N° RG 20/01534 – N° Portalis DBVX-V-B7E-M4MJ
Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE du 20 février 2020
RG : 2019j00460
S.A.R.L. SOCIETE CARROSSERIE BARLET & COMPAGNIE
C/
S.A.S.U. BENNES RHONE ALPES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 21 Septembre 2023
APPELANTE :
S.A.R.L. SOCIETE CARROSSERIE BARLET & COMPAGNIE au capital de 12.224 €, immatriculée au RCS de SAINT ETIENNE sous le n°886 950 179, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée et plaidant par Me Eric FUMAT de la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
INTIMEE :
S.A.S. BENNES RHONE ALPES au capital de 126.280 euros, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de SAINT ETIENNE sous le numéro 634 501 381, représentée par son dirigeant légal en exercice domicilié es qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Laurent LELIEVRE de la SELARL SAINT-EXUPERY AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 716
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 01 Juillet 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 08 Juin 2023
Date de mise à disposition : 21 Septembre 2023
Audience tenue par Patricia GONZALEZ, présidente, et Aurore JULLIEN, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
– Patricia GONZALEZ, présidente
– Marianne LA-MESTA, conseillère
– Aurore JULLIEN, conseillère
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
La Sarl Carrosserie Barlet & Compagnie (ci-après « la société Barlet ») est spécialisée dans la carrosserie de véhicules industriels et de poids lourds. Elle avait la Sasu Bennes Rhône-Alpes (ci-après « la société BRA ») parmi ses clients.
Le 4 décembre 2017, la société BRA a confié, dans le cadre d’une sous-traitance, des travaux portant sur un véhicule de marque Mercedes type Arcos 2640K à la société Barlet. Les travaux ont été réalisés et livrés en septembre 2018.
Le 31 août 2018, la société Barlet a adressé à la société BRA une facture de 13.020 euros TTC. Par courrier du 27 septembre 2018, la société BRA a contesté le montant de cette facture en raison de retard dans la livraison du camion et a sollicité la déduction de la somme de 3.000 euros HT. Par courrier recommandé du 9 octobre 2018, la société Barlet s’est opposée à cette demande.
Par courrier recommandé 15 novembre 2018, la société Barlet a mis en demeure la société BRA de lui régler la somme de 3.600 euros TTC au titre des factures impayées. Par courrier recommandé du 27 novembre 2018, la société BRA a maintenu sa position et n’a pas réglé l’intégralité de la facture.
Par acte d’huissier du 16 avril 2019, la société Barlet a assigné la société BRA devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne afin d’obtenir à titre principal le paiement de 3.600 euros TTC au titre du reliquat de sa facture et des dommages-intérêts
Par jugement contradictoire du 20 février 2020, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :
– dit que la société Barlet en sa qualité de sous-traitant est tenue à une obligation de résultat envers la société BRA,
– dit que la société Barlet a commis une faute en ne respectant pas le délai de livraison prévu dans le devis du 27 novembre 2017 accepté par la société BRA,
– dit que la société Barlet a commis une faute en ne respectant pas son obligation d’information,
– débouté la société Barlet de sa demande de versement de la somme de 3.600 euros au titre du reliquat du prix contractuellement prévu,
– débouté la société Barlet de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,
– débouté la société BRA de sa demande de dommages-intérêts de 7.000 euros,
– condamné la société Barlet à verser à la société BRA une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens sont à la charge de la société Barlet,
– ordonné l’exécution provisoire du jugement nonobstant toutes voies de recours et sans caution,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes.
***
La société Barlet a interjeté appel par acte du 25 février 2020.
