Conditions Générales de Vente : 8 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/04670

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Conditions Générales de Vente : 8 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/04670

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 08/06/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/04670 – N° Portalis DBVT-V-B7F-T2GK

Jugement n° 2020016237 rendu le 07 juillet 2021 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

APPELANTE

SARL Parc de la Renardière représentée par son gérant, M. [E] [X]

ayant son siège social [Adresse 3]

représentée par Me Florent Méreau, avocat constitué ès qualités d’administrateur provisoire de Me Etienne Chevalier, substitué par Me Damien Grzeziczak, avocats au barreau de Lille

INTIMÉE

SAS S.E.L. Groupe prise en la personne de son représentant légal domiclié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Laurent Guilmain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l’audience publique du 29 mars 2023 tenue par Clotilde Vanhove magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Dominique Gilles, président de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Clotilde Vanhove, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 08 juin 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 8 mars 2023

EXPOSE DU LITIGE

La société Parc de la Renardière, qui est spécialisée dans le secteur d’activité de la production d’électricité, a suivant devis du 25 juin 2013 signé le 5 septembre 2013, commandé à la société Sel groupe une prestation de fourniture et d’installation d’une «’Command-Web-Com’» (CWC), appareillage électronique permettant de superviser à distance le poste de livraison d’un parc éolien, et d’un convertisseur fibre optique pour un montant de 31’400 euros HT pour son site La Renardière.

La société Parc de la Renardière s’est acquittée d’un acompte de 30% à la commande, soit la somme de 9’420 euros HT.

Le matériel a été livré et installé les 2 et 3 décembre 2014.

La société Parc de la Renardière a dénoncé des coupures du parc éolien fin 2014 et début 2015.

La société Sel groupe, estimant le 22 avril 2015 que le matériel était opérationnel et fonctionnel après avoir réalisé des essais, a sollicité de la société Parc de la Renardière le paiement du solde des factures.

Après plusieurs relances et mises en demeure, la société Sel groupe a sollicité du président du tribunal de commerce de Nantes d’obtenir une ordonnance d’injonction de payer. Par ordonnance du 21 avril 2016, le président de ce tribunal de commerce a enjoint à la société Parc de la Renardière de payer à la société Sel groupe les sommes de 26’376 euros en principal, outre intérêts aux taux légal à compter du 1er mars 2016, 257,55 euros au titre des intérêts échus, 80 euros à titre d’indemnité forfaitaire, 13,34 euros au titre des frais accessoires et 39 euros au titre des dépens.

La société Parc de la Renardière a formé opposition à cette ordonnance et par jugement du 17 mai 2018, le tribunal de commerce de Lille Métropole a’:

– dit recevable mais mal fondée l’exception d’incompétence,

– débouté la société Parc de la Renardière de son exception d’incompétence et s’est déclaré compétent,

– condamné la société Parc de la Renardière à payer à la société Sel groupe la somme de 7’476 euros au titre de la facture du 16 mars 2015 avec intérêt égal à trois fois le taux légal à compter du 17 avril 2015 et anatocisme, et débouté la société Sel groupe du surplus de ses demandes de pénalités au titre de cette facture et de sa demande d’exécution provisoire au titre de cette facture,

– avant dire-droit sur les autres demandes des parties, nommé en qualité d’expert M. [Z], avec mission de’: convoquer les parties et leurs conseils, se faire remettre tous documents et pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, donner son avis sur les désordres et dommages dénoncés par la société Parc de la Renardière concernant l’automate de contrôle à distance CWC installé par la société Sel groupe fin 2014, préconiser les solutions nécessaires pour remédier aux désordres et dommages et évaluer leurs coûts, fournir au tribunal tous éléments techniques ou factuels de nature à lui permettre de déterminer les responsabilités encourues, se faire remettre tous documents et pièces qu’il estimera utiles,

– débouté la société Parc de la Renardière du surplus de ses demandes au titre de la mission de l’expert,

– fixé à 2’000 euros le montant de la provision à consigner par la société Sel groupe avant le 1er juillet 2018 au greffe de ce tribunal, et dit qu’à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l’expert sera caduque et l’instance poursuivie,

– dit que le rapport de l’expert devra être déposé au greffe du tribunal dans un délai de six mois à compter de la consignation,

– ordonné l’exécution provisoire de la mesure d’instruction,

– sursis à statuer dans l’attente du rapport d’expertise sur toutes les demandes des parties autres que l’exception d’incompétence et le règlement de la facture de 7’476 euros du convertisseur fibre optique,

– réservé les dépens.

