Confirmation d’un jugement avec condamnation aux dépens et indemnités pour frais irrépétibles

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Confirmation d’un jugement avec condamnation aux dépens et indemnités pour frais irrépétibles

Mme [J] [E] épouse [W] et M. [P] [W] ont engagé la SARL MVE Bâtiment pour des travaux d’extension de leur immeuble, avec un devis de 96 309,36 euros. Un permis de construire a été obtenu en avril 2012, et les travaux ont été déclarés achevés en juillet 2013. Cependant, un procès-verbal de réception a été établi avec réserves en novembre 2013, signalant des infiltrations en sous-sol. Les tentatives de résolution amiable n’ont pas abouti, et un constat d’huissier a été réalisé en novembre 2019. Un expert judiciaire a été désigné en mars 2020, et son rapport a été déposé en mars 2021. Les époux [W] ont assigné la SARL MVE Bâtiment en octobre 2021 pour obtenir des dommages-intérêts pour les travaux de reprise et le préjudice de jouissance. La SARL MVE a ensuite assigné la SA AXA France IARD en intervention forcée. Le tribunal a déclaré la SARL MVE responsable des désordres, mais a estimé que ceux-ci n’engageaient pas sa responsabilité décennale. La SARL MVE a été condamnée à verser des indemnités aux époux [W] et à la SA AXA France IARD. La SARL MVE a interjeté appel en mai 2023, contestant la décision et demandant une réévaluation des responsabilités et des indemnités. Les époux [W] et la SA AXA France IARD ont également formulé des demandes de confirmation du jugement. L’affaire est fixée pour plaidoirie en mai 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

19 septembre 2024
Cour d’appel d’Amiens
RG
23/02162
ARRET

S.A.R.L. MVE BATIMENT

C/

[W]

[E] épouse [W]

S.A. AXA FRANCE IARD

CJ/VB/MC

COUR D’APPEL D’AMIENS

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU DIX NEUF SEPTEMBRE

DEUX MILLE VINGT QUATRE

Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 23/02162 – N° Portalis DBV4-V-B7H-IYNE

Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D’AMIENS DU VINGT NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS

PARTIES EN CAUSE :

S.A.R.L. MVE BATIMENT immatriculée au RCS d'[Localité 7] sous le numéro 490 844 529, prise en la personne de son représentant légal à savoir Monsieur [R] [X], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Juliette DELAHOUSSE substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocats au barreau d’AMIENS

APPELANTE

ET

Monsieur [P] [W]

né le 08 Octobre 1953 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Madame [J] [E] épouse [W]

née le 20 Juin 1959 à

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentés par Me Nathalie AMOUEL de la SCP CARON-AMOUEL-PEREIRA, avocat au barreau d’AMIENS

S.A. AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Aurélien DESMET de la SCP COTTIGNIES-CAHITTE-DESMET, avocat au barreau d’AMIENS

INTIMES

DÉBATS & DÉLIBÉRÉ :

L’affaire est venue à l’audience publique du 23 mai 2024 devant la cour composée de Mme Graziella HAUDUIN, Présidente de chambre, Présidente, M. Douglas BERTHE, Président de chambre et Mme Clémence JACQUELINE, Conseillère, qui en ont ensuite délibéré conformément à la loi.

A l’audience, la cour était assistée de Mme Vitalienne BALOCCO, greffière.

Sur le rapport de Mme Clémence JACQUELINE et à l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré et la présidente a avisé les parties de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 19 septembre 2024, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

PRONONCÉ :

Le 19 septembre 2024, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Graziella HAUDUIN, Présidente de chambre et Mme Vitalienne BALOCCO, greffière.

*

* *

DECISION :

Mme [J] [E] épouse [W] et M. [P] [W] sont propriétaires d’un immeuble à usage d’habitation sis [Adresse 1] à [Localité 8].

Ils ont confié des travaux d’extension de cet immeuble à la SARL MVE Bâtiment qui a établi un devis en date du 28 novembre 2011 pour un montant de 96 309,36 euros.

Un arrêté de permis de construire a été obtenu le 3 avril 2012 et la déclaration d’ouverture de chantier est datée du 8 septembre 2012.

Les travaux ont fait l’objet d’une déclaration d’achèvement en date du 1er juillet 2013 et d’une attestation de conformité du 15 juillet suivant.

La SARL MVE Bâtiment a établi une facture en date du 29 octobre 2013 pour un montant de 108 876,16 euros.

Les époux [W] ont procédé au règlement intégral de cette facture en plusieurs échéances.

