Conditions Générales de Vente : 26 septembre 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 22/00321

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Conditions Générales de Vente : 26 septembre 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 22/00321

BR/SH

Numéro 23/03098

COUR D’APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 26/09/2023

Dossier : N° RG 22/00321 – N° Portalis DBVV-V-B7G-IDNF

Nature affaire :

Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

Affaire :

Société COOPÉRATIVE AGRICOLE LUR BERRI

C/

[D] [L]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 26 Septembre 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 19 Juin 2023, devant :

Madame REHM, Magistrate honoraire, chargée du rapport,

assistée de Madame HAUGUEL, greffière présente à l’appel des causes,

Madame [I], en application des articles 805 et 907 du code de procédure civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame FAURE, Présidente

Madame ROSA-SCHALL, Conseillère

Madame REHM, Magistrate honoraire

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

Société COOPÉRATIVE AGRICOLE LUR BERRI prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représentée et assistée de Maître DABAN, avocat au barreau de PAU

INTIME :

Monsieur [D] [L]

né le 10 Août 1979 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté et assisté de Maître ARCAUTE, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 25 NOVEMBRE 2021

rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TARBES

RG numéro : 19/00026

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [D] [L] exerce la profession d’agriculteur à titre individuel dans la culture des céréales et l’exploitation de vaches laitières à [Localité 3] (65).

La société coopérative agricole à capital variable LUR BERRI dont le siège social est sis [Adresse 6] à [Localité 4] (64), a émis entre le 08 novembre 2016 et le 21 août 2017 quatorze factures pour un montant total de 33 027,34 euros à destination de Monsieur [D] [L] correspondant à des commandes de produits alimentaires pour bovins.

Ces factures étant demeurées impayées, par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 27 novembre 2017, la société coopérative LUR BERRI a adressé à Monsieur [D] [L] une mise en demeure d’avoir à régler une somme totale de 37 837,75 euros au titre du principal et des intérêts de retard.

En l’absence de paiement, elle a saisi la société Sud-Ouest Recouvrement qui a tout aussi vainement adressé à Monsieur [D] [L] une mise en demeure en date du 14 février 2018 d’avoir à payer une somme totale de 36 857,21 euros.

Le 03 avril 2018, la société coopérative LUR BERRI a déposé une requête devant le président du tribunal de grande instance de Tarbes, aux fins d’obtenir une ordonnance d’injonction de payer la somme de 40 265,28 euros à l’encontre de Monsieur [D] [L].

Cette requête a été rejetée par ordonnance en date du 08 novembre 2018 au motif que les justificatifs de l’obligation n’avaient pas été fournis.

Par exploit du 26 décembre 2018, la société coopérative LUR BERRI a fait assigner Monsieur [D] [L] devant le tribunal de grande instance de Tarbes, devenu tribunal judiciaire depuis le 1er janvier 2020, devant lequel elle a sollicité sa condamnation, sur le fondement des articles 1103,1104, 1111, 1113, 1120, 1164, 1172, 1193, 1231-1, 1231-6 et 1353 du code civil ainsi que de l’article L 441-10 II du code de commerce et avec le bénéfice de l’exécution provisoire, à lui payer les sommes suivantes :

– 36 857,21 euros au titre des factures impayées sur la période du 08 novembre 2016 au 21 août 2017,

– 3 038,37 euros au titre des intérêts légaux de retard à compter du 14 février 2018,

– 1 000,00 euros à titre de dommages et intérêts,

– 1 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens, en ce compris les frais de requête et d’huissier de justice.

Au soutien de ses demandes, la société coopérative LUR BERRI expose qu’elle est en relation d’affaires depuis plusieurs années avec Monsieur [D] [L] qui lui achète régulièrement des produits agricoles pour les besoins de son exploitation et qu’il reste lui devoir plusieurs factures émises au titre des produits vendus et de pénalités de retard.

Par jugement contradictoire du 25 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Tarbes a :

– débouté la société coopérative LUR BERRI de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de Monsieur [D] [L],

– condamné la société coopérative LUR BERRI à payer à Monsieur [D] [L] une indemnité de 1500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société coopérative LUR BERRI aux dépens,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Le premier juge a considéré que si l’usage en matière agricole autorise les parties en cas de relations d’affaires suivies, à conclure verbalement des ventes d’aliments ou de produits agricoles, il ne dispense pas pour autant le demandeur de rapporter la preuve par tous moyens de l’existence de l’obligation invoquée à l’encontre du débiteur et il a estimé qu’en l’absence de bons de commandes ou de bons de livraison signés, le seul fait pour Monsieur [L] de ne pas avoir contesté les factures émises ne pouvait suffire à fonder la créance contractuelle dont la société coopérative LUR BERRI demande l’exécution et a donc rejeté ses demandes.

Par déclaration du 1er février 2022, la société coopérative agricole LUR BERRI a relevé appel de cette décision, en sollicitant la réformation de l’intégralité du jugement entrepris.

