Conditions Générales de Vente : 29 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/00727

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Conditions Générales de Vente : 29 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/00727

N° RG 21/00727 – N° Portalis DBVM-V-B7F-KXYE

C8

Minute N°

Copie exécutoire

délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY

la SCP GUIDETTI BOZZARELLI LE MAT

la SELARL BGLM

Me Guillaume PIALOUX

la SCP TGA-AVOCATS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 29 JUIN 2023

Appel d’un jugement (N° RG 2016J3103)

rendu par le Tribunal de Commerce de GAP

en date du 22 janvier 2021

suivant déclaration d’appel du 08 février 2021

APPELANTE :

L’AUXILIAIRE mutuelle d’assurance des professionnels du bâtiment et

des travaux publics, société d’assurance mutuelle à cotisations variable, entreprise régie par le Code des Assurances, immatriculée au RCS de LYON sous le n° 775 649 056 00014, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Christian SALOMEZ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMÉES :

La Compagnie ABEILLE IARD & SANTE nouvelle dénomination de la Compagnie AVIVA ASSURANCES aux droits de laquelle elle vient, Société Anonyme d’Assurances Incendie, Accidents et Risques Divers, entreprise régie par le Code des Assurances, au capital social de 168 132 098,28 €, inscrite au RCS de NANTERRE sous le numéro 306 522 665, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice siégeant audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1] – FRANCE

représentée et plaidant par Me Gaëlle LE MAT de la SCP GUIDETTI BOZZARELLI LE MAT, avocat au barreau de GRENOBLE

Société MARMALCOA, société de droit portugais, pris en la personne de

son représentant légal domicilié ès qualité audit siège.

[Adresse 5]

[Adresse 5]

représentée par Me Christophe GUY de la SELARL BGLM, avocat au barreau des HAUTES-ALPES

Société SOGEA PROVENCE venant aux droits de la société CHANTIERS MODERNES venant elle-même aux droits de la société CHARLES QUEYRAS TP, SAS au capital de 542.850 euros inscrite au RCS sous le numéro 325.059.491, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2],

[Adresse 2]

représentée par Me Guillaume PIALOUX, avocat au barreau des HAUTES-ALPES, postulant et par Me BLUM de la SELARL BLUM-ENGELHARD-DE CAZALET, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.S. URBATP CARRIERES ET MARBRES agissant sous le nom commercial SPORTIELLO, société par actions simplifiée au capital de 560.000,00 euros immatriculée au RCS de Romans B 314 925 892, prise en la personne de son représentant légal (URBATP GROUPE) domicilié es-qualité audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 6]

représentée par Me Francois DESSINGES de la SCP TGA-AVOCATS, avocat au barreau des HAUTES-ALPES

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente,

Mme Marie-Pascale BLANCHARD, Conseillère,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

Assistés lors des débats de Alice RICHET, Greffière,

DÉBATS :

A l’audience publique du 08 mars 2023, Mme FIGUET, Présidente, a été entendue en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour que l’arrêt soit rendu ce jour, après prorogation du délibéré.

Exposé du litige

Suivant marché de travaux publics accepté le 13 octobre 2009, la commune d'[Localité 4] a confié à un groupement d’entreprise dont le mandataire est la société Charles Queyras TP des travaux de requalification du boulevard Pasteur relatifs au tronçon du centre ville consistant en la reprise des réseaux, la création de trottoirs, parking, places et zones piétonnes pour un montant de 3.721.090,84 euros Ttc.

La maîtrise d’oeuvre est confiée à une équipe dont le mandataire est l’agence Guillermin.

Par acte du 29 octobre 2009, la société Charles Queyras TP commande à la société Sportiello Marbres la fourniture des bordure, bandes structurantes, couvertines, marches, pavés en pierre calcaire de type Nastone NTB ou équivalent pour un prix de 250.805,95 euros Ttc.

La société Sportiello Marbres s’est fournie auprès de la société Marmalcoa qui a extrait la pierre calcaire d’une carrière située au Portugal.

Les travaux relatifs à la tranche 1 et tranche 2C ont été réceptionnés le 26 juillet 2010.

Suivant lettre du 19 mars 2012, la commune d'[Localité 4] a signalé à la société Charles Queyras TP que des bordures se délitaient et même se désagrégeaient et l’a invitée à régler ce problème.

Par lettre du 27 mars 2012, la société Charles Queyras TP a rappelé à la société Sportiello Marbres qu’elle était garante de la conformité des pierres livrées et l’a invitée à signaler le sinistre à son assureur. Elle a signalé aussi à la même date le sinistre à son assureur, la société l’Auxiliaire, qui a organisé une expertise amiable.

A la suite de cette expertise, la société l’Auxiliaire a indemnisé son assuré la société Charles Queyras TP à hauteur de la somme de 293.296,50 euros pour la réparation des dommages.

Les travaux relatifs à la tranche 2A et 2B ont été réceptionnés le 16 juillet 2012.

Le 15 novembre 2013, la commune d'[Localité 4] informait la société Charles Queyras TP de l’existence de nouveaux désordres sur les bordures posées lors des travaux des phases 1 et 2C.

Le 24 juin 2014, la commune d'[Localité 4] informait la société Charles Queyras TP de désordres sur les bordures posées lors des tranches 2A et 2B.

La société Charles Queyras TP effectuait deux nouvelles déclarations de sinistres.

Statuant sur l’assignation délivrée par la société l’Auxiliaire les 21 et 24 octobre 2014,le juge des référés du tribunal de commerce de Gap a ordonné une expertise judiciaire confiée à Monsieur [Y] par ordonnance du 29 avril 2015. L’expert a déposé son rapport le 10 juillet 2016.

Suivant protocole transactionnel du 28 mars 2017, la société l’Auxiliaire s’est engagée à indemniser la société Chantiers Modernes Sud venant aux droits de la société Charles Queyras TP à hauteur de 633.841,50 euros au titre de la 2ème déclaration de sinistre effectuée le 27 novembre 2013 et de la troisième déclaration de sinistre effectuées le 8 septembre 2014. En contrepartie, la société Chantiers Modernes Sud venant aux droits de la société Charles Queyras a renoncé à toute action du chef du 2ème sinistre constituant aggravation du 1er sinistre déclarée le 27 novembre 2013 ainsi que du 3ème sinistre déclaré le 8 septembre 2014.

Par acte d’huissier du 26 juillet 2016, la société Urbatp Carrières et Marbres – Sportiello venant aux droits de la société Sportiello Marbres a assigné la société Marmalcoa, la société Charles Queyras TP, la société l’Auxiliaire et la compagnie d’assurance Aviva devant le tribunal de commerce de Gap pour voir déclarer forclose l’action en garantie des vices cachés de la société Charles Queyras TP et de son assureur et subsidiairement en condamnation de la société Marmalcoa.

Par acte d’huissier du 24 mars 2017, la société l’Auxiliaire a assigné la société Urbatp Carrières et Marbres, la société Aviva, la société Chantiers Modernes Sud venant aux droits de la société Charles Queyras TP et la société Marmalcoa devant le tribunal de commerce de Gap aux fins d’indemnisation.

Les deux instances ont été jointes par jugement du 16 juin 2017.