Les travaux ont fait l’objet d’un procès-verbal de réception avec réserves portant notamment sur des infiltrations en sous-sol en date du 29 novembre 2013.

Les démarches amiables entreprises n’ont pas permis de régler les désordres.

Les époux [W] ont fait établir un procès-verbal de constat par Me [B], huissier de justice à [Localité 7], en date du 19 novembre 2019.

Par ordonnance du 25 mars 2020, M. [G] a été désigné en qualité d’expert judiciaire par le juge des référés d'[Localité 7]. Il a déposé son rapport le 29 mars 2021.

Par acte d’huissier de justice du 13 octobre 2021, les époux [W] ont fait assigner la société MVE Bâtiment devant le tribunal judiciaire d’Amiens afin notamment d’obtenir la condamnation de la société MVE Bâtiment à leur verser la somme de 40 672 euros TTC au titre des travaux de reprise à réaliser et à l’indemniser de leur préjudice de jouissance au sous-sol et dans le jardin pendant la durée des travaux de reprise.

Par exploit d’huissier en date du 16 décembre 2021, la SARL MVE Bâtiment a fait assigner la SA AXA France IARD en intervention forcée.

Les instances ont été jointes par ordonnance du 3 février 2022.

Par jugement en date du 29 mars 2023, le tribunal judiciaire d’Amiens a :

– déclaré la SARL MVE responsable des désordres subis par les époux [W] [E] ;

– dit que ces désordres n’engagent pas sa responsabilité décennale ;

– débouté la SARL MVE de sa demande de garantie à l’encontre de la SA AXA France IARD ;

– condamné la SARL MVE Bâtiment à payer aux époux [W] [E] les sommes suivantes :

* 40 672 euros TTC à titre de dommages intérêts en réparation de leur préjudice matériel ;

* 6 540 euros à titre de dommages intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance ;

* 1 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la SARL MVE aux dépens y compris ceux exposés dans l’instance en référé et le coût de l’expertise ;

– condamné la SARL MVE à payer à la SA AXA France IARD la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rejeté la demande de la SARL MVE Bâtiment à payer à la SA AXA France IARD la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La SARL MVE a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 5 mai 2023.

Aux termes de ses conclusions d’appelante signifiées le 16 janvier 2024, elle demande à la cour de :

Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Ce faisant :

* Pour les désordres d’infiltrations en sous-sol dire que les désordres se sont révélés dans leurs ampleur et conséquences après réception et de ce fait qu’ils relèvent de la responsabilité décennale de la SARL MVE Bâtiment ;

* Pour le désordre de raccordement du réseau d’évacuation des eaux pluviales de l’extension et de la véranda sur le réseau existant, dire que la non-conformité alléguée n’est pas imputable à la société MVE Bâtiment ;

En conséquence,

Débouter les époux [W] de leurs demandes au titre de la non-conformité des installations d’évacuation des eaux pluviales qui affecte le réseau existant ;

Subsidiairement, si par impossible la cour juge que le raccordement d’évacuation des eaux pluviales au réseau existant est non conforme, dire que la non-conformité et de ce fait la remise en état relèvent de la responsabilité décennale de la Société MVE Bâtiment ;

Condamner AXA France IARD à garantir la Société MVE Bâtiment en application des garanties légales et facultatives souscrites dans le contrat en cause ;

Limiter le quantum de l’indemnisation à de plus justes proportions en limitant les travaux à la récupération des eaux de pluie de la partie extension ;

Condamner la SA AXA France IARD à garantir la Société MVE Bâtiment de l’ensemble des condamnations qui seraient mises à sa charge, en principal, intérêts, frais et accessoires en application des garanties légales et facultatives souscrites dans le contrat en cause ;

Condamner in solidum les consorts [W] et AXA France IARD à payer à la SARL MVE une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel de première instance et de référé y compris les frais d’expertise judiciaire dont distraction est requise au profit de la SELARL Delahousse et associés.

La société MVE Bâtiment expose que les désordres relatifs aux infiltrations dans le garage en sous-sol relèvent de la responsabilité décennale car, s’ils ont été réservés, ils ne se sont révélés qu’après la réception dans toute leur ampleur et leurs conséquences à la suite de l’expertise judiciaire.

Elle indique que la non-conformité tenant à l’écoulement des eaux pluviales de l’extension dans le réseau d’évacuation des eaux usées préexistait avant la création de l’extension et le raccordement par ses soins du système d’évacuation des eaux de pluie de l’extension sur le réseau existant. À titre subsidiaire, elle soutient que le défaut de conformité relève de la responsabilité décennale.

