 134- 4 du code de commerce prévoit que l’agent commercial doit exécuter son mandat en bon professionnel ; le mandant doit mettre l’agent commercial en mesure d’exécuter son mandat.
L’article L 134-12 du code de commerce précise :
En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.
L’agent commercial perd le droit à réparation s’il n’a pas notifié au mandant, dans un délai d’un an à compter de la cessation du contrat, qu’il entend faire valoir ses droits.
Les ayants droit de l’agent commercial bénéficient également du droit à réparation lorsque la cessation du contrat est due au décès de l’agent.
L’article L 134-13 ajoute :
La réparation prévue à l’article L. 134-12 n’est pas due dans les cas suivants:
1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l’agent commercial ;
2° La cessation du contrat résulte de l’initiative de l’agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l’âge, l’infirmité ou la maladie de l’agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée;
3° Selon un accord avec le mandant, l’agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu’il détient en vertu du contrat d’agence.
Mme [E]-[C] fait valoir trois types de manquements dans l’exécution du contrat par la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE:
1) la vente directe à des grossistes et/ou à une centrale d’achat.
Comme il a été vu supra, aucune exclusivité n’a été consentie à Mme [E]-[C]. Les manquements allégués de la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE à ce titre sont donc infondés.
2) Le retrait des clients historiques
Mme [E]-[C] établit que la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE lui a retiré les clients OUNI, AUCHAN et WISHBOX / HILIGHTS en cours de mandat en méconnaissance des engagements de 2016.
En effet dans un mail du 21 mars 2019 la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE lui propose notamment de conclure un contrat formalisé ou de rester dans la relation actuelle mais que dans ces conditions elle tient à ce que les clients qui l’ont contactée directement et qui son gérés directement par ECODIS ne rentrent pas dans le calcul de ses commissions ; que sont ainsi concernés les comptes OUNI, AUCHAN et WISHBOX/ HILIGHTS ; qu’elle l’informera le cas échéant de tout autre client qu’elle sera amenée à gérer en direct.
Il résulte notamment d’une lettre de la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE en date du 24 mars 2020 que :
– si la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE a versé des commission à Mme [C] sur certains anciens clients, il s’agissait d’aider cette dernière dans le début de son activité et non pas de lui attribuer une exclusivité.
– La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE y réfute avoir été liée par un contrat d’exclusivité alors que Mme [C] a toujours refusé de signer le contrat qui lui avait été proposé.
– Elle y souligne que la société Ouni n’est pas un client apporté par Mme [C] :
Concernant les commission auprès de Ouni qui est un client historique de Ecodis (et non apporté par Mme [C])
Les commandes d’OUNI sur la fin 2019 portent sur des produits non présents sur les catalogues ECODIS. Il n’a jamais été question de rémunérer Madame [C] sur des produits hors catalogue (en l’occurrence des sacs imprimés).
Il en est de même pour AUCHAN qui est un client direct d’ECODIS et commande uniquement des sacs imprimés non présents au catalogue.
Quant à la société WISHBOX, nous n’avons pas enregistré de commandes depuis fin 2018
Comme il a été vu supra, aucune exclusivité n’a été accordée à Mme [E]-[C]. Il ne peut utilement être reproché à la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE de ne pas avoir respecté une exclusivité non établie.
3) Le règlement des commissions
La pièce 23 (ECODIS) établit que la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE n’ a communiqué que le 30 septembre 2022 après la résiliation des relations commerciales, ses CA 2019 et 2020 pour les clients de Mme [E]-[C].
Y figurent les clients OUNI, AUCHAN et WISHBOX/ HILIGHTS.
En l’absence d’exclusivité, Mme [E]-[C] n’avait droit à commission qu’aux transactions passées par son intermédiaire avant les clients préexistants à son arrivée.
Elle justifie avoir reçu rémunération au titre des commissions sur le chiffre d’affaire du client Ouni résultant de son intervention. Elle ne justifie pas que les autres transactions réalisées avec ce client résultent de son intervention. Elle n’avait donc pas droit à cette rémunération complémentaire.
De même, s’agissant de clients antérieurs, Mme [E]-[C] ne pouvait prétendre à commission auprès des clients Wish Box, Hilights et Auchan sauf à justifier être intervenue dans les transactions.
La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE a reconnu dans sa lettre du 24 mars 2020 que Mme [E]-[C] lui avait apporté quatre nouveaux clients, Ateliers Caroline, Boutique du Monde, Parlement Européen et Pall Center.
Elle avait donc droit à commission sur toutes les transactions passées avec ces quatre clients.
Mme [E]-[C] justifie de commandes passées par le client Ateliers de Caroline en octobre et décembre 2019.
Ces commandes n’apparaissent pas dans les comptes produits par la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE. Il en résulte qu’elle n’a pas présenté à l’agent commercial un état complet des transactions passées avec des clients qu’il avait apportés et au titre desquels elle avait droit à rémunération.
En outre, il sera vu infra que les commissions due pour l’année 2020 n’ont pas été intégralement payées.
Mme [E]- [C] démontre donc des circonstances imputables au mandant par suite desquelles la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée. En effet, l’absence de règlement de commissions en 2019 et 2020 imposés sans motifs légitimes par le mandant sont de nature à rompre la relation de confiance entre les partenaires.
La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE doit donc régler à Mme [E] [C] les commissions auxquelles elle a droit pour 2019 et 2020 et une indemnité de rupture.
Le jugement est infirmé de ce chef.
Les commissions
Comme signalé supra Mme [E]-[C] bénéficiait d’une exclusivité sur les clients historiques OUNI, AUCHAN, et WISHBOX /HYLIGHTS.
Les CA réalisés sur ces clients doivent donc rentrer dans le calcul des commissions.
1) Les commissions pour 2019
La tableau de l’expert comptable produit par la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE (pièce 23) mentionne les chiffres d’affaires suivants :
– OUNI : 7.572,62 euros
– AUCHAN Luxembourg (LIV QUAI SUD) : 9.600 euros
– WISHBOX : néant
– AUCHAN Luxembourg (DIFFERDANGE) : 1.440 euros.
Soit un total de 18.612,62 euros.
Sur ce montant, Mme [E]- [C] a été rétribuée des commissions sur le chiffre d’affaire OUNI pendant le premier trimestre 2019 à hauteur de 5.459,28 euros ( pièce 7).
A défaut d’exclusivité, et de justification d’autres intervention de Mme [E]-[C] auprès de ces clients, sa demande y afférente sera rejetée.
2) Les commissions 2020
Comme il a été vu supra, le contrat d’agent commercial n’a pris fin qu’après le 31 décembre 2020. Les rémunérations au titre de l’année entière sont dues.
L’attestation comptable communiquée pièce 23 fait apparaître un chiffre d’affaire global de 22.575,12 euros pour 2020. Il n’est pas justifié que cette somme corresponde à des clients anciens sur lesquels Mme n’aurait pas eu droit à commission.
Mme [E]-[C] établit que certains de ses clients n’apparaissant pas sur ce tableau (pièces 5 à 8 51 52 53 54) :
– LUXAROMES ;
– [O] [P] ;
– TESTY SARL ;
– LES ATELIERS DE CAROLINE.
Elle verse des factures :
– LUXAROMES : 961,45 euros (pièce 51)
– [O] [P] : 399,21 euros (pièce 52).
Elle communique aussi des commandes passées par la société TEISTY pour des montants respectifs de :
– 772,09 euros (pièce 53)
– 1.350,82 euros (pièce 54)
Ces éléments portent le chiffre d’affaire 2020 à 26.058,69 euros.
Mme [E]- [C] considère qu’il ne reflète pas l’activité réelle et à ce titre sollicite que soit ajoutés à titre forfaitaire, les montants complémentaires suivants :
– 1.000 euros pour une commande LUXAROMES de janvier 2020 (pièce 55),
– 1.300 euros pour LES ATELIERS DE CAROLINE, évalué sur la base des commandes passées par ce client en 2019 (pièce 9).
Portant ainsi le chiffre d’affaires 2020 à : 28.358,69 euros
Il appartient au mandant de fournir à son agent tous les éléments comptables de nature à lui permettre le calcul de ses commissions.
La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE ne s’est pas conformée à cette obligation.
La pièce 55 destinée à établir la commande LUXAROMES de janvier 2020 ne permet pas de justifier l’attribution d’une somme forfaitaire de 1000 euros à ce titre puisqu’il ne s’agit que d’une fiche dont l’origine reste méconnue.
La pièce 9 est un mail tronqué.
En revanche il ressort de la pièce 8 et notamment des tableaux de commissions transmis par la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE à Mme [E]-[C] qu’en 2019 elle a touché la somme de 1292,54 euros à titre de commissions pour les commandes LES ATELIERS DE CAROLINE.
Mme [E]-[C] rappelle que le contexte COVID a fait baisser les ventes.
Il est donc justifié de lui accorder à ce titre un montant évalué à 600 euros et non à 1 300 euros.
Ces éléments portent le chiffre d’affaire 2020 à 26.658,69 euros HT.
Les commissions 2020 sont donc évaluées à hauteur de 8 % de 26.658,69 euros soit 2 133 euros HT.
La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE est donc condamnée à verser à Mme [E]-[C] la somme de 2 133 euros HT au titre des commissions 2020.
L’indemnité de rupture
Au vu des commissions dont a bénéficié Mme [E]-[C] dans la période antérieure à la rupture, il y a lieu de lui accorder la somme de 3.000 euros au titre de son indemnité de rupture, somme à laquelle la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE est condamnée.
La résistance abusive
La résistance abusive se définit par la contrainte pour une partie d’intenter une action en justice pour parvenir à ses fins.
Elle ne se traduit pas par une simple résistance.
Il résulte de l’article 1240 du code civil que l’octroi de dommages et intérêts sur le fondement de la résistance abusive et injustifiée suppose que soient caractérisés l’existence d’un abus dans l’exercice du droit de résister ainsi qu’un préjudice subi en conséquence de cet abus.
En l’espèce, Mme [E]- [C] ne démontre pas l’abus de la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE.
Sa demande est rejetée
Le jugement est confirmé de ce chef.
Les demandes annexes
Il n’est pas inéquitable de condamner la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE à payer à Mme [E]-[C] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE est condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
La cour,
Confirme le jugement en ce qu’il a débouté Mme [E]-[C] de sa demande au titre de la résistance abusive.
Infirme le jugement pour le surplus.
Statuant à nouveau
– Rejette la demande de Mme [E] [C] de condamnation de la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE au titre d’un rappel de commissions pour l’année 2019,
– Condamne la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE à verser à Mme [E]-[C] la somme de 2 133 euros HT au titre de commissions dues pour l’année 2020 avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 février 2021 ;
– Condamne la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE à verser à Mme [E]- [C] la somme de 3.000 euros au titre de l’indemnité de rupture avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 février 2021 ;
– Condamne la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE à verser à Mme [E]-[C] une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamne la société DE DISTRIBUTION ECOLOGIQUE DE BRETAGNE aux dépens de première instance et d’appel ;
– Rejette les autres demande des parties.
LE GREFFIER LE PRESIDENT