Par jugement du 22 janvier 2021, le tribunal de commerce de Gap a :

– jugé recevable l’action subrogatoire engagée par la compagnie l’Auxiliaire,

– jugé que la compagnie l’Auxiliaire et la société Charles Queyras TP ont eu connaissance du vice caché dès le 16 octobre 2012, date du rapport d’avancement du laboratoire LERM,

– jugé que l’action de la compagnie l’Auxiliaire et de la société Charles Queyras TP intentée le 24 octobre 2014 est prescrite,

– déclaré irrecevables la compagnie l’Auxiliaire et la société Charles Queyras TP,

– rejeté toute autre demande de chacune des parties sur le fond, l’action en garantie des vices cachés étant prescrite,

– condamné la compagnie l’Auxiliaire à verser aux défendeurs la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile selon le décompte suivant :

* société Urbatp Carrières et Marbres à hauteur de 1.000 euros,

* compagnie Aviva à hauteur de 1.000 euros,

* société Marmalcoa à hauteur de 1.000 euros,

– condamné la compagnie l’Auxiliaire aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 8 février 2021, la société l’Auxiliaire a formé appel à l’encontre de ce jugement en ce qu’il a :

– jugé que la compagnie l’Auxiliaire et la société Charles Queyras TP ont eu connaissance du vice caché dès le 16 octobre 2012, date du rapport d’avancement du laboratoire LERM,

– jugé que l’action de la compagnie l’Auxiliaire et de la société Charles Queyras TP intentée le 24 octobre 2014 est prescrite,

– déclaré irrecevables la compagnie l’Auxiliaire et la société Charles Queyras TP,

– rejeté toute autre demande de chacune des parties sur le fond, l’action en garantie des vices cachés étant prescrite,

– condamné la compagnie l’Auxiliaire à verser aux défendeurs la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile selon le décompte suivant :

* société Urbatp Carrières et Marbres à hauteur de 1.000 euros,

* compagnie Aviva à hauteur de 1.000 euros,

* société Marmalcoa à hauteur de 1.000 euros,

– condamné la compagnie l’Auxiliaire aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise.

Prétentions et moyens de la société l’Auxiliaire

Dans ses conclusions remises le 20 février 2023, elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Gap en ce qu’il a déclaré irrecevable comme prescrite l’action engagée par la société l’Auxiliaire,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Gap en ce qu’il a déclaré recevable l’action subrogatoire engagée par la société l’Auxiliaire,

Statuant à nouveau :

– constater que la société Charles Queyras TP n’a commis aucune faute à l’origine du vice caché affectant les pierres naturelles calcaires fournies par la société Urbatp Carrières et Marbres,

– constater qu’au jour de la réception des tranches 1 et 2 des travaux réalisés par la société Charles Queyras TP pour le compte de la commune d'[Localité 4], l’origine des désordres apparus et réparés n’était pas connue par le maître d’ouvrage et l’entreprise,

– rejeter les appels incidents et le moyen soulevé par les sociétés intimées tiré des prétendues fautes commises par la société Charles Queyras TP,

– rejeter les appels incidents et le moyen soulevé par les sociétés intimées, tirés de la réception des travaux sans réserves prononcée par la commune d'[Localité 4],

– condamner in solidum les sociétés Marmalcoa et Urbatp Carrières et Marbres, cette dernière solidairement avec la Sa Abeille Iard & Santé, à payer à la compagnie d’assurances l’Auxiliaire les sommes suivantes :

* 293.296,50 euros correspondant à l’indemnité d’assurance versée par l’Auxiliaire à la société Charles Queyras TP du chef de l’indemnisation de la première réclamation de la commune d'[Localité 4], cette somme représentant, après déduction de la franchise contractuelle restée à la

charge de l’assuré, d’une part la somme de 37.364,44 euros au titre du remboursement du prix des bordures en pierres naturelles mises en oeuvre sur une partie de la tranche 1 et affectées d’un vice caché, et d’autre part la somme de 255.932,06 euros à titre de dommages-intérêts représentant le coût des travaux de dépose et d’évacuation des bordures, de mise en oeuvre des bordures de remplacement et enfin le surcoût lié à l’achat de nouvelles bordures,

* 633.841,50 euros correspondant à l’indemnité d’assurance versée par l’Auxiliaire à la société Chantiers Modernes Sud, venant aux droits de la société Charles Queyras TP du chef de l’indemnisation de la deuxième réclamation de la commune d'[Localité 4] et représentant, après déduction de la franchise contractuelle restée à la charge de l’assuré, d’une part la restitution du prix d’achat des bordures affectées d’un vice caché pour 102.578,74 euros, et d’autre part 531.262,76 euros à titre de dommages et intérêts représentant le coût des travaux de dépose et d’évacuation des bordures, ainsi que de mise en oeuvre des bordures de remplacement s’agissant de l’ensemble des ouvrages mis en oeuvre en voirie, à l’exception des bordures de « jardin » et des bordures « chasse roue », ainsi que de celles déjà réparées dans le cadre du règlement de la première réclamation, le tout sur la base de l’option2 retenue par l’expert judiciaire [Y],

* 80.671,50 euros correspondant à l’indemnité d’assurance versée par l’Auxiliaire à la société Sogea Provence, venant aux droits de la société Chantiers Modernes Sud, venant aux droits de la société Charles Queyras TP, du chef de la troisième réclamation de la commune d'[Localité 4] et représentant, après déduction de la franchise contractuelle restée à la charge de l’assuré, d’une part le remboursement du prix des bordures « jardin » et « chasse roue » en pierres naturelles mises en oeuvre au niveau de la tranche 2 et affectées d’un vice caché, pour un montant de 14.254,04 euros, et d’autre part la somme de 75.380,86 euros représentant le coût des travaux de dépose et d’évacuation de ces bordures ainsi que de mise oeuvre des bordures de remplacement correspondantes,

– rejeter les appels incidents et les moyens et les demandes reconventionnelles présentées par la société Urbatp Carrières et Marbres, la Sa Abeille Iard & Santé, et la société Marmalcoa,

– rejeter l’appel incident et les moyens présentés par la Sa Abeille Iard & Santé s’agissant de l’application du contrat d’assurance et de la détermination du plafond de garantie,

– ordonner l’application cumulative du plafond de garantie de 400.000 euros prévu à la garantie « frais de dépose ‘ repose » correspondant à l’exclusion racheté par Urbatp Carrières et Marbres, et de celui de 800.000 euros prévu par la garantie « responsabilité civile après livraison» au titre des «dommages corporels, matériels et immatériels consécutifs tous dommages confondus»,

– ordonner que ces deux plafonds de garantie seront indexés conformément aux termes des conditions du contrat délivré par la Sa Abeille Iard & Santé,

– débouter la société Urbatp Carrières et Marbres, la Sa Abeille Iard & Santé, et la société Marmalcoa de leurs demandes de condamnations au titre des frais irrépétibles et des dépens de procédure,

– condamné solidairement la société Urbatp Carrières et Marbres et la Sa Abeille Iard & Santé à payer à la société l’Auxiliaire la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné solidairement la société Urbatp Carrières et Marbres et la Sa Abeille Iard & Santé aux entiers dépens, incluant les frais d’expertise judiciaire taxés à la somme de 11.062,03 euros ttc suivant ordonnance de taxe du 19 juillet 2016.

Sur la prescription, elle fait valoir :

– que la jurisprudence retient de manière constante que le point de départ du délai de prescription de l’action en garantie des vices cachés est le moment où l’acquéreur a pu déceler de manière certaine l’origine exacte du défaut, soit la date du dépôt du rapport d’expertise judiciaire lorsqu’une mesure d’expertise judiciaire a été ordonnée,

– que son assuré et elle-même n’ont eu connaissance de l’existence effectif du vice que par la communication du rapport final établi par le laboratoire Lerm le 18 janvier 2013 ainsi que l’a relevé l’expert judiciaire, étant précisé que le rapport préliminaire du 16 octobre 2012 ne comportait qu’une analyse provisoire,

– que ce rapport étant contesté, une expertise judiciaire a dû être ordonnée,

– que dès lors, il convient de retenir la date du dépôt du rapport d’expertise judiciaire du 10 juillet 2016 comme point de départ du délai de prescription,

– qu’en tout état de cause, le délai de prescription de deux ans a été interrompu par l’assignation en référé délivrée les 21 et 24 octobre 2014,

– que son action et donc recevable.

Sur la subrogation, elle indique qu’elle justifie que la société Charles Queyras TP avait bien souscrit un contrat garantissant sa responsabilité décennale en vertu duquel les indemnités d’assurance ont été versées, qu’elle produit les quittances subrogatoires, qu’à la date de la délivrance des assignations au fond, elle était bien subrogée dans les droits et actions de son assuré, que l’action engagée présente un caractère indivisible ayant pour objet la restitution de la chose par l’acquéreur et la restitution du prix par le vendeur outre dommages et intérêts.

Sur le fond, elle fait valoir qu’un revendeur ne peut se retrancher derrière son seul rôle de négociant pour faire échec à l’action en garantie des vices cachés, même en l’absence de faute dans le conseil accompagnant la vente, cette action étant étrangère à toute notion de faute.

Elle fait remarquer que la commune d'[Localité 4] était parfaitement fondée à solliciter la réparation de désordres intervenus postérieurement aux réceptions.

S’agissant du choix de la pierre, elle relève qu’il ne peut être reproché à la société Charles Queyras TP d’avoir refusé la pierre à 240 cycles de résistance au gel dès lors que la pierre choisie correspond à ce qui est réglementairement prévu en zone D et que le problème réside en la présence de composés argileux trop importante dans la matrice de la pierre naturelle calcaire, qu’il ne peut non plus lui être reproché d’avoir poursuivi les travaux de la deuxième tranche malgré la connaissance des désordres affectant les bordures dès lors qu’elle n’a eu connaissance de l’origine des désordres qu’à compter du rapport final du Lerm du 18 janvier 2013.

Sur la garantie de la société Abeille Iard Santé, elle fait remarquer que la société Sportiello Marbres aux droits de laquelle vient la société Urbatp Carrières et Marbres a racheté l’exclusion visé à l’article 5 paragraphe 2 des conditions générales et qu’en conséquence, l’assureur s’est engagé à prendre en charge les frais de dépose et de repose du produit livré dans la limite de 400.000 euros, qu’en outre la garantie responsabilité civile après livraison stipule une prise en charge des dommages matériels et immatériels consécutifs dans la limite de 800.000 euros, que ces deux plafonds doivent se cumuler à défaut d’établir que la police exclut le cumul de garantie.

Prétentions et moyens de la société Sogea venant aux droits de la société Chantiers Modernes venant elle-même aux droits de la société Charles Queyras TP

Dans ses conclusions remises le 3 septembre 2021, elle demande à la cour de:

– constater que la société l’Auxiliaire a dûment versé aux débats les 3 quittances subrogatives correspondant aux 3 réclamations et se trouve donc recevable à agir,

– constater que la société l’Auxiliaire et la société Charles Queyras TP n’ont eu connaissance de l’existence du vice effectif affectant les bordures en

pierre naturelle calcaire que par la communication du rapport final établi par le laboratoire Lerm le 18 janvier 2013,

– constater que le délai de prescription de deux ans qui a été interrompu par l’assignation en référé délivrée les 21 et 24 octobre 2014, n’a recommencé à courir, qu’à compter du dépôt du rapport d’expertise judiciaire, soit le 10 juillet 2016,

– constater que l’expert a conclu que la responsabilité du fournisseur de la pierre est engagée,

– réformer le jugement,

– débouter la société Marmalcoa et la société Urbatp Carrières Marbres de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

– condamner la société Marmalcoa et la société Urbatp Carrières Marbres à payer in solidum la somme de 72.093,50 euros pour la première réclamation et pour la deuxième réclamation faisant état d’une aggravation,

– condamner la société Marmalcoa et la société Urbatp Carrières Marbres à payer in solidum la somme de 8.963,50 euros pour la troisième réclamation,

– condamner la société Urbatp Carrières Marbres à payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens.

Sur la prescription, elle fait valoir :

– qu’elle n’a eu connaissance de l’existence du vice affectant les bordures que par la communication du rapport final établi par le laboratoire Lerm le 18 janvier 2013, étant observé que le rapport préliminaire du 16 octobre 2012 n’a pas été porté à sa connaissance et ne comportait qu’une analyse provisoire,

– que la commune d'[Localité 4] n’avait pas connaissance du vice lors du démarrage de la 2ème tranche, étant observé que des essais au microscope électrique ont été nécessaires pour déterminer la cause du dommage,

– que la prescription de l’action relativement à la 2ème tranche de travaux sera également rejetée, l’action fondée sur le vice caché étant indivisible et devant s’appliquer à l’ensemble du produit concerné qui a fait l’objet d’une seule commande,

– que l’assignation en référé interruptive de prescription a été délivrée le 21 octobre 2014 à la société Aviva et le 24 octobre 2014 à la société Urbatp Carrières Marbres,

– que la prescription n’a recommencé à courir qu’à compter du dépôt du rapport d’expertise.

Sur le fond, elle indique qu’il convient d’écarter toute faute de la société Charles Queyras TP, que les bordures ont été choisies par les représentants de la commune au regard de leurs caractéristiques mécaniques et physiques, que la pierre retenue résistait à plus de 212 cycles de gel alors que la norme était de 144 cycles pour la région d'[Localité 4], que la difficulté vient de la présence d’argile en trop grande quantité, étant relevé qu’il n’existe pas de tests supplémentaires imposant de vérifier la présence d’argile dans la roche en fonction du climat. Elle relève qu’il ne peut être reproché à la société Charles Queyras TP d’avoir poursuivi les travaux de la 2ème tranche dès lors qu’elle n’a eu connaissance du vice que le 18 janvier 2013. Elle ajoute qu’elle est bien fondée à solliciter les franchises qu’elle a dû assumer.

Prétentions et moyens de la société Urbatp Carrières et Marbres agissant sous le nom commercial Sportiello

Dans ses conclusions remises le 15 juillet 2022, elle demande à la cour de :

A titre principal,

– dire que la société Charles Queyras TP et son assureur la société l’Auxiliaire ont eu connaissance du vice affectant les bordures en pierre livrée par la société Sportellio dès le 16 octobre 2012 à la lecture du rapport d’avancement du Lerm,

– dire que la société l’Auxiliaire es qualités d’assureur de la société Charles Queyras TP a délivré son assignation en référé le 24 octobre 2014,

– déclarer prescrite l’action de la société l’Auxiliaire, et a fortiori celle de la société Charles Queyras TP, le délai de prescription de deux ans à compter de la découverte du vice étant expiré,

– confirmer le jugement du tribunal de commerce de Gap du 22 janvier 2021 dans toutes ses dispositions en ce qu’il a :

* jugé recevable l’action subrogatoire engagée par la compagnie l’Auxiliaire,

* jugé que la compagnie l’Auxiliaire et la société Charles Queyras TP ont eu connaissance du vice caché dès le 16 octobre 2012, date du rapport d’avancement du laboratoire LERM,

* jugé que l’action de la compagnie l’Auxiliaire et de la société Charles Queyras TP intentée le 24 octobre 2014 est prescrite,

* déclaré irrecevables la compagnie l’Auxiliaire et la société Charles Queyras TP,

* rejeté toute autre demande de chacune des parties sur le fond, l’action en garantie des vices cachés étant prescrite,

* condamné la compagnie l’Auxiliaire à verser aux défendeurs la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile selon le décompte suivant:société Urbatp Carrières et Marbres à hauteur de 1.000 euros, compagnie Aviva à hauteur de 1.000 euros, société Marmalcoa à hauteur de 1.000 euros,

* condamné la compagnie l’Auxiliaire aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise,

* dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

Subsidiairement,

– déclarer prescrite la prétention indemnitaire de la société l’Auxiliaire et a fortiori celle de la société Charles Queyras TP portant sur la tranche 2 des travaux :

* 102.578,74 euros ttc au titre de la restitution du prix d’achat des bordures affectés d’un vice caché au niveau de la tranche 2,

* 797.007,25 euros ttc à titre de dommages et intérêts représentant le coût des travaux de dépose et d’évacuation des bordures ainsi que de mise en oeuvre des bordures de remplacement au niveau de la tranche 2,

* 39.353,35 euros ttc à titre de dommages et intérêts représentant les honoraires de maîtrise d’oeuvre du chef des travaux de reprise de la tranche 2,

– déclarer prescrite la prétention indemnitaire de la société l’Auxiliaire et a fortiori celle de la société Charles Queyras TP de 80.671,50 euros correspondant à l’indemnité d’assurance versée par la société l’Auxiliaire en réparation des désordres constatés en 2018, cette demande ayant été présentée pour la première fois par voie de conclusions le 17 octobre 2018,

A titre plus subsidiaire,

– dire et juger que la société Urbatp a fourni une pierre conforme aux caractéristiques techniques de la pierre définies dans le CCTP fourni par la société Charles Queyras TP qui ne permettait pas d’exclure la présence de veine d’argile,

