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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
15e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 27 OCTOBRE 2022
N° RG 20/01915
N° Portalis DBV3-V-B7E-UBQF
AFFAIRE :
S.A.S. MAGICFIT
C/
[Y] [T]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Juillet 2020 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Saint Germain en Laye
N° Section : Commerce
N° RG : 18/00278
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT
Me Christine BACHELET de la SCP BACHELET – BERION – GUERARD OBERTI
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SEPT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, initialement fixé au 21 septembre 2022, différé au 22 septembre 2022, puis prorogé au 27 octobre 2022, les parties ayant été avisées, dans l’affaire entre :
S.A.S. MAGICFIT
N° SIRET : 827 999 301
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 637 – Représentant : Me Joseph SUISSA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1795 substitué par Me Mathilde DECLERCQ, avocat au barreau de PARIS
APPELANTE
****************
Madame [Y] [T]
née le 23 Juillet 1984 à [Localité 4] (08)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Christine BACHELET de la SCP BACHELET – BERION – GUERARD OBERTI, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 151
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 31 mai 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Régine CAPRA, Présidente chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Régine CAPRA, Présidente,
Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,
Madame Perrine ROBERT, Vice-président placé,
Greffier lors des débats : Madame Carine DJELLAL,
EXPOSE DU LITIGE
Mme [Y] [T] a signé le 15 septembre 2017 avec la société Gigafit [Localité 3], qui exploite une salle de sport à [Localité 3], un contrat de travail à durée indéterminée à effet à compter de cette date, aux termes duquel elle était engagée en qualité de commerciale, niveau II, moyennant un salaire mensuel brut de base de 1 800 euros, porté à 1 832,94 euros à compter du mois d’octobre 2017, une prime mensuelle correspondant à 10% sur chaque souscription obtenue par le fruit de son intervention ainsi que 20% sur les ventes additionnelles.
La société Gigafit [Localité 3] a été dénommée à compter du 1er juin 2018 la société Magicfit.
Les relations entre les parties sont soumises à la convention collective nationale du sport.
La société employait habituellement moins de onze salariés.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 13 juin 2018, la société Magicfit a notifié à Mme [T] une mise à pied conservatoire et une convocation à un entretien préalable fixé au 21 juin 2018, puis reporté, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 20 juin 2018 au 25 juin 2018.
Mme [T] a été placée en arrêt de travail pour maladie du 11 au 15 juin 2018, prolongé le 15 juin 2018 jusqu’au 9 juillet 2018, puis le 9 juillet 2018 jusqu’au 6 août 2018.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 28 juin 2018, expédiée le 2 juillet 2018, la société Magicfit a notifié à Mme [T] son licenciement pour faute grave.
Contestant son licenciement et estimant ne pas avoir été remplie de ses droits, Mme [T] a saisi, le 8 octobre 2018, le conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye afin d’obtenir le paiement de diverses sommes.
Par jugement du 23 juillet 2020, auquel la cour renvoie pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye a :
– constaté que le licenciement de Mme [T] par la société Magicfit ne repose pas sur une faute grave et est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
– fixé le salaire mensuel brut de référence de Mme [T] à 2 236 euros ;
– condamné la société Magicfit à payer à Mme [T] les sommes suivantes :
* 2 236 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
* 223,60 euros au titre des congés payés afférents,
* l 416,58 euros à titre de rappel de salaire du l3/6/2018 au 2/7/2018 (mise à pied),
* 141,65 euros au titre des congés payés afférents,
* 4 500 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 19 663,80 euros au titre de rappel de commissions,
* 1966,38 euros au titre des congés payés afférents,
* 499,43 euros à titre de rappel de salaire correspondant au repos équivalent à 25% des heures travaillées de nuit,
* 49,94 euros au titre des congés payés afférents,
* 174 euros à titre de remboursement de la moitié des frais d’assurance santé,
* 13 416 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé,
* 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonné la remise des bulletins de paie rectifiés conformes au jugement, sous astreinte de 30 euros par jour et par bulletin à compter du 60ème jour du prononcé du jugement, le Conseil se réservant le droit de liquider l’astreinte,
– débouté la société Magicfit de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes,
– condamné la société Magicfit à payer les intérêts de droit sur les salaires et éléments de salaire à compter du 11 octobre 2018 date de réception par le défendeur de la convocation à l’audience du bureau de conciliation et à compter du prononcé pour le surplus ;
– ordonné la capitalisation des intérêts sur le fondement de l’article 1343-2 du code civil,
– ordonné l’exécution provisoire en application des dispositions de l’article 515 du code de procédure civile,
– condamné la société Magicfit aux éventuels dépens comprenant les frais d’exécution du jugement.
La société Magicfit a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 14 septembre 2020.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par Rpva le 10 décembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Magicfit demande à la cour de :
– la juger bien fondée dans l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– débouter Mme [T] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Par conséquent,
– fixer le salaire mensuel brut de base de Mme [T] à la somme de 2 096,43 euros ;
– juger que le licenciement de Mme [T] repose sur une faute grave ;
– débouter Mme [T] de ses demandes d’indemnisation au titre de l’indemnité de préavis et des congés payés afférents, de l’indemnité de licenciement, du salaire de la période de mise à pied conservatoire et des congés payés afférents ainsi que de l’indemnité de rupture à hauteur de 2 mois de salaire ;
Subsidiairement :
– juger que le licenciement de Mme [T] repose sur une cause réelle et sérieuse ;
– juger que Mme [T] ne saurait percevoir une indemnité compensatrice de préavis supérieure à 1 mois de salaire, comme l’a d’ailleurs retenu le conseil de prud’hommes, soit 2 096,43 euros, et 209,64 euros au titre des congés payés afférents ;
A titre infiniment subsidiaire :
– juger que Mme [T] ne saurait percevoir de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au titre de l’article L. 1235-3 du code du travail et ce d’autant plus qu’elle n’apporte aucunement la preuve d’un quelconque préjudice ou, à titre très infiniment subsidiaire, que cette indemnité ne saurait dépasser l’équivalent d’1 mois de salaire, soit 2 096,43 euros ;
En tout état de cause :
– juger que Mme [T] a perçu l’ensemble de ses commissions sur la période de septembre 2017 à juin 2018 ;
– débouter Mme [T] de sa demande de rappel de commissions de septembre 2017 à juin 2018 ;
– juger que Mme [T] n’apporte aucune preuve des heures de nuit qu’elle prétend avoir effectuées;
– débouter Mme [T] de sa demande de rappel de salaire pour heures de nuit ;
– condamner Mme [T] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner Mme [T] aux dépens de la procédure de première instance et d’appel.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par Rpva le 24 février 2021, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, Mme [T] demande à la cour de déclarer la société Magicfit irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes, et l’en débouter et, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris et, ainsi de :
– dire que son licenciement ne repose pas sur une faute grave et est dépourvu de cause réelle et sérieuse;
– fixer son salaire de mensuel brut de référence à la somme de 2 236 euros ;
– condamner la société Magicfit à lui payer les sommes suivantes :
* 2 236 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
* 223,60 euros au titre des congés payés afférents,
* 1 416,58 euros à titre de rappel de salaire du 13 juin au 02 juillet 2018,
* 141,65 euros au titre des congés payés afférents,
* 4 500 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 19 663,80 euros au titre de rappel de commissions de septembre 2017 à juin 2018,
* 1 966,38 euros au titre des congés payés afférents,
* 499,43 euros à titre de rappel de salaire pour heures de nuit,
* 49,94 euros au titre des congés payés afférents,
* 174 euros au titre du remboursement de ¿ des cotisations mutuelles,
* 13 416 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé,
* 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– ordonner la remise des bulletins de paie rectifiés sous astreinte de 30 euros par jour et par bulletin à compter du 60ème jour du prononcé du jugement ;
– condamner la société Magicfit à payer les intérêts de droit sur les salaires et les éléments de salaire à compter du 11 octobre 2018 date de réception par le défendeur de la convocation à l’audience du bureau de conciliation
– ordonner la capitalisation des intérêts sur le fondement de l’article 1343-2 du code civil ;
– condamner la Société Magicfit à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la Société Magicfit aux entiers dépens.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 13 avril 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’existence d’un contrat de travail antérieur au 15 septembre 2017
Mme [T] soutient que si la relation contractuelle a donné lieu à la signature d’un contrat de travail à durée indéterminée écrit à effet au 15 septembre 2017, elle a commencé à travailler pour la société Magicfit dès qu’elle a reçu sa lettre d’embauche le 15 mai 2017.
