Conflit autour des droits à la couverture maladie et des pénalités financières : enjeux de résidence et de ressources

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Conflit autour des droits à la couverture maladie et des pénalités financières : enjeux de résidence et de ressources

Demande de CMU-C

Le 16 mai 2019, Madame [C] [N] épouse [M] a sollicité la Couverture Maladie Universelle Complémentaire (CMU-C) pour un foyer de cinq personnes. La Complémentaire Santé Solidaire lui a été accordée pour la période du 1er août 2019 au 31 juillet 2020.

Contrôle et notification des griefs

Un contrôle des ressources a révélé un écart entre les ressources déclarées et celles réellement perçues entre le 1er mai 2018 et le 30 avril 2019. En conséquence, la Caisse a notifié des griefs à Madame [C] [N] le 7 août 2020.

Pénalités et indu

Le 18 décembre 2020, la CPAM du Rhône a infligé une pénalité de 1.200 euros. De plus, un indu de 789,92 euros a été notifié le 22 septembre 2020, suivi d’une mise en demeure le 19 janvier 2021 et d’une contrainte signifiée le 7 juin 2021.

Affiliation à la PUMA

Madame [C] [N] épouse [M] était également affiliée à la Protection Universelle Maladie (PUMA). Elle a reçu une notification de griefs le 31 août 2020 pour fausses déclarations de ressources, entraînant un retrait de ses droits à la PUMA le 15 octobre 2020. Une pénalité de 1.000 euros a été notifiée le 27 novembre 2020.

Recours devant la Commission de Recours Amiable

Le 26 avril 2023, Madame [C] [N] épouse [M] a contesté l’indu, le retrait des droits à la PUMA et les pénalités financières devant la Commission de Recours Amiable, qui a rejeté son recours le 2 août 2023.

Saisine du Tribunal Judiciaire

Par requête du 24 août 2023, Madame [C] [N] épouse [M] a saisi le Pôle social du Tribunal Judiciaire de Lyon. L’audience a eu lieu le 12 septembre 2024, où elle a été représentée par son avocat.

Demandes de la requérante

Elle a demandé l’annulation des décisions de la CPAM, le rétablissement de ses droits, le remboursement de sommes saisies, ainsi que des indemnités pour frais. Elle a contesté le bien-fondé des décisions, arguant qu’elle remplissait les conditions de ressources et de résidence.

Position de la CPAM

La CPAM a demandé la confirmation des décisions contestées, arguant que Madame [C] [N] épouse [M] n’avait pas respecté les délais pour contester l’indu et le retrait des droits. Elle a également demandé la condamnation de Madame [C] au paiement des sommes dues.

Jugement du Tribunal

Le tribunal a déclaré le recours de Madame [C] [N] irrecevable concernant l’indu et le retrait des droits. Il a validé la contrainte pour un montant de 789,92 euros et confirmé la pénalité de 1.200 euros pour fausse déclaration de ressources, tout en annulant la pénalité de 1.000 euros pour non-respect de la procédure.

Décisions finales

Le tribunal a condamné la CPAM aux dépens et a rappelé que la décision était exécutoire de droit à titre provisoire. L’appel est possible dans un délai d’un mois suivant la notification du jugement.

Quelles sont les conditions de contestation d’un indu de prestations sociales ?

La contestation d’un indu de prestations sociales est régie par plusieurs dispositions législatives. Selon l’article L. 133-9-2 du Code de la sécurité sociale, l’action en recouvrement de prestations indues s’ouvre par l’envoi d’une notification au débiteur, précisant le motif, la nature et le montant des sommes réclamées.

Cette notification doit également mentionner un délai de deux mois pour contester le montant réclamé.

En cas de non-paiement, une mise en demeure est adressée, suivie d’une contrainte si le débiteur ne s’exécute pas. L’article R. 133-3 précise que l’opposition à la contrainte doit être formée dans un délai de quinze jours à compter de sa signification.