– dire et juger que la présence d’argile ne constitue pas un vice caché au sens de l’article 1648 du code civil s’agissant d’une pierre naturelle calcaire,

– dire et juger que la société Urbatp s’est conformée à son devoir de conseil en préconisant l’utilisation d’une pierre calcaire beige impérial origine Turquie et Porphyre d’Italie, en fournissant les fiches techniques de ces pierres et que la société Charles Queyras TP a refusé cette pierre,

– dire et juger que la société Urbatp s’est conformée à son obligation de délivrance conforme,

Plus subsidiairement,

– dire que le vice avait un caractère apparent lors de la réalisation de la 2ème tranche des travaux (septembre 2011 – juillet 2012),

– constater que la réception des travaux réalisés en exécution du marché public de travaux a été prononcée sans réserve en date du 16 juillet 2012,

– débouter la société l’Auxiliaire de l’ensemble de ses demandes,

Surabondamment,

– dire et juger que la société Charles Queyras TP a imposé à la société Urbatp de fournir la pierre litigieuse alors que la société Urbatp avait pourtant préconisé une pierre plus adaptée au climat embrumais,

– dire et juger que la société Charles Queyras TP a poursuivi l’exécution de la 2ème tranche de travaux en connaissant le caractère vicié des bordures qu’elle posait,

– dire que les fautes commises sont exclusivement la cause du préjudice subi par la société Charles Queyras TP ,

– débouter la société l’Auxiliaire de ses demandes,

Très subsidiairement,

– limiter les sommes à verser à la société l’Auxiliaire à la somme de 209.793,65 euros en application de la clause limitative de garantie insérée dans le contrat de vente Marmalcoa Urbatp et subsidiairement limiter les sommes à verser à la société l’Auxiliaire à la somme de 416.278,68 euros conformément au devis de la société Urbatp en date du 26 février 2016,

En tout état de cause,

– débouter la société Sogea Provence de ses demandes,

– condamner la compagnie Aviva à relever et garantir la société Urbatp des condamnations prononcées à son encontre,

– dire et juger que devront s’appliquer de manière cumulative le plafond de garantie de 400.000 euros prévue à la garantie ‘frais de dépose-repose’ correspondant à l’exclusion rachetée par la société Urbatp et celui de 800.000 euros stipulé par la garantie ‘responsabilité civile après livraison’ au titre des dommages corporels, matériels et immatériels consécutifs et non consécutifs tous dommages confondus,

– dire et juger que ces deux plafonds de garantie seront indexés conformément aux termes des conditions du contrat conclu avec la compagnie Aviva,

– dire et juger que la société Marmalcoa a vendu à la société Sportellio aux droits de laquelle vient la société Urbatp des bordures en pierre naturelle affectées d’un vice caché compromettant l’usage auquel elles étaient destinées,

– dire et juger que la société Urbatp a interrompu la prescription en assignant la société Marmalcoa en date du 20 septembre 2016 et que son action à l’égard de la société Marmalcoa est parfaitement recevable,

– condamner la société Marmalcoa à payer à la société Urbatp une somme que la société l’Auxiliaire évalue de la manière suivante:

* 293.296,50 euros correspondant à l’indemnité d’assurance versée par la société l’Auxiliaire à la société Charles Queyras TP du chef de l’indemnisation de la première réclamation de la commune d'[Localité 4], cette somme représentant, apres déduction de la franchise contractuelle restée à la charge de l’assuré, d’une part la somme de 37.364,44 euros au titre du

remboursement du prix des bordures en pierres naturelles mises en oeuvre sur une partie de la tranche 1 et affectées d’un vice caché, et d’autre part la somme de 255.932,06 euros au titre de dommage-intérêts représentant le coût des travaux de dépose et d’évacuation des bordures, de mise en oeuvre des bordures de remplacement et enfin le surcoût lié à l’achat de nouvelles bordures,

* 633.841,50 euros correspondant à l’indemnité d’assurance versée par la société l’Auxiliaire à la société Chantiers Modernes Sud venant aux droits de la société Charles Queyras TP du chef de l’indemnisation de la deuxième réclamation de la commune d'[Localité 4] et représentant, après déduction de la franchise contractuelle restée à la charge de l’assuré, d’une part la restitution du prix d’achat des bordures affectées d’un vice caché pour 102.578,74 euros et d’autre part 531.262,76 € à titre de dommages et intérêts représentant le coût des travaux de dépose et d’évacuation des bordures ainsi que de mise en oeuvre des bordures de remplacement s’agissant de l’ensemble des ouvrages mis en oeuvre en voirie, à l’exception des bordures de jardin et des bordures chasse roue ainsi que de celles déjà réparées dans le cadre du règlement de la première réclamation, le tout sur la base de l’option2 retenue par l’expert judiciaire [Y],

* 80.671,50 euros correspondant à l’indemnité d’assurance versée par la société l’Auxiliaire à la société SDGEA Provence venant aux droits de la société Chantiers Modernes Sud venant aux droits de la société Charles Queyras TP du chef de la troisième réclamation de la commune d'[Localité 4] et représentant, après déduction de la franchise contractuelle restée à la charge de l’assuré, d’une part le remboursement du prix des bordures de jardin et des bordures chasse roue en pierres naturelles mises en oeuvre au niveau de la tranche 2 et affectées d’un vice caché, pour un montant de 14.254,04 euros , et d’autre part la somme de 75.380,86 euros représentant le coût des travaux de dépose et d’évacuation de ces bordures ainsi que de mise en oeuvre des bordures de remplacement correspondantes,

– dire et juger que ces deux plafonds de garantie seront indexés conformément aux termes des conditions du contrat délivré par la société Aviva,

– condamner solidairement la société Urbatp Carrières et Marbres et la société Aviva Assurances à payer à la société l’Auxiliaire la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner solidairement la société Urbatp Carrières et Marbres et la société Aviva Assurances aux entiers dépens incluant les frais d’expertise judiciaire taxés à la somme de 11.062,03 euros Ttc suivant ordonnance de taxe du 19 juillet 2016,

En tout état de cause,

– condamner tout succombant à verser à la société Urbatp une somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, y compris les frais d’expertise judiciaire pour un montant de 11.062,03 euros ttc.

Elle fait valoir que le laboratoire Lerm mentionnait dès son rapport d’avancement établi le 16 octobre 2012 la présence de composés argileux dans les bordures livrées, qu’une facture du 16 octobre 2012 relative à ce rapport a été adressée à la société l’Auxiliaire, qu’en conséquence dès cette date, la société l’Auxiliaire avait connaissance de la nature et de la gravité du vice, le rapport final n’étant qu’une reprise des conclusions du rapport du 16 octobre 2012, que l’action est donc prescrite, l’assignation en référé n’ayant été délivrée que le 24 octobre 2014.

Elle ajoute qu’il appartenait à la société l’Auxiliaire de justifier que le paiement de l’indemnité à la société Charles Queyras TP a été effectué au plus tard le 25 avril 2017, date à laquelle expirait le délai de prescription biennale interrompue par l’ordonnance de référé, qu’à défaut, la société l’Auxiliaire n’a pu recueillir qu’une action prescrite, que l’action relative à la 2ème tranche de travaux est prescrite, que s’agissant de la troisième réclamation, elle a été faite par conclusions du 17 septembre 2018, soit plus de 5 ans après la vente des pierres.

Sur le fond, elle considère que la présence d’argile dans une pierre calcaire n’est pas un vice caché, que par ailleurs elle a rempli son obligation de conseil en proposant à la société Charles Queyras TP une pierre calcaire origine Turquie et porphyre d’Italie très résistante aux essais de gélivité (240 cycles), préconisation qui a été refusée par la société Charles Queyras TP, que sa responsabilité ne peut être engagée dès lors qu’elle a livré une pierre conforme aux caractéristiques contractuelles du marché.

S’agissant des désordres affectant la deuxième tranche de travaux, elle fait remarquer que ces travaux ont été réalisés alors même que les bordures de la première tranche s’étaient délitées, que la ville d’Embrun avait connaissance de l’existence de désordres généralisés au plus tard le 19 mars 2013 et a pourtant réceptionné ces travaux sans réserve, que cette réception purge le vice apparent, que la société Charles Queyras TP n’était pas tenue d’indemniser la commune d'[Localité 4].