L’expert a déposé son rapport le 30 novembre 2018.

Après réinscription de l’affaire, par jugement contradictoire du 7 juillet 2021, le tribunal de commerce de Lille Métropole a :

– débouté la société Parc de la Renardière de tous ses moyens, fins et conclusions,

– condamné la société Parc de la Renardière à payer à la société Sel groupe la somme de 15’750 euros HT avec intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2015 et avec anatocisme,

– condamné la société Parc de la Renardière à payer à la société Sel groupe la somme de 2’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement nonobstant appel et sans caution,

– condamné la société Parc de la Renardière aux frais et dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise judiciaire,

– débouté la société Sel groupe du surplus de ses demandes.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 31 août 2021, la société Parc de la Renardière a relevé appel du jugement en toutes ses dispositions, à l’exception de l’exécution provisoire et du débouté du surplus des demandes de la société Sel groupe.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par la voie électronique le 27 avril 2022, la société Parc de la Renardière demande à la cour de :

– dire mal jugé et bien appelé et infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

– statuer à nouveau,

à titre principal’:

– juger que la société Sel groupe a été défaillante dans l’exécution de ses obligations contractuelles,

– juger que la société Sel groupe a manqué à son devoir de conseil,

– prononcer la résolution du contrat de vente aux torts de la société Sel groupe,

– condamner la société Sel groupe au paiement de la somme de 11’304 euros TTC (somme versée au titre de l’acompte par elle pour la fourniture et l’installation du CWC),

– dire et juger que les préjudices subis par elle sont la conséquence directe des manquements de la société Sel groupe,

– en conséquence, condamner la société Sel groupe au paiement de la somme de 7’985,30 euros au titre du coût des travaux de reprise et 7’172,05 euros au titre de l’indemnisation de la perte d’exploitation,

– débouter la société Sel groupe de l’ensemble de ses demandes (notamment de sa demande de paiement du solde de la facture), fins et conclusions,

à titre subsidiaire, et si la cour devait entrer en voie de condamnation à son encontre,

– ordonner la compensation entre les sommes dues par elle et les indemnités à verser par la société Sel groupe au titre des préjudices subis (15’157,35 euros TTC),

dans tous les cas,

– condamner la société Sel groupe au paiement de la somme de 15’000 euros à titre de dommages et intérêts pour mauvaise foi,

– condamner la société Sel groupe au paiement de la somme de 10’000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Sel groupe aux entiers frais et dépens, en ce compris le coût de l’expertise.

Elle fait valoir que’:

l’expert a mis en avant plusieurs dysfonctionnements’: les interfaces avec l’environnement Senvion et Micom ne fonctionnent pas, les paramètres clients ne sont pas remplis, les valeurs de production manquent, les mesures de courant, tension, puissance ne fonctionnent pas et des données sont incohérentes dans les câblages’; il a également confirmé que les essais à réaliser avant mise en service n’avaient pas été effectivement réalisés et a considéré que la CWC n’était pas opérationnelle en l’état’;

l’installation n’a été finalisée et mise en service que plus de quatre ans et demi après sa livraison et l’expert a retenu la responsabilité de la société Sel groupe pour ne pas avoir assuré la mise en service et les essais de la CWC, que la responsabilité de la société Sel groupe devait être engagée pour manquement à son devoir de conseil et qu’une résolution du contrat aux torts de la société Sel groupe pouvait être engagée.

Sur la résolution du contrat, elle fait valoir sur le fondement de l’article 1184 ancien du code civil, que’:

– suite à l’installation du matériel, elle était dans l’incapacité de le mettre en fonction car elle ne disposait pas du code source informatique lui permettant de confier la prestation à une entreprise tierce, malgré ses nombreuses demandes d’intervention pour finaliser l’installation formées auprès de la société Sel groupe’; cette dernière ne s’est exécutée qu’à la suite des opérations d’expertise (intervention du 31 mars 2019), le matériel ayant donc été mis en fonction plus de quatre ans après son installation alors qu’il avait vocation à être amorti sur trois ans et avait une durée de vie de dix ans environ’;

– elle a mis à la disposition de la société Sel groupe une connexion internet ainsi que plusieurs adresses IP’;

– les interventions ponctuelles de la société Sel groupe n’ont eu pour vocation que de supprimer les nuisances (coupures intempestives) en procédant à l’arrêt du CWC’; en débranchant le matériel il est évident qu’elle n’avait plus de coupures, mais elle ne disposait plus des fonctionnalités pour lesquelles elle avait acquis le matériel’;

– la société Sel groupe a manqué à son obligation de délivrance de la chose’;

– la société Sel groupe lui a fourni un produit défectueux qui a entraîné plusieurs accidents’;

– si l’absence de fonctionnement de la CWC pendant cinq ans n’a pas eu d’incidence sur la production, ce matériel avait vocation à lui permettre de commander à distance le site de production et ainsi avoir une visibilité sur le parc éolien, ce dont elle n’a pu bénéficier’;

– la résolution du contrat doit ainsi être ordonnée pour défaut d’exécution et non respect des délais de livraison.

Sur le fondement de l’article 1240 du code civil, elle sollicite la réparation de ses préjudices liés aux fautes et manquements de la société Sel groupe, constitués des travaux de reprise qui ont été nécessaires et des pertes d’exploitation en raison des arrêts intempestifs du parc éolien entre le 3 décembre 2014 et le 3 mai 2015.

Subsidiairement, si la cour entrait en voie de condamnation à son encontre, elle sollicite, sur le fondement de l’article 1290 du code civil, la compensation entre ces sommes et celles qui lui sont dues par la société Sel groupe en indemnisation de ses préjudices.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par la voie électronique le 15 février 2022, la société Sel groupe demande à la cour de :

sur l’appel principal’:

– le déclarer recevable mais mal fondé,

– débouter la société Parc de la Renardière de l’ensemble de ses demandes,

– confirmer le jugement exception faite de la disposition relative aux pénalités de retard et dommages et intérêts complémentaires,

sur l’appel incident’:

– le dire recevable et bien fondé,

– réformer le jugement du chef des pénalités de retard dues en application de l’article L.441-6 du code de commerce et dire et juger que la somme de 26’376 euros sera assortie des pénalités prévues par l’article L.441-6 du code de commerce à compter du 12 février 2015 s’agissant du montant de la facture du 12 janvier 2015, et à compter du 16 avril 2015 s’agissant du montant de la facture du 16 mars 2015,

– réformer le jugement du chef des pénalités de retard dues en application des conditions générales de vente et condamner la société Parc de la Renardière à la somme de 391,68 euros et en ordonner la capitalisation par année entière,

– réformer le jugement «’du chef du jugement’» et condamner la société Parc de la Renardière à lui payer la somme de 1’500 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires,

y ajoutant,

– condamner en cause d’appel la société Parc de la Renardière au paiement d’une somme de 10’000 euros au titre de l’application de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais d’expertise judiciaire.

Elle soutient que sa créance est bien fondée, puisqu’elle a exécuté sa prestation et peut donc, sur le fondement de l’ancien article 1184 du code civil, en solliciter le paiement intégral. Si l’expert indique qu’elle n’avait pas finalisé la mise en service de la CWC, il précise que cette situation n’a pas eu d’influence directe sur la production de la société Parc de la Renardière à l’exception de neuf coupures apparues qui ne sont pas des dommages directs’. La société Parc de la Renardière ne peut donc être exonérée du paiement du solde des factures.

S’agissant de la demande de résolution du contrat présentée par la société Parc de la Renardière, elle soutient, sur le fondement de l’article L.110-4 du code de commerce, que cette demande et celle de restitution de l’acompte sont prescrites depuis le 25 juin 2018. Elle ajoute, sur le fondement de l’article 528-1 du code de procédure civile, que ses demandes se heurtent à l’autorité de la chose jugée attachée au jugement du 17 mai 2018 qui a condamné la société Parc de la Renardière et ordonné une mesure d’expertise, devenu irrévocable.

Elle fait valoir que pour les préjudices qu’elle invoque, la société Parc de la Renardière’:

– ne justifie pas des travaux de reprise, se contentant de communiquer un ensemble de bons d’intervention sans faire le lien avec les désordres,

– sur la perte d’exploitation, ne tient pas compte des dispositions de l’article 1150 du code civil et de l’article 11.5 des conditions générales de vente qui excluent les dommages indirects et/ou immatériels tels que les pertes d’exploitation.

