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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 11
ARRET DU 27 JANVIER 2023
(n° , 7 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/07493 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDQOS
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Mars 2021 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2020037956
APPELANTE
SAS FRANCE CONVENTIONS
agissant poursuites et diligences de son Président y domicilié en cette qualité.
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Assistée de Me Sarah KREMER, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
S.A. LA PATINOIRE ROYALE GALERIE VALERIE BACH
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Me Caroline BORIS de l’AARPI C3C, avocat au barreau de PARIS, toque : G0667
Assistée de Me Jérémie BLOND, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant M. Denis ARDISSON, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Denis ARDISSON, Président de chambre
Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère
Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère
Qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : M.Damien GOVINDARETTY
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Denis ARDISSON, Président de chambre et par Damien GOVINDARETTY, Greffier présent lors de la mise à disposition.
Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 11 mars 2021 qui, avec exécution provisoire, a écarté l’application de la clause exonératoire de responsabilité du contrat stipulé aux conditions générales de vente passée entre la société France Conventions et la société La patinoire royale, condamné la société France Conventions à restituer à la société La patinoire royale l’acompte de 10.593,70 euros avec intérêts à compter du 5 août 2020, et condamné la société France Conventions aux dépens et à payer la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Vu l’appel interjeté le 19 avril 2021 interjeté par la société France Conventions ;
* *
Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 16 novembre 2022 pour la société France Conventions aux fins de voir, en application des articles 1103, 1110, 1171, 1218, 1229 et 1351 et suivants du code civil, L. 442-1, I-2°du code de commerce :
– réformer le jugement en toutes ses dispositions,
– dire que l’article 1er alinéa 4 des conditions générales de vente déroge expressément, de manière claire et non équivoque, au régime de droit commun de la force majeure,
– dire que l’article 1er alinéa 4 ainsi que l’ensemble des conditions générales de vente ne créent pas un déséquilibre significatif et doivent, conséquemment, être appliquées en l’espèce,
-rejeter l’ensemble des demandes reconventionnelles formulées par la société La patinoire royale,
– déclarer la société La patinoire royale mal fondée en son action et ses demandes,
– débouter la société La patinoire royale de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions et ainsi de sa demande de restitution de l’acompte versé,
à titre subsidiaire,
– dire que la société La patinoire royale a refusé de manière fautive, la proposition légitime de report de l’édition de la Foire Art [Localité 3] au mois de septembre 2020 et a ainsi résilié la relation contractuelle à ses risques et périls, et en conséquence, débouter la société La patinoire royale de l’ensemble de ses demandes, ainsi de sa demande de restitution de l’acompte versé,
– débouter la société La patinoire royale de sa demande de restitution de l’acompte, compte tenu des prestations réalisées par la société France Conventions au jour de la date d’effet de la résiliation de leur relation par effet de la force majeure en application des dispositions de l’article 1229 du code civil,
en tout état de cause,
– condamner la société La patinoire royale à verser la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société La patinoire royale aux entiers dépens,
– assortir la présente décision de l’exécution provisoire ;
* *
Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 22 novembre 2022 pour la société La patinoire royale aux fins d’entendre, en application des articles 1218, 1110 alinéa 2, 1190, 1171, 1229 et 1352-6 du code civil et L. 442-1 et L. 442-4 du code de commerce :
– dire le contrat d’adhésion s’interprétant contre celui qui la proposé, que l’article 1er alinéa 4 des conditions générales de la société France Conventions ne déroge pas expressément, de manière claire et non équivoque, au régime de droit commun de la force majeure,
– dire que, à supposer que l’article 1er alinéa 4 ait entendu déroger au régime de droit commun de la force majeure, en dispensant la société France Conventions de l’exécution de ses obligations, alors pourtant que la requérante reste tenue au paiement de la prestation, l’article 1er alinéa 4 crée un déséquilibre significatif et doit, conséquemment, être réputé non écrit ou, en tout état de cause, être déclarée nulle,
– dire que, de même, en permettant à la société France Conventions de conserver, à titre d’avantage, les sommes perçues de la requérante, sans aucune contrepartie pour cette dernière, l’article 1er alinéa 4 doit être déclaré nul,
– confirmer le jugement sauf en ce qu’il a jugé que les intérêts au taux légal devaient courir à compter du 5 août 2020, soit à compter de la dernière mise en demeure adressée à la société France Convention,
– condamner la société France Conventions à verser au titre des restitutions, les intérêts au taux légal à compter du 26 février 2020, courant sur la somme de 10.593,70 euros,
– ordonner la publication du jugement à intervenir dans les versions numérique et papier du le ‘Journal des Arts’ et sur le site internet de la société France Conventions, dédiés à l’édition 2024 jusqu’à la date de fermeture de l’édition 2024 de Art [Localité 3] ; et ce, aux frais de la société France Conventions, sous un délai de 15 jours courant à compter de la signification du jugement à intervenir et, au-delà, sous astreinte de 500 euros par jour de retard,
– condamner la société France Conventions à verser la somme de 7.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société France Conventions aux entiers dépens, de première instance comme d’appel.
SUR CE, LA COUR,
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs conclusions et au jugement.
1. Il sera succinctement rapporté que pour l’édition de la foire ‘Art [Localité 3]’ qu’elle organisait du 1er au 5 avril 2020 et devant rassembler 140 exposants, la société France Conventions a retenu la participation de la société La patinoire royale et l’allocation d’un espace d’exposition en contrepartie de la somme de 15.593,85 euros TTC, et ayant donné lieu au paiement d’une participation facturée pour la somme de 10.593,70 euros, les conditions générales stipulant à l’article 1, alinéa 4 :
‘Dans le cas où, pour des raisons majeures, imprévisibles ou économiques (telles que incendie, inondations, destructions, accidents, cas fortuit, grève à l’échelon local ou national, émeute, risque d’insécurité, tempête, menace terroriste, retrait d’autorisation’), la foire ne peut avoir lieu, les participations des exposants ne seront pas remboursées.’
2. Et à l’article 19 :
‘Les exposants dégagent l’organisateur de toute responsabilité en cas d’incendie, explosion, d’inondation, troubles divers et pour tout élément non imputable à l’organisateur, agents ou préposés. En particulier, il ne pourra être demandé de dommages-intérêts à l’organisateur dans le cas où la manifestation devait être annulée par suite d’événement présentant un caractère de force majeure (cf. article 1).’
3. En suite de l’arrêté du 4 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19 qui interdisait jusqu’au 31 mai 2020 ‘tout rassemblement mettant en présence de manière simultanée plus de 5000 personnes en milieu clos’, la société France Conventions a informé les exposants, par courriel du 5 mars 2020, de l’annulation de la manifestation en application de la clause de l’article 1 précité, la programmation d’une nouvelle manifestation du 7 au 11 avril 2021, tout en indiquant que :
‘sous la réserve d’obtenir l’acceptation de son dossier de refinancement auprès de ses banques et de la BPI, proposait le geste commercial dérogatoire suivant: remboursement partiel à hauteur de 50% du montant de leur participation et des frais techniques pour chacun des exposants, pour moitié par un versement fin mai 2020 et pour l’autre moitié sous la forme d’un avoir pour la session 2021 de la foire Art [Localité 3]’.
4. Alors que l’interdiction des rassemblements de plus de 100 personnes en milieu clos ou ouvert a été prolongée jusqu’au 11 mai 2020 par les décrets du 23 mars 2020 n° 2020-293 puis du 14 avril 2020 n°2020-423, la société France Conventions a tenu informé les exposants sur ses facultés de concéder des modalités de remboursements partiels ou d’offres d’avoirs sur l’organisation d’une manifestation en 2021 avant que, par lettre du 4 juin 2020, elle n’informe les exposants de l’organisation de la manifestation de la foire Art [Localité 3] du 10 au 13 septembre 2020 au Grand Palais, à laquelle participeront 112 galeries et dont la réalisation a apporté à la société France Conventions un chiffre d’affaires de 3.551.045,77 euros hors taxes pour un résultat déficitaire de 48.374,95 euros.
5. Par ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris du 11 septembre 2020, la société La patinoire royale a été autorisée à assigner à jour fixe la société France Conventions en remboursement de l’acompte.
I. Sur la validité de la clause tirée de l’énoncé des conditions exonératrices du remboursement de la participation
6. Aux termes de l’article 1218 du code civil, supplétif de volonté, il est disposé que :
‘Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.
Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1.’
7. Pour voir confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société France Conventions à restituer l’acompte de 10.593,70 euros qu’elle a versé en exécution de la réservation pour l’exposition, et conclure à la nullité de la clause de l’article 1er, alinéa 4, des conditions générales cité au paragraphe 1 de l’arrêt, la société La patinoire royale prétend qu’elle n’a pu y souscrire alors que ses stipulations ne sont pas claires et sont équivoques, alors d’une part, que ‘les raisons majeures’ qu’elles visent n’entrent pas dans la définition de la ‘force majeure’ définie à l’article 1218 précité, et d’autre part, qu’elle ne peut être complétée, sans devoir être interprétée, par le renvoi à l’article 19 cité au paragraphe 2 de l’arrêt qui, lui, vise des cas de force majeure.
8. Cependant, en apposant aux ‘raisons majeures’ les adjectifs ‘imprévisibles ou économiques’ suivis d’exemples, en particulier celui du ‘retrait d’autorisation’ impliquant que ‘la foire ne peut avoir lieu’, avec la conséquence que ‘les participations des exposants ne seront pas remboursées’, l’article 1er alinéa 4 énonce une clause de définition contractuelle exonératrice de remboursement suffisamment claire, précise et dépourvue d’équivoque, dont la portée ne dépend pas des cas de force majeure visés à l’article 19 des conditions générales.
9. En conséquence, la clause exonératrice déroge aux conditions de l’article 1218 du code civil, et le jugement sera infirmé en ce qu’il a écarté l’application de la clause sur ce fondement.
II. Sur la validité de la clause tirée du déséquilibre des droits et obligations des parties
10. Aux termes de l’article 1171 du code civil, il est disposé que :
‘Dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.
L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation.’
11. Par ailleurs, l’article L. 442-1, 2°, du code de commerce dispose que :
‘Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l’exécution d’un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de soumettre ou de tenter de soumettre l’autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.’
12 Sur le fondement de l’une ou l’autre de ces deux dispositions, la société La patinoire royale relève que la clause de l’article 1er, alinéa 4, est une clause d’adhésion et pour conclure derechef à sa nullité, elle soutient qu’elle crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, en premier lieu en ce que le non remboursement de la participation de l’exposant est stipulé sans aucune contrepartie ou compensation pour la société France Conventions, ni précision ou limitation des participations avancées pour la manifestation annulée.
13. La société La patinoire royale déduit en second lieu un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties de cette clause par comparaison avec les autres conditions générales du contrat stipulant, à l’article 1er, alinéa 2, sans faculté pour l’exposant de résilier le contrat, l’autorisation de la société France Conventions de modifier unilatéralement les modalités d’organisation de l’événement (dates d’ouverture, heures d’ouverture et de fermeture de la manifestation, prix des entrées, durée de la manifestation et emplacement
de l’exposant), à l’article 8, l’autorisation de la société France Conventions de modifier unilatéralement le prix de l’emplacement, à l’article 11, l’autorisation de la société France Conventions de modifier unilatéralement les dimensions et la disposition des surfaces demandées par l’exposant et dégage toute responsabilité de l’organisateur en cas de discordance entre le plan d’implantation de l’emplacement et son implantation effective, et se réserve la possibilité de toute modification qui peuvent même ‘ne pas être portées à la connaissance de l’exposant’, et encore à l’article 12, l’autorisation de la société France Conventions de retirer l’aménagement de l’emplacement, même préalablement donné ‘en cas de gêne apportées aux exposants voisins, à la circulation ou à la tenue de la foire’, sans diminution des frais engagés par l’exposant détenteur de l’autorisation préalable.
14. Toutefois, ainsi que le conclut la société France Conventions, la participation versée par les exposants ainsi que son non remboursement sont économiquement équilibrés entre, d’une part, l’obligation pour la prestataire d’anticiper les dépenses qu’elle doit exposer pour l’organisation de la manifestation, et correspondant à la réservation de l’espace d’exposition, la mise au point et la réalisation de campagne de communication sur différents supports, la recherche et la sélection des ‘uvres et des galeries et encore, pour la conception de l’architecture générale de l’exposition en lien avec des professionnels (scénographes et des installateurs généraux), et d’autre part, le risque de la perte de ces dépenses en cas d’annulation de la manifestation dans les conditions de l’article 1er, alinéa 4 précité.
15. Et tandis que dans son objet, la clause d’exonération de responsabilité est étrangère avec ceux des autres clauses du contrat qui ménagent la faculté de la société France Convention d’adapter l’espace d’exposition convenu entre les parties avec les conditions futures de l’aménagement de la manifestation, il ne se déduit la preuve d’aucun déséquilibre significatif sur le fondement de l’article 1171 du code civil qui, par ailleurs, exclut en son second alinéa, l’appréciation de ce déséquilibre d’après l’objet principal du contrat ou sur l’adéquation du prix à la prestation, ou sur le fondement de l’article L. 442-1, 2°, du code de commerce.
16. Alors enfin qu’il est établi la preuve que la société France Conventions a engagé la somme de 1.953.200 euros hors taxes pour l’organisation de la foire Art [Localité 3] de 2020, et que les décrets précités constituaient une cause d’annulation de cette manifestation programmée du 1er au 5 avril 2020, l’exonération de l’obligation de remboursement dans les conditions de l’article 1er, alinéa 4, des conditions générales est bien fondée, de sorte qu’il convient d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société France Conventions à restituer l’acompte.
III. Sur la publication de l’arrêt, les dépens et les frais irrépétibles
17. La société La patinoire royale succombant à l’action, il convient de la débouter de sa demande de publication de l’arrêt.
18. Pour le même motif, le jugement sera infirmé en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles. Statuant à nouveau de ces chefs y compris en cause d’appel, la société La patinoire royale sera condamnée aux dépens et à payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit valable la clause exonératrice de responsabilité ;
Déboute la société La patinoire royale de sa demande en remboursement de sa participation ;
Condamne la société La patinoire royale aux dépens de première instance et d’appel ;
Condamne la société La patinoire royale à payer à la société France Conventions la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT