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COUR D’APPEL
D’ANGERS
CHAMBRE A – CIVILE
LE/IM
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 18/01054 – N° Portalis DBVP-V-B7C-EJ75
Jugement du 27 Mars 2018
Tribunal d’Instance du MANS
n° d’inscription au RG de première instance 11-16-1200
ARRET DU 21 FEVRIER 2023
APPELANTE :
BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentée par Me Dany DELAHAIE de la SCP CHANTEUX DELAHAIE QUILICHINI BARBE, avocat postulant au barreau d’ANGERS, et Me Aurélie DEGLANE, avocat plaidant au barreau de LA ROCHELLE – ROCHEFORT
INTIMES :
Monsieur [K] [R] [O]
né le 12 Mai 1966 à [Localité 6] (72)
[Adresse 2]
[Localité 6]
Madame [V] [X] [W] [Y] épouse [P]
née le 15 Janvier 1968 à [Localité 6] (72)
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentés par Me François GAUTIER, avocat au barreau du MANS – N° du dossier 2016090
SASU SWEETCOM prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Chez Chevreuil – LAPRADE
[Localité 3]
Représentée par Me Inès RUBINEL, avocat postulant au barreau d’ANGERS, en qualité d’administratrice provisoire de Me Benoît GEORGE, associé de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocat au barreau D’ANGERS, et Me Olivier GUEVENOUX, avocat plaidant au barreau de CHARENTE
INTIMEE EN INTERVENTION FORCEE
S.E.L.A.R.L. EKIP’ en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société SWEETCOM
[Adresse 4]
[Localité 5]
Assignée, n’ayant pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 12 Décembre 2022 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
M. WOLFF, conseiller
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
ARRET : réputé contradictoire
Prononcé publiquement le 21 février 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, conseillère faisant fonction de présidente, et par Christine LEVEUF, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
Le 26 septembre 2014, dans le cadre d’une opération de démarchage à leur domicile, M. [K] [O] et Mme [V] [Y] épouse [P] ont signé un bon de commande n°5837 établi par la SAS Sweetcom portant notamment sur la fourniture, l’installation et le raccordement d’une installation photovoltaïque, pour la production d’électricité moyennant un prix de 39.900 euros TTC.
Le même jour, ils ont signé auprès de la SA Sygma Banque, une offre de crédit affecté au financement de cette installation à hauteur de 39.900 euros, remboursable en 180 mensualités sans assurance de 351,16 euros et au taux nominal de 5,76%.
Le 24 octobre 2014, M. [O] et Mme [Y] épouse [P] ont signé un bon de commande n°8012 établi par la société Sweetcom annulant et remplaçant un précédent bon de commande et portant sur la fourniture, l’installation et le raccordement de 24 panneaux photovoltaïques, Consuel compris, l’édification d’un abri bois (bardage bois naturel) avec une dalle ciment, ferraillage, décaissage du terrain compris et onduleur, la pose devant être effectuée avant le 10 janvier 2015 pour un prix de 31.500 euros TTC.
Le même jour ils ont régularisé auprès du même établissement bancaire une offre de crédit affecté au financement de « panneaux solaires » à hauteur de 31.500 euros remboursables en 180 mensualités sans assurance de 277,23 euros et au taux nominal de 5,76 %.
Deux tableaux d’amortissement ont été adressés aux emprunteurs l’un, le 15 octobre 2014, relatif au prêt de 39.900 euros mentionnant un montant total dû de 73.936,90 euros remboursable sur 192 mois, le second le 23 mai 2015 relatif au crédit de 31.500 euros mentionnant un coût total de crédit de 61.995 euros remboursable sur 192 mois.
Par exploits des 15 et 20 septembre 2016, M. [O] et Mme [Y] ont fait assigner la SAS Sweetcom ainsi que la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma banque devant le tribunal d’instance du Mans aux fins notamment d’annulation ou subsidiairement résolution des contrats de vente et conventions subséquentes.
Suivant jugement du 27 mars 2018, le tribunal d’instance du Mans a :
– prononcé la nullité du contrat de vente numéro 5837 régularisé le 26 septembre 2014 entre d’une part M. [K] [O] et Mme [V] [Y] épouse [P] et d’autre part, la SAS Sweetcom, pour un prix total de 39.900 euros TTC,
– prononcé la nullité du contrat de vente numéro 8012 régularisé le 24 octobre 2014 entre d’une part, M. [K] [O] et Mme [V] [Y] épouse [P] et d’autre part, la SAS Sweetcom pour un prix total de 31.500 euros TTC,
– ordonné la restitution des biens vendus dont l’enlèvement sera à la charge de la SAS Sweetcom,
– condamné la SAS Sweetcom à procéder à la remise en état des lieux ainsi qu’ils étaient antérieurement au contrat de vente, la condamnation sous astreinte n’étant pas nécessaire,
– prononcé, en conséquence, la nullité du contrat de crédit affecté accepté le 26 septembre 2014 par M. [K] [O] et Mme [V] [Y] épouse [P] auprès de la société Sygma banque,
– prononcé, en conséquence, la nullité du contrat de crédit affecté accepté le 24 octobre 2014 par M. [K] [O] et Mme [V] [Y] épouse [P] auprès de la société Sygma banque,
– dit que la société Sygma banque a commis une faute dans la délivrance des fonds privant la SA BNP Paribas Personal Finance de son droit à restitution du capital emprunté,
– rejeté en conséquence la demande de la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma banque tendant à obtenir le remboursement du capital emprunté,
– condamné la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma banque à rembourser à M. [K] [O] et à Mme [V] [Y] épouse [P] la somme de 16.468,56 euros au titre des mensualités déjà perçues par la banque, selon décompte arrêté au 10 novembre 2017, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, outre les mensualités postérieures,
– rejeté la demande en garantie formée par la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma banque à l’égard de la SAS Sweetcom,
– condamné in solidum la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma banque et la SAS Sweetcom à payer à M. [K] [O] et à Mme [V] [Y] épouse [P] une indemnité de 2.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamné in solidum la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS Sweetcom aux entiers dépens,
– débouté les parties de leurs autres demandes,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
Par déclaration déposée au greffe de la cour le 15 mai 2018, la SA BNP Paribas Personal Finance a interjeté appel de ce jugement en son entier dispositif.