Dans le cas de Madame [C] [N] épouse [M], il a été constaté qu’elle n’a pas formé opposition à la contrainte dans le délai imparti, ce qui rend sa contestation irrecevable.

Quels sont les recours possibles contre un retrait de droits à la CMU-C ?

Le recours contre un retrait de droits à la Couverture Maladie Universelle Complémentaire (CMU-C) doit suivre une procédure spécifique. Selon l’article L. 142-4 du Code de la sécurité sociale, tout recours contentieux doit être précédé d’un recours préalable devant la Commission de Recours Amiable (CRA).

L’article R. 142-1 précise que les réclamations doivent être formées dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision contestée.

Dans le cas de Madame [C] [N] épouse [M], il a été établi qu’elle n’a pas effectué de recours préalable dans le délai imparti, rendant ainsi sa contestation du retrait de droits irrecevable.

Quelles sont les conditions de légalité des pénalités financières infligées par la CPAM ?

Les pénalités financières infligées par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) doivent respecter certaines conditions de légalité. Selon l’article R. 147-6 du Code de la sécurité sociale, des pénalités peuvent être appliquées en cas de fausses déclarations relatives aux ressources ou à la résidence.

L’article R. 147-6-1 précise que la pénalité doit être proportionnée à la gravité des faits reprochés. De plus, l’article L. 114-17-1 stipule que la pénalité doit être prononcée après avis de la commission des pénalités de l’organisme.

Dans le cas de Madame [C] [N] épouse [M], la pénalité de 1.200 euros pour fausse déclaration de ressources a été jugée légale, car la procédure a été respectée. En revanche, la pénalité de 1.000 euros pour fausse déclaration d’adresse a été annulée en raison du non-respect de la procédure.

Quels sont les effets d’une contrainte signifiée par la CPAM ?

La contrainte signifiée par la CPAM a des effets juridiques importants. Selon l’article R. 133-3 du Code de la sécurité sociale, à défaut d’opposition dans le délai imparti, la contrainte acquiert tous les effets d’un jugement.

Cela signifie que le débiteur ne peut plus contester le bien-fondé de la créance après l’expiration du délai d’opposition. Dans le cas de Madame [C] [N] épouse [M], la contrainte signifiée a été validée, car elle n’a pas formé d’opposition dans le délai de quinze jours.

Quelles sont les conséquences d’une fausse déclaration sur les droits à la CMU-C et à la PUMA ?

Les fausses déclarations peuvent entraîner des conséquences graves sur les droits à la CMU-C et à la Protection Universelle Maladie (PUMA). Selon l’article R. 147-6 du Code de la sécurité sociale, des pénalités peuvent être infligées en cas de fausses déclarations relatives aux ressources ou à la résidence.

En cas de constatation de fraude, comme le stipule l’article R. 147-11, des sanctions plus sévères peuvent être appliquées. Dans le cas de Madame [C] [N] épouse [M], des pénalités ont été infligées pour fausses déclarations, entraînant la perte de ses droits à la CMU-C et à la PUMA.


 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

14 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Lyon
RG
23/02650
MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL – CONTENTIEUX DE L’ADMISSION A L’AIDE SOCIALE

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :
ASSESSEURS :

DÉBATS :

PRONONCE :

AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :

14 Novembre 2024

Justine AUBRIOT, présidente
Alain MARQUETTY, assesseur collège employeur
Claude NOEL, assesseur collège salarié

assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Doriane SWIERC, greffiere

tenus en audience publique le 12 Septembre 2024

jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 14 Novembre 2024 par le même magistrat

Madame [C] [N] épouse [M] C/ CPAM DU RHONE

N° RG 23/02650 – N° Portalis DB2H-W-B7H-YRHT

DEMANDERESSE

Madame [C] [N] épouse [M]
née le 13 Janvier 1969 à [Localité 3],
demeurant [Adresse 1]
(bénéficie d’une AJ Totale numéro 69383-2023-005235 du 03/08/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LYON)
représentée par Me Alexis DOSMAS, avocat au barreau de LYON,

