MM/ND
Numéro 23/680
COUR D’APPEL DE PAU
2ème CH – Section 1
ARRÊT DU 20/02/2023
Dossier : N° RG 19/02446 – N° Portalis DBVV-V-B7D-HKE3
Nature affaire :
Demande en nullité d’un contrat tendant à la réalisation de travaux de construction
Affaire :
SA FRANFINANCE
C/
[T] [X], [I] [P] épouse [X], S.A.R.L. FORCE ENERGIE, S.E.L.A.R.L. DE BOIS-HERBAUT
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 20 Février 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 08 Décembre 2022, devant :
Monsieur Marc MAGNON, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame Nathalène DENIS, greffier présent à l’appel des causes,
Marc MAGNON, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente
Monsieur Marc MAGNON, Conseiller
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTE :
SA FRANFINANCE
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Guillaume FRANCOIS de la SELARL AQUI’LEX, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN
Assistée de Me Olivia MARIOL, avocat au barreau de PAU
INTIMES :
Monsieur [T] [X]
né le 25 Mars 1948 à [Localité 8]
de nationalité française
[Adresse 9]
[Adresse 10]
[Localité 11]
Madame [I] [P] épouse [X]
née le 30 Juillet 1964 à [Localité 11]
de nationalité française
[Adresse 9]
[Adresse 10]
[Localité 11]
Représentés par Me Bruno MOUTIER, avocat au barreau de PAU
S.A.R.L. FORCE ENERGIE
venant aux droits de France Energie, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
assignée
S.E.L.A.R.L. DE BOIS-HERBAUT
prise en la personne de Maître Alexandre Herbaut, es qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL Force Energie
[Adresse 1]
[Adresse 7]
[Localité 5]
assignée
sur appel de la décision
en date du 16 MAI 2019
rendue par le TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE PAU
EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE :
[T] [X] et [I] [P] épouse [X] sont propriétaires d’une maison d’habitation située à [Adresse 12]. Le 11 mars 2014, ils ont passé commande auprès de la société France Climat de la pose de 24 panneaux photovoltaïques, moyennant paiement de la somme de 42 900,00 euros TTC financée par un prêt remboursable sur 14 ans souscrit auprès de la société Sygma Banque, pour un coût total du crédit de 64368,10 euros.
Ils ont également passé commande le 27 mars 2014 auprès de la société France Énergie de la pose de 12 panneaux photovoltaïques et d’un onduleur, moyennant paiement de la somme de 22 900,00 euros financée par un prêt remboursable sur 14 ans souscrit auprès de la société Franfinance, pour un coût total du crédit de 36927,00 euros.
Par acte du 17 octobre 2017, les époux [X] ont fait assigner la société France Climat, la société Force Énergie, venant aux droits de la société France Énergie, la société Franfinance et la société Cetelem, venant aux droits de la société Sygma Banque, devant le tribunal d’instance de Pau aux fins de voir :
‘ prononcer la résolution des contrats principaux pour inexécution par France Climat et France Énergie de leurs obligations de conseil et de résultat ;
‘ prononcer la résolution consécutive des contrats de prêt et les dispenser de tout remboursement des prêts ;
‘ condamner la société Force Énergie à rembourser aux organismes de prêt, les sociétés Franfinance et Cetelem, les sommes résultant de la résolution des contrats de prêt ;
‘ fixer à ce montant leur créance à l’encontre de la société France Climat, société en liquidation judiciaire ;
‘ condamner les organismes de prêt à leur rembourser les mensualités perçues ;
‘ condamner la société Force Énergie à leur payer la somme de 15 000,00 euros de dommages et intérêts et fixer à ce montant la créance de dommages et intérêts qui leur est due par la société France climat ;
‘ prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
La procédure a été enrôlée sous le numéro 11/17-733.
Les sociétés France Climat et Force Energie n’ont pas comparu.
Par acte du 28 mai 2018, les époux [X] ont fait assigner la société BNP, venant aux droits de la société Cetelem, venant elle-même aux droits de la société Sygma Banque, devant le tribunal d’instance de Pau pour les mêmes causes.
Cette seconde procédure a été enrôlée sous le numéro 11/18-412.