Suivant conclusions déposées le 23 octobre 2018, la société Sweetcom a formé appel incident de cette même décision.
Par jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 3 février 2021, la SAS Sweetcom a été placée en redressement judiciaire, procédure convertie le 14 avril suivant en liquidation judiciaire. Dans ces conditions et par exploit du 4 juin 2021, la banque a fait assigner en intervention forcée la SELARL Ekip’, en sa qualité de liquidateur de la SAS Sweetcom.
Bien que régulièrement assigné à son domicile à la diligence de l’appelante le 4 juin 2021 et des intimés personnes physiques le 11 août de la même année, le liquidateur n’a pas constitué avocat, faisant savoir par courrier du 17 août 2021, qu’en raison d’un manque de fonds disponibles, il ne pourrait être représenté dans le cadre de la présente procédure.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 4 mai 2022 et l’audience de plaidoiries finalement fixée au 12 décembre de la même année.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures, déposées le 11 juin 2021 et régulièrement signifiées au liquidateur judiciaire le 11 août de la même année, la SA BNP Paribas Personal Finance demande à la présente juridiction de :
– prononcer la jonction de la présente instance avec celle introduite à sa demande, à l’encontre de la SELARL Ekip’ ès qualités de liquidateur de la société Sweetcom, selon assignation en intervention forcée du 4 juin 2021,
– réformer le jugement rendu par le tribunal d’instance du Mans le 27 mars 2018 entre les parties en ce qu’il :
– a prononcé la nullité du contrat de vente N°5837 régularisé le 26 septembre 2014 entre d’une part, M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] et d’autre part, la SAS Sweetcom, pour un prix total de 39.900 euros TTC,
– a prononcé la nullité du contrat de vente N°8012 régularisé le 24 octobre 2014 entre d’une part, M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] et d’autre part, la SAS Sweetcom pour un prix total de 31.500 euros TTC,
– a ordonné la restitution des biens vendus dont l’enlèvement sera à la charge de la SAS Sweetcom,
– a condamné la SAS Sweetcom à procéder à la remise en état des lieux ainsi qu’ils étaient antérieurement au contrat de vente, la condamnation sous astreinte n’étant pas nécessaire,
– a prononcé, en conséquence, la nullité du contrat de crédit affecté accepté le 26 septembre 2014 par M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] auprès de la Société Sygma Banque,
– a prononcé, en conséquence, la nullité du contrat de crédit affecté accepté le 24 octobre 2014 par M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] auprès de la Société Sygma Banque,
– a dit que la Société Sygma Banque a commis une faute dans la délivrance des fonds la privant de son droit à restitution du capital emprunté,
– a rejeté en conséquence sa demande tendant à obtenir le remboursement du capital emprunté,
– l’a condamnée à rembourser à M. [K] [O] et à Mme [V] [P] née [Y] la somme de 16.468,56 euros au titre des mensualités déjà perçues par la banque, selon décompte arrêté au 10 novembre 2017, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, outre les mensualités postérieures,
– a rejeté sa demande en garantie formulée à l’égard de la SAS Sweetcom,
– l’a condamnée in solidum avec la SAS Sweetcom à payer à M. [K] [O] et à Mme [V] [P] née [Y] une indemnité de 2.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,
– l’a condamnée in solidum avec Sweetcom aux entiers dépens,
– a ordonné l’exécution provisoire de la décision,
– confirmer le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau sur les chefs réformés :
– juger n’y avoir lieu à nullité des contrats principaux conclus les 26 septembre 2014 et 24 octobre 2014 entre la société Sweetcom d’une part, et M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] d’autre part,
– juger que le ou les contrat(s) éventuellement vicié(s) ont été confirmés par l’exécution de leurs obligations par M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y],
– juger n’y avoir lieu à nullité des contrats de crédit conclus les 26 septembre 2014 et octobre 2014 entre la société Sygma Banque aux droits de laquelle elle vient d’une part, et M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] d’autre part,
– débouter M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire, en cas de nullité du ou des contrat(s) :
– juger qu’aucune faute n’a été commise par la société Sygma Banque aux droits de laquelle elle vient dans le déblocage des fonds,
– juger que le préjudice subi par M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] du fait de l’éventuelle faute du prêteur dans le déblocage des fonds est inexistant, et ne peut en conséquence être indemnisé,
– en conséquence, en cas de nullité des contrats conclus le 26 septembre 2014 condamner solidairement M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] à lui payer la somme de 39.900 euros au titre de l’obligation pour l’emprunteur de restituer le capital prêté, déduction faite des remboursements effectués, et juger que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
– en conséquence, en cas de nullité des contrats conclus le 26 septembre 2014 condamner solidairement M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] à lui payer la somme de 31.500 euros au titre de l’obligation pour l’emprunteur de restituer le capital prêté, déduction faite des remboursements effectués, et juger que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
A titre plus subsidiaire, en cas de faute du prêteur dans le ou les déblocage(s) des fonds :
– juger que le préjudice subi par M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] s’analyse comme une perte de chance de ne pas contracter et s’apprécie en conséquence en pourcentage,
– en conséquence, en cas de faute du prêteur dans le déblocage des fonds du prêt du 26 septembre 2014, condamner solidairement M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] à lui verser une somme correspondant à 75% du capital prêté, soit la somme de 29.925 euros,
– en conséquence, en cas de faute du prêteur dans le déblocage des fonds du prêt du 24 octobre 2014, condamner solidairement M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] à lui verser une somme correspondant à 75% du capital prêté, soit la somme de 23.625 euros,
A titre encore plus subsidiaire, en cas de débouté du prêteur de son droit à restitution de la ou des somme(s) prêtée(s) :
– en cas de débouté du prêteur de son droit à restitution des fonds prêtés au titre du contrat de crédit du 26 septembre 2014, constater et fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Sweetcom à la somme de 39.900 euros à titre de dommages et intérêts,
– en cas de débouté du prêteur de son droit à restitution des fonds prêtés au titre du contrat de crédit du 24 octobre 2014, constater et fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Sweetcom à la somme de 31.500 euros à titre de dommages et intérêts,
En toutes hypothèses :
– à titre principal, condamner in solidum M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] à lui payer la somme de 3.600 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour la procédure de première instance et d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel,
– à titre subsidiaire, constater et fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Sweetcom à la somme de 3.600 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour les procédures de première instance et d’appel et les entiers dépens de première instance et d’appel.