DÉFENDERESSE

CPAM DU RHONE, dont le siège social est sis [Adresse 4]
comparante en la personne de Mme [X] munie d’un pouvoir spécial
Notification le :

Une copie certifiée conforme à :

[C] [N] épouse [M]
CPAM DU RHONE
Me Alexis DOSMAS, toque 2509
Une copie revêtue de la formule exécutoire :

CPAM DU RHONE
Une copie certifiée conforme au dossier

RAPPEL DE LA PROCÉDURE

Le 16/05/2019, Madame [C] [N] épouse [M] a demandé le bénéfice de la Couverture Maladie Universelle Complémentaire (CMU-C) pour un foyer de cinq personnes.

Selon les pièces justificatives fournies, la Complémentaire Santé Solidaire lui a été accordée pour une période du 01/08/2019 au 31/07/2020.

Suite à un contrôle effectué sur les ressources et les comptes bancaires de l’intéressée et à un écart constaté entre les ressources déclarées et celles réellement perçues sur la période de référence du 01/05/2018 au 30/04/2019, la Caisse lui a adressé, par courrier en date du 07/08/2020, une notification des griefs.

Par courrier du 18/12/2020, la CPAM du Rhône lui a notifié une pénalité financière d’un montant de 1.200 euros

Par courrier du 22/09/2020, un indu de 789.92 € a été notifié à Madame [C] [N] épouse [M] correspondant à la prise en charge de la CMU-C à tort sur la période du 01/08/2019 au 31/07/2020. Une mise en demeure en date du 19/01/2021 lui a été adressée, puis une contrainte signifiée le 07/06/2021.

Parallèlement, Madame [C] [N] épouse [M] est affiliée à la Protection Universelle Maladie (PUMA). Une notification des griefs en date 31/08/2020 lui est adressée au motif qu’elle avait effectué de fausses déclarations de ressources en indiquant sur les formulaires de demandes de CMU-C qu’elle résidait en France afin de bénéficier indument de la PUMA. Une notification de retrait des droits à la PUMA lui est adressée le 15/10/2020.

Par courrier du 27/11/2020, la CPAM du Rhône lui a notifié une pénalité financière d’un montant de 1.000€.

Le 26/04/2023 Madame [C] [N] épouse [M] a saisi la Commission de Recours Amiable de la CPAM du Rhône, afin de contester l’indu de 789.92 € adressé le 22/09/2020, le retrait des droits à la PUMA adressé le 15/10/2020, ainsi que les deux pénalités financières de 1.200 € du 18/12/2020 et 1.000 € du 27/11/2020. La CRA a rejeté son recours le 02/08/2023, considérant qu’elle n’avait pas contesté l’indu ni la fermeture des droits dans les délais de 2 mois suivant notification de ces décisions et que la contestation des pénalités devait être portée devant le tribunal judiciaire et non devant la CRA.

Par requête en date du 24/08/2023, Madame [C] [N] épouse [M] a saisi le Pôle social du Tribunal Judiciaire de LYON.

Le greffe de cette juridiction a donc convoqué les parties, conformément à l’article R142-10-3 du Code de la sécurité sociale, pour l’audience du 12/09/2024.
À cette date, en audience publique, Madame [C] [N] épouse [M] était représentée par son conseil Maître DOSMAS.
Elle sollicite à titre principal : l’annulation des décisions de la CPAM sur l’indu et les pénalités financières, le rétablissement dans ses droits au titre de la PUMA et de la CMU-C, la condamnation de la CPAM du RHONE à lui verser la somme de 630,74€ à titre de remboursement de la saisie opérée le 06/04/2022 en exécution d’un avis à tiers détenteur et la somme de 100€ à titre d’indemnisation des frais et irrégularités prélevés le 31/05/2022 pour le mois précédent sur son compte bancaire par [2].
La requérante sollicite également l’exécution provisoire de la décision, et la condamnation de la CPAM du RHONE à la somme de 2.000€ au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et la condamnation de l’organisme aux dépens.