Les deux procédures ont été jointes.
Par jugement réputé contradictoire du 16 mai 2019, le tribunal d’instance de Pau a :
‘ prononcé la résolution du contrat de vente en date du 11 mars 2014 conclu entre la société France Climat et les époux [X] ;
‘ prononcé la résolution du contrat de vente en date du 27 mars 2014 conclu entre la société France Énergie et les époux [X] ;
‘ prononcé la résolution consécutive du contrat de prêt souscrit le 11 mars 2014 par les époux [X] auprès de la société Sygma Banque ;
‘ prononcé la résolution consécutive du contrat de prêt souscrit le 27 mars 2014 par les époux [X] auprès de la société Franfinance ;
‘ dit que la société Sygma Banque a commis une faute la privant de son droit à restitution du capital prêté ;
‘ dit que la société Franfinance a commis une faute la privant de son droit à restitution du capital prêté ;
‘ condamné la société BNP Paribas Personal Finance (venant aux droits de la société Sygma Banque) à rembourser aux époux [X] les mensualités perçues au titre du contrat de crédit ;
‘ condamné la société Franfinance à rembourser aux époux [X] les mensualités perçues au titre du contrat de crédit ;
‘ condamné la société Force Énergie à rembourser à la société Franfinance le capital qu’elle a perçu soit la somme de 22 900 euros ;
‘ fixé la créance de la SA BNP Paribas Personal Finance au passif de la liquidation judiciaire de la société France Climat à la somme de 42 900 euros correspondant au capital perçu ;
‘ fixé la créance des époux [X] au passif de la liquidation judiciaire de la société France Climat à la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
‘ condamné la société Force Énergie à payer aux époux [X] la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts ;
‘ condamné solidairement la SA BNP Paribas Personal Finance, la société Franfinance, la société Force Énergie et Me Claus ès-qualité de mandataire liquidateur de la société France Climat à payer aux époux [X] la somme de 1200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
‘ dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration en date du 22 juillet 2019, la SA Franfinance a relevé appel de ce jugement.
Une ordonnance de clôture est intervenue le 30 juin 2021.
Par arrêt avant-dire droit du 25 octobre 2021, la cour a rouvert les débats et invité les parties à formuler toute observation utile sur la fin de non-recevoir soulevée d’office par la cour, tirée de l’indivisibilité du litige entre la société Franfinance, les époux [X] et la société France Energie.
A la suite de cette décision et par déclaration d’appel du 24 novembre 2021, la SA Franfinance a intimé la SARL Force Energie et la SELARL De Bois-Herbaut, en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL Force Energie.
La SA Franfinance a signifié cette déclaration d’appel et ses conclusions à la SELARL De Bois Herbaut, ès qualités, par assignation délivrée à personne morale le 15 mars 2022 et à la SARL Force Energie, le même jour, par assignation transformée en procès-verbal de tentative de signification.
Par ordonnance du 10 novembre 2022, du magistrat de la mise en état de la 2ème chambre section 1, cet appel enregistré sous le numéro RG 21/03762 a été joint à l’appel principal enregistré sous le numéro RG 19/2446.
L’affaire a été de nouveau appelée à l’audience du 8 décembre 2022.
Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l’espèce des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour entend se référer pour l’exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Vu les conclusions notifiées le 17 février 2022 par la société SA Franfinance qui demande de :
Vu le jugement rendu par le Tribunal d’instance de Pau en date du 16 mai 2019,
Réformer le jugement du Tribunal en ce qu’il a :
‘ prononcé la résolution du contrat de vente en date du 27 mars 2014 conclu entre la société France Énergie et les époux [X],
‘ prononcé la résolution consécutive du contrat de prêt souscrit le 27 mars 2014 par les époux [X] auprès de la société Franfinance,
‘ dit que la société Franfinance a commis une faute la privant de son droit à restitution du capital prêté,
‘ condamné Franfinance à rembourser aux époux [X] les mensualités perçues au titre du contrat de crédit,
‘ condamné solidairement Franfinance à payer aux époux [X] la somme de 1200 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
Débouter les époux [X] de leur demande relative à la résolution du contrat de vente et du contrat de crédit souscrit auprès de la S.A Franfinance ;
Si par extraordinaire, la Cour faisait droit à la demande de résolution des contrats de Monsieur et Madame [X],
Dire et juger que la société Franfinance n’a commis aucune faute de nature à la priver de son droit à restitution du capital prêté par les époux [X] ;
Condamner les époux [X] à restituer à Franfinance le capital prêté, déduction faite des échéances versées.