Aux termes de leurs dernières écritures déposées le 12 août 2021 et signifiées le 11 de ce même mois, M. [O] et Mme [Y] [P] demandent à la présente juridiction de :
– prononcer la jonction de la présente instance avec celle introduite à leur demande à l’encontre de la SELARL Ekip’ ès qualités de liquidateur de la SASU Sweetcom, selon assignation en intervention forcée délivrée en date du 11 août 2021,
– dire et juger recevable mais mal fondée la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque en son appel du jugement contradictoire rendu en premier ressort par le tribunal d’instance le Mans du 27 mars 2018,
– dire et juger recevable mais mal fondée la SAS Sweetcom en son appel incident du jugement contradictoire rendu en premier ressort par le tribunal d’instance du Mans le 27 mars 2018,
– débouter en conséquence la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque et la SAS Sweetcom de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement contradictoire rendu en premier ressort par le tribunal d’instance du Mans le 27 mars 2018,
– et pour le cas où par impossible la cour ne priverait pas la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque de son droit à remboursement des sommes prêtées en considération des manquements graves par elle commis à leur égard, il y aura alors lieu de condamner la SAS Sweetcom à les garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre au profit de la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque et de fixer en conséquence leur créance au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Sweetcom à titre chirographaire à la somme de 81.313,94 euros outre les intérêts au taux légal sur la somme de 78.513,94 euros à compter du 27 mars 2018 et jusqu’à complet règlement,
– condamner la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque à leur payer une somme de 4.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile en cause d’appel,
– fixer leur créance au passif de la liquidation judiciaire de la SASU Sweetcom à la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour la procédure d’appel ainsi qu’au titre des entiers dépens d’appel,
– condamner la BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque aux entiers dépens d’appel.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 16 janvier 2019, la SAS Sweetcom demande à la présente juridiction de :
– la recevoir en son appel incident et l’y disant fondée,
– infirmer le jugement entrepris en ses dispositions lui portant grief et statuant à nouveau,
– dire et juger n’y avoir lieu à nullité des contrats conclus les 26 septembre 2014 et 24 octobre 2014 entre la société Sweetcom d’une part, et M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] d’autre part,
– réformer le jugement rendu par le tribunal d’instance du Mans le 27 mars 2018,
– débouter M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
– condamner M. [K] [O] et Mme [V] [P] née [Y] à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel,
A titre subsidiaire, en cas de nullité du ou des contrat(s) :
– dire et juger que si des fautes ont été commises par la société BNP Paribas Personal Finance dans l’octroi du crédit ou la délivrance des fonds celles-ci sont à l’origine de son préjudice,
– débouter en conséquence la société BNP Paribas Personal Finance de toute demande à son encontre,
– condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile, aux dernières écritures, ci-dessus mentionnées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Liminairement, il doit être observé que les assignations en intervention forcée du liquidateur de la société installatrice, ont été enregistrées au sein de ce dossier, de sorte qu’il n’y a pas lieu à prononcer la jonction sollicitée.
Sur les bons de commande
En droit, les articles L 111-1 et L 121-27 du Code de la consommation en leurs versions applicables au présent litige disposent que : ‘Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible t compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’Etat.
(…)’,
‘I.-Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat (…)’.
Par ailleurs, le premier alinéa de l’article L 121-18-1 de ce même code en sa version présentement applicable prévoit que : ‘Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L. 121-17″.
Enfin l’article 1338 du Code civil en sa version applicable au présent litige prévoit que : ‘L’acte de confirmation ou ratification d’une obligation contre laquelle la loi admet l’action en nullité ou en rescision n’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l’action en rescision, et l’intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.
A défaut d’acte de confirmation ou ratification, il suffit que l’obligation soit exécutée volontairement après l’époque à laquelle l’obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée.
La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l’époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l’on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers’.
Le premier juge a retenu que les obligations liées aux deux bons étaient déterminées pour chacune des parties (fourniture et installation pour l’une et paiement du prix pour l’autre), de sorte que les conventions ont été considérées comme disposant d’un objet et comme étant causées, de sorte que les demandes d’annulation à ce titre ont été rejetées. S’agissant du dol, il a été considéré que quand bien même la société Sweetcom ait pu se faire remettre les sommes visées aux deux contrats de prêt par la banque, sans aviser cette dernière de l’annulation du premier bon de commande, il n’a pas été démontré que cette société ait usé de manoeuvres dolosives aux fins de leur faire souscrire les deux engagements. Cependant, il a été retenu que le bon de commande n°5837 n’était pas suffisamment précis pour pouvoir être considéré comme d’une part présentant les caractéristiques essentielles du bien et d’autre part respectant les dispositions légales relatives au délai d’exécution de la prestation. De plus, il a été souligné que ce bon ne comporte pas de mention relative aux caractéristiques du prêt devant financer cette opération et que les dispositions réglementaires de forme quant au bordereau de rétractation n’ont pas été respectées, de sorte qu’il a été jugé que ce bon de commande n’était pas conforme aux dispositions d’ordre public du Code de la consommation. S’agissant du bon de commande n°8012, il a été considéré qu’il n’était pas suffisamment précis quant aux délais d’exécution ainsi que relativement aux caractéristiques du prêt y étant affectées et que le bordereau de rétractation n’était pas conforme. Concernant la confirmation des contrats par leur exécution postérieure, il a été souligné qu’un protocole transactionnel avait été régularisé avec la SAS Sweetcom qui n’avait pas installé l’ensemble des panneaux visés au contrat, que les clients avaient déposé plainte à l’encontre de cette société courant avril 2014 et avaient pris attache avec un conciliateur de justice en raison de leur incompréhension face aux deux contrats de prêts avant de se retourner vers un avocat. Le premier juge a ainsi retenu que ce n’est qu’en suite de l’intervention de leur conseil que les clients avaient eu connaissance des vices affectant le contrat de vente et que leur comportement postérieur à la régularisation des bons de commande démontre leur volonté de faire valoir leurs droits.