Sur le fond elle conteste le bien-fondé des décisions de la caisse prises au motif qu’elle ne remplissait pas les conditions de ressources et de résidence pour bénéficier de la CMU-C et de la PUMA.
Sur le critère de résidence, elle indique résider 6 mois en France, et elle explique que si sa carte bleue a bien été utilisée à l’étranger (Espagne), c’est parce qu’elle l’avait prêtée à sa mère et à sa belle-sœur. Elle précise également que ses enfants ne sont pas inscrits à l’école mais suivaient des cours à distance.
Sur les conditions de ressources, la requérante argue de ce que la caisse ne justifie pas du différentiel de 19.443,46€ entre les ressources déclarées et celles soit-disant effectivement perçues.

Elle demande à titre subsidiaire l’annulation des pénalités financières prononcées à son encontre pour non-respect de la procédure applicable en vertu de l’article R147-2 du CSS.
Elle fait valoir qu’elle n’a pris connaissance des pénalités financières que dans le cadre de la procédure judiciaire initiée devant le juge de l’exécution en contestation d’une dénonciation d’opposition à tiers détenteur du 17/01/2023.

Elle demande enfin à titre infiniment subsidiaire une réduction du montant des pénalités à leur plus strict minimum en raison de la gravité toute relative des faits, et en raison de sa bonne foi et de son absence de volonté de frauder.

La CPAM du RHONE a comparu représentée par Madame [X] et a demandé au tribunal de confirmer la décision entreprise et de débouter Madame [C] [N] épouse [M] de l’ensemble de son recours.
Elle sollicite de prime abord de voir constater l’irrecevabilité du recours de Madame [C] [N] épouse [M] en contestation de l’indu, au motif qu’elle n’a pas formé opposition à la contrainte dans les 15 jours après la signification le 07/06/2021 .
A titre reconventionnel elle demande à voir confirmer les deux pénalités financières des montants respectifs de 1.200€ et 1.000€, la procédure étant régulière et les notifications revenues en pli « avisé et non réclamé » , et condamner Madame [C] [N] épouse [M] au paiement de l’indu de 789.92€ et des deux pénalités (en deniers ou quittance), au motif que l’assurée de remplissait pas les conditions de ressources ni de résidence.
Sur ce dernier point la caisse soutient que l’assurée ne répondait pas au critère de résidence au regard de l’article R111-2 du CSS qui prévoit une présence au minimum de 6 mois sur le territoire, et qu’il ressort des contrôles effectués que l’assurée effectuaient l’intégralité de ses dépenses en Espagne et que ses enfants n’étaient pas scolarisés en France.

Puis, le tribunal s’est retiré et a délibéré de l’affaire conformément à la loi, avant de rendre son jugement par mise à la disposition au greffe le 14/11/2024.

MOTIFS

Sur l’irrecevabilité du recours portant sur l’indu et le retrait des droits

1/ sur l’irrecevabilité de la contestation de l’indu :

Selon l’article 1302 et 1302-1 du Code civil, ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution et celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui qui l’a indument versé.

L’article L.133-9-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 10 septembre 2012 au 25 mars 2021, dispose que :

« L’action en recouvrement de prestations indues s’ouvre par l’envoi au débiteur par le directeur de l’organisme compétent d’une notification de payer le montant réclamé par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Cette lettre précise le motif, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements donnant lieu à répétition. Elle mentionne l’existence d’un délai de deux mois imparti au débiteur pour s’acquitter des sommes réclamées et les modalités selon lesquelles les indus de prestations pourront être récupérés, le cas échéant, par retenues sur les prestations à venir. Elle indique les voies et délais de recours ainsi que les conditions dans lesquelles le débiteur peut, dans le délai mentionné au deuxième alinéa de l’article R. 142-1, présenter ses observations écrites ou orales.