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 9 février 2021 fondées sur les articles 1103, 1231-1 et suivants, 1344-1, 1188, 1240, 1217 et 1231-1 du code civil et les articles 564 et suivants et 699 et suivants du code de procédure civile, la société Barlet demande à la cour de :
– réformer le jugement déféré,
– condamner la société BRA à lui verser la somme de 3.600 euros au titre du reliquat du prix contractuellement prévu,
– dire que cette somme portera intérêts, au taux légal, à compter de la mise en demeure du 9 octobre 2018,
– ordonner la capitalisation des intérêts,
– condamner en conséquence la société BRA à lui verser la somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société BRA de sa demande de condamnation à son égard à 7.000 euros de dommages-intérêts,
– déclarer irrecevable, comme nouvelle en appel, la demande de condamnation à son égard à régler la somme de 5.000 euros à titre du préjudice moral,
en toute hypothèse,
– rejeter cette demande,
– rejeter les demandes de participation formées par la société BRA à son encontre au titre des frais irrépétibles,
– condamner la société BRA à lui payer la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, pour les frais irrépétibles exposés en première instance,
– la condamner aux entiers dépens de première instance avec application de l’article 699 du code de procédure civile,
y ajoutant,
– condamner la société BRA à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en cause d’appel,
– la condamner aux entiers dépens de l’instance d’appel avec application de l’article 699 du code de procédure civile.
***
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 27 avril 2021 fondées sur les articles 1103, 1104, 1217 et 1353 et suivants du code civil, la société BRA demande à la cour de :
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
dit que la société Barlet a commis une faute en ne respectant pas le délai de livraison prévu dans le devis du 27 novembre 2017 qu’elle a accepté,
dit que la société Barlet a commis une faute en ne respectant pas son obligation d’information,
débouté la société Barlet de sa demande de versement de la somme de 3.600 euros au titre du reliquat du prix contractuellement prévu,
débouté la société Barlet de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,
condamné la société Barlet au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,
pour le surplus,
à titre reconventionnel,
– débouter la société Barlet de l’ensemble de ses demandes, moyens et prétentions,
– condamner la société Barlet à lui payer la somme de 2.000 euros au titre du préjudice financier qu’elle a subi en sus des pénalités subies,
– condamner la société Barlet au paiement de la somme de 5.000 euros toutes causes de préjudice confondues, notamment le trouble commercial et le préjudice d’image qu’elle a subi,
– condamner la société Barlet à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de ses frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens.
***
La procédure a été clôturée par ordonnance du 1 juillet 2021 les débats étant fixés au 8 juin 2023.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il est précisé que le litige est soumis au nouveau droit des contrats issu de l’ordonnance du 10 février 2016 puisque le contrat litigieux est postérieur au 1er octobre 2016.
Sur le non respect des obligations
La société Barlet fait valoir que :
– la facture du 31 août 2018 d’un montant de 13.020 euros TTC est strictement conforme au devis accepté par la société BRA le 4 décembre 2017,
– les délais stipulés dans les devis qui ne concernent pas des consommateurs sont présumés avoir une valeur indicative ; la mention ‘délai : mai 2018’, par son imprécision, est indicatif et le 31 mai 2018 ne peut pas constituer un délai de fin de la prestation alors qu’aucune date de début de la prestation n’a été définie,
– la livraison du camion par la société BRA le 11 avril 2018 est indifférente car il n’était pas encore équipé de la grue conformément au devis, condition préalable à la réalisation par elle de sa prestation ; la livraison du camion équipé conformément au devis du faux-châssis et de la grue par la société BRA n’est intervenue que le 20 juin 2018, de sorte qu’une réalisation de la prestation pour mai 2018 était impossible,
– à titre subsidiaire, à supposer que le 31 mai 2018 constitue un délai impératif de livraison, et que ses travaux aient pu commencer le 11 avril 2018, il ne restait que 13 jours ouvrables pour tenir le délai, alors que de l’aveu de la société BRA la prestation nécessitait 20 à 25 jours ; le délai était donc impossible à tenir y compris dans ces conditions,
– ses prestations ont de fait été réalisées entre le 20 juin et le 5 septembre, soit 25 jours ouvrable compte tenu de la fermeture estivale prévue de longue date de sorte que l’exécution a eu lieu dans un délai raisonnable et normal,
– par application de l’article 1231 du code civil, le retard n’est établi qu’après mise en demeure du débiteur, et non simplement par l’arrivée de l’échéance ; or, la société BRA ne l’a jamais mise en demeure, mais a attendu la réception de la facture pour évoquer un retard ; les appels et le mail évoqués ne constituent pas des relances ; en l’absence de mise en demeure, la société BRA ne peut pas se prévaloir d’un retard de son débiteur pour lui demander des dommages et intérêts moratoires,
– elle n’a pas à supporter les carences des autres prestataires auxquels elle n’est pas contractuellement liée ; le retard dans la livraison du camion au client final est dû au retard de livraison de la grue par la société HIAB ; par conséquent, si la société BRA a subi un préjudice, c’est contre celle-ci qu’elle devrait agir ; la société BRA préfère agir contre elle plutôt que contre la société HIAB car cette dernière est numéro 1 du secteur et qu’elle en est le distributeur.