Aux termes de ses dernières écritures, l’appelante indique, s’agissant du bon de commande du 26 septembre 2014, que :
– les caractéristiques essentielles du bien y sont mentionnées dès lors qu’il est fait état de 24 panneaux photovoltaïques pour une puissance de 6KW,
– la mention figurant au contrat (‘date de pose avant le 30/10/2014″) caractérise un délai d’exécution suffisamment précis,
– les dispositions visées par le premier juge, s’agissant du financement, n’imposent aucunement de présenter les modalités du prêt au contrat principal et, en tout état de cause, le bon de commande mentionne expressément le montant emprunté, l’établissement prêteur, le nombre de mensualités, leur coût, le TEG, les frais de l’assurance facultative ainsi que la durée du report. De plus, il est souligné que l’ensemble des informations nécessaires figure à l’offre préalable,
– le formulaire de rétractation mentionne effectivement l’ancien délai de 7 jours, non applicable à l’espèce, situation sans incidence en l’espèce, dès lors que les clients n’ont ‘jamais émis la moindre volonté de se rétracter’, quant au fait que ce bordereau soit, selon le premier juge, ‘une partie de contrat que le cocontractant doit découper’, elle souligne qu’en tout état de cause l’usage de cet élément suppose nécessairement sa découpe, de sorte que cette situation n’est pas contraire aux dispositions du Code de la consommation,
– le prix global à payer figure de manière effective au contrat.
L’appelante conclut donc à l’infirmation du jugement en ce qu’il a prononcé la nullité de cette convention.
Concernant le contrat du 24 octobre 2014, elle indique que :
– la date de livraison est précisément mentionnée comme étant ‘avant le 10 janvier 2015″,
– les mentions relatives aux modalités du financement, visées par le premier juge ne sont imposées par aucune disposition du Code de la consommation et en tout état de cause figurent à l’offre préalable,
– les difficultés relatives au formulaire de rétraction sont identiques à celles du précédent bon de commande,
– cette convention mentionne tant la puissance de l’installation que sa nature de sorte que les caractéristiques essentielles du bien y figurent,
– le prix global figure au bon de commande.
L’appelante en déduit que cette convention est également valable de sorte que la décision de première instance doit être infirmée à ce titre.
En tout état de cause, elle soutient que, s’agissant d’une nullité relative, le comportement de ses contradicteurs :
‘- absence de rétractation dans le délai légal,
– prise de possession du bien,
– utilisation du bien,
– règlement des échéances du prêt’,
établit leur volonté de couvrir cette nullité par application des dispositions anciennes de l’article 1338 du Code civil.
Aux termes de ses dernières écritures, la société désormais déconfite indique que ‘l’objectif du législateur est d’assurer aux consommateurs une information générale depuis l’examen du bon de commande ; il n’est évidemment pas d’offrir aux plaideurs l’assurance d’obtenir systématiquement la nullité d’un contrat conclu parfois plusieurs années auparavant, au motif que tels ou tels détails techniques n’auraient pas été mentionnés sur le bon de commande, quand leur exigence repose le plus souvent sur une interprétation toute personnelle de la loi’. Ainsi, elle précise que les caractéristiques essentielles du bien étaient présentes au contrat, dès lors qu’étaient mentionnées ‘la puissance de l’installation, les biens livrés et la prestation de service prévue’. Elle souligne par ailleurs, que ni le rendement ni le tarif de rachat de l’énergie n’avaient à figurer au bon de commande pas plus que ne devait être précisé le planning détaillé de l’installation et que la seule mention du prix global était exigée. Dans ces conditions, elle soutient que ‘les deux bons de commande sont en l’espèce suffisamment précis puisqu’ils contiennent :
– l’identité du démarcheur,
– les caractéristiques essentielles des marchandises, en ce compris le nombre de panneaux, leur puissance, leur prix et les garanties afférentes,
– la date de livraison, qui n’est assurément pas vague,
– les caractéristiques essentielles du crédit affecté,
– un bordereau de rétractation détachable, comportant en son verso [ses] coordonnées. A cet égard aucune disposition l’égale (sic) n’exige que ledit bordereau ne soit séparé du reste du contrat’.
Elle précise au demeurant que toute information complémentaire est délivrée par le démarcheur au moyen de la documentation transmise et de l’offre de crédit. S’agissant du délai de 7 jours mentionné par erreur, elle souligne que la sanction de cette difficulté est l’allongement de ce délai à 12 mois. Elle conclut donc à l’infirmation de la décision de première instance en ce qu’elle a prononcé la nullité des contrats et affirme que cette sanction aurait en tout état de cause été couverte par le comportement de ses clients qui ont eu connaissance des dispositions légales applicables au contrat (notamment L 121-23 du Code de la consommation) et qui :
– ne se sont pas prévalus de la possibilité de se rétracter,
– ‘ont reçu le bon de livraison et remis spontanément à destination de la banque un document de réception sans réserve valant demande de déblocage des fonds’,
– ont reçu sans observation la facture,
– ont honoré le paiement des échéances du prêt,
– ont produit de l’électricité.
Aux termes de leurs dernières écritures, les clients intimés indiquent que :
– l’adresse du fournisseur se trouve au dos des bordereaux de rétractation, de sorte que l’usage de ce dernier implique la disparition des coordonnées du contractant,
– le délai de rétractation figurant aux contrats est irrégulier, 7 jours aux lieu et place des 14 jours résultant de la loi dite Hamon,
– les contrats ne comportent pas de ‘désignation précise de la nature, de la marque, des références et des caractéristiques techniques des biens offerts ou/et des services proposés, étant surabondamment relevé qu’aucune documentation technique [ne leur] était remise’,
– les bons de commande ne précisent pas la date de livraison des biens vendus ainsi que celle de la mise en service, alors même qu’ils comprennent la prestation dite de ‘raccordement’,
– les bons de commande ne respectent pas la réglementation applicable s’agissant du prix global à payer ainsi que celle portant sur la vente à crédit (absence de mention du taux nominal, des frais d’assurance, du nombre des mensualités, voire pour l’un d’eux du TEG ainsi que du montant des mensualités).