Une ordonnance d’injonction de rencontrer un médiateur en date du 10 août 2022 a été transmise aux parties et à leurs conseils mais aucun accord n’a pu aboutir, Monsieur [D] [L] ayant refusé la médiation.

Le 28 novembre 2022, le conseil de l’appelante a sollicité la fixation du dossier.

Par avis du 20 décembre 2022, le magistrat chargé de la mise en état a informé les parties que cette affaire était fixée à l’audience du 19 juin 2023, la clôture intervenant le 17 mai 2023.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 1er mai 2022, la société coopérative LUR BERRI demande à la cour, sur le fondement des articles 1103,1104, 1111, 1113, 1120, 1164, 1172, 1193, 1231-1, 1231-6 et 1353 du code civil ainsi que de l’article L 441-10 II du code de commerce, de :

– réformer le jugement du tribunal judiciaire de Tarbes du 25 novembre 2021,

Statuer à nouveau et :

– condamner Monsieur [L] à payer à la société coopérative LUR BERRI la somme de 33 027,34 euros au titre des factures impayées sur la période du 08 novembre 2016 au 21 août 2017,

– le condamner à lui payer la somme de 3 038,37euros au titre des intérêts légaux de retard à compter du 14 février 2018,

– le condamner à lui payer la somme de 1 000,00 euros à titre de dommages et intérêts en application de l’article 1231-1 du code civil,

– le condamner à lui payer la somme de 2 200,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens, en ce compris les frais de requête et d’huissier de justice,

– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir en application de l’article 515 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 29 juillet 2022, Monsieur [D] [L] demande à la cour de :

– débouter la société coopérative LUR BERRI de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Tarbes en date du 25 novembre 2021 en ce qu’il a débouté la société LUR BERRI de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de Monsieur [D] [L] ainsi que la condamnation de cette société à lui payer une indemnité de 1 500,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société coopérative LUR BERRI à porter et payer à Monsieur [D] [L] la somme de 1 500,00 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner en tous les dépens.

L’ordonnance de clôture a été fixée au 17 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1°) Sur l’omission de statuer

A titre liminaire, la cour observe que le premier juge était saisi d’une fin de non-recevoir, Monsieur [D] [L] ayant soutenu que l’action de la société coopérative LUR BERRI concernant les factures des 08 novembre 2016 et 12 décembre 2016 étaient prescrites, par application des dispositions de l’article L 137-2 du code de la consommation qui prévoient une prescription biennale pour l’action des professionnels à l’encontre des consommateurs.

Si le premier juge a statué dans les motifs sur cette fin de non-recevoir qu’il a rejetée à juste titre au motif que Monsieur [D] [L] ayant contracté avec la société coopérative LUR BERRI pour les besoins de son activité professionnelle, ne pouvait être considéré comme un consommateur, de sorte que la prescription applicable est quinquennale et non biennale, ces dispositions n’ont pas été reprises dans le dispositif ; il existe donc une omission matérielle qu’il convient de rectifier conformément aux dispositions de l’article 462 du code de procédure civile en précisant qu’il y a lieu d’ajouter au dispositif ‘rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de la société coopérative LUR BERRI concernant les factures en date des 08 novembre 2016 et 12 décembre 2016 et déclare ses demandes recevables’.

2°) Sur la demande principale

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

L’article 1359 du même code dispose que ‘L’acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique.

Il ne peut être prouvé outre ou contre un écrit établissant un acte juridique, même si la somme ou la valeur n’excède pas ce montant, que par un autre écrit sous signature privée ou authentique.

Celui dont la créance excède le seuil mentionné au premier alinéa ne peut pas être dispensé de la preuve par écrit en restreignant sa demande.

Il en est de même de celui dont la demande, même inférieure à ce montant, porte sur le solde ou sur une partie d’une créance supérieure à ce montant.’

L’article 1360 du même code stipule que ‘Les règles prévues à l’article précédent reçoivent exception en cas d’impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit, s’il est d’usage de ne pas établir un écrit, ou lorsque l’écrit a été perdu par force majeure.’

Selon le décret n°80-533 du 15 juillet 1980, la somme ou la valeur visée à l’article 1359 du code civil est fixée à 1 500,00 euros.

En l’espèce, la société coopérative LUR BERRI soutient qu’il existe entre les parties une relation d’affaire établie, Monsieur [D] [L] étant client depuis le 30 avril 2016 et indique que les commandes étaient souvent passées par téléphone ou par mail ; elle ajoute que Monsieur [D] [L] n’a jamais contesté avoir été destinataire des produits agricoles provenant de la coopérative LUR BERRI.

Monsieur [D] [L] soutient qu’il s’agit de factures qui ne correspondent à aucune commande et qui ne sont accompagnées d’aucuns bons de livraison en l’absence de production de bons de commande ou de livraison signés par lui.