Par ailleurs, elle fait valoir, sur la clause exclusive de responsabilité, que :
– la simple référence aux conditions générales de vente est suffisante ; la société BRA les a acceptées par la mention de renvoi du devis qu’elle a signé ; la faute de frappe contenue dans le devis, indiquant ‘acception’ des conditions générales de vente au lieu ‘d’acceptation’ est indifférente car la commune intention des parties est claire,
– la société BRA a eu également connaissance des conditions générales de vente lors des travaux précédents au fil du courant d’affaires entre les deux sociétés,
– les clauses exonératoires de responsabilité sont valables ; l’article 4 des conditions générales de vente stipule que : ‘les dépassements de délai de livraison ne peuvent donner lieu à dommages et intérêts, à retenue ni à annulation des commandes en cours.’ ; par conséquent, même en retard, elle ne doit aucune indemnisation.
* * *
La société BRA réplique que :
– la société Barlet est intervenue en tant que sous-traitant, lequel est soumis à une obligation contractuelle de résultat vis-à-vis de l’entreprise principale,
– l’acceptation sans réserve du devis a formalisé le contrat ; le délai stipulé, à côté duquel elle a fait figurer son tampon, ne peut pas être qualifié d’indicatif ; la date de livraison du véhicule carrossé par la société Barlet était contractuellement fixée à mai 2018,
– le temps de réalisation de la prestation est estimé à 20 ou 25 jours ouvrables ; la société Barlet disposait donc d’un délai de 33 jours ouvrables entre le 11 avril 2018 et le 31 mai 2018 ; les travaux n’ont commencé que le 8 juin 2018, postérieurement à la date contractuelle de fin ; la société Barlet a livré le camion carrossé le 7 septembre 2018, avec plus de 3 mois de retard ; ce retard constitue une faute,
– aucune date de mise à disposition du camion entre les mains de la société Barlet n’était stipulée ; cette dernière n’a émis aucune réserve quant à la possibilité d’effectuer les travaux pour mai 2018 lorsque le camion lui a été remis le 11 avril 2018,
– n’ayant pas de nouvelle de l’avancement des travaux, elle a tenté à plusieurs reprises de contacter la société Barlet fin mai et début juin, y compris par une relance par voie de mail le 2 juillet 2018 ; la société Barlet n’a pas répondu, n’a pas communiqué sur l’avancement des travaux, sur une éventuelle difficulté, et n’a pas justifié de son retard ; ce défaut de communication constitue une faute.
– si elle a récupéré le camion pour y installer la grue, ce n’est qu’après constatation de l’absence de commencement des travaux par la société Barlet.
Elle ajoute que :
– il n’est pas démontré qu’elle a accepté les conditions générales de vente ; la clause de renvoi est peu apparente et indique une ‘acception’ de ces conditions de sorte qu’elle est contestable,
– elle n’a reçu communication des conditions générales de vente que dans le cadre de la mise en demeure qui lui a été adressée le 8 octobre 2018 ; la société Barlet ne démontre pas la transmission de ces conditions simultanément au devis et elles ne sont pas accessibles sur le site internet de la société Barlet ; la version produite n’est pas datée, de sorte qu’elles ont pu être modifiées par la société Barlet entre la date de signature du devis et la date de mise en demeure ; elles ne sont donc pas opposables,
– il est étonnant de constater que selon l’article 4 de ces conditions générales de vente, le dépassement d’un délai de plus de 2 mois après mise en demeure restée infructueuse puisse conduire à la résolution de la vente,
– à titre subsidiaire, si les conditions générales sont opposables, il convient de noter qu’elle a sollicité à de multiples reprises la société Barlet dès fin mai, plus de 2 mois avant la livraison du véhicule carrossé.