Elle estime la demande de compensation non applicable, en l’absence de créances réciproques, sur le fondement de l’article 1289 ancien du code civil.

Elle expose, concernant son appel incident, que les pénalités de retard prévues par l’article L.441-6 du code de commerce sont dues, de même que les pénalités de retard prévues par les conditions générales de vente.

Enfin, elle souligne qu’en raison de sa volonté indéniable de trouver une solution amiable au litige et de la mauvaise foi évidente de la société Parc de la Renardière, refusant de régulariser une créance certaine, l’attitude déloyale de la société Parc de la Renardière doit être sanctionnée par l’octroi de dommages et intérêts complémentaires pour résistance abusive.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 8 mars 2023. Plaidé à l’audience du 29 mars 2023, le dossier a été mis en délibéré au 8 juin 2023.

MOTIVATION

1) Sur la recevabilité des demandes de la société Parc de la Renardière

Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut du droit d’agir tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L’article 125 du même code précise que les fins de non-recevoir doivent être relevées d’office lorsqu’elles ont un caractère d’ordre public, notamment lorsqu’elles résultent de l’inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l’absence d’ouverture d’une voie de recours. Le juge peut relever d’office la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée.

L’article 954 du même code prévoit que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

En l’espèce, si la société Sel groupe invoque dans la discussion de ses conclusions la prescription de certaines demandes de la société Parc de la Renardière et l’autorité de la chose jugée, elle ne formule aucune demande tendant au prononcé de l’irrecevabilité des demandes de la société Parc de la Renardière dans le dispositif de ses conclusions, mais sollicite simplement la confirmation du jugement, qui n’a pas statué sur la recevabilité des demandes, et le débouté des demandes.

S’agissant de la fin de non recevoir tirée de la prescription, la cour, qui ne peut la relever d’office, ne peut que constater qu’elle n’en est pas saisie par la société Sel groupe.

Concernant la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée, si le juge est tenue de relever d’office la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée attachée à une décision précédemment rendue dans la même instance, la cour constate que le jugement du 17 mai 2018 n’a pas statué sur une demande de résolution du contrat, qui n’était pas formée par la société Parc de la Renardière à ce stade de la procédure.

Il n’apparaît donc pas à la cour, qui n’est pas saisie d’une demande en ce sens dans le dispositif des conclusions de la société Sel groupe, qu’une fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée doive être soulevée d’office relativement aux demandes de la société Parc de la Renardière tendant à la résolution du contrat et à la restitution de l’acompte.

2) Sur les demandes de résolution du contrat formée par la société Parc de la Renardière et de restitution de l’acompte versé

Aux termes de l’article 1184 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

Le juge apprécie souverainement la gravité du manquement aux obligations. La sanction de la résolution suppose un retard ou un non-respect des obligations d’une gravité suffisante ou susceptible d’atteindre de façon importante l’objet du contrat.

Il convient en premier lieu de préciser que si dans le dispositif de ses conclusions la société Parc de la Renardière sollicite qu’il soit «’jugé que la SAS SEL a manqué à son devoir de conseil’», conformément aux dispositions de l’article 954 du code de procédure civile aux termes desquelles la cour n’examine les moyens au soutien des prétentions énoncées dans le dispositif que s’ils sont invoqués dans la discussion, en l’absence de développement de ce moyen dans la discussion de ses conclusions, il n’a pas à être examiné par la cour.

Le contrat conclu par les parties portait sur’:

«’1. Command-Web-Com (CWC) Fourniture et installation dans le PDL de la Renardière des éléments suivants’: CWC, Ecran 15 »

2. Prestation éolien (Prest-éolien) Fourniture, pose et raccordement du convertisseur fibre optique amont et aval pour les TGS PDL et poste source du parc de la Renardière. Mise en service par les équipes du fabricant’».

Il n’est pas contesté par les parties que la société Sel groupe a rempli ses obligations concernant le convertisseur fibre optique et le jugement du 17 mai 2018 a condamné la société Parc de la Renardière à payer à la société Sel groupe la somme de 7’476 euros au titre de la facture correspondant à ce matériel.

La société Parc de la Renardière soutient en revanche que la société Sel groupe a été défaillante dans l’exécution de ses obligations contractuelles concernant la CWC.

Il ressort du rapport d’expertise, qu’aucun élément objectif ne vient remettre en cause s’agissant des constatations effectuées, que l’expert a relevé que certaines fonctions de la CWC étaient utilisables, mais qu’il la considérait comme non opérationnelle en l’état, estimant que les essais et la mise en service n’avaient pas été valablement effectués. L’expert retient que «’après installation de la CWC le 3 décembre 2014, Parc de la Renardière a constaté 9 coupures jusqu’au 3 mars 2015, [‘] date à laquelle il a été identifié, par une équipe conjointe ERDF/SEL, une neutralisation de la temporisation du TGS du fait de la non mise au point de l’interfonctionnement du CWC avec Senvion. SEL a mis en place un palliatif (déconnexion d’un câble) pour régler ce problème’».

Il est indiqué par les parties que postérieurement au dépôt du rapport du d’expertise, la société Sel groupe est intervenue afin de régler les difficultés qui étaient relevées par l’expert et que désormais, la CWC fonctionne.

Il en résulte qu’il est démontré que la société Sel groupe a manqué à ses obligations contractuelles, puisque le fonctionnement de la CWC était défectueux et que la CWC n’est devenue pleinement opérationnelle que plus de quatre ans après sa livraison.

Cependant, la gravité de ces manquements n’est pas suffisante pour prononcer la résolution du contrat dès lors que’:

– la partie du contrat concernant le convertisseur fibre optique a parfaitement été exécutée par la société Sel groupe,

– certaines fonctions de la CWC étaient utilisables dès son installation,

– l’expert a précisé, ce que reconnaît la société Parc de la Renardière, que les dysfonctionnements de la CWC n’ont pas eu d’influence directe sur la production du parc de la Renardière, à l’exception de neuf coupures apparues entre le 3 décembre 2014 et le 3 mars 2015,

– la société Parc de la Renardière ne justifie d’aucune plainte quant au fonctionnement de la CWC installée en décembre 2014 auprès de la société Sel groupe avant le courrier du 10 mars 2015, par lequel elle indique, s’agissant des coupures intervenues, que l’intervention d’ERDF a établi comme cause des découplages du réseau intervenus, une mauvaise programmation du CWC et un mauvais câblage’; elle n’évoque aucunement dans ce courrier l’absence de formation nécessaire à l’utilisation du matériel livré, ni l’absence de mise en service de l’installation, mais des dysfonctionnements engendrés par la CWC, ce qui suppose qu’elle avait été mise en fonctionnement,

– si la société Parc de la Renardière évoque dans les manquements qu’elle reproche à la société Sel groupe le fait qu’elle ne disposait pas de code source informatique permettant la mise en fonctionnement du matériel, il est néanmoins d’une part relevé par l’expert que certaines fonctions de la CWC étaient utilisables et d’autre part par la société Parc de la Renardière elle-même que le fonctionnement de la CWC a eu pour conséquence des coupures du réseau, ce qui signifie que le matériel était en fonctionnement, bien qu’imparfaitement.

Compte tenu de ces éléments, la société Parc de la Renardière doit être déboutée de sa demande de résolution du contrat et de la demande de restitution de l’acompte qui en découlait. Le jugement sera donc confirmé sur ces points.

3) Sur les demandes en paiement formées par la société Sel groupe

En l’absence de résolution du contrat, le jugement doit être confirmé en ce qu’il a condamné la société Parc de la Renardière à payer à la société Sel groupe la somme de 15’750 euros HT avec intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2015 et avec anatocisme, la question des intérêts prononcés ne faisant pas l’objet de contestations de la part de la société Parc de la Renardière.

Si la société Sel groupe sollicite la réformation du jugement en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes au titre des pénalités de retard prévues par l’article L.441-6 du code de commerce et des pénalités prévues par les conditions générales de vente, la cour constate que c’est à bon droit que les premiers juges l’ont déboutée de cette demande dès lors que ce n’est que postérieurement au dépôt du rapport d’expertise que la société Sel groupe a terminé l’exécution de ses prestations, la société Parc de la Renardière étant fondée, avant cette date à se prévaloir de l’exception d’inexécution pour refuser le paiement des factures correspondant au solde des prestations. La société Sel groupe ne peut donc valablement solliciter l’application des pénalités de retard tant légalement que contractuellement prévues.

Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu’il a débouté la société Sel groupe de ses demandes au titre des pénalités de retard.

4) Sur la demande de dommages et intérêts formées par la société Sel groupe pour résistance abusive

Dès lors qu’il a été précédemment retenu que l’inexécution par la société Parc de la Renardière de son obligation de paiement n’était pas fautive tant que la société Sel groupe n’avait pas exécuté complètement ses prestations, aucune résistance abusive ne peut être caractérisée de sa part.

Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu’il a débouté la société Sel groupe de cette demande.

5) Sur les demandes de dommages et intérêts formées par la société Parc de la Renardière

Bien que la société Parc de la Renardière vise comme fondement juridique de ses demandes l’article 1240 du code civil, en application de l’article 12 du code de procédure civile, la cour relève qu’il s’agit en réalité d’une demande de dommages et intérêts fondée sur la responsabilité contractuelle, en présence d’un contrat entre les parties, dont le fondement est l’ancien article 1147 du code civil.

Aux termes de ce texte, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

La société Parc de la Renardière sollicite la condamnation de la société Sel groupe au paiement des sommes de’:

– 7’985,30 euros au titre des travaux de reprise,

– 7’172,05 euros au titre de la perte d’exploitation,

– 15’000 euros de dommages et intérêts pour mauvaise foi.

Le retard de la société Sel groupe dans l’exécution de ses obligations a été précédemment établi.

S’agissant des travaux de reprise dont se prévaut la société Sel groupe, il doit être relevé que les bons d’intervention de la société Senvion qu’elle produit pour en justifier sont rédigés en anglais, ne permettant aucunement à la cour de connaître le détail de ces interventions et ainsi leur éventuel lien de causalité avec le retard de la société Sel groupe dans l’exécution de ses prestations.

Concernant la perte d’exploitation, les premiers ont à juste titre relevé que les conditions générales de vente de la société Sel groupe, dont la société Parc de la Renardière ne conteste pas l’opposabilité à son égard, prévoient en leur article 11.5 que «’aucune des parties ne sera tenue pour responsable vis-à-vis de l’autre, des dommages indirects et/ou immatériels tels que mais non limité aux pertes d’exploitation, pertes de gains, de production ou de contrats… qu’elle pourrait causer à l’autre partie du fait de l’exécution du contrat de vente’». Le jugement sera en conséquence confirmé, compte tenu de cette exclusion, en ce qu’il a débouté la société Parc de la Renardière de cette demande.

En revanche, le retard de la société Sel groupe dans l’exécution de ses obligations contractuelles étant établi et celle-ci n’ayant consenti à terminer ses prestations qu’après le dépôt du rapport d’expertise, soutenant avant cela qu’elle avait parfaitement rempli ses obligations, ce qui a nécessairement causé un préjudice à la société Parc de la Renardière qui n’a pu utiliser pendant quatre ans l’intégralité des fonctionnalités de la CWC, le jugement sera réformé en ce qu’il a débouté la société Parc de la Renardière de sa demande de dommages et intérêts compte tenu de la mauvaise foi de la société Sel groupe dans l’exécution de ses obligations. Compte tenu de la durée pendant laquelle la société Parc de la Renardière a été privée de l’intégralité des fonctionnalités de la CWC et des éléments dont dispose la cour, son préjudice sera justement évalué à la somme de 8’000 euros.

La société Sel groupe sera condamnée de ce chef à payer à la société Parc de la Renardière la somme de 8’000 euros à titre de dommages et intérêts.

6) Sur les prétentions annexes

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société Parc de la Renardière aux dépens.

En revanche, il sera réformé en ce qu’il a condamné la société Parc de la Renardière au paiement de la somme de 2’000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, l’équité commandant de dire n’y avoir lieu à faire application des dispositions de ce texte, tant concernant la procédure de première instance que la procédure d’appel.

La société Parc de la Renardière sera condamnée aux dépens de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Réforme le jugement entrepris, mais seulement en ce qu’il a débouté la société Parc de la Renardière de sa demande de dommages et intérêts pour mauvaise foi et en ce qu’il l’a condamnée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur les chefs réformés et y ajoutant,

Condamne la société Sel groupe à payer à la sociét Parc de la Renardière la somme de 8’000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile tant pour la procédure de première instance que pour la procédure d’appel ;

Condamne la société Parc de la Renardière aux dépens d’appel.

Le greffier

Valérie Roelofs

Le président

Dominique Gilles

 


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