Usant de son pouvoir souverain d’appréciation de l’impossibilité morale de se procurer une preuve littérale de l’acte juridique, résultant de l’usage en matière agricole qui autorise les parties à conclure verbalement des ventes de semences et de produits phytosanitaires, la cour d’appel estime que ces commandes par un exploitant agricole à une société commerciale peuvent être faites par téléphone et ne pas être concrétisées par un écrit daté et signé par le client.

Il convient de relever qu’outre les factures litigieuses, la société coopérative LUR BERRI produit l’historique du compte de Monsieur [D] [L] dont il ressort qu’il est effectivement client de la coopérative depuis le mois d’avril 2016 et qu’il a continué à être client postérieurement aux factures litigieuses ; les mails produits par l’appelante démontrent par ailleurs que des commandes étaient effectivement passées par téléphone.

La société coopérative LUR BERRI rapporte ainsi la preuve de l’existence de relations d’affaires suivies entre les parties, alors que par ailleurs non seulement Monsieur [D] [L] ne conteste pas avoir été livré des produits concernés par la société coopérative LUR BERRI mais il explique dans ses écritures avoir sollicité cette dernière pour l’aider à nourrir ses bovins avec une nouvelle machine de façon automatisée et il lui reproche de ne pas avoir attiré son attention sur la réalité de ses besoins qu’elle avait largement surestimés ; il lui reproche également d’avoir unilatéralement modifié, sans son accord, le prix de vente des marchandises comme cela ressort des factures litigieuses.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la preuve de l’existence d’une créance de la société coopérative LUR BERRI à l’égard de Monsieur [D] [L] est rapportée et Monsieur [D] [L] ne peut sérieusement soutenir n’avoir jamais donné son accord sur les modifications du prix de vente des marchandises alors qu’en sa qualité d’exploitant agricole il ne peut ignorer que le coût des céréales varie selon le prix du marché que la société coopérative LUR BERRI ne fait qu’appliquer.

En l’absence de preuve de libération de sa dette par Monsieur [D] [L], il convient de faire droit à la demande en paiement formée par l’appelante.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point.

Monsieur [D] [L] sera donc condamné à payer à la société coopérative LUR BERRI la somme principale de 33 027,34 euros au titre des factures impayées sur la période du 08 novembre 2016 au 21 août 2017.

Dans le corps de ses écritures, la société coopérative LUR BERRI sollicite la condamnation de Monsieur [D] [L] à lui payer la somme de 3 038,37 euros au titre des intérêts contractuels en faisant valoir que ce taux apparaît sur les factures émises dans les conditions générales de vente figurant au recto de chaque facture dans une clause intitulée ‘Pénalités de retard’; dans le dispositif, elle sollicite cette même somme au titre des intérêts légaux de retard à compter du 14 février 2018, ce qui est manifestement une erreur matérielle, le montant sollicité correspondant aux intérêts conventionnels et non aux intérêts légaux.

En l’absence de contrat signé par Monsieur [D] [L], l’usage invoqué ci-dessus ne peut fonder une demande de paiement d’intérêts à un taux conventionnel et ce d’autant plus que, contrairement à ce qui est indiqué par l’appelante, les conditions générales de vente ne figurent pas au verso des factures produites aux débats ; la demande de ce chef sera donc rejetée.

3°) Sur la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur [D] [L]

Subsidiairement, Monsieur [D] [L] sollicite dans les motifs de ses écritures la condamnation de la société coopérative LUR BERRI à lui payer la somme de 37 065,71 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son devoir d’information.

Cette demande n’est pas reprise dans le dispositif de ses conclusions.

En application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour est saisie par le dispositif des dernières conclusions des parties et ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif .

La cour n’a donc pas à statuer sur cette demande.

4°) Sur les demandes annexes

Le jugement de première instance sera infirmé en ce qui concerne les condamnations au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Monsieur [D] [L] sera condamné à payer à la société coopérative LUR BERRI la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et sera débouté de sa demande formulée à ce titre.

Monsieur [D] [L] sera condamné aux dépens de première instance et d’appel.

Il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision comme cela est sollicité par la société coopérative LUR BERRI, le pourvoi en cassation n’empêchant pas l’exécution de la décision attaquée conformément aux dispositions de l’article L.111-11 du code des procédures civiles d’exécution ; cette demande est donc sans objet.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Rectifie le jugement rendu le 25 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Tarbes en ce sens qu’il y a lieu d’ajouter au dispositif :

– rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de la société coopérative LUR BERRI concernant les factures en date des 08 novembre 2016 et 12 décembre 2016 et déclare ses demandes recevables,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

Condamne Monsieur [D] [L] à payer à la société coopérative agricole LUR BERRI la somme de 33 027,34 euros au titre des factures impayées sur la période du 08 novembre 2016 au 21 août 2017,

Déboute la société coopérative agricole LUR BERRI de sa demande au titre des intérêts conventionnels,

Condamne Monsieur [D] [L] à payer à la société coopérative agricole LUR BERRI la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute Monsieur [D] [L] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [D] [L] aux dépens de première instance et d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme HAUGUEL, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Sylvie HAUGUEL Caroline FAURE

 


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