Conditions Générales de Vente : 31 janvier 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/02919

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Conditions Générales de Vente : 31 janvier 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/02919

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 31 JANVIER 2023

BV

N° RG 22/02919 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-MYDZ

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

c/

[N] [T]

[B] [M] épouse [T]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/011139 du 28/07/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BORDEAUX)

S.A.S. SWEETCOM SUD

S.C.P. CBF ASSOCIES

S.E.L.A.R.L. EKIP’

Nature de la décision : AU FOND

SUR RENVOI DE CASSATION

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décisions déférées à la Cour : sur renvoi de cassation d’un arrêt rendu le 20 avril 2022 (Pourvoi n° T 20-22.084) par la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation sur un arrêt rendu le 25 mai 2020 (RG : 17/01183) par la Première Chambre Civile de la Cour d’Appel d’AGEN en suite d’un jugement du Tribunal d’Instance d’AUCH du 24 août 2017 (RG : 11-17-61 et 11-17-143), suivant déclaration de saisine en date du 16 juin 2022

DEMANDERESSE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la Société SYGMA BANQUE, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]

représentée par Maître William MAXWELL de la SAS MAXWELL MAILLET BORDIEC, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Sébastien MENDES GIL de la SELARL CLOIX & MENDES-GIL, avocat plaidant au barreau de PARIS

DEFENDEURS :

[N] [T]

né le [Date naissance 5] 1958 à [Localité 9] (31)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 8]

[B] [M] épouse [T]

née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 7] (32)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 8]

représentés par Maître Mathieu RAFFY de la SELARL MATHIEU RAFFY – MICHEL PUYBARAUD, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistés de Maître Francois DUFFAU, avocat plaidant au barreau de PAU

S.A.S. SWEETCOM SUD, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 3]

non représentée, assignée selon procès verbal de recherches infructueuses (article 659 du code de procédure civile)

S.C.P. CBF ASSOCIES, ès qualité d’administrateur judiciaire de la société SWEETCOM SUD, domiciliée en cette qualité [Adresse 6]

non représentée, assignée selon dépôt de l’acte à l’étude d’huissier

S.E.L.A.R.L. EKIP’, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société SWEETCOM SUD, domiciliée en cette qualité [Adresse 4]

non représentée, assignée à personne habilitée

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 06 décembre 2022 en audience publique, devant la Cour composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

– par défaut

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Suivant bon de commande n°003472 signé le 20 février 2013 dans le cadre d’un démarchage à domicile, M. [N] [T] et Mme [B] [M] épouse [T] (ci-après les époux [T]) ont commandé auprès de la société Sweetcom Sud la fourniture et l’installation, sur la maison dont ils sont propriétaires à [Localité 7] (32), d’une centrale photovoltaïque pour un prix de 10 000 euros.

Suivant bon de commande n°003473 du même jour, les époux [T] ont également commandé à la même société la fourniture et l’installation d’un ballon thermodynamique d’une capacité de 270 litres pour un prix de 26 200 euros.

Pour financer intégralement ces installations, ils ont souscrit le même jour un contrat de crédit affecté auprès de la SA Sygma Banque, aux droits de laquelle vient désormais la SA BNP Paribas Personal Finance, d’un montant 36 200 euros au taux de 5,76%, remboursable en 180 mensualités de 372,65 euros après différé d’amortissement d’un an.

Le matériel a fait l’objet d’un bon de livraison établi le 11 mars 2013.

Le 18 mars 2013, M. [T] a signé un ‘certificat de livraison de bien ou de fourniture de service’ donnant instruction à la Sygma Banque de verser les fonds empruntés à la société Sweetcom Sud.

Le 21 mars 2013, la société Sweetcom Sud a émis deux factures n°1702 et 1703 portant sur les sommes de 26 200 et 10 000 euros.

L’attestation de conformité a été établie le 7 mai 2013. L’installation a été raccordée le 26 juin 2013 et mise en service le 6 août 2013. Un contrat d’achat de l’électricité produite a été signé avec EDF le 26 mai 2014.

Le 26 avril 2015, les époux [T] ont souscrit avec la société Sweetcom Sud un contrat d’entretien et de maintenance du chauffe-eau thermodynamique et de l’installation photovoltaïque moyennant les sommes respectives de 110 euros et 267,50 euros TTC par an.

Par actes délivrés le 30 janvier 2017, les époux [T] ont fait assigner la SAS Sweetcom et la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque devant le tribunal d’instance d’Auch, afin notamment d’obtenir la nullité des bons de commande et du contrat de crédit affecté.

Par jugement du 24 août 2017, le tribunal d’instance d’Auch a :

– ordonné la jonction des affaires numérotées RG 11-17-61 et RG 11-17-143 sous le numéro RG 11-17-61,

– dit que la SAS Sweetcom est mise hors de cause,

– ordonné l’annulation du contrat de vente et de prestation de service portant le n°003472 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sweetcom Sud,

– ordonné l’annulation du contrat de vente et de prestation de service portant le n°003473 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sweetcom Sud,

– ordonné l’annulation du contrat de crédit affecté n°38500576 signé le 20 février 2013 entre M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sygma, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance portant sur une somme empruntée de 36 200 euros,

– condamné la société Sweetcom Sud à verser à la société Sygma, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 36 200 euros à titre de restitution du capital emprunté,

– condamné la société Sweetcom Sud à verser à la société Sygma, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

– condamné la société Sweetcom Sud à verser à M. [N] [T] et Mme [B] [T] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

– condamné la société Sygma, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance, à verser à M. [N] [T] et Mme [B] [T] la somme de 8 956,80 Euros correspondant aux 24 premières échéances honorées du prêt jusqu’au 24 mars 2016 inclus, ainsi que toutes autres sommes postérieures qui auraient été versées par eux dans le cadre du crédit affecté n° 38500576 désormais annulé,

– ordonné à la société Sweetcom Sud, après avoir convenu d’un rendez-vous avec M. [N] [T] et Mme [B] [T] et sauf meilleur accord des parties, de venir, à ses frais, effectuer le démontage et l’enlèvement de la centrale photovoltaïque et du ballon thermodynamique et de l’ensemble des équipements liés à ces systèmes, et de remettre le toit et les éléments de la maison en contact avec le matériel dans l’état initial, et ce dans le délai de 60 jours calendaires à compter de la date de signification du jugement par huissier de justice, et à charge pour elle d’en faire la preuve,

– à défaut pour la société Sweetcom Sud de respecter ce délai, l’a condamnée, dans ce cas, au versement d’une astreinte de 25 euros par jour de retard calendaire à compter du 61ème jour suivant la date de signification du jugement par huissier de justice, à charge pour elle d’en faire la preuve, et ce dans la limite de 8 000 euros qui constituerait ainsi le montant maximal de l’astreinte définitive,

– dit que le tribunal se réserve le droit, le cas échéant, de liquider le montant des éventuelles astreintes,

– dit que si la société Sweetcom Sud n’est pas venue démonter et enlever le matériel et procéder à la remise en état des éléments de la maison à compter du 381 ème jour suivant la date de signification du jugement par huissier de justice, elle serait réputée avoir abandonné l’entière propriété des éléments de cette centrale photovoltaïque et du ballon thermodynamique qui serait alors transférée à M. [N] [T] et Mme [B] [T], libres alors à eux d’en disposer à leur guise,

– condamné la société Sweetcom Sud à payer à M. [N] [T] et Mme [B] [T] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Sweetcom Sud à payer à la société Sygma, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 800 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté tout autre chef ou surplus de demande,

– condamné la société Sweetcom Sud aux entiers dépens de l’instance.

La société Sweetcom Sud a relevé appel de ce jugement.

Par arrêt du 25 mai 2020, la cour d’appel d’Agen a :

– infirmé le jugement sauf en ce qu’il a ordonné la jonction des affaires numérotées RG 11-17-61 et RG 11-17-143 sous le numéro RG 11-17-61,

Statuant à nouveau,

– rejeté les demandes d’annulation et de résolution des contrats souscrits le 20 février 2013 entre [N] [T] et [B] [M] son épouse, et la SARL Sweetcom, ainsi que la demande d’annulation et de résolution subséquente du contrat de crédit affecté souscrit le même jour avec la SA Sygma Banque, ainsi que les demandes de dommages et intérêts,

– rejeté la demande de radiation du fichier national recensant les incidents de paiement,

– condamné solidairement [N] [T] et [B] [M] son épouse à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS Sweetcom, chacune, la somme de 1 200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné solidairement [N] [T] et [B] [M] son épouse aux dépens de 1ère instance et d’appel.

Les époux [T] ont formé un pourvoi en cassation.

Par jugement du 14 avril 2021, le tribunal de commerce de Toulouse a prononcé la liquidation judiciaire de la société Sweetcom Sud. La SCP CBF Associés a été désignée en qualité d’administrateur et la SELARL Ekip’ en qualité de mandataire liquidateur.

La société BNP Paribas Personal Finance a régulièrement déclaré sa créance.

Par arrêt du 20 avril 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation a :

– cassé, sauf en ce qu’il ordonne la jonction des affaires sous le numéro RG 11-17-61, l’arrêt rendu le 25 mai 2020 par la cour d’appel d’Agen et renvoyé les parties devant la cour d’appel de Bordeaux,

– condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens,

– rejeté les demandes formées en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer comme elle l’a fait, la Cour de cassation a considéré qu’en statuant par des motifs impropres à caractériser la connaissance qu’auraient eue les emprunteurs du vice tiré de l’inobservation des dispositions des articles R.121-3 à R.121-6 du code de la consommation, dans leur rédaction issue du décret n°97-298 du 27 mars 1997, applicables aux contrats litigieux, la cour d’appel a violé l’article 1338 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.

La SA BNP Paribas Personal Finance a saisi la cour d’appel de ce siège par déclaration du 16 juin 2022 et par conclusions déposées le 8 août 2022, elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement rendu par le tribunal d’instance d’Auch le 24 août 2017 en ce qu’il a ordonné l’annulation du contrat de vente et de prestation de service, portant le n° 003472 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société SWEETCOM SUD ; En ce qu’il a ordonné l’annulation du contrat de vente et de prestation de service, portant le n° 003473 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société SWEETCOM ; En ce qu’il a ordonné l’annulation du contrat de crédit affecté n° 38500576 signé le 20 février 2013 entre M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société SYGMA, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE portant sur une somme empruntée de 36 200 euros ; En ce qu’il a condamné la société SWEETCOM SUD à verser à la société SYGMA, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 36 200 euros à titre de restitution du capital emprunté ; En ce qu’il a condamné la société SWEETCOM SUD à verser à la société SYGMA, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts ; En ce qu’il a condamné la société SWEETCOM SUD à verser à M. [N] [T] et Mme [B] [T] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts ; En ce qu’il a condamné la société SYGMA, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à M. [N] [T] et Mme [B] [T] la somme de 8 956,80 euros correspondant aux 24 premières échéances honorés du prêt jusqu’au 24 mars 2016 inclus, ainsi que toutes autres sommes postérieures qui auraient été versées par eux dans le cadre du crédit affecté n° 38500576 désormais annulé ; En ce qu’il a ordonné à la société SWEETCOM SUD, après avoir convenu d’un rendez-vous avec M. [N] [T] et Mme [B] [T] et sauf meilleur accord des parties de venir, à ses frais, effectuer le démontage et l’enlèvement de la centrale photovoltaïque et du ballon thermodynamique et de l’ensemble des équipements liés à ces systèmes, et de remettre le toit et les éléments de la maison en contact avec le matériel dans l’état initial, et ce dans le délai de 60 jours calendaires, à compter de la date de signification du présent jugement par huissier de justice, et à charge pour elle d’en faire la preuve ; En ce qu’il l’a, à défaut pour la société SWEETCOM SUD de respecter ce délai, condamnée dans ce cas, au versement d’une astreinte de 25 euros par jour calendaire de retard à compter du 61 ème jour suivant la date de signification du présent jugement par huissier de justice, à charge pour elle d’en faire la preuve, et ce dans la limite de 8 000 euros qui constituerait ainsi le montant maximal de l’astreinte définitive ; En ce qu’il a dit que la présente juridiction se réserve le droit, le cas échéant, de liquider le montant des éventuelles astreintes ; En ce qu’il a dit que si la société SWEETCOM SUD n’est pas venue démonter et enlever le matériel et procéder à la remise en état et des éléments de la maison à compter du 381 ème jour suivant la date de signification du présent jugement par huissier de justice, elle serait réputée en avoir abandonné l’entière propriété des éléments de cette centrale photovoltaïque et du ballon thermodynamique qui serait alors intégralement transférée à M. [N] [T] et Mme [B] [T], libres alors à eux d’en disposer à leur guise ; En ce qu’il a débouté la société SYGMA aux droits de laquelle vient la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande de condamnation solidaire de M. et Mme [T] à lui payer les sommes au titre du remboursement du crédit affecté du 20 février 2013 jusqu’à complet apurement, sa demande subsidiaire en cas de nullité ou résolution du contrat de crédit de condamnation solidaire de M. et Mme [T] à lui restituer le capital prêté, et donc à lui payer la somme de 36 200 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de mise à disposition des fonds, sa demande de condamnation de la société SWEETCOM SUD à lui payer le montant du principal du prêt augmenté des intérêts, soit une somme de 57.346,20 € ;

Statuant sur les chefs critiqués,

– A titre principal, débouter M. [N] [T] et Mme [B] [T] de leur demande en nullité du contrat conclu avec la société SWEETCOM SUD, ainsi que de leur demande en nullité du contrat de crédit conclu avec la société SYGMA BANQUE et de leur demande en restitution des mensualités réglées ;

– débouter M. [N] [T] et Mme [B] [T] de leur demande en résolution du contrat conclu avec la société SWEETCOM SUD, ainsi que de leur demande en résolution du contrat de crédit conclu avec la société SYGMA BANQUE et de leur demande en restitution des mensualités réglées ;

– Subsidiairement, en cas de nullité ou résolution des contrats, débouter M. [N] [T] et Mme [B] [T] de leur demande visant à être déchargés de l’obligation de restituer le capital prêté ; condamner, en conséquence, in solidum M. [N] [T] et Mme [B] [T] à régler à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 36.200 € en restitution du capital prêté ;

– En tout état de cause, débouter M. [N] [T] et Mme [B] [T] de leur demande visant à la privation de la créance de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ;

– Très subsidiairement, limiter la réparation qui serait due par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE eu égard au préjudice effectivement subi par l’emprunteur à charge pour lui de l’établir et eu égard à la faute de l’emprunteur ayant concouru à son propre préjudice ; limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. [N] [T] et Mme [B] [T] d’en justifier ;

– A titre infiniment subsidiaire, en cas de privation de créance de la Banque, condamner in solidum M. [N] [T] et Mme [B] [T] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 36.200 € correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable ; enjoindre à M. [N] [T] et Mme [B] [T], de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux à la SELARL EKIP, es-qualité de Liquidateur Judiciaire de la société SWEETCOM SUD, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l’arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d’électricité, et juger qu’à défaut de restitution, ils resteront tenus de la restitution du capital prêté ; Subsidiairement, priver M. [N] [T] et Mme [B] [T] de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,