A l’expiration du délai de forclusion prévu à l’article R. 142-1 ou après notification de la décision de la commission instituée à ce même article, le directeur de l’organisme créancier compétent, en cas de refus du débiteur de payer, lui adresse par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception une mise en demeure de payer dans le délai d’un mois qui comporte le motif, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées, la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, les voies et délais de recours et le motif qui, le cas échéant, a conduit à rejeter totalement ou partiellement les observations présentées ».

L’article R.133-3 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 11 mai 2017 au 13 août 2022, dispose que :

« Si la mise en demeure ou l’avertissement reste sans effet au terme du délai d’un mois à compter de sa notification, le directeur de l’organisme créancier peut décerner la contrainte mentionnée à l’article L. 244-9 ou celle mentionnée à l’article L. 161-1-5. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d’huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. A peine de nullité, l’acte d’huissier ou la lettre recommandée mentionne la référence de la contrainte et son montant, le délai dans lequel l’opposition doit être formée, l’adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine.
L’huissier de justice avise dans les huit jours l’organisme créancier de la date de signification.

Le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la signification. L’opposition doit être motivée ; une copie de la contrainte contestée doit lui être jointe. Le secrétariat du tribunal informe l’organisme créancier dans les huit jours de la réception de l’opposition.
La décision du tribunal, statuant sur opposition, est exécutoire de droit à titre provisoire ».

Il ressort de ces dispositions que l’opposition à la contrainte ne peut valablement être faite que dans un délai de quinze jours, qui débute au lendemain de la signification de la contrainte.

En l’espèce il résulte des pièces produites par la CPAM (pièce 4) que par courrier du 22/09/2020 Mme [C] [N] épouse [M] s’est vue notifier un indu de 789,92 Euros (le courrier mentionnant le délai de 2 mois pour le contester devant la CRA).
Ce courrier étant restée sans réponse, une mise en demeure lui a été adressée en le 19/01/2021 (soit plus de 3 mois après), puis plus de 4 mois après, une contrainte signifiée à l’étude de l’huissier le 07/06/2021, personne n’étant présent au domicile (pièce 14 CPAM).

Il apparaît ainsi que la procédure de notification de l’indu est régulière et qu’il appartenait à Mme [N] de former opposition à la contrainte délivrée dans les 15 jours de la signification soit jusqu’au 22/06/2021 à minuit, cachet de la poste faisant foi.

Madame [C] [N] épouse [M] ne justifie pas avoir formé opposition à contrainte dans le délai. Elle n’est donc plus recevable à contester le bien-fondé de l’indu d’un montant de 789,92€ qui lui a été notifié, étant précisé que la contestation par Madame [C] [N] épouse [M] des sommes de 630,74€ (saisie à titre d’un avis à tiers détenteur) et 100€ (prélevée par la [2]), relève quant à elle de la compétence du juge de l’exécution, et n’a donc pas d’incidence sur le principe même de l’indu.

Il sera rappelé qu’à défaut d’opposition, la contrainte décernée comporte tous les effets d’un jugement.

2/ sur l’irrecevabilité de la contestation du retrait des droits

Vu l’article 125 du CPCP ,

En application de l’article L142-4 du CSS « les recours contentieux formés dans les matières mentionnées aux articles L. 142-1 , à l’exception du 7°, et L. 142-3 sont précédés d’un recours préalable, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’Etat (…)»
En vertu de l’article R142-1 du CSS « Les réclamations relevant de l’article L. 142-4 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil, du conseil d’administration ou de l’instance régionale de chaque organisme .
Cette commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation ».
En l’espèce il ressort des pièces produites par la CPAM que par courrier du 21/09/2020 reçu le 25/09/2020, Mme [N] a reçu notification d’un retrait des droits à la CMU-C à compter du 1er/08/2019. Et par courrier du 15/10/2020 elle s’est vu notifier la fermeture de ses droits à l’assurance maladie à compter du 29/11/2020 (pièces 3 et 10 respectivement).
Or Mme [N] ne justifie d’aucun recours préalable à l’encontre de ces deux décisions dans le délai de 2 mois prévu à l’article sus-visé.
Faute d’un recours administratif devant la CRA, elle sera donc déclarée irrecevable en sa contestation.

Sur les pénalités financières

Le tribunal est saisi par la caisse primaire d’assurance maladie du Rhône d’une demande reconventionnelle tendant à confirmer les pénalités financières de 1.200 et 1.000 euros notifiées à Mme [N], outre la condamnation de celle-ci à lui payer lesdites sommes en deniers ou quittance.

Il appartient donc au tribunal de vérifier la légalité de ces pénalités financières au regard des dispositions en vigueur.

Selon l’article R 147-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige : « Peuvent faire l’objet d’une pénalité les personnes mentionnées au 1° du I de l’article L. 114-17-1 :
1° Qui, dans le but d’obtenir, de faire obtenir ou de majorer un droit aux prestations d’assurance maladie, d’invalidité, d’accident de travail, de maternité, de maladie professionnelle ou de décès ou un droit à la protection complémentaire en matière de santé, ou à l’aide médicale de l’Etat :
a) Fournissent de fausses déclarations relatives à l’état civil, la résidence, la qualité d’assuré ou d’ayant droit ou les ressources ;
b) Omettent de déclarer la modification d’une ou plusieurs de ces mêmes déclarations […] ;

Selon l’article R147-6-1 du Code de la sécurité sociale : 
« La pénalité prononcée au titre de l’article R. 147-6 est fixée, en fonction de la gravité des faits reprochés et s’ils ne relèvent pas d’une fraude au sens des articles R.147-11 et R. 147-12, à un montant maximum égal à :
1° 50 % des sommes définies au II de l’article R. 147-5, pour les cas prévus au 2° de l’article R. 147-6. Ce montant ne peut excéder le plafond mensuel de la sécurité sociale;
2° Une fois le plafond mensuel lorsqu’il est constaté un ou plusieurs faits relevant des cas prévus au 1° de l’article R. 147-6 ;
3° La moitié du plafond mensuel lorsqu’il est constaté un ou plusieurs faits relevant des cas prévus au 3° de l’article R. 147-6.
Cette pénalité est prononcée sans préjudice de celles éventuellement dues au titre des faits dont la personne en cause tentait d’empêcher le contrôle. »

En application des dispositions de l’article L. 114 -17 -1, I, 1° du CSS dans sa rédaction applicable au litige, « le directeur d’un organisme local d’assurance-maladie peut infliger une pénalité financière aux bénéficiaires des régimes obligatoires des assurances maladie, maternité, invalidité, décès, accident du travail et maladies professionnelles, de la protection complémentaire en matière de santé mentionnée à l’article L. 861 –1, de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé mentionnée à l’article L. 863 –1 ou de l’aide médicale de l’État mentionné au premier alinéa de l’article L. 251 –1 du code de l’action sociale et des familles ».

Selon les V et VII du même texte, « la pénalité, doit, sauf cas de fraude établie dans les cas définis par voie réglementaire, être prononcé après l’avis de la commission composée constituée au sein du conseil ou du conseil d’administration de l’organisme local d’assurance-maladie ».

Sur le fondement des textes précités et de l’article L142-4 qui prévoit que le recours préalable devant la CRA n’est pas un préalable obligatoire pour contester les décisions prises en application de l’article L114-7, il appartient au juge du contentieux de la sécurité sociale de vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés à la personne concernée, ainsi que l’adéquation du montant de la pénalité à l’importance de l’infraction commise par cette dernière.

1/ sur la pénalité de 1200 Euros pour fausse déclaration de ressources

En l’espèce, la requérante soutient que les pénalités prononcées à son encontre doivent être annulées car la caisse n’a pas respecté la procédure applicable et que ces pénalités financières ne lui ont pas été notifiées.

Néanmoins, la caisse justifie du courrier de notification des griefs du 07/08/2020, réceptionné le 10/08/2020 (pièce 2), qui indique un différentiel de 19.443,46€ sur les ressources déclarées et précise que Mme [N] dispose d’un mois pour faire ses observations. Elle verse également un courrier de convocation devant la Commission des Pénalités Financières du 24/09/2020, et justifie de l’AR « pli avisé et non réclamé » (pièce 5).
Puis par courrier du 18/12/2020, après avis conforme implicite du Directeur de l’UNCAM (délai d’un mois écoulé), la caisse justifie avoir notifié à Madame [C] [N] épouse [M] une pénalité financière d’un montant de 1.200€, ladite notification étant à nouveau revenue en « pli avisé et non réclamé » en date du 19/12/2020 (pièce 8).

Force est de constater que la CPAM du Rhône a respecté la procédure de pénalité financière, qui est régulière en tous points.

Sur le fond Madame [C] [N] épouse [M] soutient qu’elle n’a pas dissimulé ses ressources sur la période de référence du 01/05/2018 au 30/04/2019.

La CPAM quant à elle verse en pièce 6 un tableau récapitulatif, clair et cohérent, de l’ensemble des virements, des dépôts de chèques, effectués sur son compte, ainsi que l’ensemble des relevés bancaires entre mai 2018 et avril 2019.

La requérante n’a formulé aucune observation sur ces crédits portés à son compte. Elle ne s’est d’ailleurs même pas présentée devant la commission des pénalités financières pour fournir d’éventuelles explications et se contente aujourd’hui de dire que devant la masse des documents produits par l’organisme social, il lui est difficile de se justifier de tout dans le détail.
En tout état de cause elle ne produit aucun élément de nature à remettre en cause les calculs de la caisse. Elle n’explique pas les virements, les dépôts en espèces et les remises de chèques qu’elle a perçus mais qu’elle n’a pas déclarés, alors qu’il lui appartenait de faire.

Il ressort de tous ces éléments que le total des ressources perçues par Madame [C] [N] épouse [M], sur la période de référence, s’élève à 37.872,76€, et dépassaient donc le plafond annuel CMU-C applicable en 2019 de 22.377€.

La pénalité de 1.200 Euros apparaît donc justifiée et proportionnée à la faute commise, dissuasive mais au demeurant inférieure au maximum encouru (3.377 Euros), et se situant plutôt dans la fourchette minimum.
Elle sera confirmée.

2/ Sur la pénalité de 1.000 Euros pour fausse déclaration d’adresse

Par courrier du 27/11/2020, la caisse a notifié à Madame [C] [N] épouse [M] une pénalité financière d’un montant de 1.000€. Cette pénalité a été fixée pour fausse déclaration relativement au critère de résidence, et plus précisément pour avoir indiqué une résidence en France sur les formulaires de demandes de CMU-C afin de bénéficier de la PUMA.
La caisse vise expressément la fraude commise par l’usage d’un faux.
La notification est revenue en pli avisé et non réclamé en date du 28/11/2020 (pièce 13).

Selon l’article R. 147-11, 1° du CSS, dans sa rédaction applicable au litige, sont qualifiés de fraude les « faits commis, dans le but d‘obtenir le bénéfice d’une prestation injustifiée au préjudice d’un organisme d‘assurance maladie, ou au préjudice d’un organisme mentionné à l‘article L. 861-4 s‘agissant de la protection complémentaire en matière de santé, lorsque a été constaté l‘établissement ou l’usage de faux, la notion de faux étant caractérisée par toute altération de la vérité sur toute pièce justificative, ordonnance, feuille de soins ou autre support de facturation, attestation ou certificat, déclaration d‘accident du travail ou de trajet, sous forme écrite ou électronique ».