En tout état de cause,
Débouter les époux [X] de toutes leurs demandes, fins et conclusions à l’encontre de la SA Franfinance.
Condamner les époux [X] à payer à la S.A Franfinance la somme de 1 500,00 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de
Procédure Civile.
Condamner les époux [X] aux entiers dépens de l’instance d’appel.
*
Vu les conclusions notifiées le 12 octobre 2022 par les époux [X] qui demandent de :
Déclarer irrecevable et en toute hypothèse infondée Franfinance en son appel,
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,
Y ajoutant,
Condamner Franfinance à payer aux concluants 5000 € de dommages-intérêts pour le préjudice matériel causé, outre 3000 € complémentaire pour frais irrépétibles d’appel ;
La condamner aux dépens.
MOTIVATION :
Sur la procédure :
La société Force Energie n’ayant pas été touchée par la signification de la déclaration d’appel, l’arrêt sera rendu par défaut.
La demande de jonction entre l’appel principal et l’appel provoqué dirigé contre la société Force Energie et son liquidateur, la SELARL De Bois Herbaut, est devenue sans objet, cette jonction ayant été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état.
Sur la recevabilité de l’appel de la société Franfinance :
Il résulte des articles 552 et 553 du code de procédure civile, qu’en cas d’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties, l’appel dirigé contre l’une des parties réserve à l’appelant la faculté d’appeler les autres à l’instance, mais l’appel formé contre l’une n’est recevable que si toutes sont appelées à l’instance. Par conséquent, l’appel étant, en application de l’article 900 du même code, formé par déclaration unilatérale ou requête conjointe, les parties que l’appelant a omis d’intimer sont appelées à l’instance par voie de déclaration d’appel.
Ainsi, la seconde déclaration d’appel formée par l’appelant pour appeler à la cause la partie omise dans la première déclaration d’appel régularise l’appel, sans créer une nouvelle instance, laquelle demeure unique.(2e Civ., 19 novembre 2020, pourvoi n° 19-16.009).
Dès lors que l’appelant interjette appel contre une partie dans les délais légaux, il est recevable à le faire, par déclaration séparée, à l’égard d’autres parties indivisibles, même après l’expiration des délais, mais avant que le juge ne statue, l’instance devant toujours être en cours ( Com., 5 décembre 2018, pourvoi n° 17-22.350 ; 2e Civ., 10 janvier 2019, pourvoi n° 17-27.060).
La cour a jugé que le litige était indivisible entre les époux [X] et la société Force Energie, l’appel pouvant aboutir à une contradiction de décisions en cas de succès des prétentions de la société Franfinance, au regard des condamnations prononcées contre la société Force Energie en première instance et non déférées à la cour.
La société Franfinance a depuis intimé la société Force Energie et son liquidateur judiciaire, la SELARL De Bois Herbaut, avant que la cour ne statue.
L’appel de la société Franfinance est en conséquence recevable.
Sur la résolution du contrat de vente passé avec la SARL Force Energie :
La société Franfinance conclut à l’infirmation du jugement sur la résolution du contrat de vente passé avec la société Force Energie et sur la résolution subséquente du contrat de crédit affecté, au motif que les époux [X] ont obtenu le raccordement de leur installation au réseau EDF (en réalité ERDF) et qu’au final leur principale difficulté résulte de ce que la rentabilité escomptée n’est pas atteinte, difficulté qui ne peut en aucune manière être imputée au prêteur.
Les époux [X] concluent au contraire à la confirmation du jugement sur ce point au premier motif que l’installation posée n’a pas été autorisée par la commune de [Localité 11], l’installateur ayant, par un subterfuge, déclaré une installation de panneaux au sol, alors que les panneaux photovoltaïques ont été installés en toiture, pour passer outre l’avis négatif de l’architecte des bâtiments de France. Ils précisent en effet que le règlement de la zone architecturale protégée dans laquelle se situe leur maison ne prévoit pas la possibilité d’installer des panneaux photovoltaïques en toiture ; que la société France Energie a d’abord déposé une déclaration de travaux pour pose en toiture qui a été frappée d’opposition par la commune, sur avis défavorable de l’architecte des bâtiments de France, puis une demande de permis de construire pour la construction d’un abri de jardin destiné à recevoir les panneaux photovoltaïques, également refusée, et enfin une seconde déclaration de travaux pour la pose de panneaux photovoltaïques au sol qui cette fois a été acceptée. Pour autant, les panneaux ont bien été installés en toiture, ce qui a conduit la mairie de [Localité 11] à demandé à la société France Energie de déposer une déclaration de travaux aux fins de régularisation. Compte tenu du retard de raccordement au réseau, ils ne bénéficient pas du tarif de rachat de 0,29 euro par kilowatt mais d’un tarif de 0,26 euro.
En second lieu, ils font valoir que l’installation, raccordée au réseau depuis mars 2015, ne produit pas autant d’énergie photovoltaïque que ce qui était annoncé par le vendeur, de sorte que la rentabilité annoncée ne sera jamais atteinte. Ils évaluent leur préjudice global à 81240,00 euros sur 20 ans, correspondant au différentiel entre la production vendue réalisée, telle qu’elle ressort des premières factures EDF, et la production vendue annoncée.
Ils ajoutent qu’ils n’ont pu obtenir le remboursement de la TVA.
En l’espèce, il ressort de la brochure remise aux acheteurs par la société France Energie que cette dernière mettait en avant, parmi les avantages d’une installation photovoltaïque, un contrat EDF garanti sur 20 ans, indexé à la hausse, et un rendement du capital investi de +/-10 %.
Or, il s’avère que le tarif de rachat d’électricité mentionné par le commercial de la société France Energie était de 0,29 euros, alors que le tarif qui figure sur les deux premières factures EDF est de 0,265 euros , inférieur par conséquent au tarif annoncé, vidant de tout contenu la promesse trompeuse d’un contrat de rachat d’électricité garanti sur 20 ans et indexé à la hausse.
Par ailleurs, sur les deux premières années d’exploitation de l’installation photovoltaïque, le chiffre d’affaires annuel moyen de la production électrique vendue à EDF a atteint le montant de 2724,00 euros, pour 36 panneaux en production, au lieu du montant de 4480 euros par an pour 24 panneaux annoncé par le commercial de la société France Energie, soit 2240,00 euros pour 12 panneaux.
Si l’ont ramène au nombre de panneaux financés par le crédit Franfinance le chiffre d’affaires moyen réalisé, on obtient un rendement annuel du capital investi qui peut être calculé ainsi :
2724,00 euros x 12/36 = 908 euros que divise le capital investi correspondant au coût total du crédit, que multiplie 100, soit 908/36927 euros x 100 = 2,45 soit un taux de rentabilité de l’investissement de 2,45%.
Il est ainsi manifeste que les promesses de stabilité tarifaire et de rentabilité du capital investi dans l’installation, formulées par la société France Energie dans sa brochure commerciale, ne sont pas tenues et ne le seront jamais compte tenu notamment de la faible variation marginale de la production vendue, d’une année sur l’autre, incompatible avec une progression qui permettrait d’atteindre le rendement de +/- 10 % annoncé.
La rentabilité de l’installation photovoltaïque étant entrée dans le champ de la négociation contractuelle, déterminant le consentement des époux [X], il apparaît ainsi que l’installation vendue n’est pas conforme à ce qui avait été annoncé par le vendeur et à ce qu’étaient en droit d’attendre les acquéreurs.
A ce premier motif de résolution du contrat de vente s’ajoute un second motif : les panneaux photovoltaïques ont été installés en toiture et l’installation est en conséquence non conforme à celle décrite dans la déclaration préalable de travaux, laquelle présentait les photographies prospectives d’une installation posée au sol. Cette non-conformité résulte par ailleurs d’une volonté délibérée du vendeur, qui avait reçu mandat des acheteurs pour accomplir notamment les démarches administratives de déclaration en mairie et qui s’est heurté à l’opposition de la commune de [Localité 11] pour une installation en toiture, compte tenu de l’avis défavorable de l’architecte des bâtiments de France.