Sur les préjudices, elle fait tout d’abord valoir que seuls les travaux d’évacuation des eaux de pluie de l’extension peuvent être laissés à sa charge. Sur le préjudice de jouissance du garage, elle conteste la durée retenue par le tribunal dans la mesure où les époux [W] ont pu utiliser le sous-sol avant l’aggravation des désordres. Elle ajoute que le montant de l’indemnisation est excessif. Elle conteste l’existence d’un préjudice de jouissance du jardin.

Sur l’action dirigée contre la société Axa, elle affirme qu’elle est tenue de la garantir au titre du désordre de nature décennale. Elle soutient que le désordre affectant les réseaux d’eaux sont de nature décennale en raison de l’inaptitude du réseau à remplir les fonctions auxquelles il était destiné. Subsidiairement, elle expose qu’elle est garantie au titre de sa responsabilité contractuelle.

Par leurs dernières conclusions signifiées le 16 octobre 2023, les époux [W] sollicitent la confirmation du jugement en toutes ses dispositions ainsi que la condamnation de la SARL MVE Bâtiment à lui payer une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel avec recouvrement direct selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile.

Ils indiquent s’en rapporter sur la qualification du désordre affectant l’isolation du sous-sol.

Sur l’évacuation des eaux pluviales, ils soutiennent que l’intervention de la société MVE Bâtiment est bien établie. Ils exposent que la non-conformité résulte du raccordement par la société MVE Bâtiment des eaux pluviales de l’extension sur le réseau d’évacuation des eaux usées.

S’agissant de leur préjudice de jouissance, ils exposent que l’état du sous-sol les a privés d’un usage complet de ce dernier et qu’ils demandent une indemnisation sur la base de la valeur locative d’un sous-sol et non d’un logement à usage d’habitation. En ce qui concerne le jardin, ils expliquent avoir commencé les travaux et être totalement privés de son usage.

Par ses dernières conclusions signifiées le 7 mars 2024, la SA Axa France Iard demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SARL MVE Bâtiment de ses demandes formées à l’encontre de la SA AXA France Iard ;

Subsidiairement,

Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a fait droit à la demande de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance ;

Réduire à de notables proportions les demandes indemnitaires des époux [W] ;

Dire opposable à la SARL MVE Bâtiment la franchise de garantie décennale et les garanties facultatives s’élevant à la somme de 1 000 euros ;

Condamner la SARL MVE Bâtiment à payer à la SA AXA France IARD une somme de 1 000 euros correspondant au montant de sa franchise contractuelle avant revalorisation ;

En tout état de cause,

Condamner la SARL MVE Bâtiment à payer à la SA AXA France IARD une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Sur les infiltrations en sous-sol, elle note que le désordre est apparu en cours de chantier et a fait l’objet d’une réserve lors de la réception. Elle en conclut que la responsabilité décennale ne peut être engagée. Elle conteste que les désordres se soient révélés dans leur ampleur postérieurement à la réception.

Elle précise que la responsabilité civile professionnelle n’est pas mobilisable et qu’il ne peut être recouru à la garantie des dommages intermédiaires car le désordre n’était pas caché à la réception.

Sur le réseau d’évacuation des eaux pluviales, elle note qu’il n’existe aucun désordre permettant de mettre en oeuvre la responsabilité décennale mais une non conformité qui ne génère aucune impropriété à la destination.

Subsidiairement, elle note que les époux [W] ne démontrent pas qu’ils sont privés de l’usage du sous-sol. Elle ajoute que le contrat a en outre été résilié le 1er avril 2017 avant la réclamation du maître de l’ouvrage. Enfin, elle soutient que la preuve de la réalité d’un trouble dans la jouissance du jardin pendant la durée des travaux n’est pas rapportée.

La clôture de la procédure a été ordonnée le 20 mars 2024 et l’affaire a été fixée pour être plaidée à l’audience du 23 mai 2024.

MOTIFS

Sur le fondement de la responsabilité de la SARL MVE Bâtiment et la garantie d’AXA France IARD :

Selon l’article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

Aux termes de l’article 1792 du même code, tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination.

En vertu de l’article 1792-4-3 du même code, en dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux.

Il résulte de l’article 1792-6 du même code que la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.

La garantie de parfait achèvement, à laquelle l’entrepreneur est tenu pendant un délai d’un an à compter de la réception, s’étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.

A défaut de mise en oeuvre de la garantie de parfait achèvement dans les conditions fixées par l’article 1792-6 du code civil, le maître de l’ouvrage peut agir sur le fondement de la responsabilité contractuelle.

Par ailleurs, la garantie décennale couvre les défauts qui, signalés à la réception, ne se sont révélés qu’ultérieurement dans leur ampleur, leur gravité et leur conséquence.

1. L’expert a constaté au cours des opérations d’expertise, et ce dès la visite du 5 octobre 2020, la présence de flaques d’eau dans le garage en sous-sol, la présence de deux murs de soutènement saturés d’eau, des poutres métalliques au plafond corrodées du fait de l’humidité. Il a établi que ces désordres sont la conséquence de malfaçons concernant le dispositif d’étanchéité des murs, totalement absent par endroit ou défaillant dans d’autres zones du soubassement.

Il ressort du procès-verbal de réception du 29 novembre 2013 que les époux [W] ont émis plusieurs réserves dont l’une porte sur ‘les fuites au sous-sol’.

La société MVE Bâtiment soutient que ce désordre ayant donné lieu à une réserve ne s’est révélé dans sa gravité qu’après la réception.

Cependant, il ressort des photographies produites et du contenu des courriels adressés par M. [W] à la société pour lui demander de venir remédier au désordre avant la mise en oeuvre de la procédure judiciaire que les fuites d’eau sont apparues pendant le chantier, que les époux [W] ont indiqué en mai 2014 qu’il leur était impossible de garder des produits au sous-sol comme ils l’auraient souhaité, en janvier 2015 qu’ils ne stockaient pas d’objets au sous-sol sous peine de les retrouver ‘humides ou mêmes mouillés’, en avril 2016, qu’ils ont tenté de mettre une bâche sur le trottoir pour limiter les infiltrations et qu’enfin, au fil des mois et mêmes des années, ils n’ont stocké au sous-sol que des bouteilles posées sur des palettes. Les photographies démontrent que les mêmes infiltrations d’eau, traces d’humidité et d’eau au sol peuvent être constatées.

Il est donc exclu de retenir que ces désordres, qui rendent l’ouvrage impropre à sa destination, ne se sont révélés dans leur ampleur que postérieurement à la réception des travaux. L’importance des ‘fuites au sous-sol’ figurant dans les réserves était connue des parties en novembre 2013.

La SARL MVE Bâtiment n’engage donc pas sa responsabilité décennale, mais sa responsabilité contractuelle à ce titre puisqu’elle n’a pas respecté les règles de l’art lorsqu’elle a réalisé les travaux d’étanchéité des murs enterrés.

Dès lors, la SA AXA France IARD, assureur de responsabilité décennale de la société MVE Bâtiment, ne peut être condamnée à garantir la société pour ce désordre.

2. L’expert a par ailleurs constaté que les eaux pluviales de l’extension se déversent dans un réservoir dont le trop-plein s’évacue dans le réseau public d’évacuation des eaux usées. Il explique que la société MVE Bâtiment a canalisé les eaux pluviales de l’extension dans un réservoir de récupération et que le trop plein de ce réservoir a été renvoyé par une canalisation enterrée vers un tampon collectant les eaux usées sur la voie publique. Il retient qu’il s’agit d’une non-conformité aux normes prévues en la matière.

La société MVE Bâtiment ne conteste plus avoir réalisé les travaux d’évacuation des eaux de pluie prévus au devis du 28 novembre 2012 et facturés dans la dernière facture du 29 octobre 2013. L’expert a d’ailleurs relevé dans son rapport que l’entreprise ne démentait pas son intervention sur l’évacuation des eaux de pluie.

Ce défaut de conformité ne s’analyse pas comme un désordre relevant de la garantie décennale puisque les eaux de pluie s’évacuent et que le dispositif conçu par l’entreprise fonctionne. Il s’agit d’une non-conformité à la réglementation qui interdit de déverser des eaux de pluie dans le réseau public d’évacuation des eaux usées.

La société MVE Bâtiment prétend que les eaux de pluie de l’immeuble existant s’évacuaient avant son intervention dans le réseau public des eaux usées si bien qu’elle ne peut être tenue pour responsable de cette non-conformité. Elle souligne qu’un courriel de la direction technique de Gazelec indique à M. et Mme [W] que les ‘eaux pluviales du logement se rejettent dans les eaux usées’ ce qui représente une non-conformité. Ce courrier ne permet cependant pas de s’assurer que le ‘logement’ évoqué correspond à tout l’ensemble immobilier comme le soutient la société ou uniquement à l’extension objet du litige. De même, le fait que la société Eno-Bât qui a établi un devis en vue de la reprise du réseau évoque ‘l’ancien réseau non conforme au niveau des piquages’ ne permet pas de déterminer avec certitude qu’il est question du réseau pré-existant ou du réseau réalisé pour récolter les eaux pluviales de l’extension. Quoiqu’il en soit, et à supposer même que le réseau d’évacuation des eaux pluviales de l’immeuble d’origine n’ait pas été conforme, il appartenait à la société MVE Bâtiment de trouver une solution de raccordement des eaux pluviales de l’extension respectant les normes applicables. Si la prétendue non-conformité du réseau pré-existant ne lui permettait pas de mettre en oeuvre une solution adaptée, elle devait le signaler aux époux [W] et les inviter à mettre aux normes ce réseau avant d’envisager la réalisation des travaux d’extension de leur maison.

Dans ces conditions, la société MVE Bâtiment, professionnelle du bâtiment, aurait dû préconiser une autre solution technique que celle mise en oeuvre en l’espèce qui a consisté à raccorder le trop-plein du réservoir qui récolte les eaux de pluie de l’extension directement sur le réseau public des eaux usées.

Cette non-conformité ne s’analysant pas en un désordre relevant de la garantie décennale, la société AXA France IARD ne peut être condamnée à garantir la société MVE Bâtiment.

3. Dans ces conditions, le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu la responsabilité de la société MVE Bâtiment sur le fondement de la responsabilité contractuelle et débouté la société de sa demande de garantie par la SA AXA France IARD.

Sur l’indemnisation des préjudices subis par M. et Mme [W]

M. et Mme [W] demandent la confirmation du jugement s’agissant des montants qui leur sont alloués à titre d’indemnisation de leurs divers préjudices.

La société MVE Bâtiment développe des moyens tendant à réduire l’indemnisation de plusieurs postes de préjudices des époux [W]. Cependant, aux termes du dispositif de ses conclusions la société se contente de demander à la cour de ‘limiter le quantum de l’indemnisation à de plus justes proportions en limitant les travaux à la récupération des eaux de pluie de l’extension’ sans former aucune demande concernant le montant de l’indemnisation des autres préjudices indemnisés aux termes du jugement entrepris.

En application de l’article 954 du code de procédure civile qui dispose que la cour statue sur les seules prétentions récapitulées au dispositif des écritures, la cour n’est donc saisie que de cette demande concernant le coût des travaux de reprise du réseau d’évacuation des eaux de pluie de l’extension.

Sur ce point, l’expert a retenu que le coût de la mise en conformité de l’évacuation des eaux pluviales s’élève à 9 100 euros TTC conformément au devis de la société Reno-Bât Constructions du 17 février 2021. La société MVE Bâtiment échoue à démontrer que ce devis porterait sur la réfection de l’intégralité du réseau des eaux pluviales non conforme de l’immeuble existant et de l’extension. Le devis n’évoque que les éléments non conformes signalés par l’expert à savoir ‘fouille en tranchée depuis la cuve enterrée jusqu’au collecteur dans le chemin communal’ et ‘condamnation de l’ancien réseau non conforme au niveau des piquages’ ce qui correspond bien aux piquages réalisés à tort par la société MVE Bâtiment sur le réseau communal des eaux usées. L’expert n’aurait d’ailleurs pas manqué d’écarter un devis qui aurait mis à la charge de la société MVE Bâtiment la reprise de l’ensemble du réseau des eaux usées de l’ensemble immobilier alors qu’il n’était saisi que du problème concernant le réseau de l’extension et qu’il le rappelle au gré de son rapport. Au surplus, le conseil de la société MVE Bâtiment n’aurait pas manqué de le signaler dans ses dires.

Dans ces conditions, la SARL MVE Bâtiment doit indemniser les époux [W] du coût de la reprise du réseau des eaux de pluie de l’extension à hauteur de 9100 euros si bien que le jugement sera également confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

La SARL MVE Bâtiment, qui succombe en ses prétentions, sera condamnée aux dépens d’appel avec recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Elle sera également condamnée à verser une indemnité de 2 000 euros aux épouse [W] et de 1 500 euros à la SA AXA France IARD au titre des frais irrépétibles d’appel.

Les dispositions du jugement concernant les dépens et les frais irrépétibles seront par ailleurs confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition au greffe, dans les limites de l’appel,

Confirme intégralement le jugement entrepris dans ses chefs soumis à la cour,

Y ajoutant,

Condamne la SARL MVE Bâtiment aux dépens d’appel avec recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL MVE Bâtiment à verser une indemnité de 2 000 euros à Mme [J] [E] épouse [W] et M. [P] [W] et de 1 500 euros à la SA AXA France IARD au titre des frais irrépétibles d’appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


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