Il résulte de la combinaison des textes que, pour être constitutive d’une fraude au sens de l’article R.147-11,1° du code de la sécurité sociale, la fausse déclaration visée par l’article R.147-6 du même code doit être précédée, accompagnée ou suivie de la production d’un document faux ou falsifié aux fins d’établir la preuve de faits corroborant la fausse déclaration (Cass, 2ème civ., 12 novembre 2020, 19-17749, publié au bulletin).

En l’espèce, la fausse déclaration de Mme [N] relativement à sa résidence en France sur les formulaires de demandes de CMU-C n’a pas été précédée, accompagnée ou suivi de l’établissement ou de l’usage d’un document faux ou falsifié de sorte que les faits commis par l’assurée ne sont pas constitutifs d’une fraude au sens de l’article R. 147–11 du code de la sécurité sociale.

Au vu de la pièce 13 versée par la CPAM qui détaille la procédure suivie pour le prononcé de la pénalité, la procédure, hors cas de fraude, prévoyant l’avis préalable de la commission des pénalités de l’organisme n’a pas été respectée alors qu’il s’agit d’une formalité substantielle dont l’objet est d’apprécier les fautes et de pondérer le montant.

Le non-respect de cette formalité substantielle entraîne l’annulation de la pénalité financière sans qu’il soit besoin d’examiner sur le fond la motivation de la pénalité en question, à savoir la question de la résidence en France de l’assurée.

Sur les autres demandes
Il n’apparaît pas inéquitable de ne pas faire application au profit de Madame [C] [N] épouse [M] des articles 37 et 75 de la loi du 10/07/1991.
Par ailleurs il convient de condamner la CPAM aux dépens en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, mis à la disposition des parties ;

Déclare le recours de Madame [C] [N] épouse [M] irrecevable en sa contestation de l’indu et de la fermeture des droits à assurance-maladie et CMU-C ;

Constate que la contrainte émise le 31/05/2021 et signifiée le 07/06/2021 a acquis tous les effets d’un jugement ;

Valide ladite contrainte pour un montant de 789,92€ correspondant à la prise en charge de la CMU-C à tort sur la période du 01/08/2019 au 31/07/2020 ;

Confirme la pénalité financière de 1.200 Euros notifiée à Mme [N] épouse [M] le 18/12/2020 pour fausse déclaration de ressources ;

Condamne Madame [C] [N] épouse [M] au paiement de cette pénalité financière d’un montant de 1.200€ en deniers ou quittance ;

Annule la pénalité financière d’un montant de 1.000€ notifiée à Mme [N] le 27/11/2020 faute de respect de la procédure ;

Rejette toute autre demande ;

Rappelle que la décision du tribunal est exécutoire de droit à titre provisoire ;

Condamne la CPAM du RHONE aux entiers dépens ;

Rappelle que la présente décision est susceptible d’appel dans le délai de un mois à compter de sa notification ;

Rappelle que l’appel doit être formé par pli recommandé avec accusé de réception adressé au greffe de la cour d’appel (Chambre sociale, 1 rue du palais de justice, 69 321 Lyon Cedex 05) avec une copie du jugement contesté ;

Rappelle que la déclaration d’appel doit indiquer les noms, prénoms, profession et domicile de l’appelant, ainsi que le nom et l’adresse de la partie adverse, qu’elle doit désigner le jugement dont il est fait appel, et mentionner, le cas échéant, le nom et l’adresse du représentant de l’appelant devant la cour ;

Jugement rendu par mise à la disposition au greffe le 14 novembre 2024, dont la minute a été signée par la présidente et la greffière ;

GREFFIÈRE PRESIDENTE


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