Ils en déduisent que la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a prononcé la nullité de ces conventions, au regard de leur absence de volonté de réitérer ces actes. Ainsi ils indiquent que leurs contradictrices démontrent d’autant moins les conditions de l’article 1338 du Code civil, qu’ils ont saisi le conciliateur de justice, déposé plainte suivie d’une constitution de partie civile à l’instruction et introduit la présente procédure, ce qui établit leur volonté de faire valoir leurs droits au civil et faire sanctionner la société venderesse au pénal. A ce titre, ils soulignent que par jugement du 2 janvier 2020, dont il a été interjeté appel, M. [O] a été reconnu comme étant victime de diverses infractions dont :
– faux
– altération frauduleuse de la vérité dans un écrit ainsi que son usage,
– pratique commerciale trompeuse.
Sur ce :
En l’espèce il est constant que les conventions aujourd’hui litigieuses ont été souscrites dans le cadre d’opérations de démarchage des intimés à leur domicile.
A ce titre le bon de commande n°5837 précise s’agissant du ‘modèle – caractéristiques précises’ : ’16Kwc Photovoltaïque revente 24 panneaux Souesolart [‘ écriture ne permettant pas de plus efficacement déchiffrer ce nom]
Dont 3 actives . 1 module garantie 10 ans
1 onduleur garantie 20 ans
2KWc Solaire Direct en surimposition
Installation Raccordement Garantie Demande Comprise’.
La première installation destinée à la revente est mentionnée comme étant d’une puissance de 5 Kwc pour un prix de 28.400 euros et la seconde présente un coût de 11.500 euros pour une puissance de 2Kwc, le tout pour un prix total présenté à hauteur de 39.900 euros.
Par ailleurs, ce bon de commande mentionne ‘date de pose : avant le 30/10/2014″.
Enfin, s’agissant des conditions de paiement, il fait état d’un financement intégral sollicité auprès de la société Sygma Banque, sans plus amples précisions quant aux caractéristiques du prêt.
Or s’agissant des caractéristiques essentielles des biens ainsi vendus, il convient d’étudier les termes de ce bon de commande avec les deux factures qui lui sont liées, N°26995 et 26996, toutes deux datées du 16 octobre 2014.
La lecture de ces deux dernières pièces laisse apparaître que si le bon de commande mentionne expressément ‘1 onduleur’, les deux factures mentionnent pour la première :
un ‘Onduleur OMNIKSOL-20K-TL Puissance nominale 2000W Rendement européen : 96,6% garantie 5 ans’
et pour la seconde :
‘2 Onduleur KOSTAL modèle PIKO 3.0 ou équivalent garanti 10 ans, rendement européen 95% Coffret AC-DC inclus’.
Il résulte de la seule lecture des factures, que le bon de commande ne comporte pas l’ensemble des biens réellement commandés dès lors que pour l’installation à visée d’autoconsommation, il n’est pas même fait état de l’onduleur qui est pourtant facturé et manifestement inclus au prix devisé. Au demeurant le nombre de panneaux solaires attaché à cette installation n’ayant pas de visée de revente n’est pas même mentionné. En effet la lecture comparée des factures et du bon de commande laisse apparaître que les 24 panneaux mentionnés correspondent exclusivement aux 24 ‘capteurs’ secondairement facturés. La facture portant sur l’installation d’autoconsommation précise qu’elle porte sur 8 panneaux, soit un total commandé de 32 panneaux, ce qui ne ressort aucunement du bon n°5837.
Il résulte donc que contrairement aux affirmations des appelantes à titre principal et incident, ce bon de commande ne peut aucunement être considéré comme présentant les caractéristiques essentielles des biens vendus, dès lors qu’il ne comporte pas même la désignation de l’ensemble des éléments essentiels des installations photovoltaïques sur lesquelles il porte.
Par ailleurs, s’agissant du délai dans lequel la prestation doit être exécutée, il doit être observé que le bon de commande ne porte pas exclusivement sur la vente et la pose d’une centrale photovoltaïque mais sur ce qui est présenté comme ‘raccordement et demande’, prestations au demeurant facturées. Or le délai mentionné au bon de commande porte exclusivement sur la pose, de sorte que le délai d’exécution des plus amples prestations n’est aucunement mentionné, en violation des dispositions de l’article L 111-1 ci-dessus repris.
En outre, il doit être souligné que les instructions d’usage du bordereau de rétraction figurant au bas des conditions générales de vente précisent expressément quant aux conditions dans lesquelles ‘l’annulation de la commande’ peut intervenir : «l’expédier au plus tard le septième jour de la commande ou si ce délai expire normalement un samedi (…) le premier jour ouvrable suivant», mention dont il n’est pas contesté qu’elle soit erronée, s’agissant d’une convention régularisée postérieurement au mois de juin 2014.
Or cette mention est confirmée par la reprise de l’article L 121-25 au sein de ces mêmes conditions générales, ces dernières précisant : «dans les sept jours, jours fériés compris, à compter de la commande ou de l’engagement d’achat, le client a la faculté d’y renoncer par lettre recommandée avec accusé de réception», (cette version étant antérieure à l’entrée en vigueur de la loi dite Hamon).
Dans ces conditions, il ne peut qu’être constaté que la mention erronée figurant au formulaire détachable est au surplus confirmée par la reprise aux conditions générales de vente d’un article au demeurant abrogé au jour de la convention.
Ainsi, et sans qu’il soit nécessaire d’étudier les griefs formés à l’encontre des mentions relatives au financement, il ne peut qu’être constaté que le bon de commande n°5837 ne respecte pas les dispositions légales ci-dessus reprises, dès lors que les caractéristiques essentielles de l’ensemble des biens et prestations qui en sont l’objet n’y figurent pas et que le délai d’exécution de l’ensemble des prestations n’y est pas mentionné.
Par ailleurs, s’agissant du bordereau de rétraction si l’article L 121-21-1 du Code de la consommation précisait que : ‘Lorsque les informations relatives au droit de rétractation n’ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° du I de l’article L. 121-17, le délai de rétractation est prolongé de douze mois à compter de l’expiration du délai de rétractation initial, déterminé conformément à l’article L. 121-21″, il doit être souligné qu’en l’espèce il ne s’agit pas d’un défaut d’information relativement au droit de rétraction ainsi visé mais une information erronée et réduisant de moitié la possibilité pour le consommateur de se dédire.
En tout état de cause, la sanction visée à l’article L 121-21-1 du Code de la consommation n’est pas exclusive de celle plus générale et posée par l’article L121-18-1 ci-dessus repris.
Ainsi, au regard de conditions générales de vente confirmées par un formulaire de rétractation dont il ne peut être considéré qu’ils soient, tous deux, conformes à l’article L 121-17 au regard de la mention d’un délai de rétractation ne correspondant plus à la réglementation applicable et cela à la défaveur du consommateur, il ne peut qu’être considéré que ce bon de commande encourt également la nullité à ce titre.
S’agissant du bon de commande n°8012, il mentionne au titre du ‘modèle – caractéristiques précises’ : ‘1 Abri bois 3 faces bardage bois naturel
1 Dalle ciment + Ferraillage + décaissage terrain compris
Tirage gaine de l’eau et (électricité ‘) prévoir Avec la Dalle
16 Kwc Photovoltaïque Revente – Rvolt
24 panneaux
Onduleurs garantie 20 Ans + 1 module Garantie
10 Ans . 85% fabrication Garantie 25 Ans
Installation Raccordement + Consuel Compris’.
Cette installation est mentionnée comme étant d’une puissance de 6 Kwc pour un prix de 31.500 euros.
Par ailleurs, ce bon de commande mentionne ‘date de pose : avant le 10/01/2015″.
Enfin, s’agissant des conditions de paiement, il fait état d’un financement intégral sollicité auprès de la société Sygma Banque, payable en 180 mensualités moyennant un TEG de 5,76% après report de 12 mois.
Or, il doit être souligné que ce bon de commande porte sur la construction d’un abri bois devant supporter une installation photovoltaïque, dont il est uniquement mentionné qu’il dispose de trois faces et un bardage bois. Ses dimensions, qui sont l’une de ses caractéristiques essentielles, ne sont aucunement mentionnées. Au demeurant, si les factures n° 29359 et 29360 du 27 mai 2015, mentionnent la mise en oeuvre d’un système d’intégration (SystoEtanche), ainsi qu’une ‘unité de gestion de l’énergie par insufflation MODUL’R, kit d’insufflation avec gaines isolées et bouche d’insufflation, chatière d’évacuation’ outre un ‘thermostat sans fil’ en lien avec une ‘production de chauffage’, il doit être souligné que le bon de commande ne comporte aucune mention de ces éléments qui ne peuvent qu’être considérés comme des données essentielles relatives aux biens commandés.
Ainsi à l’image du bon de commande précédent cette convention ne peut aucunement être considérée comme présentant les caractéristiques essentielles des biens vendus, dès lors qu’elle ne comporte pas même la désignation de l’ensemble des éléments essentiels de l’installation sur laquelle elle porte.
De plus, s’agissant du délai dans lequel la prestation doit être exécutée, il doit encore être observé que ce bon de commande ne porte pas exclusivement sur la vente et la pose d’une centrale photovoltaïque mais sur ce qui est présenté comme ‘raccordement + Consuel’. Or le délai mentionné au bon de commande porte exclusivement sur la pose, de sorte que le délai d’exécution des autres prestations à caractère plus administratif n’est pas plus mentionné à cette convention qu’à la précédente.
En outre, le bordereau de rétractation est formulé dans les mêmes termes que celui figurant au bon de commande précédemment étudié et les conditions générales de vente sont identiques à celles d’ores et déjà mentionnées ci-dessus. De sorte que les développements mentionnés ci-avant s’agissant de la régularité de ce bordereau s’appliquent également à cette seconde convention.
Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit nécessaire d’étudier plus avant les griefs formés au titre du financement, que le bon de commande n°8012 encourt également la nullité pour ne pas respecter les dispositions d’ordre public du Code de la consommation.
Concernant la confirmation de ces deux conventions, il doit être rappelé qu’elle suppose la démonstration tant de la connaissance, par la personne pouvant invoquer la nullité relative, du vice affectant l’acte que de son intention de le réparer.
A ce titre, la connaissance du vice peut résulter, comme l’indique l’appelante incidente, de la reproduction des dispositions du Code de la consommation portant notamment sur le formalisme attaché à la vente hors établissement.
Cependant, il doit être souligné que les conditions générales de vente produites reprennent des dispositions légales qui, au jour des conventions litigieuses, étaient soit abrogées (pour l’article L 121-25, n’existant plus depuis l’entrée en vigueur en juin 2014 de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014), soit n’étaient plus applicables dans les termes figurant aux pièces contractuelles (pour les articles L 121-23, -24, -26 et -27, modifiés par l’entrée en vigueur de la loi dite Hamon de mars 2014).
Dans ces conditions, il ne peut aucunement être considéré que les appelantes (principale ou incidente) démontrent la connaissance par les consommateurs des vices affectant les deux bons de commande, dès lors que les dispositions légales permettant justement d’apporter cette information au client n’étaient pas correctement reprises.
Il en résulte que les appelantes ne démontrent pas que l’exécution postérieure des conventions litigieuses ait été effectuée en connaissance des vices les affectant et partant avec l’intention de les couvrir.
La décision de première instance doit donc être confirmée en ce qu’elle a :
– prononcé la nullité de ces deux bons de commande et ordonné les diverses mesures notamment de restitution qui en découlent,
– prononcé, en conséquence, l’annulation de plein droit des contrats de crédits affectés conclus les 26 septembre et 24 octobre 2014 entre la société Sygma Banque et les intimés, et cela en application des dispositions de l’article L 311-32 du Code de la consommation.
Sur les restitutions en suite de l’annulation des contrats de prêts
Le premier juge a considéré qu’en ‘débloquant les fonds pour le premier avant la réception du certificat de livraison, sur la foi de bons de commande violant les dispositions du Code de la consommation conclus à un mois d’intervalle et sensiblement similaires, au contenu sibyllin, et de deux certificats de livraison type, dépourvus de mention manuscrite, revêtus d’une signature manifestement imitée qu’une simple comparaison avec les documents dont elle aurait dû être en possession lui aurait permis de déceler, sans procéder en outre à une vérification sérieuse de solvabilité, (la fiche de dialogue ne fait état d’aucune charge, y compris immobilière, aucun justificatif de ressources et de charges joints à la demande) eu égard au montant des sommes empruntées et de l’objet des contrats, la société Sygma Banque a commis des fautes engageant sa responsabilité, lesquelles la privent de son droit à restitution du capital prêté’.
Aux termes de ses dernières écritures, l’appelante indique que les fonds ont été versés, pour les deux contrats, sur production d’une attestation régularisée par M. [O], lui demandant de procéder ainsi, le 13 octobre 2014 pour la première convention et le 22 mai 2015 pour la seconde. A ce titre, elle souligne qu’aucune obligation de vérification de réalisation de la prestation ne pèse sur le prêteur. De plus, elle souligne ne pas avoir débloqué les fonds antérieurement à la production des certificats de livraison. Par ailleurs, elle indique, au soutien de sa demande en infirmation des dispositions de la décision de première instance et de condamnation à restitution du capital prêté, que :
– la vérification des bons de commande et des vices les affectant, à laquelle il lui est reproché de ne pas avoir procédé, revient à l’instituer délégataire d’un pouvoir juridictionnel. Par ailleurs, elle souligne qu’il ne lui appartient pas, en qualité de prêteur, de vérifier la régularité formelle des bons de commande qu’elle finance et qu’en tout état de cause, si une telle obligation lui incombait, ‘la communication du contrat principal par le vendeur au prêteur a permis à la société Sygma Banque d’en apprécier la régularité au regard du Code de la consommation’. Enfin, elle souligne qu’il ne peut lui être reproché une mauvaise interprétation du Code de la consommation, au regard notamment du caractère particulièrement fluctuant de ce droit,
– s’agissant du certificat de livraison de 2015, elle indique qu’aucun élément ne lui permettait de remettre en cause la véracité de la signature. Cependant concernant la signature présente au certificat d’octobre 2014, elle souligne que si elle diffère de celle présente aux autres pièces contractuelles (commande et prêt), le premier juge n’en a pas tiré les bonnes conséquences. En effet, elle souligne que cette faute est imputable au vendeur et non au prêteur de sorte que ses conséquences dommageables doivent être supportées par la société Sweetcom. Au surplus, la banque souligne que s’agissant de la seconde commande, qui n’a pu être intégralement mise en oeuvre, un accord transactionnel est intervenu entre la venderesse et ses clients, la première versant aux seconds une somme de 8.000 euros, qu’ils ont conservé sans aviser le prêteur de la diminution du prix pour autant intégralement financé,
– le premier juge n’a pas correctement analysé les certificats de livraison qui comportent les mentions manuscrites,
– seule une faute dans la libération des fonds justifie la privation du prêteur de son droit à remboursement, de sorte que les difficultés lors que l’appréciation de la solvabilité de l’emprunteur ne sont pas de nature à fonder une telle sanction. En tout état de cause, elle souligne que les emprunteurs ont expressément déclaré ne pas avoir de charge notamment d’emprunt immobilier,
– il n’est pas justifié d’un préjudice, dès lors que l’installation photovoltaïque est mise en place et fonctionnelle.
Subsidiairement, l’établissement de crédit soutient que si son droit à remboursement lui est dénié, ‘ceci aboutit à un enrichissement concret de 71.400 euros, au profit’ soit de la venderesse, soit de ses clients, ce qui est contraire au principe de la réparation intégrale du préjudice. Dans ces conditions, elle affirme que ‘le préjudice subi par les emprunteurs doit s’analyser comme une perte de chance de ne pas contracter, c’est-à-dire de ne pas signer le bon de commande du contrat principal’. Dans ces conditions, elle sollicite la condamnation des emprunteurs à lui restituer 75% du capital prêté.
Aux termes de leurs dernières écritures, les emprunteurs observent que leur contradictrice invoque vainement des certificats de livraison, ne disposant pas des mentions manuscrites, dont les signatures ont été grossièrement falsifiées et qui ne font pas mention de l’ensemble des prestations commandées. Ainsi ils soutiennent que la banque ‘n’a pas craint de débloquer au profit de (…) les capitaux empruntés au titre des crédits affectés pour des montants respectifs de (…) non seulement au vu de deux bons de commande ne respectant pas les dispositions d’ordre public du Code de la consommation mais encore sans même satisfaire à son obligation minimale de s’assurer aussi bien de la régularité des contrats financés que de la complète réalisation de l’opération financée qui n’était toujours pas achevée à la date du 26 novembre 2016 (ni même davantage à ce jour !)’. Ils concluent donc à la confirmation de la décision de première instance en indiquant que ‘en procédant de la sorte, [l’appelante] venant aux droit de la SA Sygma Banque a commis des fautes dans le déblocage des fonds qui engagent incontestablement sa responsabilité et la privent à titre de sanction, et quel que soit le préjudice subi par ailleurs par le consommateur, de son droit à restitution des capitaux prêtés’.
Sur ce :
En l’espèce, il doit dans un premier temps être observé que la lecture des tableaux d’amortissement produits aux débats établit que les fonds liés au premier prêt ont été libérés le 14 octobre 2014. Or le certificat de livraison lié à cette opération, s’il est daté par le vendeur ou prestataire de service du 13 octobre, il n’en demeure pas moins que la signature du ‘client – emprunteur’ est précédée d’une date dont la mention est surchargée mais qui laisse apparaître un 19 aux lieu et place du 13 invoqué par l’appelante. Au demeurant, la mention du 19 octobre 2014 est confirmée par la date figurant au mandat accordé au prêteur lui permettant de prélever les échéances du prêt sur le compte bancaire des emprunteurs.
Ainsi, il ne peut qu’être constaté que le prêteur s’est libéré des fonds, avant même la régularisation du certificat de livraison qu’il invoque.
Au surplus, s’il est constant que l’emprunteur qui sollicite son prêteur aux fins de libération des fonds, au moyen d’un certificat attestant de la livraison complète des biens et de la réalisation des prestations commandées n’est pas fondé à faire grief à son cocontractant de ne pas avoir exécuté ses obligations à ce titre, il n’en demeure pas moins que ce document, déterminant l’établissement de crédit à débloquer les fonds, doit émaner de l’un des emprunteurs.
