Conflit autour d’un contrat de prêt et de la saisie immobilière : enjeux de validité et de créance

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Conflit autour d’un contrat de prêt et de la saisie immobilière : enjeux de validité et de créance

Le 21 septembre 2006, les époux [K] ont contracté un prêt de 760 000 euros avec la banque Landsbanki, garantissant leur bien immobilier et un portefeuille de titres. En raison d’une insuffisance du ratio de gagerie, la banque a exigé le remboursement de 813 588 euros en novembre 2009. Après la liquidation de la banque en décembre 2008, un jugement de 2016 a condamné les époux à rembourser 953 359,79 euros, jugement qui est devenu définitif. En mai 2023, la banque a engagé une saisie immobilière sur des biens des époux, suivie d’une assignation devant le juge de l’exécution. La banque a demandé la validation de la saisie et le paiement de la créance, tandis que les époux contestaient la validité de la saisie et la créance, invoquant des irrégularités et des clauses abusives. Le juge a prononcé la nullité du commandement de saisie, ordonné la mainlevée et condamné la banque à payer des frais, tout en rejetant les demandes de dommages et intérêts des époux.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Nanterre
RG
23/00116
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE

SAISIES IMMOBILIÈRES

JUGEMENT DU 17 OCTOBRE 2024

N° RG 23/00116 – N° Portalis DB3R-W-B7H-YRMX

AFFAIRE

S.A. LANDSBANKI [Localité 8] représentée par Maître [U] [Z], liquidateur judiciaire

C/

[V] [E] [H] [C] épouse [K], [P] [L] [K]

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Géraldine MARMORAT, Juge, statuant en tant que juge de l’exécution, assistée de Jessica ALBERT, Greffier.

CREANCIER POURSUIVANT :

S.A. LANDSBANKI [Localité 8]
représentée par Maître [U] [Z], liquidateur judiciaire
[Adresse 2]
[Localité 8]

représentée par Maître Séverine RICATEAU de la SELARL SLRD AVOCATS, avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 782

DEFENDEURS :

Madame [V] [E] [H] [C] épouse [K]
née le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 11]
[Adresse 6]
[Localité 13]

Monsieur [P] [L] [K]
né le [Date naissance 3] 1950 à [Localité 12]
[Adresse 6]
[Localité 13]

comparants en personne et assistés par Maître Aurélia CORDANI de la SCP TOULLEC CORDANI, avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : NAN391

DÉBATS :

L’affaire a été débattue le 16 mai 2024 en audience publique.

JUGEMENT

rendu par décision contradictoire, en premier ressort, par mise à disposition au greffe du tribunal au 18 juillet 2024, prorogé 5 septembre, 19 septembre puis 17 octobre 2024.

EXPOSE DU LITIGE

Le 21 septembre 2006, Madame [V] [C] épouse [K] et monsieur [P] [K] (ci-après les époux [K]) ont conclu avec la banque Landsbanki [Localité 8] un contrat de prêt « Equity release » remboursable sur 20 ans pour un montant de 760 000 euros représentant la valeur de leur bien immobilier sis à [Localité 13] (Hauts-de-Seine).

Par acte du 21 septembre 2006, ils ont conclu avec la banque un contrat de gage portant sur un portefeuille de titre acquis avec une partie des fonds prêtés. Le bien immobilier a été affecté en garantie hypothécaire par acte notarié du 11 octobre 2006, reçu maître [A], notaire à [Localité 9] (Oise).

Le contrat prévoyait que dans le cas où la valeur des biens donnés en garantie à la banque deviendrait inférieure à 90% des sommes totales dues par l’emprunteur, la banque avait la possibilité d’exiger de son client qu’il rétablisse un taux de couverture supérieur à 100%, réclamer le remboursement immédiat du prêt ou liquider la garantie et en utiliser le produit pour rembourser le prêt.

Par jugement du 8 octobre 2008, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg a admis au bénéfice de la procédure de sursis de paiement, pour une durée maximale de six mois, l’établissement de crédit LANDSBANKI [Localité 8].

Par jugement du 12 décembre 2008, le tribunal de Luxembourg a prononcé la dissolution et la liquidation de la Banque LANSBANKI [Localité 8].

Par courrier du 19 novembre 2009, la banque a mis en demeure les époux [K] de rembourser la somme de 813 588 euros au motif d’une déchéance du terme pour insuffisance du ratio de gagerie, calculé par la banque à hauteur de 56%.