En l’absence d’un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque l’existence d’un contrat de travail d’en rapporter la preuve.
L’existence d’un contrat de travail dépend des conditions de fait dans laquelle s’exerce l’activité. Le contrat de travail se caractérise par l’existence d’un lien de subordination dont il résulte que l’activité est exercée sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Si Mme [T] établit qu’elle a été présente le 13 mai 2017 sur le stand de la société à la fête de printemps de [Localité 3] et qu’elle a fait souscrire des abonnements pour le compte de l’entreprise les 7, 9 et 13 mai, le 18 juillet et les 8 et 9 septembre 2017, soit avant la signature de son contrat de travail, concomitante de l’ouverture de la salle de sport au public, elle ne démontre pas qu’elle a exercé cette activité dans le cadre d’un lien de subordination vis-à-vis de la société avant le 15 septembre 2017, le mail du 12 juin 2017 qu’elle invoque ne caractérisant pas l’existence de directives qui lui auraient été données qu’elle aurait été tenue de respecter.
L’existence d’un contrat de travail liant les parties antérieurement au 15 septembre 2017 n’est pas démontrée.
Sur la demande d’indemnité pour travail dissimulé
A défaut de relation salariale avec Mme [T] antérieure au 15 septembre 2017, il n’est pas établi que l’employeur s’est intentionnellement soustrait à l’accomplissement des formalités prescrites par l’article L. 8221-5 du code du travail, à savoir la remise d’un bulletin de paie prescrite par l’article L. 3243-2 et la déclaration préalable à l’embauche auprès des organismes de protection sociale prescrite par l’article L. 1221-10.
Il convient en conséquence de débouter Mme [T] de sa demande d’indemnité fondée sur l’article L. 8223-1 du code du travail. Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a condamné la société Magicfit à payer à Mme [T] la somme de 13 416 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé.
Sur les commissions
Le contrat de travail stipule que la salariée percevra une prime mensuelle correspondant à 10% sur chaque souscription obtenue par le fruit de son intervention ainsi que 20% sur les ventes additionnelles.
Mme [T], qui a perçu des commissions d’un montant total de 3 499,81 euros brut, revendique le paiement de la somme de 19 663,80 euros à titre de rappel de commissions pour les mois de septembre 2017 à juin 2018, ainsi que la somme de 1 966,38 euros au titre des congés payés afférents.
Aux termes de l’article 1315, devenu 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Le salarié doit pouvoir vérifier que le calcul de sa rémunération a été effectué conformément aux modalités prévues par le contrat de travail.
Lorsque le calcul de la rémunération dépend d’éléments détenus par l’employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d’une discussion contradictoire.
La société Magicfit ne produit aucun élément permettant de déterminer le montant des souscriptions obtenues par le fruit de l’intervention de Mme [T]. Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Magicfit à payer à Mme [T] la somme de 19 663,80 euros au titre du rappel de commissions ainsi que la somme de 1966,38 euros au titre des congés payés afférents.
Sur les heures de nuit
Selon l’article 5.3.3.3.1. de la convention collective nationale du sport, est considéré comme travail de nuit dans la branche la période de travail effectif qui s’étend de 22 heures à 7 heures ; est considéré comme travailleur de nuit tout travailleur dont l’horaire de travail habituel le conduit au moins 2 fois par semaine à travailler 3 heures de son temps de travail quotidien dans la plage horaire de nuit ou celui effectuant au moins 300 heures dans cette plage au cours d’une année civile.
Selon l’article 5.3.3.3.2.2., pour les salariés n’étant pas considérés comme travailleur de nuit au sens des dispositions précédentes, si les caractéristiques de leur emploi les conduisent à prolonger leur travail après 22 heures, cette contrainte et la contrepartie correspondante devront être prévues à leur contrat de travail. Les salariés qui sont amenés exceptionnellement à travailler au-delà de 22 heures, bénéficient d’un repos équivalent à 25% de la durée de travail effectuée au-delà de cet horaire.
Mme [T] sollicite le paiement de la somme de 499,43 euros à titre de rappel de salaire correspondant au repos équivalent à 25% des heures travaillées de nuit, dont elle a été privée, ainsi que la somme de 49,94 euros au titre des congés payés afférents.
Aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée du travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, l’employeur tient à la disposition de l’agent de contrôle de l’inspection du travail mentionné à l’article L. 8112-1 les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Mme [T], qui produit des plannings mentionnant qu’elle travaillait régulièrement plusieurs soirs par semaine jusqu’à 23 heures et plusieurs matins par semaine à compter de 6 heures, présente des éléments suffisamment précis quant aux heures de travail accomplies au cours de la plage horaire de 22 heures à 7 heures, auxquels l’employeur peut répondre. La société Magicfit, qui conteste ces plannings, ne verse aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée, alors qu’elle était tenue d’assurer le contrôle des heures de travail effectuées et de procéder à l’enregistrement de l’horaire accompli par la salariée. La preuve de l’accomplissement par Mme [T] d’heures de travail au-delà de 22 heures est dès lors rapportée.
La salariée, dont il n’est pas allégué qu’elle devait être considérée comme un travailleur de nuit au sens de l’article 5.3.3.3.1. de la convention collective, avait droit à un repos équivalent à 25% de la durée de travail effectuée au-delà de 22 heures.
Mme [T], qui n’a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos équivalent à 25% de la durée de travail effectuée au-delà de 22 heures, a droit à indemnisation de ce chef.
Celle-ci comporte à la fois le montant de l’indemnité de repos et le montant de l’indemnité de congés.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Magicfit à payer à Mme [T] la somme de 499,43 euros brut au titre du repos équivalent à 25% des heures travaillées de nuit ainsi que la somme de 49,94 euros brut au titre des congés payés afférents.
Sur la demande de remboursement de 50% de la cotisation à la mutuelle
Il résulte de l’article 7.2 de l’accord du 6 novembre 2015 relatif à la mise en place d’un régime de frais de santé dans la branche du sport, étendu par arrêté du 6 février 2017, que le régime de frais de santé collectif et obligatoire, dénommé ‘régime conventionnel obligatoire’, mis en place par cet accord est financé par l’employeur à hauteur de 50% minimum de la cotisation due pour le salarié.
En ne proposant pas à Mme [T] d’adhérer au régime conventionnel qu’il devait obligatoirement mettre en place et dont il devait obligatoirement la faire bénéficier, la société Magicfit a fait perdre à la salariée le bénéfice de la prise en charge de 50% minimum de la cotisation salariale à ce régime. La salariée, qui a dû, du fait de l’employeur, maintenir son adhésion à une mutuelle individuelle de frais de santé, est bien fondée à prétendre, en réparation du préjudice subi, à une indemnité de 174 euros. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a condamné la société Magicfit à payer ladite somme à Mme [T] à titre de remboursement de la moitié de ses frais d’assurance santé.
Sur le licenciement
La lettre de licenciement est rédigée comme suit :
‘Nous avons eu à déplorer de votre part des agissements constitutifs d’une faute grave.
Nous vous avions convoquée à un entretien prévu le lundi 25 juin 2018. Vous ne vous êtes pas présentée à cet entretien.
En effet, le 26 mai 2018, alors que vous auriez dû prendre votre poste à 15 heures, vous ne vous êtes pas présentée et vous avez pris la décision de vous faire remplacer par un prestataire extérieur sans m’en avertir.
Cette conduite met en cause la bonne marche de l’entreprise. Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.
En conséquence nous avons pris la décision de vous licencier pour abandon de poste ce qui constitue une faute grave.
Compte-tenu de la gravité de celle-ci et de ses conséquences, votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible.
Nous vous confirmons pour la même raison la mise à pied conservatoire dont vous faites l’objet depuis le 13 juin 2018.
Le licenciement prend donc effet dès l’envoi de cette lettre.’
Dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, il est uniquement reproché à Mme [T] de ne pas s’être présentée pour prendre son poste le 26 mai 2018 à 15 heures et d’avoir pris la décision de se faire remplacer par un prestataire extérieur sans en avertir son employeur.
Il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de la faute grave qu’il invoque à l’appui du licenciement.
La société Magicfit produit une attestation de M. [B] [R], coach sportif, qui indique avoir pris en charge la surveillance du plateau et de l’accueil en alternance le 26 mai 2018 de 16h00 à 19h00, afin de ne pas laisser l’accueil sans attention et ainsi ne pas négliger l’arrivée des clients en l’absence de Mme [T].
L’attestation de Mme [I] [N], commerciale comme Mme [T] au sein de la société Magicfit et soeur de M. [X] [N], gérant de la société, ne fait pas état de faits en date du 26 mai 2018.
Mme [T] justifie :
– avoir adressé à [I] [N] le vendredi 25 mai 2018 à 22h23 un message lui indiquant qu’elle est à bout de force, qu’elle a mal à la gorge et des courbatures, limite grippe, qu’elle va dormir et qu’elle verra le demain et lui demandant de prévenir [W] le lendemain matin ;
– avoir adressé à [X] [N] le vendredi 25 mai à 22h53 un sms pour le prévenir qu’elle est complètement grippée, qu’elle verra le lendemain au réveil et que si ça ne va pas mieux, elle ira chez le médecin car elle ne tient plus ;
– avoir reçu de [I] [N] le samedi 26 mai 2018 à 8h50, un message l’informant qu’elle a prévenu [W] mais qu’elle n’a toujours pas de réponse, qu’il doit sans doute dormir ;
– avoir reçu de [X] [N] le samedi 26 mai à 9h03 un sms lui indiquant qu’il ne vient pas aujourd’hui, qu’il a ses enfants et lui souhaitant bon courage et bonne journée ;
– avoir adressé à [I] [N] un message lui indiquant qu’elle ne tient plus, qu’elle a mal partout, qu’elle va voir avec [B] le coach pour qu’il fasse de l’accueil, que comme [W] ne peut pas venir, soit on fait ça, soit [W] trouve un remplaçant ;
– avoir reçu de [I] [N] un message compatissant lui demandant si elle veut qu’elle demande à [B], lui indiquant qu'[B] le stagiaire a dit pouvoir faire l’accueil de 14 h à 16h, mais qu’il part ensuite et lui indiquant qu’après, [B] le coach pourrait le faire de 16 h à 20 h ;
– avoir adressé à [I] [N] un message lui demandant si elle les a eus, lui indiquant que [W] n’est pas là avant lundi, qu’elle va dormir et lui demandant de lui dire pour [B] le coach ;
– avoir adressé à [X] [N] le samedi 26 mai à 13h13 un sms pour le prévenir qu’elle est toujours très mal et très grippée, qu’elle ne peut pas parler, que le bruit lui fait mal à la tête et qu’elle a des courbatures, que donc, pour qu’elle puisse dormir un minimum, [B] va faire l’accueil et qu’elle viendra à la fin le remplacer.
Elle produit une attestation de M. [B] [R], coach sportif, qui indique l’avoir vue prendre son poste le 26 mai 2018 à 19h00.
La société Magicfit ne démontre pas que Mme [T] n’a pas informé le gérant de son absence et de son remplacement envisagé à l’accueil par le coach sportif. Il est établi que le gérant, qui devait être joignable pour répondre aux imprévus, notamment gérer les absences du personnel, est resté taisant nonobstant les messages de la salariée. Il n’est pas démontré que la surveillance de l’accueil permettait au coach sportif, prestataire extérieur, d’accéder à des données confidentielles de l’entreprise.
La société Magicfit ne justifie pas non plus avoir demandé à Mme [T] de lui remettre un certificat médical pour justifier son absence le samedi 26 mai 2018 de 15h à 19h, qui n’a donné lieu à aucune retenue pour absence injustifiée sur le salaire du mois de mai 2018.
Le seul fait que Mme [T] ne produise pas de certificat médical pour justifier de son état de santé le samedi 26 mai 2018, ne caractérise ni une faute grave, ni une cause réelle et sérieuse de licenciement. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a dit le licenciement de Mme [T] sans cause réelle et sérieuse.
Sur l’indemnité compensatrice de préavis
En l’absence de faute grave, Mme [T] qui comptait moins de deux ans d’ancienneté, est bien fondée à prétendre en application des dispositions conventionnelles et des dispositions de son contrat de travail, à un délai de préavis d’un mois.
En application de l’article L. 1234-5 du code du travail, l’indemnité compensatrice de préavis correspond aux salaires et avantages qu’aurait perçus le salarié s’il avait travaillé pendant cette période. Si la rémunération de ce dernier est composée d’une partie fixe et d’une partie variable, il convient de se référer à la moyenne de la rémunération pour calculer le montant de cette indemnité.
Mme [T] revendique une indemnité compensatrice de préavis calculée sur la rémunération mensuelle brute moyenne qu’elle a effectivement perçue de septembre 2017 à mai 2018, soit 2 236 euros par mois, indépendamment des rappels de commissions ci-dessus alloués.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Magicfit à payer à la salariée la somme de 2 236 euros demandée au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ainsi que la somme de 223,60 euros au titre des congés payés afférents.
Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
En application des dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, Mme [T] peut prétendre à une indemnité à la charge de l’employeur d’un montant maximal d’un mois de salaire brut, calculé sur la base de la rémunération qu’elle aurait dû percevoir et non sur celle de la rémunération qu’elle a effectivement perçue du fait des manquements de l’employeur à l’obligation de payer les commissions convenues.
La perte injustifiée de son emploi a causé à la salariée un préjudice que la cour fixe à la somme de 3 500 euros. Il convient en conséquence d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Magicfit à payer à la salariée la somme de 4 500 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société Magicfit à payer à Mme [T] la somme de 3 500 euros de ce chef.
Sur le rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire
En l’absence de faute grave, la mise à pied conservatoire est injustifiée. Mme [T] est donc bien fondée à prétendre au paiement de son salaire pour la période du 13 juin au 2 juillet 2018, soit non seulement son salaire fixe, qui a donné lieu à une retenue indue d’un montant total de 1 184,08 euros, soit 1 039,18 euros au regard du salaire de base pour 35 heures par semaine (965,16 + 74,02) et 148,90 euros au regard des heures supplémentaires contractuelles (135,55 +10,35), mais également les commissions qu’elle aurait perçues si elle avait travaillé durant cette période.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Magicfit à payer à la salariée la somme de l 416,58 euros qu’elle revendique à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire ainsi que la somme de 141,65 euros au titre des congés payés afférents.
Sur les intérêts
Les créances à caractère salarial sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d’orientation, soit le 11 octobre 2018. Le jugement sera confirmé de ce chef.
La créance d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est productive d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Il y a lieu d’ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.
Sur la remise de bulletins de paie rectifiés
Il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a ordonné à la société Magicfit de remettre à Mme [T] des bulletins de paie conformes à la décision et de l’infirmer en ce qu’il prononce une astreinte, laquelle n’est pas nécessaire.
Sur les dépens et l’indemnité de procédure
La société Magicfit, qui succombe partiellement, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel et sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
Il convient de la condamner, en application de l’article 700 du code de procédure civile, à payer à Mme [T] la somme de 3 000 euros pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel, en sus de la somme de 1 000 euros qu’elle a été condamnée à payer à celle-ci par le conseil de prud’hommes pour les frais irrépétibles exposés en première instance.
PAR CES MOTIFS :
La COUR,
Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,
Infirme partiellement le jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye en date du 23 juillet 2020 et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :
Condamne la société Magicfit à payer à Mme [Y] [T] la somme de 3 500 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;
Déboute Mme [Y] [T] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé ;
Dit n’y avoir lieu d’assortir la remise de bulletins de paie conformes au jugement du prononcé d’une astreinte ;
Confirme pour le surplus les dispositions non contraires du jugement entrepris ;
Y ajoutant :
Condamne la société Magicfit à payer à Mme [Y] [T] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel ;
Déboute la société Magicfit de sa demande d’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel ;
Condamne la société Magicfit aux dépens d’appel.
– Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– Signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER,LA PRÉSIDENTE,