Or en l’espèce l’établissement de crédit ne conteste pas même le fait que la signature présente au certificat de livraison du 13 octobre 2014 ne soit pas celle des emprunteurs.
Il en résulte que, s’agissant du premier prêt, l’établissement de crédit s’est libéré des fonds, avant même la date figurant au certificat attestant de la réalisation complète des prestations commandées, pièce dont il ne conteste au surplus pas le caractère falsifié. Un tel comportement ne peut que s’analyser comme un manquement de l’établissement à ses obligations.
S’agissant du second prêt, les intimés dénient leur signature, or si ce sceau présente quelques vagues similitudes avec celui des intimés, il apparaît manifestement assez grossièrement imité au regard des signatures présentes au contrat de prêt auquel il est lié. Ainsi, l’appelante qui ne produit aucune pièce venant établir l’origine de la signature qu’elle invoque, ne démontre aucunement que ce sceau corresponde à celui de l’un des emprunteurs.
Il en résulte donc que l’établissement de crédit, en libérant les fonds empruntés sur la base d’un certificat dont la simple lecture associée aux autres pièces contractuelles permettait de remettre en cause l’origine, a manqué à ses obligations contractuelles dans des conditions de nature à engager sa responsabilité.
S’agissant du préjudice, il doit être souligné que les intimés rappellent que les travaux de la société Sweetcom n’ont jamais été achevés.
Cependant, il doit être souligné que suivant accord transactionnel régularisé avec la venderesse le 1er mars 2016, les intimés ont obtenu une indemnisation à hauteur de 8.000 euros en raison de l’impossibilité, aux fins de respect des règles de l’urbanisme, de mettre en place la totalité des panneaux commandés.
Par ailleurs, les emprunteurs n’indiquent aucunement que l’installation mise en place soit de quelque manière que ce soit dysfonctionnelle, le procès-verbal de constat du 29 novembre 2016, ne faisant aucune mention à ce titre et se bornant à établir la présence de 32 panneaux solaires répartis sur les toitures de la ‘maison’ et du ‘hangar en bois’, ainsi que quelques désordres affectant des baguettes d’angle outre la présence de vis ayant transpercé des murs ou toiture.
Il résulte donc de ce qui précède que les intimés ne démontrent pas l’existence d’un préjudice en lien avec les manquements de l’établissement crédit.
Dans ces conditions, la décision de première instance doit être infirmée en ce qu’elle n’a pas ordonné les restitutions liées à l’annulation des crédits affectés. Les emprunteurs doivent donc être condamnés in solidum :
– au titre du prêt souscrit le 26 septembre 2014 au paiement de la somme de 39.900 euros au titre de l’obligation pour l’emprunteur de restituer le capital prêté, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
– au titre du prêt souscrit le 26 septembre 2014 au paiement de la somme de 31.500 euros au titre de l’obligation pour l’emprunteur de restituer le capital prêté, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
et le jugement sera confirmé s’agissant des restitutions liées aux échéances d’ores et déjà honorées par les emprunteurs.
Sur la demande en réparation
Aux termes de leurs dernières écritures, les intimés indiquent que si la banque n’était pas privée de son droit à restitution des sommes prêtées, ‘il y aura alors lieu de condamner la SAS Sweetcom à les garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre au profit de [l’appelante] et en conséquence de fixer [leur] créance au passif de la liquidation judiciaire à titre chirographaire à la somme de 81.313,94 euros outre les intérêts au taux légal sur la somme de 78.513,94 euros à compter du 27 mars 2018″.
La société Sweetcom pour sa part indique que ‘cette demande ne peut prospérer, puisqu’en vertu des dispositions de l’article L 312-56 [du Code de la consommation], seul le prêteur peut solliciter du vendeur la garantie du parfait remboursement des sommes prêtées’.
Sur ce :
En l’espèce, la prétention ainsi formée par les intimés, qui ne correspond pas une demande en restitution du prix des conventions annulées, s’analyse en une demande en réparation.
Or ils n’indiquent pas même quelle serait la nature du préjudice qu’ils subiraient étant rappelé qu’ils ont d’ores et déjà régularisé avec leur venderesse un protocole transactionnel s’agissant de l’impossibilité de mettre en place tous les panneaux solaires commandés.
Dans ces conditions, cette demande ne peut qu’être rejetée.
Sur les demandes accessoires
Les parties succombant toutes partiellement en leurs demandes, chacune d’elles conservera la charge de ses propres dépens.
Par ailleurs l’équité commande de rejeter les demandes fondées sur les dispositions de l’article 700.
Enfin, au regard de l’issue du présent litige, les dispositions de la décision de première instance à ce titre doivent être confirmées.
PAR CES MOTIFS
La cour,
CONFIRME, dans les limites de sa saisine le jugement du tribunal d’instance du Mans du 27 mars 2018, sauf en celles de ses dispositions ayant :
– dit que la société Sygma banque a commis une faute dans la délivrance des fonds privant la SA BNP Paribas Personal Finance de son droit à restitution du capital emprunté,
– rejeté en conséquence la demande de la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma banque tendant à obtenir le remboursement du capital emprunté ;
Statuant de nouveau de ces seuls chefs et y ajoutant :
REJETTE la demande en réparation formée par M. [K] [O] et Mme [V] [Y] épouse [P] à l’encontre de la SA BNP Paribas Personal Finance au titre du manquement dans le déblocage des fonds empruntés ;
CONDAMNE in solidum M. [K] [O] et Mme [V] [Y] épouse [P], au titre du prêt souscrit le 26 septembre 2014 au paiement à la SA BNP Paribas Personal Finance de la somme de 39.900 euros au titre de l’obligation pour l’emprunteur de restituer le capital prêté, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
CONDAMNE in solidum M. [K] [O] et Mme [V] [Y] épouse [P], au titre du prêt souscrit le 26 septembre 2014 au paiement à la SA BNP Paribas Personal Finance de la somme de 31.500 euros au titre de l’obligation pour l’emprunteur de restituer le capital prêté, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
REJETTE la demande subsidiaire en garantie formée par M. [K] [O] et Mme [V] [Y] épouse [P] à l’encontre de la SAS Sweetcom ;
REJETTE l’ensemble des demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
LAISSE à chaque partie la charge de ses propres dépens.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
C. LEVEUF C. MULLER