Par courrier du 7 janvier 2010, la banque a informé les époux [K] de la réalisation de son gage sur le portefeuille d’investissements, vendu pour 129 224,78 euros, portant le solde dû à la somme de 684 925,80 euros (équivalent à la somme CHF 1.018.995,24) .

Par jugement du 1er juin 2016, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg a notamment condamné [P] [K] et [V] [C] épouse [K] solidairement à payer à la SA LANDSBANKI [Localité 8], en liquidation la somme de 953.359,79 euros avec les intérêts conventionnels à partir du 30 septembre 2015 jusqu’à solde.

Les époux [K] n’ont pas interjeté appel, rendant ce jugement définitif par certificat de non appel délivré le 9 décembre 2016.

Selon certificat de l’article 53 du règlement UE n°1215/2012 en date du 5 juillet 2018 et signifié le 21 décembre 2018, le greffier en chef tribunal d’arrondissement du Luxembourg a certifié le caractère exécutoire de la décision du tribunal d’arrondissement du 1er juin 2016 signifié le 27 septembre 2016.

Suivant commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 22 mai 2023 et publié le 28 juin 2023 au Service de la Publicité Foncière de [Localité 14] 2ème Bureau volume 2023 S n° 41, la société LANDSBANKI [Localité 8], représentée par son liquidateur judiciaire, Maître [U] [Z] a fait saisir divers biens et droits immobiliers appartenant à Monsieur [P] [K] et Madame [V] [C], épouse [K], situés dans un ensemble immobilier état futur d’achèvement sis à [Localité 13], 77 et [Adresse 7], cadastrés AO n° [Cadastre 4] pour une surface de 29a 30ca et section AO n°[Cadastre 5], lot de volume 105 pour 41a 26ca, en l’espèce les lots n°1117, lot n°1126, lot n°1239 et lot n°1240, plus amplement désignés dans le cahier des conditions de vente déposé au Greffe.

Par acte de commissaire de justice du 25 août 2023, la société LANDSBANKI [Localité 8], représentée par son liquidateur judiciaire, Maître [U] [Z], créancier poursuivant a fait assigner monsieur [P] [K] et madame [V] [C] à comparaître devant le juge de l’exécution de Nanterre à l’audience d’orientation du 5 octobre 2023.

Le cahier des conditions de vente a été déposé au Greffe du juge de l’exécution de Nanterre le 29 août 2023.

Après plusieurs renvois pour permettre aux parties de se mettre en état, l’affaire a été retenue à l’audience d’orientation du 16 mai 2024.

Aux termes de ses écritures de défense n°4, la société LANDSBANKI [Localité 8] représentée par son liquidateur, maître [U] [Z], créancier poursuivant, représenté par son conseil demande au juge de l’exécution de :
juger irrecevables et mal fondée Monsieur et Madame [K] en l’intégralité de leurs demandes, fins et prétentions,constater la validité de la présente saisie immobilière en contemplation des textes applicables,fixer le montant retenu pour la créance du poursuivant, en principal et intérêts de 1.290.034,99 euros, au 15 mars 2023, outre les intérêts de retard sur la somme principale de 953.359,79 euros à un taux de 1,75% par an, en plus de l’EURIBOR 3 mois, majoré de 3 points pour de non-paiement, à compter du 16 mars 2023 jusqu’à parfait paiement,fixer la date à laquelle il sera procédé à l’adjudication,dire que la publicité de la vente sera faite dans les conditions prévues aux articles R 322-31 à R 322-36 du code des procédures civiles d’exécution,désigner tel commissaire de justice qu’il vous plaira commettre pour procéder à la visite dans la quinzaine précédent la vente, soit la SARL [R]-[J]-[O]-[G]-[W], commissaire de justice associés à [Localité 10], pendant une durée d’une heure,faire actualiser si nécessaire par un technicien de son choix les diagnostics techniques prévus à l’article L 271-4 du code de la construction et de l’habitation (plomb, amiante, termites, installation intérieure de gaz naturel, risques naturels et technologiques, performance énergétique, installation intérieure d’électricité) et se renseigner sur l’identité du Syndic,dire que l’huissier commis pourra, si besoin est, se faire assister d’un serrurier, du commissaire de police ou de son représentant, ou du commandant de la brigade de gendarmerie compétente, et à défaut de deux témoins majeurs conformément aux articles L142-1 et L142-2 du code des procédures civiles d’exécution,faire vérifier l’état d’occupation des biens immobiliers saisis,dire que les frais et honoraires du commissaire de justice désignés et des techniciens choisis feront partie des frais ordinaires de poursuite qui seront taxés par le juge et payés par privilège en sus du prix.
A titre subsidiaire, si la vente amiable venait à être autorisée à la demande du débiteur,
Fixer eu égard aux conditions économiques du marché, le montant du prix en deçà duquel l’immeuble ne pourra être vendu, fixer la date de l’audience à laquelle l’affaire sera rappelée, dans un délai qui ne pourra excéder quatre mois,Rappeler que le débiteur devra accomplir les diligences nécessaires à la conclusion de la vente amiable et devra rendre compte au créancier poursuivant, sur sa demande, des démarches accomplies à cette fin,Dire que le prix de vente de l’immeuble ainsi que toutes sommes acquittées par l’acquéreur à quelque titre que ce soit seront consignés entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations,En tout état de cause :
Condamner Monsieur et Madame [K] à payer à la LANDSBANKI [Localité 8] la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,Taxer les frais de poursuite tels qu’ils seront indiqués et justifiés lors de l’audience d’orientation par le créancier poursuivant en application de l’arrêté du 28 février 2020 et notamment de l’article A 444-191 V du code de commerce, et dire qu’ils seront versés directement, avec les émoluments de vente dus à l’avocat poursuivant, par l’acquéreur en sus du prix de vente,Dire que les dépens seront pris en frais privilégiés de vente.
Au soutien de ses prétentions, la société LANDSBANKI [Localité 8] fait essentiellement valoir que la nullité de l’acte n’est pas encourue puisque le décompte est régulier et intègre les intérêts aux sommes dont ils sont redevables selon le jugement luxembourgeois du 1er juin 2016, soit la somme de 1.290.034.99 euros au 15 mars 2023. Elle relève que le taux des intérêts moratoires n’est pas précisé puisqu’aucun intérêt moratoire n’a été ajouté.
Elle ajoute que les consorts [K] ne démontrent pas le grief qu’ils allèguent, s’agissant d’une nullité relative et alors même qu’ils sont redevables de cette dette depuis quatorze ans.

La banque affirme que les titres exécutoires en vertu desquels elle fonde la présente procédure sont bien exécutoires, puisque selon la clause attributive de compétence insérée dans le contrat la juridiction luxembourgeois était compétente à statuer sur leur litige, et que cette décision a été rendu exécutoire sur le territoire français ; ajoutant qu’il a été jugé qu’un acte d’affectation hypothécaire vaut titre exécutoire autorisant la mise en œuvre d’une procédure de saisie immobilière et que l’acte sous seing privé réitéré devant le notaire mentionne bien les éléments d’un acte notarié et est revêtu de la formule exécutoire constituant de ce fait un titre exécutoire régulier.

La société LANDSBANKI [Localité 8] indique que seules les juridictions luxembourgeoises sont compétentes pour qualifier les clauses du contrat de prêt et en tirer les éventuelles conséquences et qu’étant en liquidation judiciaire les demandes ayant des conséquences patrimoniales sont irrecevables, précisant que des jurisprudences ont retenu en ce sens que les demandes de nullité des conventions de prêt, de gage et d’affectation hypothécaire ainsi que de dommages et intérêts dont la cause est antérieure à la liquidation judiciaire sont rejetées affectant le patrimoine de la banque.

La banque ajoute que le délai de prescription de droit commun pour la nullité d’un contrat est de cinq ans et que dès lors que les époux [K] ont saisi le juge de l’exécution en 2023 tandis que le contrat a été conclu en 2004, la demande en nullité est irrecevable étant prescrite.
Concernant l’allégation de clauses abusives dans le contrat, la banque rappelle que le droit français et notamment le code de la consommation n’est pas ici applicable conformément aux stipulations du contrat qui est soumis au droit luxembourgeois, comme cela a déjà été jugé. Elle indique que conformément à ce qui a déjà été retenu par la jurisprudence, la banque a donné des informations suffisamment claires aux clients et qu’ils ont accepté de contracter malgré la mise en garde des époux [K] sur les risques encourus.

En outre, la société LANDSBANKI [Localité 8] affirme que la banque a reçu l’habilitation afin d’agir en qualité de prestataire de service d’investissement, comme l’a admis la jurisprudence et qu’elle n’a pas agi en fraude dans la gestion du portefeuille de nature à engager sa responsabilité.
Sur le défaut d’exigibilité et de liquidité de la créance, elle précise que le décompte prend en compte la dette qui résulte du jugement définitif et exécutoire du Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, qui a déjà discuté le quantum sur la base d’un décompte vérifiable.
Enfin, pour s’opposer à la demande de vente amiable la banque met en exergue que les débiteurs ne produisent pas d’estimation récente du bien, ni de mandat de vente conclu avec une agence immobilière, ni compromis de vente ou offre d’achat, de sorte qu’ils ne remplissent pas les conditions pour leur accorder la vente amiable.

Aux termes de leurs dernières écritures en défense n°4 signifiées par voie électronique le 7 mai 2024, Monsieur et Madame [K] représentés par leur avocat, demandent au juge de l’exécution de :
Annuler la procédure de saisie immobilièreJuger que la banque LANDSBANKI [Localité 8] SA, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, ne justifie pas d’un titre exécutoire, constatant une créance certaine, liquide et exigible à l’encontre de Monsieur et Madame COUDERTJuger que la banque LANDSBANKI [Localité 8] SA, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, ne dispose pas d’une créance certaine, liquide et exigible à l’encontre de Monsieur et Madame COUDERTJuger que la banque LANDSBANKI SA, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, ne pouvait pas faire souscrire les époux [K] au montage equity release, à défaut d’agrément comme prestataire de service d’investissement, ne pouvant pas détenir ou gérer pour ses clients de compte-titres, et que ledit montage equity release est frauduleuxRéputer non écrites, en tant que clauses abusives, les clauses des articles 3, 9, 11 et 21 du contrat de prêtJuger inexistant le contrat de prêt dans la mesure où les clauses réputées non écrites constituent l’objet principal du contratCondamner la société LANDSBANKI [Localité 8] SA en liquidation, prise en la personne de Me [Z] à verser à Monsieur et Madame [K] la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour saisie abusive ;A titre très subsidiaire
Juger que la dette de Monsieur et Madame [K] ne saurait excéder la somme effectivement libérée de 181.989 eurosA titre infiniment subsidiaire
Autoriser la vente amiable des immeubles dont s’agit et fixer une mise à prix qui ne saurait être inférieure à 650.000 eurosEn tout état de cause
Condamner la société LANDSBANKI [Localité 8] SA en liquidation, prise en la personne de Me [Z] à verser à Monsieur et Madame [K] la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Au soutien de leurs prétentions, Monsieur et Madame [K] soulèvent l’irrégularité des mentions obligatoires contenues dans le commandement du 22 mai 2023, leur causant un grief entraînant la nullité du commandement. Ils font ensuite valoir que le titre et la créance alléguée sont viciés, ce qui entraine de ce fait la nullité de la saisie, considérant que le commandement insère un décompte irrégulier, et que les titres exécutoires dont se prévaut le demandeur, doivent être écartés puisque l’acte notarié constitue une simple affectation hypothécaire et non une réitération authentique du prêt lui faisant grief, et que le jugement n’est pas exécutoire en France.
Ils soutiennent que la créance perd son caractère certain étant entaché d’une fraude en raison du fait que la banque n’avait pas les agréments nécessaires pour proposer le produit « equity release », mais aussi puisque le produit « equity release » contient des clauses abusives qui doivent être réputées non écrites.
Les époux [K] contestent l’exigibilité et la liquidité de la dette pour irrégularité de la déchéance du terme, pour défaut d’exigibilité et de proportionnalité de la clause de déchéance du terme, rendant la déchéance du terme abusive et inefficace, et en raison de la contrariété des décomptes et l’absence de justificatifs permettant de vérifier le montant de la dette. Ils soulignent la mauvaise foi de la banque.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il sera renvoyé aux conclusions des parties en application de l’article 455 du code de procédure civile.

L’affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 18 juillet 2024, prorogé en dernier lieu au 17 octobre 2024.

Les parties ayant régulièrement constitué avocat, le présent jugement, rendu en premier ressort, sera contradictoire en application de l’article 467 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Conformément à l’article R 322-15 du code des procédures civiles d’exécution, à l’audience d’orientation, le juge de l’exécution, après avoir entendu les parties présentes ou représentées, vérifie que les conditions des articles L 311-2, L 311-4 et L 311-6 sont réunies, statue sur les éventuelles contestations et demandes incidentes et détermine les modalités de poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée. Lorsqu’il autorise la vente amiable, le juge s’assure qu’elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.

Et, en application de l’article R 322-18 du code des procédures civiles d’exécution, le jugement d’orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires.