Sur ce,
L’article 1217 du code civil dispose que : ‘La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.’
L’article 1231 du code civil dispose que : ‘A moins que l’inexécution soit définitive, les dommages et intérêts ne sont dus que si le débiteur a préalablement été mis en demeure de s’exécuter dans un délai raisonnable.’
L’article 1119 alinéa 1er du code civil dispose que : ‘Les conditions générales invoquées par une partie n’ont effet à l’égard de l’autre que si elles ont été portées à la connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées.’
L’article 1188 du code civil dispose que : ‘Le contrat s’interprète d’après la commune intention des parties plutôt qu’en s’arrêtant au sens littéral de ses termes. Lorsque cette intention ne peut être décelée, le contrat s’interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation.’
En l’espèce, il résulte des productions que selon devis du 27 novembre 2017, signé le 4 décembre 2017 par la société BRA, la société Barlet s’est engagée à exécuter diverses prestations sur le véhicule Mercedes litigieux, le devis faisant mention de la fourniture et le montage d’un plateau à ridelles. Il était précisé ‘délai : mai 2018″ sans que la date de dépôt du véhicule ne soit précisée ni la durée d’exécution des travaux.
Ces travaux s’inscrivaient dans une opération globale ; la société Etellin avait commandé un camion équipé d’un plateau et d’une grue à la société Sevi, son concessionnaire Mercedes ; cette dernière a confié la réalisation des équipements à la société BRA, laquelle a sous-traité plusieurs d’entre eux à la société Barlet.
Le délai imprécis tel que mentionné dans le devis ne revêt pas un caractère impératif faute d’éléments permettant de le caractériser ainsi et il apparaît donc seulement indicatif. Son non respect ne peut donc à lui seul caractériser le manquement à une obligation de résultat et il convient de déterminer si le contrat a été exécuté dans un délai raisonnable.
Le devis précisait ‘travaux sur véhicule châssis-cabine équipé d’une grue AR porte-à-faux + son faux châssis sur toute sa longueur fourni, monté par BRA’, ce qui permet d’en déduire que le véhicule remis à la société Barlet devait déjà être équipé du châssis et de la grue.
La société Barlet affirme que le faux-châssis et la grue devaient être installés par une société Hiab qui n’a pas effectué sa prestation dans les délais permettant la livraison du camion fin mai 2018. La société BRA n’oppose aucun démenti formel à cette affirmation dans ses conclusions et reste elle-même particulièrement taisante sur l’identité du professionnel ayant posé la grue et sur ses conditions et délais d’intervention.
Or, il n’est pas contesté que le camion a été remis le 11 avril 2018 à la société Barlet, équipé du faux châssis puis qu’il a été repris le 8 juin 2018 et qu’il a été ramené à la société Barlet le 20 juin 2018 doté du plateau et de la grue pour l’exécution des travaux de carrosserie mentionnés au devis (explications données par l’intimée dans ses conclusions). Le camion a donc été initialement remis sans la grue et les parties sont d’accord sur ces différentes dates.
Le véhicule a été récupéré le 7 septembre 2017. La société BRA a déduit la somme de 3.600 euros ‘à titre de pénalité’ en se prévalant d’une retenue similaire de son donneur d’ordres. Elle a par courrier du 27 septembre 2018 écrivait ‘conformément à votre accord, nous avons posé le véhicule avec son faux châssis le 11/04/2018 chez vous. Malgré plusieurs relances pour commencer le plateau à la date du 8 juin 2018, nous avons constaté que les travaux pour le plateau n’avaient toujours pas débuté. Nous avons donc récupéré le véhicule afin d’installer la grue dans le but d’avancer les travaux et ainsi de rester dans les délais’.
Or, contrairement à ce qu’affirme la société BRA dans ses conclusions, il ne résulte pas du devis que la société Barlet devait installer la grue et il découle de ces explications que le véhicule n’a été remis équipé de la grue à la société Barlet que postérieurement à la date mentionnée sur le contrat de sorte que la société Barlet n’était manifestement pas à même d’effectuer les travaux dans un délai proche de celui porté sur le devis.