– juger, en tout état de cause, en cas de nullité ou résolution des contrats, que la société SWEETCOM SUD est garante de la restitution du capital prêté, ce qui n’exonère toutefois pas l’emprunteur de son obligation lorsqu’il n’en a pas été déchargé ;

– condamner, en conséquence, la société SWEETCOM SUD à garantir la restitution de l’entier capital prêté, et donc à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 36.200 € au titre de la créance en garantie de la restitution du capital prêté ; Subsidiairement, si la Cour ne devait pas faire droit à la demande de garantie de restitution du capital prêté ou n’y faire droit que partiellement, condamner la société SWEETCOM SUD à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 36.200 €, ou le solde, sur le fondement de la répétition de l’indu, et à défaut sur le fondement de la responsabilité ; condamner, par ailleurs, la société SWEETCOM SUD au paiement des intérêts perdus du fait de l’annulation des contrats, et donc à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 21.146,20 € à ce titre ; fixer, en conséquence, les créances de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au passif de la procédure collective de la société SWEETCOM SUD aux sommes de 36.200 € et 21.146,20 € ;

– débouter M. [N] [T] et Mme [B] [T] de toutes autres demandes, fins et conclusions ;

– ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence ; – En tout état de cause, condamner in solidum M. [N] [T] et Mme [B] [T] au paiement à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles d’appel de l’article 700 du Code de procédure civile ; Les condamner in solidum aux entiers dépens de l’instance avec distraction au profit de la SELAS Cloix & Mendes-Gil.

Par conclusions déposées le 5 octobre 2022, les époux [T] demandent à la cour de :

– confirmer le jugement rendu le 24 août 2017 par le tribunal d’instance d’Auch en ce qu’il :

* ordonne l’annulation du contrat de vente et de prestation de service portant le n°003472 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sweetcom Sud,

* ordonne l’annulation du contrat de vente et de prestation de service portant le n°003473 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sweetcom Sud,

* ordonne l’annulation du contrat de crédit affecté n°38500576 signé le 20 février 2013 entre M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sygma, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance portant sur une somme empruntée de 36 200 Euros,

* condamne la société Sygma, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance, à verser à M. [N] [T] et Mme [B] [T] la somme de 8 956,80 euros correspondant aux 24 premières échéances honorées du prêt jusqu’au 24 mars 2016 inclus, ainsi que toutes autres sommes postérieures qui auraient été versées par eux dans le cadre du crédit affecté n° 38500576 désormais annulé,

– infirmer le jugement rendu le 24 août 2017 par le tribunal d’instance d’Auch en ce qu’il :

* condamne la société Sweetcom Sud à verser à M. [N] [T] et Mme [B] [T] la somme de 2 000 Euros à titre de dommages et intérêts,

* ordonne à la société Sweetcom Sud, après avoir convenu d’un rendez-vous avec M. [N] [T] et Mme [B] [T] et sauf meilleur accord des parties, de venir, à ses frais, effectuer le démontage et l’enlèvement de la centrale photovoltaïque et du ballon thermodynamique et de l’ensemble des équipements liés à ces systèmes, et de remettre le toit et les éléments de la maison en contact avec le matériel dans l’état initial, et ce dans le délai de 60 jours calendaires à compter de la date de signification du jugement par huissier de justice, et à charge pour elle d’en faire la preuve,

* à défaut pour la société Sweetcom Sud de respecter ce délai, la condamne, dans ce cas, au versement d’une astreinte de 25 euros par jour de retard calendaire à compter du 61ème jour suivant la date de signification du jugement par huissier de justice, à charge pour elle d’en faire la preuve, et ce dans la limite de 8 000 euros qui constituerait ainsi le montant maximal de l’astreinte définitive,

* dit que le tribunal se réserve le droit, le cas échéant, de liquider le montant des éventuelles astreintes,

* dit que si la société Sweetcom Sud n’est pas venue démonter et enlever le matériel et procéder à la remise en état des éléments de la maison à compter du 381 ème jour suivant la date de signification du jugement par huissier de justice, elle serait réputée avoir abandonné l’entière propriété des éléments de cette centrale photovoltaïque et du ballon thermodynamique qui serait alors transférée à M. [N] [T] et Mme [B] [T], libres alors à eux d’en disposer à leur guise,

* condamne la société Sweetcom Sud a payer à M. [N] [T] et Mme [B] [T] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

* rejette tout autre chef ou surplus de demande,

* condamne la société Sweetcom Sud aux entiers dépens de l’instance.

Y ajoutant,

– débouter la SA BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la SA Sygma Banque, de ses demandes.

– priver la SA BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la SA Sygma Banque, de sa créance de restitution à l’encontre des époux [T], en tout ou partie.

– ordonner l’effacement de madame [B] [T] et de monsieur [N] [T] du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP).

– condamner la SA BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la SA Sygma Banque, aux entiers dépens, tant de première instance qu’en cause d’appel, avec distraction au profit de maître Matthieu RAFFY, avocat, et en ce comprise l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement et d’encaissement prévus à l’article L. 111-8 du Code des procédures civiles d’exécution.

La société Sweetcom Sud, la SCP CBF Associés ès qualités et la SELARL Ekip’ ès qualités n’ont pas constitué avocat. La société Sweetcom Sud a été assignée par procès-verbal de recherches. La déclaration de saisine de la cour et les conclusions ont été régulièrement signifiées à la SCP CBF Associés et à la SELARL Ekip’.

L’affaire a fait l’objet le 8 juillet 2022 d’une ordonnance de fixation à bref délai à l’audience collégiale du 6 décembre 2022, avec clôture de la procédure à la date du 22 novembre 2022.

***

Par courrier transmis par RPVA le 21 novembre 2022, l’avocat de la société BNP Paribas Personal Finance a demandé le report de l’ordonnance de clôture.

Le 29 novembre 2020, la société BNP Paribas Personal Finance a déposé un nouveau jeu d’écritures.

Par conclusions de procédure déposées le 30 novembre 2022, les époux [T] demandent à la cour de déclarer tardives et, par voie de conséquence, irrecevables, les conclusions régularisées par la société BNP Paribas Personal Finance le 29 novembre 2022 et de les rejeter des débats.

Par conclusions en réplique sur incident de procédure déposées le 5 décembre 2022, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :

– à titre principal, rejeter la demande des époux [T] visant à voir déclarer irrecevables les conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance déposées le 29 novembre 2022,

– à titre subsidiaire, reporter la date de clôture et la date des plaidoiries afin de permettre aux époux [T] de répondre aux conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance déposées le 29 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance déposées le 29 novembre 2022

Aux termes de l’article 802 du code de procédure civile, après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office.

L’article 803 du même code précise que cette ordonnance ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue.

En l’espèce, par déclaration de saisine en date du 16 juin 2022, la société BNP Paribas Personal Finance a saisi la cour d’appel de renvoi de Bordeaux suite à l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 20 avril 2022.

Conformément à l’article 1037-1 du code de procédure civile, la société BNP Paribas Personal Finance a déposé ses conclusions dans le délai de deux mois suivant cette déclaration, soit le 8 août 2022 et les époux [T] ont répliqué dans le délai de deux mois imparti soit le 5 octobre 2022.

La société BNP Paribas Personal Finance a ensuite déposé un nouveau jeu de conclusions le 29 novembre 2022, soit postérieurement à l’ordonnance de clôture du 22 novembre 2022 dont elle avait été informée dès le 8 juillet 2022.

Si elle se plaint de n’avoir disposé que d’un délai de 2 mois moins 7 jours alors que les époux [T] avaient répliqué en deux mois moins trois jours, force est de constater qu’elle bénéficiait d’un délai suffisant pour conclure.

Faute pour l’appelante de démontrer la survenance d’une cause grave, il convient de rejeter ses conclusions déposées le 29 novembre 2022, après la clôture ordonnée, et ne retenir pour les débats que celles du 8 août 2022.

Sur la validité du contrat de vente :

Le contrat principal conclu entre la société Sweetcom Sud et les époux [T] l’a été à l’occasion d’un démarchage à domicile. Il relève par suite du régime des articles L. 121-23 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur au jour de la souscription des contrats litigieux, antérieure à l’entrée en vigueur de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014.

L’article L. 121-23 dispose :

« Les opérations visées à l’article L. 121-21 doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

« 1o Noms du fournisseur et du démarcheur ;

« 2o Adresse du fournisseur ;

« 3o Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

« 4o Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

« 5o Conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d’exécution de la prestation de services ;

« 6o Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l’intérêt et le taux effectif global de l’intérêt déterminé dans les conditions prévues à l’article L. 313-1 ;

« 7o Faculté de renonciation prévue à l’article L. 121-25, ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26. »

L’article L. 121-24 du même code dispose que le contrat visé l’article L. 121-23 doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation dans les conditions prévues à l’article L. 121-25. Un décret en Conseil d’État précisera les mentions devant figurer sur ce formulaire.

L’article R. 121-3 du même code dispose :

« Le formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation prévu à l’article L. 121-25 fait partie de l’exemplaire du contrat laissé au client.

« Il doit pouvoir en être facilement séparé.

« Sur l’exemplaire du contrat, doit figurer la mention :

« Si vous annulez votre commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable ci-contre. »

L’article R. 121-4 du même code dispose :

‘ Le formulaire prévu à l’article L. 121-4 comporte, sur une face, l’adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé.’

L’article R. 121-5 du même code dispose :

« Le formulaire prévu à l’article L. 121-24 comporte, sur son autre face, les mentions successives ci-après en caractères très lisibles :

« 1o En tête, la mention « Annulation de commande » (en gros caractères), suivie de la référence « Code de la consommation, articles L. 121-23 à L. 121-26 » ;

« 2o Puis, sous la rubrique « Conditions », les instructions suivantes, énoncées en lignes distinctes :

« Compléter et signer ce formulaire » ;

« L’envoyer par lettre recommandée avec avis de réception » (ces derniers mots doivent être soulignés dans le formulaire ou figurer en caractères gras) ;

« Utiliser l’adresse figurant au dos » ;

« L’expédier au plus tard le septième jour à partir du jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, le premier jour ouvrable suivant » (soulignés ou en caractères gras dans le formulaire) ;

« 3o Et, après un espacement, la phrase :

« Je soussigné, déclare annuler la commande ci-après », suivie des indications suivantes, à raison d’une seule par ligne :

« Nature du bien ou du service commandé… ».

« Date de la commande… ».

« Nom du client… ».

« Adresse du client… ».

« 4o Enfin, suffisamment en évidence, les mots :

« Signature du client… ». »

L’article R. 121-6 du même code dispose :

‘Le vendeur ne peut porter sur le formulaire que les mentions prévues aux articles R. 121-4 et R. 121-5, ainsi que des références d’ordre comptable.’

Contrairement à ce que soutient la banque, il résulte de l’application combinée de ces textes que le formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice par le client démarché de sa faculté de rétractation doit à peine de nullité du contrat répondre aux exigences des articles R. 121-3 à R. 121-6 du code de la consommation (Civ. 1ère, 21 novembre 2006, n°05-20.706).

En outre, l’article L. 133-2 ancien, alinéa premier, du même code, prévoit que les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible.

En l’espèce, les époux [T] soutiennent que le bon de commande, souscrit après démarchage de la société Sweetcom Sud, n’est pas conforme aux dispositions de l’article L. 121-23 du code de la consommation dans sa version applicable à la date de signature du contrat dès lors que la nature de la prestation et les caractéristiques de celle-ci sont imprécises ; que le contrat ne comporte pas les mentions des conditions d’exécution du contrat ou le délai de mise en service, ni le coût total du crédit, ni le taux nominal de l’intérêt. Ils ajoutent que les dispositions concernant le droit de rétractation ne sont pas respectées puisque le bordereau de rétractation comporte plusieurs adresses et non l’adresse exacte à laquelle le formulaire doit être envoyé ; que les caractères ne sont pas très lisibles ; que la mention ‘utiliser l’adresse figurant au dos’ fait défaut ; que le formulaire porte deux mentions qui ne sont pas d’ordre comptable ; que le formulaire n’est pas facilement séparable.

En l’espèce, le bon de commande n° 003472 signé le 20 février 2013 et produit en pièce n°2 par les intimés, fait apparaître la description suivante :

’24 panneaux monocristallins SYSTOVI

Cellules Bosch

Onduleur garantie 20 ans

Frais raccordement et consuel inclus

Garantie production 25 an

Boitier de protection

Participation financière 2.500 euros

Pose 10% inclus.’

Le bon de commande n°003473 signé le 20 février 2013 et produit en pièce n°3 par les intimés, fait apparaître la description suivante :

‘ECS + 300 T

Capacité 270 L

COP 3,8

Régulation digitale

Garantie 5 ans, pièces, main d’oeuvre, et déplacement

Pose 10% inclus’

Le contrat est affecté de plusieurs irrégularités tenant à ce que contrairement aux prescriptions de l’article L. 121-23 4°, 5°, 6° :

– le bon de commande n° 003472 n’indique pas le taux nominal de l’intérêt,

– le bon de commande n°003473 ne mentionne ni le taux nominal de l’intérêt ni le taux effectif global,

– le bon de commande n° 003472 ne prévoit qu’un délai de pose des panneaux et ne fait nulle mention d’un délai de réalisation des prestations à caractère admnistratif, alors que la société Sweetcom avait expressément à sa charge, selon les conditions générales de vente, la signature du certificat de conformité et la mise en service de la centrale photovoltaïque, laquelle suppose de réaliser des démarches administratives. Il s’ensuit que les acquéreurs n’étaient pas en mesure de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations.

– le bon de commande n°003473 n’indique ni la marque ni le modèle du ballon thermodynamique commandé, interdisant toute comparaison ou vérification utile au consommateur dans le délai de rétractation.

La cour constate en outre que les formulaires de rétractation ne respectent pas les exigences édictées aux articles R. 121-24 à R. 121-6 du code de la consommation, puisque :

– la face visée à l’article R. 121-4 comporte plusieurs adresses et non l’adresse exacte à laquelle le formulaire doit être envoyé,

– sur la face visée à l’article R. 121-5, ne figure pas la mention « utiliser l’adresse figurant au dos »,

– il est indiqué deux mentions non prévues aux articles R. 121-4 et R. 121-5 et ne constituant pas des références d’ordre comptable, à savoir l’attestation de prise de connaissance des conditions générales de vente et l’attestation de remise d’une offre préalable de crédit.

Ces irrégularités sont sanctionnées par la nullité du contrat.

L’exécution volontaire du contrat ne peut en valoir confirmation qu’à la double condition que le consommateur ait la connaissance précise du vice affectant l’acte et que soit caractérisée sa volonté non équivoque de couvrir le vice. Il appartient à la société BNP Paribas Personnel Finance qui l’allègue de le démontrer, cela ne se présumant pas.

En l’espèce, les contrats reproduisent au verso des bons de commande les dispositions des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du code de la consommation.

Si la lecture de ces dispositions pouvait certes alerter un consommateur normalement attentif sur les omissions du bon de commande quant aux caractéristiques essentielles des biens offerts, au taux nominal et aux conditions d’exécution du contrat en méconnaissance de l’article L. 121-23, en revanche, la seule reproduction des articles L. 121-23 à L. 121-26 ne permet pas d’établir que les emprunteurs ont eu connaissance des causes de nullité tirées de l’inobservation des articles R. 121-4 à R. 121-6 précités.

Dès lors, il n’est pas démontré que les époux [T] ont eu ou pu avoir connaissance de l’intégralité des vices affectant le contrat de vente.

Au demeurant, rien ne permet de considérer que les époux [T] aient jamais, même implicitement, renoncé à se prévaloir de la nullité du contrat de vente. Ainsi, ni le fait de ne pas exercer leur droit de rétractation, ni le fait d’avoir par la suite acquiescé aux différentes étapes de la livraison et de l’installation des panneaux, puis d’avoir réglé les mensualités du crédit ne suffisent à établir leur volonté de couvrir les irrégularités affectant le contrat de vente.

Sans qu’il y ait lieu d’examiner l’annulation du contrat pour dol et d’entrer davantage dans le détail de l’argumentation des parties, il convient, par motifs substitués, de confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente résultant des bons de commande n°003472 et n°003473 du 20 février 2013 conclus entre la société Sweetcom Sud et les époux [T].

Sur les conséquences de la nullité du contrat principal sur le contrat de prêt

L’article L.311-32, alinéa 1er, du code de la consommation dans sa version applicable au litige, prévoit que le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

En application de ces dispositions et au regard de l’annulation du contrat conclu par acceptation des bons de commande du 20 février 2013, le contrat de crédit affecté au financement de l’opération doit également être annulé de plein droit. C’est donc à bon droit que le tribunal a annulé le contrat de crédit à la consommation affecté conclu par les époux [T] le 20 février 2013 avec la société Sygma Banque. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les restitutions

Il est constant que l’annulation d’un contrat emporte remise des parties dans leur état antérieur.

La liquidation judiciaire ouverte à l’encontre de la société Sweetcom Sud exclut, de fait, la restitution du prix de vente aux époux [T]. Il ne saurait donc être ordonné à ces derniers de restituer l’équipement litigieux à la société Sweetcom Sud sauf à créer entre ces deux parties un déséquilibre incompatible avec la législation d’ordre public qui protège le consommateur dans sa relation contractuelle avec un professionnel. Le liquidateur judiciaire de la société Sweetcom Sud, qui n’a pas constitué avocat, ne sollicite d’ailleurs pas la restitution du matériel et les règles d’ordre public relatives à la procédure collective ne font pas obstacle à la compensation entre les créances de restitution réciproques de la société Sweetcom Sud sur le prix de vente et des époux [T] sur le matériel installé.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu’il a dit qu’il appartiendra à la société Sweetcom Sud de démonter et enlever la centrale photovoltaïque et le ballon thermodynamique, de remettre le toit et les éléments de la maison en contact avec le matériel dans l’état initial.

La nullité du contrat de crédit affecté implique la restitution par le prêteur des remboursements perçus et la restitution par les emprunteurs du capital emprunté, même lorsque les fonds ont été directement versés entre les mains du vendeur.

L’emprunteur peut toutefois échapper à une telle restitution s’il parvient à démontrer l’existence d’une faute commise par le prêteur, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre cette faute et le préjudice subi.

La demande de dispense de restitution du capital emprunté doit donc être analysée comme une demande indemnitaire venant se compenser avec le capital emprunté.

En l’espèce, les époux [T] reprochent à la banque d’avoir financé l’opération alors que le contrat de vente était entaché de nullité et d’avoir débloqué les fonds alors que la prestation n’était pas totalement achevée.

La société BNP Paribas Personal Finance fait valoir, d’une part, qu’elle est tierce au contrat de vente dont les irrégularités ne sauraient engager sa responsabilité, d’autre part, qu’elle a libéré les fonds sur ordre de paiement de l’emprunteur et au vu d’un certificat de livraison, signé de l’emprunteur, suffisamment précis pour identifier la prestation dont l’exécution est visée.

Il convient de rappeler que le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute (Civ. 1ère, 25 nov. 2020, n°19-14.908).

Le contrat de vente étant en l’espèce affecté de plusieurs irrégularités sanctionnées par la nullité ainsi que cela a été relevé ci-dessus, il en résulte que la société Sygma Banque, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance, a commis une faute en finançant un contrat dont la nullité était apparente et en rendant ainsi possible une opération qui n’aurait pas dû recevoir exécution.

En outre, le seul certificat de livraison, dont le contenu est sommaire et ne permet pas de connaître la date du contrat et la nature des obligations à la charge du vendeur, était insuffisant à permettre le déblocage des fonds, étant observé que ce certificat, qui mentionne que « tous les travaux et prestations de service qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisés », a été établi moins d’un mois après le contrat, ce qui était de nature à créer un doute sur la réalisation de la totalité des prestations à la charge du vendeur, alors que le contrat prévoit expressément une installation totale incluant nécessairement les démarches administratives et la demande de raccordement, ce qui imposait à tout le moins une vérification de l’adéquation de cette formule avec les mentions du bon de commande.

Les fautes du prêteur sont donc caractérisées.

Pour autant, il est constant que l’installation litigieuse a effectivement été raccordée au réseau ERDF et mise en service le 6 août 2013, soit moins de 6 mois après la conclusion du contrat, que les époux [T] ont conclu avec la société EDF le 26 mai 2014 un contrat de revente de l’électricité produite et qu’ils perçoivent annuellement depuis septembre 2014 le prix de cette production. Les époux [T], qui bénéficient donc d’une installation photovoltaïque en état de fonctionnement, quand bien même elle ne procurerait pas le rendement escompté, ne rapportent dès lors pas la preuve d’un préjudice directement imputable à une faute de l’établissement de crédit.

En conséquence, les époux [T] sont déboutés de leurs demandes indemnitaires à l’encontre de la société BNP Paribas Personal Finance.

Le jugement est donc infirmé en toutes ses dispositions autres que celles qui ont :

– ordonné la jonction des affaires numérotées RG 11-17-61 et RG 11-17-143 sous le numéro RG 11-17-61,

– dit que la SAS Sweetcom est mise hors de cause,

– ordonné l’annulation du contrat de vente et de prestation de service portant le n°003472 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sweetcom Sud,

– ordonné l’annulation du contrat de vente et de prestation de service portant le n°003473 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sweetcom Sud,

– ordonné l’annulation du contrat de crédit affecté n°38500576 signé le 20 février 2013 entre M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sygma, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance portant sur une somme empruntée de 36 200 euros.

La société BNP Paribas Personal Finance est condamnée à restituer aux époux [T] l’ensemble des sommes qu’ils ont versées en exécution du contrat de crédit nul.

Les époux [T] sont condamnés in solidum à restituer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 36.200 euros.

Conformément à la demande de la société BNP Paribas Personal Finance, ces condamnations réciproques seront payées par compensation entre elles à concurrence de la plus faible.

Sur les demandes de la société BNP Paribas Personal Finance

La banque sollicite à titre principal au titre de l’obligation de garantie du vendeur et à titre subsidiaire, sur le fondement de la répétition de l’indu ou de la responsabilité, la condamnation de la société Sweetcom Sud à lui payer la somme de 36. 200 au titre de la créance en garantie du capital prêté, outre la somme de 21.146,20 euros en paiement des intérêts perdus et à voir fixer ses deux créances à la procédure collective de la société Sweetcom Sud.

Les demandes de condamnations en paiement de la banque sont irrecevables sur le fondement de l’article L. 641-3 du code de commerce, qui fait défense aux créanciers d’agir contre le débiteur placé en liquidation judiciaire, et de solliciter sa condamnation au paiement d’une somme d’argent.

Par ailleurs, ainsi qu’il vient d’être jugé, la banque n’est pas privée de son droit à restitution du capital emprunté, et, elle a, en outre, commis une faute en ne vérifiant pas la régularité formelle du contrat de vente, qui est à l’origine de l’annulation du contrat de crédit affecté et, partant de la perte des intérêts contractuels qu’elle déplore, en sorte qu’elle doit être déboutée de sa demande visant à voir fixer ses créances au passif de la liquidation judiciaire.

Sur la radiation du FICP

Il sera fait droit à la demande de radiation des époux [T] du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La cour condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens de la procédure de première instance et de la procédure d’appel en application de l’article 696 du code de procédure civile.

Le jugement déféré est infirmé en ce qui concerne l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles de la procédure d’appel.

Enfin, l’ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l’arrêt.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Vu l’arrêt de la Cour de cassation en date du 20 avril 2022,

Rejette les conclusions déposées le 29 novembre 2022 par la société BNP Paribas Personal Finance,

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a :

– ordonné la jonction des affaires numérotées RG 11-17-61 et RG 11-17-143 sous le numéro RG 11-17-61,

– dit que la SAS Sweetcom est mise hors de cause,

– ordonné l’annulation du contrat de vente et de prestation de service portant le n°003472 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sweetcom Sud,

– ordonné l’annulation du contrat de vente et de prestation de service portant le n°003473 signé le 20 février 2013 par M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sweetcom Sud,

– ordonné l’annulation du contrat de crédit affecté n°38500576 signé le 20 février 2013 entre M. [N] [T], Mme [B] [T] et la société Sygma, aux droits de laquelle vient désormais la société BNP Paribas Personal Finance portant sur une somme empruntée de 36 200 euros.

Infirme le jugement en toutes ses autres dispositions critiquées,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à restituer à M. [N] [T] et Mme [B] [M] épouse [T] l’ensemble des sommes qu’ils ont versées en exécution du contrat de crédit,

Condamne in solidum M. [N] [T] et Mme [B] [M] épouse [T] à restituer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 36.200 euros correspondant au capital emprunté,

Y ajoutant,

Ordonne la compensation de ces condamnations réciproques à concurrence de la plus faible,

Ordonne la radiation des époux [T] du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires,

Dit n’y avoir lieu à indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Maître Raffy, avocat, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, Président, et par Madame Véronique SAIGE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


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