Sur la demande de nullité du commandement de payer valant saisie
L’article 114 du code précité dispose qu’aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi. La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
Selon les dispositions de l’article R 321-3 3°du code des procédures civiles d’exécution, le commandement de payer valant saisie comporte le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux des intérêts moratoires.
Son dernier alinéa dispose que ces mentions sont prescrites à peine de nullité. Toutefois, la nullité n’est pas encourue au motif que les sommes réclamées sont supérieures à celles dues au créancier.
Il est admis que l’indication du taux d’intérêt moratoire est une mention essentielle.
En l’espèce, le commandement de payer valant saisie mentionne qu’il est fait commandement à monsieur et madame [K] de payer la somme totale sauf MEMOIRE au 15 mars 2023 de 1.290.034,99 euros, en principal et intérêts outre le coût des présentes, sans préjudice de tous autres dus, intérêts et frais pour mémoire, somme décomposée comme suit :

– Principal : 953.359,80 €
Intérêts au taux conventionnel 108.936,37 €Intérêts majorés 227.738,82 €Intérêts postérieurs MEMOIRE
Si le montant des intérêts est énoncé, le mode de calcul des intérêts n’est pas précisé, aucun taux n’est mentionné ; de telle sorte que c’est à tort que le banque se borne à soutenir que les calculs n’ont pas à être détaillés renvoyant aux clauses du contrat, connues des défendeurs.
Or, aucun renvoi audit contrat ou élément ne figure au commandement pour permettre de reconstituer le calcul des intérêts.
Il est constant qu’aucun décompte détaillé n’est annexé au commandement (pièce respective 12 et 15)et ne permet d’identifier le montant du capital restant du au jour de la déchéance du terme et les éventuels règlements postérieurs, de sorte que les époux [K] ne se trouvaient pas en mesure d’apprécier de façon précise les modalités de calcul de leur dette ; ce qui leur cause un grief.
Par conséquent, la nullité du commandement de payer valant saisie doit être prononcée et la procédure annulée.
Sur la demande de dommages et intérêts pour saisie abusive
Aux termes de l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire, le juge de l’exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire. Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en oeuvre.
Le juge de l’exécution connaît, sous la même réserve, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s’élèvent à l’occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s’y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découle.
Il connaît, sous la même réserve, des demandes en réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageables des mesures d’exécution forcée ou des mesures conservatoires.
Le juge de l’exécution exerce également les compétences particulières qui lui sont dévolues par le code des procédures civiles d’exécution.
L’article L. 121-2 du code des procédures civiles d’exécution donne au juge de l’exécution la possibilité d’ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages et intérêts en cas d’abus de saisie.
En l’espèce, sans visa de texte, il est sollicité la condamnation des défendeurs de la banque à payer aux époux [K] la somme de 100 000 euros pour procédure abusive.
Ils font valoir leur préjudice tiré du mensonge de la banque et de ses agissements fautifs pour prétendre leur extorquer l’exécution d’une prétendue créance.
En l’absence de tout syllogisme et de démonstration d’un préjudice justifiant l’octroi de dommages et intérêts, la demande sera rejetée.
Sur les mesures accessoires
La société Landsbanki [Localité 8], représentée par son liquidateur judiciaire, Maître [U] [Z] succombant, sera condamnée aux dépens; sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
Compte tenu de l’issue du litige, il apparaît inéquitable de laisser à la charge des époux [K] les frais irrépétibles engagés, la SA LANDSBANKI prise en la personne de son liquidateur judiciaire, Maître [U] [Z] sera condamnée à leur régler la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS
Le juge de l’exécution, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
PRONONCE la nullité du commandement de payer valant saisie du 22 mai 2023,
ORDONNE la mainlevée et la radiation aux frais de maître [U] [Z] en qualité de liquidateur de la société Landsbanki [Localité 8], du commandement de payer valant saisie immobilière du 22 mai 2023 publié le 28 juin 2023 au Service de la Publicité Foncière de [Localité 14] 2ème Bureau volume 2023 S n° 41
DIT que monsieur le Conservateur des hypothèques procédera à la publication du jugement en marge du commandement,
REJETTE la demande de dommages et intérêts de madame et monsieur [K] ;
REJETTE les demandes plus amples ou contraires des parties
CONDAMNE monsieur en qualité de liquidateur de la société Landsbanki prise en la personne de son liquidateur judiciaire, Maître [U] [Z] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE la société Landsbanki [Localité 8] prise en la personne de son liquidateur judiciaire, Maître [U] [Z] au paiement des entiers dépens ;

Ainsi jugé et prononcé le 17 Octobre 2024
Et ont signé.

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION

copie à :
Maître Séverine RICATEAU CE TOQUE
Maître Aurélia CORDANI CE TOQUE HYPO


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