Par ailleurs, les relevés téléphoniques produits par la société BRA sont insuffisants à caractériser des mises en demeure adressées à son adversaire, faute de connaissance de leur contenu et alors que les parties étaient en relation pour d’autres prestations, et cette société ne justifie nullement d’avoir mis en demeure son adversaire de s’exécuter dans un délai raisonnable, ne produisant des courriers que postérieurement à la réception de la facture hormis un mail du 2 juillet 2018 par lequel la société BRA demandait l’état d’avancement de travaux sur deux camions dont celui en cause sans énoncer de reproches.
La société BRA évalue elle-même un délai d’exécution pouvant aller jusqu’à 25 jours et le fait que le camion ait été restitué seulement début septembre ne peut permettre une réduction du prix ou l’octroi de dommages intérêts puisqu’il doit nécessairement être tenu compte des vacances estivales dans le délai d’exécution qui reste raisonnable.
Il découle donc de ce qui précède que la société BRA ne rapporte pas la preuve d’une exécution imparfaite de ses obligations par son adversaire de sorte qu’elle n’était pas fondée à retenir une partie du prix. Le jugement est en conséquence infirmé.
Il n’est donc pas nécessaire de se pencher sur la clause exclusive de responsabilité invoquée par l’appelante dans un second temps.
Sur les demandes en paiement
La retenue opérée par la société BRA n’étant pas justifiée, la société Barlet justifie sa demande en paiement de la somme la somme de 3.600 euros outre intérêts à compter de la mise en demeure, outre capitalisation des intérêts.
S’agissant des dommages intérêts sollicités par la société BRA, l’appelante soutient que la demande de dommages et intérêt pour préjudice moral est une demande nouvelle en cause d’appel de sorte qu’elle est irrecevable, et qu’une personne morale ne peut pas subir de préjudice d’angoisse alors que la société BRA soutient qu’elle a subi pour les mêmes fautes un préjudice financier indirect de désorganisation, de temps passé à effectuer des relances, et de dispositions requises pour le travail en urgence afin de rattraper le retard pour un montant de 2.000 euros et qu’elle a subi un préjudice évalué à 5.000 euros pour notamment trouble commercial, intégrant l’angoisse de ne pas répondre au délai de son client, et le préjudice d’image avec la perte d’un client.
Le montant des dommages intérêts sollicités correspond au total à celui réclamé en première instance, non détaillé par le jugement, de sorte que l’existence d’une demande nouvelle en appel n’est pas avérée. Par contre, la société BRA échouant sur sa prétention principale, le jugement ne peut qu’être confirmé en ce qu’il a rejeté sa demande de dommages intérêts pour indemnisation des préjudices découlant d’une faute de son adversaire qui n’a pas été retenue.
Sur la résistance abusive
La société Barlet fait valoir que l’attitude de la société BRA justifie de la voir condamnée à 2.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive.
La société BRA ne présente aucun moyen en défense de cette demande.
Cependant, faute de démontrer avoir subi le moindre préjudice distinct de celui des intérêts de retard, né du non paiement de la somme de 3.600 euros, la société Barlet ne justifie pas de sa demande de dommages intérêts pour résistance abusive. Le jugement est confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
La société BRA qui succombe sur ses prétentions a la charge des dépens de première instance et d’appel et elle versera à son adversaire une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile que l’équité commande de fixer à 4.000 euros pour l’ensemble de la procédure.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant dans les limites de l’appel,
Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a rejeté la demande de la société Carrosserie Barlet et compagnie en paiement de dommages intérêts pour résistance abusive et en ce qu’il a rejeté la demande de la société Bennes Rhône-Alpes en paiement de la somme de 7.000 euros à titre de dommages intérêts.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Bennes Rhône-Alpes à payer à la société Carrosserie Barlet et compagnie la somme de 3.600 euros au titre du reliquat du prix contractuellement prévu et dit que cette somme portera intérêts, au taux légal, à compter de la mise en demeure du 9 octobre 2018.
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.
Condamne la société Bennes Rhône-Alpes aux dépens de première instance et d’appel, ces derniers avec droit de recouvrement et à payer à la société Carrosserie Barlet et compagnie la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE