Conditions Générales de Vente : 9 mars 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 21/00429

·

·

Conditions Générales de Vente : 9 mars 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 21/00429

SB/IC

S.A.S. AVENIR AGRO

C/

E.A.R.L. DE MARSOIS

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE DIJON

2ème chambre civile

ARRÊT DU 09 MARS 2023

N° RG 21/00429 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FVF6

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 04 mars 2021,

rendue par le tribunal judiciaire de Chaumont – RG : 18/01073

APPELANTE :

S.A.S. AVENIR AGRO prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis :

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Isabelle GAMBINI, avocat au barreau de HAUTE-MARNE

INTIMÉE :

E.A.R.L. DE MARSOIS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié au siège social sis :

[Adresse 4]

[Localité 1]

représentée par Me François-Xavier BERNARD, membre de la SELARL CABINET D’AVOCATS PORTALIS ASSOCIES – CAPA, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 45

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 05 janvier 2023 en audience publique devant la cour composée de :

Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, Président,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

Sophie BAILLY, Conseiller, qui a fait le rapport sur désignation du Président,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 09 Mars 2023,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

La SAS Avenir Agro est une société dont l’objet social est l’achat et la vente de tous produits agricoles et de tous produits pour l’agriculture, société existant depuis le 12 juillet 2000.

Son activité consiste, d’une part, à acheter auprès des agriculteurs les produits céréaliers ou colza provenant de leurs récoltes, et d’autre part à vendre à ces mêmes agriculteurs, des intrants (semences, engrais, produits de traitement et de défense des cultures).

Pour le secteur haut-marnais, la SAS Avenir Agro a recruté un agent technico-commercial la représentant localement.

L’EARL de Marsois est une exploitation agricole immatriculée depuis le 9 mai 2006, dont le gérant actuel est Madame [W] [V] épouse [U].

Depuis le mois de mars 2007, la SAS Avenir Agro était en relations d’affaires habituelles avec l’EARL de Marsois, laquelle lui achetait des produits phytosanitaires.

La SAS Avenir Agro expose que comme habituellement en matière agricole, les produits étaient livrés, facturés puis réglés ultérieurement par l’acquéreur en fonction de l’année culturale, particulièrement en fonction de la trésorerie de l’exploitation agricole.

Les règlements intervenaient soit par traite, soit par chèque.

La SAS Avenir Agro soutient que les trois factures suivantes de livraison de produits sont demeurées impayées :

– FT 01173087 du 30 septembre 2016 pour un montant TTC de 6 604,52 euros,

– FT 01174385 du 31 octobre 2016 pour un montant TTC de 6 151,02 euros,

– FT 01176552 du 31 décembre 2016 pour un montant TTC de 1 676,64 euros,

l’ensemble constituant une somme en principal de 14 432,18 euros,

Faute de règlement, la SAS Avenir Agro a fait assigner le 20 novembre 2018, au visa des articles 1104 et suivants et 1353 et suivants du code civil, l’EARL de Marsois devant le tribunal de grande instance de Chaumont, afin qu’elle soit notamment condamnée à lui verser les sommes suivantes :

– un principal de 14 432,18 euros en principal outre intérêts au taux contractuel de 14,40 % annuel à compter du 1er janvier 2018 jusqu’à complet paiement,

– 3 341 euros au titre des intérêts contractuels à compter du 30 août 2016 jusqu’au 31 décembre 2017, dont 1 182,78 euros au titre des factures non contestées et 2 158,22 euros au titre des factures principales litigieuses,

– 120 euros au titre de l’indemnité forfaitaire prévue par l’article D 441-5 du code du commerce (soit 40 euros par facture de fourniture de produits),

– 144,32 euros au titre de la clause pénale contractuelle sur le montant en principal.

Par jugement du 4 mars 2021, le tribunal judiciaire de Chaumont a débouté la société Avenir Agro de ses demandes et l’a condamnée à payer à l’EARL de Marsois la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Sur la demande en paiement des factures litigieuses, il a considéré en substance, au visa de l’article 1360 du code civil, que dans le domaine agricole, il existe un usage conduisant à ne pas établir de contrat ou de bons de commande pour chaque livraison, mais qu’au cas d’espèce, la preuve de l’obligation au paiement de l’EARL de Marsois n’était pas rapportée.

Il a rejeté la demande en paiement des intérêts de retard relatifs à des factures antérieures au 30 septembre 2016 aux motifs que la SAS Avenir Agro ne produisait ni ces factures, ni le justificatif de leur règlement et de l’acceptation par l’EARL de Marsois des conditions générales de vente faisant mention d’intérêts de 14,60 % alors que les factures d’intérêts produites indiquent un taux d’intérêts de 14,40 %.

Appel a été formé le 29 mars 2021 par la S.A.S Avenir Agro

*****

Aux termes de ses écritures notifiées par RPVA le 28 juin 2021, la SAS Avenir Agro demande à la cour, au visa notamment des articles 1104 et suivants et 1353 et suivants du code civil, de réformer le jugement dont appel et statuant à nouveau de :

– la juger recevable et bien fondée en ses demandes.