Elle fait état des fautes de la société Charles Queyras TP qui n’a pas sollicité une pierre excluant la présence d’argile, qui a refusé la pierre proposée et qui a continué à poser des bordures qu’elle savait viciées. Elle en retire que le lien de causalité est rompu et que sa responsabilité ne peut pas être recherchée.

Elle s’oppose à toute indemnisation au titre de la franchise en relevant que son paiement n’est pas démontré et que la société Sogea Provence étant responsable, cette franchise doit demeurer à sa charge.

Sur la garantie de la société Aviva, elle fait remarquer que les produits doivent seulement être conformes aux normes françaises homologuées, qu’il résulte du rapport du Lerm que la pierre mise en oeuvre respecte la norme B-61, que la garantie ‘frais de dépose -repose’ est applicable à concurrence de 400.000 euros, qu’en outre elle bénéficie d’une garantie responsabilité civile après livraison avec un plafond de 800.000 euros, que ces deux plafonds sont cumulatifs.

Sur le préjudice, elle relève que le devis des travaux de reprise s’élève à la somme de 416.278,68 euros ttc et qu’en tout état de cause, le montant ne peut être supérieure à la somme de 899.586 euros évaluée par l’expert.

Sur son action à l’encontre de la société Marmalcoa, elle indique qu’elle n’a pris connaissance du rapport du Lerm que le 24 octobre 2014 lors de l’assignation en référé, que son action n’est pas prescrite puisqu’elle a assigné la société Marmalcoa le 20 septembre 2016, que le vice était bien caché puisqu’il a fallu un examen approfondi au microscope électronique pour établir la présence de composés argileux, que la société Marmalcoa a fourni une vingtaine de pierres de remplacement de même type qui ne se sont pas délitées ce qui montre que les autres étaient bien affectées d’un vice caché, que la pierre livrée en 2009 était bien impropre à sa destination, que le vendeur professionnel est réputé avoir connaissance du vice, que la société Marmalcoa est donc tenue d’indemniser le préjudice tel qu’évalué par l’expert.

Prétentions et moyens de la société Marmalcoa

Dans ses conclusions remises le 22 février 2023, elle demande à la cour de :

– confirmer le jugement qui a :

* jugé recevable l’action subrogatoire engagée par la compagnie l’Auxiliaire,

* jugé que la compagnie l’Auxiliaire et la société Charles Queyras TP ont eu connaissance du vice caché dès le 16 octobre 2012, date du rapport d’avancement du laboratoire LERM ,

* jugé que l’action de la compagnie l’Auxiliaire et de la société Charles Queyras TP intentée le 24 octobre 2014 est prescrite,

*déclaré irrecevables la compagnie l’Auxiliaire et la société Charles Queyras TP,

* rejeté toute autre demande de chacune des parties sur le fond, l’action en garantie des vices cachés étant prescrite,

* condamné la compagnie l’Auxiliaire à verser aux défendeurs la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile selon le décompte suivant :

société Urbatp Carrières et Marbres à hauteur de 1.000 euros,

compagnie Aviva à hauteur de 1.000 euros,

société Marmalcoa à hauteur de 1.000 euros,

*condamné la compagnie l’Auxiliaire aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise,

– condamner tout succombant et la société Sas Urbatp Carrières et Marbres exerçant sous le nom commercial Sportiello à payer à la société Marmalcoa la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Subsidiairement,

– déclarer irrecevable la demande de la société l’Auxiliaire, la compagnie Abeilles Iard et Santé, la société Sogea Provence venant aux droits de la société Chantiers Modernes Sud venant aux droits de la société Charles Queyras TP contre la société Marmalcoa sur le fondement de l’action en garantie des vices cachés,

– débouter la société l’Auxiliaire de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la société Marmalcoa,

– débouter la société Sogea Provence venant aux droits de la société Chantiers Modernes Sud venant aux droits de la société Charles Queyras TP de ses demandes à l’encontre de la société Marmalcoa,

– débouter la compagnie Abeille Iard et Santé (anciennement AVIVA) de ses demandes,

– déclarer prescrite l’action de la Sas Urbatp Carrières et Marbres exerçant sous le nom commercial Sportiello contre la société Marmalcoa en garantie des vices cachés,

– déclarer infondée l’action de la Sas Urbatp Carrières et Marbres exerçant sous le nom commercial Sportiello contre la société Marmalcoa en garantie des vices cachés,

– juger que l’indemnisation sollicitée par la Sas Urbatp Carrières et Marbres exerçant sous le nom commercial Sportiello restera à sa seule charge,

– juger que les conditions générales de vente de la société Marmalcoa sont opposables à la Sas Urbatp Carrières et Marbres exerçant sous le nom commercial Sportiello,

– débouté la Sas Urbatp Carrières et Marbres exerçant sous le nom commercial Sportiello de l’ensemble de ses demandes contre la société Marmalcoa,

En tout état de cause,

– condamner tout succombant et la Sas Urbatp Carrières et Marbres exerçant sous le nom commercial Sportiello à payer à la société Marmalcoa la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les frais et dépens, pour la procédure en appel.

Elle considère que la société l’Auxiliaire qui s’est acquittée de la facture qui lui a été adressée a eu connaissance du rapport d’avancement en date du 16 octobre 2012 qui a conclu que les désordres sont en relation avec la présence de composés argileux dans la pierre mise en oeuvre, qu’elle a été appelée aux opérations d’expertise par acte du 9 décembre 2014, soit plus de deux ans après la connaissance du vice, que l’action est donc prescrite.

Elle ajoute que l’action de la société Sogea Provence venant aux droits de la société Chantiers Modernes Sud venant aux droits de la société Charles Queyras TP en garantie des vices cachés est irrecevable à son encontre dès lors qu’elle ne lui a vendu aucune marchandise, qu’elle a fourni la Sas Urbatp Carrières et Marbres exerçant sous le nom commercial Sportiello en alertant sur la caractéristique des pierres commandées, étant précisé qu’elle ignorait leur destination, que ces pierres n’étaient pas adaptées à la région d'[Localité 4] ce que la Sas Urbatp Carrières et Marbres, professionnel du secteur, n’ignorait pas.

Elle précise que les pierres fournies étaient conformes au contrat de commande, qu’aux termes des conditions de vente la garantie ne porte que sur le remplacement des produits défectueux, qu’elle ne peut être tenue de l’usage de produits inadéquats sur le matériau, tel que l’usage de sel.

Elle souligne que le préjudice de la Sas Urbatp Carrières et Marbres est éventuel.

Prétentions et moyens de la société Abeille iard Santé nouvelle dénomination de la société Aviva Assurances

Dans ses conclusions remises le 7 février 2023, elle demande à la cour de :

– donner acte à la compagnie Abeille Iard & Santé de sa nouvelle dénomination et de ce qu’elle vient aux droits de la compagnie Aviva Assurances,

– statuer ce que de droit sur la recevabilité de l’appel de la société l’Auxiliaire,

– juger cet appel non fondé,

A titre principal

– confirmer le jugement du tribunal de commerce de Gap du 22 janvier 2021, en ce qu’il a notamment :

* jugé irrecevable car prescrite l’action de la société l’Auxiliaire laquelle n’a pas été engagée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice caché,

* débouté la société l’Auxiliaire de ses prétentions,

*condamné la société l’Auxiliaire à payer à la compagnie Aviva Assurances aujourd’hui Abeille Iard & Santé la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles, et l’a condamnée aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise,

A titre subsidiaire,

– juger que les produits litigieux vendus par la société Urbatp n’entrent pas dans le champ d’application du contrat d’assurance souscrit auprès de la compagnie Aviva Assurances de sorte que ses garanties ne peuvent pas être mobilisées dans le cadre de ce litige,

– juger que les désordres, portés à la connaissance de la société Charles Queyras TP et de la commune d'[Localité 4] dès l’exécution de la 1ère tranche des travaux et apparents lors de la réception des travaux n’ont pas fait l’objet de réserves,

-juger en conséquence que les désordres ne peuvent plus donner lieu à indemnisation,

– rejeter l’ensemble des demandes dirigées à l’encontre de la compagnie Aviva Assurances aujourd’hui Abeille Iard & Santé et prononcer la mise hors de cause de celle-ci,

A titre infiniment subsidiaire,

– juger que seul le montant des travaux, option n°1 retenu par l’expert pourrait être alloué en indemnisation du sinistre quelle que soit la somme effective prise en charge par la société l’Auxiliaire,

– juger que la compagnie Aviva Assurances aujourd’hui Abeille Iard & Santé est recevable et bien fondée à opposer à la société l’Auxiliaire et toutes autres parties les exclusions et limites et franchises contractuelles de la police n° 75 118 581 souscrite, ci avant rappelées, dans le cadre de ce sinistre, et qu’il ne saurait y avoir de cumul de plafonds de garantie,

– débouter la société l’Auxiliaire de ses prétentions à ce titre,

– débouter les sociétés Charles Queyras TP nouvellement Sogea Provence et la société Urbatp de leurs demandes dirigées contre la compagnie Abeille Iard & Santé,

En tous les cas,

– débouter la société Marmalcoa de ses demandes tendant à voir déclarer toute action contre elle irrecevable,

– condamner la société Marmalcoa à relever et garantir la compagnie Aviva Assurances de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre tant en principal, qu’en frais et dépens,

– débouter la société l’Auxiliaire de sa demande au titre des frais irrépétibles,

– condamner la société l’Auxiliaire ou qui mieux le devra à payer à la compagnie Aviva Assurances la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société l’Auxiliaire ou qui mieux le devra aux entiers dépens.

Elle soutient que le vice affectant les bordures a été clairement identifié dès le 16 octobre 2012, date du rapport préliminaire, qu’elle ne peut sérieusement soutenir qu’elle n’a pas eu connaissance de ce rapport alors que c’est son expert qui a saisi le LERM et qu’elle a payé la facture correspondant à ce rapport préliminaire, que la société l’Auxiliaire n’a assigné la compagnie Aviva Assurances et son assuré que les 21 et 24 octobre 2014 devant le juge des référés, que l’action est donc prescrite.

Sur la garantie, elle fait valoir que les produits vendus par la société Urbatp ne remplissent pas les conditions des produits entrant dans le champs d’application du contrat d’assurance, les essais d’identité de la pierre datant de plus de 2 ans.

Sur le fond, elle souligne qu’alors que la commune d'[Localité 4] et la société Charles Queyras TP avaient connaissance des désordres dès le mois de mars 2010, les travaux de la tranche 1 et ceux de la tranche 2 ont été poursuivis en utilisant les mêmes pierres, que lors de la réception , les désordres n’ont pas été réservés ce qui purge tout vice, que la connaissance du risque est de nature à supprimer tout aléa quant aux travaux exécutés vis à vis des assureurs.

Sur le montant des demandes, elle observe que seuls les désordres identifié par l’expert peuvent être retenus, que le montant de sa garantie est limité à 400.000 euros, qu’il ne peut y avoir cumul de plafond, que la garantie ‘frais de dépose- repose’ est une garantie à part et ne peut être cumulée avec la garantie RC après livraison, que sa police ne fait pas état de cumul de plafond, que la garantie RC ‘produits’ n’a pas été souscrite.

Elle conclut enfin que seule la société Marmalcoa qui a vendu les matériaux affectés du vice devra supporter in fine les conséquences des désordres.

Pour le surplus des demandes et des moyens développés, il convient de se reporter aux dernières écritures des parties en application de l’article 455 du code de procédure civile.

L’instruction de la procédure a été clôturée le 23 février 2023.

Motifs de la décision

1) Sur la prescription de l’action engagée par la société l’Auxiliaire

En application de l’article 1648 du code civil, l’action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l’acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.

Dans le cadre de l’expertise amiable organisée par la société l’Auxiliaire et confiée à la société Saretec, celle-ci a confié à la société Lerm une étude aux fins de rechercher l’origine des désordres affectant les bordures en pierre mises en oeuvre sur la voirie d'[Localité 4].

La société Lerm a rédigé le 16 octobre 2012 un rapport d’avancement à l’attention de la société Saretec. Ce rapport conclut en la présence d’argiles en quantité parfois très abondante dans la pierre et indique que ces minéraux ont la propriété de présenter des variations de volume en présence d’humidité ou lorsqu’ils s’assèchent qui entraînent des contraintes mécaniques importantes engendrant des faiblesses ou des microfissures qui avec un facteur aggravant comme le gel ont pour effet la dégradation des pierres mises en oeuvre. Ce rapport précise néanmoins que les essais de gélivité qui sont en cours de réalisation permettront de statuer sur le caractère gélif ou non de la pierre.

Ce document n’est donc qu’un document intermédiaire, la société Lerm n’ayant pas encore réalisé l’ensemble des essais nécessaires pour déterminer l’origine des désordres et établir des conclusions définitives.

En outre, il est précisé que ce document est diffusé aux seules sociétés Saretec et Lerm Arles. Il n’est pas établi que ce rapport intermédiaire a été remis à la société l’Auxiliaire, ni a fortiori sa date de remise. Le seul envoi d’une facture datée du 16 octobre 2012 à la société l’Auxiliaire sans mention de l’envoi du rapport d’avancement ne permet pas d’établir cette remise.

Dès lors, contrairement à ce qu’a retenu le tribunal, il n’est pas démontré que la société l’Auxiliaire avait connaissance du vice dès le 16 octobre 2012.

Seul le rapport d’étude rédigé le 18 janvier 2013 a établi des conclusions définitives en reprenant les constatations relatives à la présence d’argiles en quantité parfois très abondante dans la pierre et en indiquant que l’action du gel apparaît comme un facteur aggravant sur les anomalies préexistantes (fissures).

Cette analyse a au demeurant été reprise par l’expert judiciaire dans son rapport du 10 juillet 2016, celui-ci mentionnant que l’origine exacte des désordres affectant les pierres naturelles calcaires n’a été connue qu’à la suite de l’établissement du rapport final d’études par la société Lerm le 18 janvier 2013.

La date de découverte du vice est donc celle du 18 janvier 2013.

En conséquence, contrairement à ce qu’a retenu le tribunal, l’assignation en référé délivrée les 21 et 24 octobre 2014 par la société l’Auxiliaire à l’encontre de la société Aviva, de la société Urbatp Carrières et Marbres et de la société Marmalcoa tendant à l’organisation d’une expertise judiciaire l’a bien été dans le délai biennal de l’article 1648 du code civil et l’a donc valablement interrompu.

L’ordonnance de référé a été rendue le 29 avril 2015, point de départ d’un nouveau délai.

L’assignation au fond a été délivrée le 24 mars 2017 par la société l’Auxiliaire, soit dans le délai biennal.

Tant lors de la délivrance de l’assignation en référé que de l’assignation au fond, la société l’Auxiliaire bénéficiait d’une quittance subrogative du 28 octobre 2013 et interrompait donc valablement la prescription en tant que subrogée. En outre, il est de jurisprudence constante que l’assignation délivrée par l’assureur à un moment où il n’est pas encore subrogé dans les droits de son assuré contre le responsable produit son effet interruptif dès lors que l’assureur vient à être subrogé avant que le juge ne statue, étant relevé qu’en l’espèce les trois quittances subrogatives en date des 28 octobre 2013, 28 mars 2017 et 6 août 2018 ont été versées aux débats.

L’interruption vaut pour l’ensemble des conséquences du vice caché et il n’y a pas lieu de distinguer selon les dates successives de réclamation, l’action en vice caché portant de façon indivisible sur l’ensemble des pierres fournies et commandées suivant commande unique du 29 octobre 2009.

Dès lors, c’est à tort que le tribunal a retenu la prescription de l’action engagée par la société l’Auxiliaire et l’a déclarée irrecevable en son action.

La cour dit en conséquence que l’action de la société l’Auxiliaire est recevable.

2) Sur la prescription de l’action engagée par la société Charles Queyras TP aux droits de laquelle vient la société Chantiers Modernes aux droits de laquelle vient la société Sogea

Une assignation en justice n’interrompt la prescription que si elle a été signifiée par le créancier lui-même au débiteur se prévalant de la prescription.

En l’espèce, la société Sogea venant aux droits de la société Chantiers Modernes venant elle-même aux droits de la société Charles Queyras TP indique qu’elle a eu connaissance du vice affectant les bordures en pierre naturelle calcaire le 18 janvier 2013. Elle ne justifie pas avoir délivré aux sociétés Aviva, Urbatp et Marmalcoa une assignation interruptive de prescription avant le 18 janvier 2015, étant relevé que l’assignation en référé- expertise a été délivrée à l’initiative de la société l’Auxiliaire.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu’il a jugé prescrite l’action de la société Charles Queyras TP aux droits de laquelle vient la société Chantiers Modernes aux droits de laquelle vient la société Sogea et l’a déclarée irrecevable en son action.

3) Sur le fond des demandes de la société l’Auxiliaire

a) sur la garantie

En application de l’article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix.

L’expert judiciaire a indiqué que les désordres se caractérisent par des fissurations, des délitements et des désagrégations des bordures en pierre naturelle calcaire et que le fait générateur provient de la présence de composés argileux encastrés dans la matrice de la pierre mise en oeuvre en voirie, les dégradations étant ensuite aggravées par les cycles récurrents de gel et dégel, reprenant ainsi les conclusions émises par le laboratoire Lerm dans son rapport du 18 janvier 2013. Il se déduit donc du rapport d’expertise judiciaire que le vice était antérieur à la vente.

L’impropriété à l’usage n’est pas contestée, ni contestable au regard de désagrégations affectant des bordures en voirie et générant des risques d’accident.

L’expert a aussi précisé en réponse aux dires qu’avant les investigations effectuées par le laboratoire Lerm, l’origine exacte des désordres affectant les pierres calcaires fournies et mises en oeuvre par la société Queyras TP ne pouvait pas être décelée d’où la notion de vice caché affectant ces matériaux.

Il est indifférent que la société Urbatp Carrières et Marbres et la société Marmalcoa indiquent avoir fourni une pierre présentant les caractéristiques techniques définies dans le CCTP ou dans le bon de commande dès lors que l’action engagée n’est pas fondée sur une défaut de conformité mais sur un vice caché.

Enfin, les société Urbatp Carrières et Marbres et Marmalcoa ne peuvent sérieusement soutenir que la présence d’argiles en quantité parfois très abondante dans la pierre telle que relevée par le laboratoire Lerm et l’expert judiciaire ne constitue pas un vice caché de la pierre dès lors que le caractère de vice caché ressort des conclusions étayées de l’expert non contredites par des éléments techniques.

Le fait que les conditions de vente de la société Marmalcoa indiquent que les pierres sont des matériaux naturels qui peuvent présenter des variation de veinage, de texture et de ton et que celles-ci ne peuvent constituer un motif de refus, ni donner lieu à une réduction de prix est inopérant en l’espèce dès lors que les défauts relevés ne sont pas des variations concernant l’apparence de la pierre mais des vices cachés entraînant une impropriété à l’usage.

Enfin, ainsi que démontré précédemment, l’origine des défauts n’a été connue qu’à la suite de l’établissement du rapport final du laboratoire Lerm en date du 18 janvier 2013. En conséquence, contrairement à ce que soutient la société Urbatp Carrières et Marbres, le vice n’était pas apparent à la réception de la deuxième tranche de travaux intervenue le 16 juillet 2012 dès lors qu’à cette date, les bordures de la deuxième tranche n’étaient pas encore affectées de désordres et que l’origine des défauts de la première tranche n’a été connue que postérieurement.

Le caractère de vice caché est donc établi.

Il est indifférent que les sociétés Urbatp Carrières et Marbres et Marmalcoa n’ont pas commis de faute s’agissant d’une action en garantie des vices cachés.

Par ailleurs, si la société Marmalcoa fait valoir qu’elle n’a aucune relation contractuelle avec la société Charles Queyras TP et que la société l’Auxiliaire, subrogée dans les droits de la société Charles Queyras TP, ne peut agir contre elle sur le fondement de la garantie des vices cachés, ce moyen est totalement inopérant dès lors qu’il est de jurisprudence constante que le sous acquéreur est recevable à exercer l’action en garantie des vices cachés contre le vendeur originaire.

Enfin, aucune faute ne peut être retenue à la charge de la société Charles Queyras TP susceptible de faire perdre à la société l’Auxiliaire, subrogée dans ses droits, le bénéfice de la garantie des vices cachés. En effet, s’il n’est pas contesté que la société Charles Queyras TP n’a pas fait le choix de la pierre proposée par la société Urbatp Carrières et Marbres en raison de sa meilleure résistance aux essais de gélivité (240 cycles), il ressort de l’expertise que la pierre choisie résiste aux 144 cycles de gel/dégel indiqués dans la norme NF B10-601 prévue pour une utilisation en voirie dans une zone de gel modéré ou sévère, que la fiche technique de la pierre choisie prévoit au demeurant une résistance à la gélivité à hauteur de 212 cycles, que les désordres proviennent de la présence d’argile en quantité excessive et que dès lors, le choix d’une pierre résistante à 240 cycles de gel/dégel n’aurait pas empêché la survenance des désordres. En outre, il ne peut être reproché à la société Charles Queyras TP de ne pas avoir prévu dans le CCTP d’autres caractéristiques techniques, notamment sur la teneur en argile, dès lors que l’expert a relevé dans sa réponse aux dires (page 6/9) qu’il n’existait pas d’autres exigences réglementaires applicables et que la pierre décrite dans le CCTP était admissible pour une mise en oeuvre sur la commune d'[Localité 4]. Enfin, il ne peut être reproché à la société Charles Queyras TP d’avoir engagé les travaux de la deuxième phase dans la mesure où elle ignorait à cette date les vices de la pierre qui n’ont été révélés que le 18 janvier 2013.

L’usage de sel sur la voirie tel qu’allégué par la société Marmalcoa est sans relation avec les désordres constatés.

Dès lors, tant la société société Urbatp Carrières et Marbres que la société Marmalcoa sont tenues de la garantie des vices cachés à l’encontre de la société l’Auxiliaire.

b) sur les sommes réclamées

L’expert a prévu deux options pour la réparation des dommages :

– l’option 1 limitée à la seule réparation des dommages constatés au 17 septembre 2015 pour un montant de 523.388,25 euros ht outre 5% au titre d’un forfait maîtrise d’oeuvre,

– l’option 2 visant au remplacement de l’ensemble des ouvrages déduction faite des couvertines de jardinière ne présentant pas de désordres significatifs pour un montant de 749.655 euros ht outre 5% au titre d’un forfait maîtrise d’oeuvre.

Compte tenu du phénomène de dégradation tendant à des désordres généralisés, il doit être retenue l’option 2.

La société l’Auxiliaire a d’ailleurs indemnisé la société Sogea venant aux droits de la société Chantiers Modernes venant elle-même aux droits de la société Charles Queyras TP sur la base de cette option 2. Elle a ainsi versé la somme de 633.841,50 euros correspondant à la somme de 749.655 euros ht mentionnée par l’expert déduction faite de la franchise contractuelle.

L’évaluation de l’expert ne comprend pas toutefois les dommages déjà réparés dans le cadre du règlement du sinistre du 27 mars 2012 pour lequel la société l’Auxiliaire justifie avoir versé la somme de 293.296,50 euros et qui lui est donc due.

En revanche, la somme visée dans la troisième quittance subrogative, à savoir 86.671,50 euros, correspond à des reprises qui n’ont pas été préconisées par l’expert judiciaire. Elle font suite à un rapport amiable rédigé par la société Sarectec qui n’est pas corroboré par d’autres éléments.

En conséquence, cette somme ne sera pas retenue.

c) sur la garantie de la société Abeille Iard & Santé venant aux droits de la société Aviva Assurances

Sur les produits assurés

Le contrat d’assurance garantit l’activité de négoce de produits importés: pierres, marbres, ardoises, calcaires, grès et porphyre. L’article 10 des conditions générales délimite comme produits assurés, les produits de technique courantes définis comme étant de technique traditionnelle et normalisée conformes aux DTU, aux normes françaises homologuées ou aux normes publiées par des instances étrangères offrant un degré de sécurité et de pérennité équivalent à celui des normes françaises.

La société d’assurance affirme que les produits vendus ne correspondent pas aux produits de technique traditionnelle et normalisée aux motifs que les essais justificatifs remontent à plus de 2 ans et qu’il n’y a qu’un seul essai.

Toutefois, la société Urbatp Carrières et Marbres justifie que si les essais d’identité sont valables 2 ans, les essais d’aptitude à l’emploi (résistance à l’usure, à la compression, au gel, à la glissance et aux attaches et absorption par capillarité) sont valables 10 ans, que les essais d’aptitude à l’emploi réalisés entre 2005 et 2008 étaient donc valables au moment de la commande effectuée le 29 octobre 2009, que s’agissant des essais d’identité, ceux sur la masse volumique et la porosité ont été effectués en 2008 et se trouvaient toujours valables le 29 octobre 2009.

Par ailleurs, l’expert du Lerm a indiqué dans son rapport du 18 janvier 2013 que la pierre vendue respecte la norme NF B10.601 s’agissant de la gélivité.

Dès lors, contrairement, à ce que soutient la société Abeille Iard & Santé, les produits vendus sont bien des produits assurés.

Sur le plafond de garantie

L’article 5 des conditions générales exclut de la responsabilité civile après livraison le coût de remplacement, de réparation ou de modification du produit ou de la prestation à l’origine du dommage ainsi que les frais de dépose et de repose du produit lui-même.

Dans les conditions particulières, il est précisé que cette exclusion est abrogée et que l’assureur de la société Urbatp prend en charge pendant 10 ans les frais engagés par les tiers pour la dépose et la repose du produit livré, à l’exception du coût du produit lui-même, révélant un défaut ou un vice caché après réception de l’ouvrage. Cette garantie s’exerce à concurrence de 400.000 euros par sinistre et par année d’assurance sous réserve d’une franchise de 3.000 euros.

Ce plafond de garantie est donc prévu pour une garantie particulière habituellement exclue de la responsabilité civile après livraison. Il se trouve exclusif du plafond de garantie de 800.000 euros prévu en matière de responsabilité civile après livraison laquelle ne couvre pas habituellement les frais de dépose et de repose du produit vicié. Il ne peut donc y avoir cumul des plafonds de garantie.

Les frais de dépose et de repose sont supérieurs au plafond de garantie. La société Abeille Iard & Santé ne devra les garantir qu’à hauteur de 400.000 euros.

d) sur les condamnations

En conséquence, il convient de condamner in solidum la société Urbatp Carrières et Marbre et la société Marmalcoa à verser la somme de 139.943,18 euros à la société l’Auxiliaire, subrogée dans les droits de la société Sogea venant aux droits de la société Chantiers Modernes venant elle-même aux droits de la société Charles Queyras TP, au titre du remboursement du prix des bordures affectées d’un vice caché.

Il convient aussi de condamner in solidum la société Urbatp Carrières et Marbre et la société Marmalcoa à verser la somme de 787.194,82 euros dont 400.000 euros déduction à faire de la franchise in solidum avec la société Abeille Iard & Santé à la société l’Auxiliaire, subrogée dans les droits de la société Sogea venant aux droits de la société Chantiers Modernes venant elle-même aux droits de la société Charles Queyras TP, à titre de dommages et intérêts correspondant aux frais de dépose et repose.

4) Sur l’appel en garantie de la société Urbatp Carrières et Marbre à l’encontre de la société Aviva

Au regard des développements précédents, la société Abeille Iard & Santé sera condamnée à relever et garantir la société Urbatp Carrières et Marbre à hauteur de 400.000 euros déduction à faire de la franchise s’agissant des condamnations prononcées à titre de dommages et intérêts.

5) Sur l’appel en garantie à l’encontre de la société Marmalcoa

La société Marmalcoa oppose à la société Urbatp Carrières et Marbre la limitation de garantie prévue dans ses conditions générales de vente aux termes desquelles en cas de vice caché et reconnu, la garantie se borne au remplacement des produits défectueux à l’exclusion de toute indemnité relative à des frais de dépose et de repose des matériaux ou à des dommages et intérêts à titre d’immobilisation.

La société Urbatp Carrières et Marbre ne conteste pas avoir pris connaissance de cette clause.

En conséquence, la société Carrières et Marbre ne sera relevée et garantie par la société Marmalcoa qu’à hauteur de la somme de 139.943,18 euros correspondant au coût des matériaux.

La cour relève que la société Marmalcoa n’a pas opposé cette limitation de garantie à la société l’Auxiliaire. Par ailleurs, la société Urbatp Carrières et Marbre ne justifie pas de l’existence d’une limitation de garantie dans le contrat de vente qu’elle a passé avec la société Charles Queyras TP aux droits de laquelle vient la société l’Auxiliaire. En conséquence, elle ne peut opposer cette limitation à la compagnie l’Auxiliaire.

6) Sur l’appel en garantie de la société Abeille Iard & Santé à l’encontre de la société Marmalcoa

La société Abeille Iard & Santé n’a été condamnée qu’au titre des frais de dépose et de repose lesquels sont exclus de la garantie par les conditions générales de vente de la société Marmalcoa.

Dès lors, le recours en garantie ne peut prospérer.

7) Sur les frais de procédure

La société Urbatp Carrières et Marbre, la société Abeille Iard & Santé et la société Marmalcoa seront condamnées in solidum aux entiers dépens de première instance incluant les frais d’expertise judiciaire et d’appel et à payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement du 22 janvier 2021 en ce qu’il a jugé recevable l’action subrogatoire engagée par la compagnie l’Auxiliaire et en ce qu’il a jugé prescrite l’action de la société Charles Queyras TP aux droits de laquelle vient la société Chantiers Modernes aux droits de laquelle vient la société Sogea et l’a déclarée irrecevable en son action.

L’infirme en ses autres dispositions.

Statuant à nouveau,

Déclare recevable pour être non prescrite l’action de la société l’Auxiliaire à l’encontre de la société Urbatp Carrières et Marbre, la société Abeille Iard & Santé et la société Marmalcoa.

Dit que les bordures en pierre posées dans le cadre du chantier de la commune d'[Localité 4] présentaient un vice caché.

Condamne in solidum la société Urbatp Carrières et Marbre et la société Marmalcoa à verser la somme de 139.943,18 euros à la société l’Auxiliaire, subrogée dans les droits de la société Sogea venant aux droits de la société Chantiers Modernes venant elle-même aux droits de la société Charles Queyras TP, au titre du remboursement du prix des bordures affectées d’un vice caché.

Condamne in solidum la société Urbatp Carrières et Marbre et la société Marmalcoa à verser la somme de 787.194,82 euros dont 400.000 euros déduction à faire de la franchise in solidum avec la société Abeille Iard & Santé à la société l’Auxiliaire, subrogée dans les droits de la société Sogea venant aux droits de la société Chantiers Modernes venant elle-même aux droits de la société Charles Queyras TP, à titre de dommages et intérêts correspondant aux frais de dépose et repose.

Condamne la société Abeille Iard & Santé à relever et garantir la société Urbatp Carrières et Marbre à hauteur de 400.000 euros déduction à faire de la franchise s’agissant des condamnations prononcées à titre de dommages et intérêts.

Condamne la société Marmalcoa à relever et garantir la société Upbatp Carrières et Marbre à hauteur de la somme de 139.943,18 euros correspondant au coût des matériaux.

Déboute la société Urbatp Carrières et Marbre de sa demande en limitation de garantie à l’encontre de la société l’Auxiliaire.

Déboute la société Abeille Iard & Santé de son appel en garantie à l’encontre de la société Marmalcoa.

Condamne in solidum la société Urbatp Carrières et Marbre, la société Abeille Iard & Santé et la société Marmalcoa aux entiers dépens de première instance incluant les frais d’expertise judiciaire et d’appel.

Condamne in solidum la société Urbatp Carrières et Marbre, la société Abeille Iard & Santé et la société Marmalcoa à payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute les autres parties de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Signé par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


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