– en conséquence, condamner l’EARL de Marsois à lui payer les sommes de :

. 14 432,18 euros en principal, outre intérêts au taux contractuel de 14,40 % annuel à compter du 1er janvier 2018 jusqu’à complet paiement,

. 3 341 euros au titre des intérêts contractuels à compter du 30 août 2016 jusqu’au 31 décembre 2017, dont 1 182,78 euros au titre de factures non contestées, et 2 158,22 euros au titre des factures principales litigieuses,

. 120 euros au titre de l’indemnité forfaitaire prévue par l’article D. 441-5 du code de commerce (soit 40 euros par facture de fournitures de produits),

. 144,32 euros au titre de la clause pénale contractuelle sur le montant en principal.

– débouter l’EARL de Marsois de toute demande plus ample ou contraire.

– condamner l’EARL de Marsois aux entiers dépens et à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses écritures notifiées par RPVA le 22 juillet 2021, l’EARL de Marsois demande à la cour de :

– débouter la SAS Avenir Agro de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

– condamner la SAS Avenir Agro aux entiers dépens et à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures signifiées conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 décembre 2022.

MOTIVATION

– Sur la demande en paiement du principal de 13 432,18 euros, outre intérêts, clause pénale et indemnité forfaitaire

Pour critiquer le jugement déféré, l’appelante fait essentiellement valoir que :

– les parties ont été en relations d’affaires habituelles de 2007 à 2016, sans formalisme dans la rédaction de bons de commande ou de livraison, comme il est d’usage en matière agricole,

– l’existence d’une relation contractuelle habituelle justifie de l’impossibilité d’un écrit préconstitué,

– son chauffeur-livreur, ainsi qu’il en atteste, déposait les marchandises commandées par l’EARL de Marsois, directement dans le local de stockage, hors présence de tout responsable de l’EARL,

– la facturation intervenait après livraison, l’échéance étant fixée à 30 jours fin de mois, les règlements intervenant habituellement par traite ou par chèque en fonction de l’année culturale,

– les éléments de comptabilité versés aux débats, certifiés par un commissaire aux comptes, forment un commencement de preuve par écrit disposant d’une présomption de sincérité alors que l’EARL de Marsois se garde, pour sa part, de produire tout élément comptable,

– la TVA est payée sur des factures émises et non acquittées, ce qui prouve que les marchandises ont été livrées à l’EARL de Marsois,

– l’EARL de Marsois a eu connaissance des factures litigieuses au plus tard le 13 avril 2017, à la suite de sa demande et d’un relevé de compte arrêté au 12 avril 2017, mentionnant non seulement lesdites factures litigieuses, mais diverses autres et faisant état du « règlement le 12 avril de 11 596,17 euros correspondant à 5 factures déjà réglées en octobre 2016  » et d’un solde dû pour la récolte 2016 de 13 045,08 euros,

– les délais de paiement, très hétérogènes, sont habituels en matière agricole et l’EARL de Marsois a pu ainsi bénéficier de très larges délais avant de s’acquitter des factures dues par elle,

– la redevance sur la pollution diffuse a été acquittée, ce qui prouve encore que les marchandises ont été délivrées à l’EARL de Marsois, étant rappelé que cette redevance est d’environ 3 % du prix de vente des produits facturés à l’année N-1, à payer à l’Agence de l’eau même en l’absence de règlement de la facture de vente par le client.

Les factures dont la SAS Avenir Agro réclame le paiement sont les suivantes :

– facture n° FT 01173087 du 30 septembre 2016 pour un montant TTC de 6 604,52 euros,

– facture du FT 01174385 du 31 octobre 2016 pour un montant TTC de 6 151,02 euros,

– facure du FT 01176552 du 31 décembre 2016 pour un montant TTC de 1 676,64 euros.

L’appelante se réfère à un assouplissement des règles probatoires en matière agricole, d’ailleurs admis par le premier juge, selon lequel alors qu’elle était manifestement liée à l’EARL de Marsois par un contrat à exécution successive, elle n’est pas tenue de produire pour chaque livraison de produits facturés, un bon de commande et un bon de livraison signés de l’intimée.

Il n’en demeure pas moins que la preuve de l’obligation de l’EARL de Marsois au paiement des factures litigieuses doit être rapportée par l’appelante et que cette preuve ne peut pas exclusivement résulter d’éléments émanant de l’appelante, lesquels ne peuvent en aucun cas constituer des commencements de preuve par écrit au sens de l’article 1362 du code civil. Ces éléments doivent être corroborés par des éléments provenant de l’EARL de Marsois, voire de tiers.

Or, en l’espèce, alors que l’EARL de Marsois conteste formellement avoir reçu les produits faisant l’objet des trois factures litigieuses (cf notamment le courrier recommandé du 21 février 2018 adressé à M. [Z] [X], Avenir Agro) et allègue, avec vraisemblance, avoir commencé en 2016 à se fournir auprès d’un tiers, devenu son founisseur exclusif à compter de 2017, tous les éléments tendant à prouver les livraisons des produits facturés proviennent uniquement de la SAS Avenir Agro.

Il en est ainsi des documents comptables qu’elle produit aux débats tels le rapport du commissaire aux comptes relatif à l’exercice clos le 30 juin 2017, l’extrait de compte tiers du 1er juillet 2000 au 26 octobre 2018, l’encours tiers arrêté au 29 janvier 2018 internes à la SAS Avenir Agro.

Le fait que la SAS Avenir Agro ait réglé la TVA afférente aux factures litigieuses et la redevance pour pollution diffuse due au titre des produits facturés n’est pas davantage probant, étant rappelé que les réglements de cette taxe et de cette redevance interviennent sur la base de déclarations de la SAS Avenir Agro et étant observé que les documents émanant de l’agence de l’eau ne comportent aucune référence à des facturations établies au nom de l’EARL de Marsois et a fortiori à des produits livrés à cette dernière.

Enfin, s’agissant de l’attestation établie le 10 septembre 2018 par le chauffeur-livreur de la SAS Avenir Agro, outre que son auteur ne peut pas être considéré comme un tiers, elle fait état sans précision de date, de nature et de quantité de produits, de livraisons à l’EARL de Marsois en l’absence des clients, alors que cette dernière produit des témoignages et une photographie et se réfère aux conditions générales de vente Avenir Agro, dont il ressort que :

– d’une part, la délivrance de produits phytosanitaires étant réglementée, il était contractuellement convenu qu’ils soient réceptionnés par leur destinataire, au besoin via un mandataire,

– d’autre part, il était d’usage que les produits de la SAS Avenir Agro soient livrés chez un intermédiaire auprès duquel l’intimée et d’autres agriculteurs venaient les chercher,

– enfin, le local de stockage dans lequel l’EARL de Marsois conserve ces produits n’est pas aisément accessible à un tiers hors la présence d’une personne physique, gérant, associé voire salarié de cette EARL.

En conséquence, la SAS Avenir Agro échouant à rapporter la preuve qui lui incombe, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes en paiement des trois factures précitées, des intêrêts échus au 31 décembre 2017 et à échoir à compter du 1er janvier 2018 sur chacune d’entre elles, d’une indemnité forfaitaire et d’une clause pénale.

– Sur la demande en paiement d’intérêts contractuels afférents à des factures antérieures à septembre 2016 payées avec retard

Cette demande porte sur la somme de 1 182,78 euros arrêtée au 28 février 2017.

Les intérêts ont été calculés au taux annuel de 14,40 % :

– à compter du 30 août 2016, sur la facture FT01159070 du 30 novembre 2015 d’un montant de 2 218,08 euros,

– à compter du 30 septembre 2016 sur les factures suivantes :

. FT01164230 du 31 mars 2016 d’un montant de 5 861,20 euros

. FT01166040 du 30 avril 2016 d’un montant de 8 124,06 euros

. FT01167285 du 31 mai 2016 d’un montant de 5 146,54 euros

. FT01168923 du 30 juin 2016 d’un montant de 3 291,37 euros.

La cour constate que l’EARL de Marsois ne présente aucun moyen de défense à l’encontre de cette demande en paiement.

Si les conditions générales de vente de l’appelante font état d’un taux contractuel de 14,60 %, elle est libre d’appliquer un taux inférieur, étant précisé que le taux pratiqué de 14,40 % est celui auquel l’intimée elle-même indique que les intérêts moratoires étaient calculés : cf avant-dernier paragraphe de la page 2 de ses conclusions.

Par ailleurs, l’EARL de Marsois ne conteste pas avoir été débitrice des 5 factures listées ci-dessus que l’appelante produit aux débats en cause d’appel. Elle ne conteste pas davantage les avoir réglées et ne prétend pas l’avoir fait avant le 28 février 2017, date à laquelle les intérêts ont été arrêtés, alors que l’appelante expose, documents comptables à l’appui, que le règlement de ces factures n’est intervenu qu’en avril 2017.

En conséquence, il convient sur ce point d’infirmer le jugement déféré et de condamner l’EARL de Marsois à payer à la SAS Avenir Agro la somme de 1 182,78 euros.

– Sur les frais de procès :

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, l’EARL de Marsois doit supporter les dépens de première instance et d’appel.

Les conditions d’application de l’article 700 du code de procédure civile ne sont réunies qu’en faveur de la SAS Avenir Agro. Toutefois dans les circonstances particulières de l’espèce, la cour laisse à sa charge l’intégralité des frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés tant en première instance qu’en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a :

– débouté la SAS Avenir Agro de sa demande en paiement de la somme de 1 182,78 euros au titre d’intérêts sur des factures émises antérieurement à septembre 2016,

– statué sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau sur ces points et ajoutant au jugement déféré,

Condamne l’EARL de Marsois à payer à la SAS Avenir Agro la somme de 1 182,78 euros d’intérêts,

Condamne l’EARL de Marsois aux dépens de première instance et d’appel,

Dit n’y avoir lieu à aucune application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x