Par ce subterfuge , la société Force Energie est ainsi parvenue à obtenir un arrêté de non-opposition à travaux, justifiant ainsi, auprès des acheteurs, d’une autorisation administrative qui ne pouvait couvrir la non-conformité de l’installation au regard du projet soumis à l’autorité publique.
Pour ces raisons le jugement est confirmé en ce qu’il a résolu le contrat de vente.
Aux termes de l’article L. 311-32 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date du contrat, devenu l’article L. 312-55 du même code, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui- même judiciairement résolu ou annulé.
Le jugement est ainsi confirmé sur la résolution du contrat de crédit affecté conclu avec Franfinance.
Sur la créance de restitution de la société Franfinance :
Franfinance conclut à l’infirmation du jugement en ce qu’elle a été condamnée à rembourser aux époux [X] les mensualités de remboursement du crédit, au motif qu’elle n’a commis aucune faute en lien avec le préjudice invoqué par les acquéreurs. Elle explique avoir libéré le capital emprunté, entre les mains du vendeur, au vu de l’attestation de fin de travaux et de l’autorisation en ce sens donnée par l’emprunteur.
Les époux [X] font valoir au contraire que la société Franfinance a commis une faute en libérant les fonds sans s’assurer au préalable de l’exécution totale du contrat principal. Ils ajoutent que l’attestation de livraison signée le 9 avril 2014 ne contient aucune précision, ni sur la nature des marchandises livrées ni sur les prestations réalisées et leur plein accomplissement.
Ils estiment que cette attestation était insuffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l’opération financée et ainsi permettre au prêteur de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal.
En droit, il résulte des articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2014-344 du 17 mars 2014 que la résolution ou l’annulation d’un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu’il finance, emporte pour l’emprunteur l’obligation de restituer au prêteur le capital prêté, mais que le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En l’espèce, la société Franfinance produit une attestation de fin de travaux en date du 9 avril 2014 signée par M [T] [X], par laquelle l’emprunteur confirme avoir obtenu et accepté sans réserve la livraison des marchandises, et constaté que tous les travaux et prestations qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisés.
Dans l’attestation de livraison signée le même jour, M [T] [X] certifie que l’achat objet du financement a bien été livré en parfait état conformément au bon de commande et que son installation n’appelle aucune restriction, ni réserve ( matériel installé).
Comme l’a retenu exactement le premier juge, cette attestation ne contient aucune précision relative à l’installation et aux prestations connexes accomplies, alors que les conditions générales de vente prévoyaient que les démarches administratives éventuelles seraient à la charge du vendeur. En outre, compte tenu de la brièveté du délai séparant l’offre préalable de crédit du 27 mars 2014, point de départ du délai de rétractation de 7 jours, et la date de livraison, la déclaration préalable de travaux ne pouvait avoir produit ses effets.
Or, la déclaration de travaux du 2 avril 2014, pour la pose de panneaux intégrés à la toiture a fait l’objet d’une opposition de la commune en date du 12 mai 2014, et la déclaration de travaux pour une installation au sol, a été déposée le 27 octobre 2014 et a donné lieu à une décision administrative tacite de non- opposition à travaux deux mois après son dépôt.
L’impossibilité matérielle d’obtenir une décision de non-opposition à travaux, entre la date du bon de commande et la date de livraison de l’installation devait nécessairement conduire la société Franfinance à opérer les vérifications qui s’imposaient auprès de l’acheteur-emprunteur et du vendeur, pour s’assurer qu’en connaissance de cause les époux [X] l’autorisaient à libérer les fonds entre les mains de la société Force Energie, bien que l’installation ne soit encore ni autorisée ni, a fortiori, raccordée au réseau ERDF.
La société Franfinance a donc commis une faute.
Toutefois, il apparaît que le préjudice économique invoqué par les époux [X] est sans lien de causalité avec la faute du prêteur qui n’était pas tenu d’une obligation de conseil, vis-à-vis des emprunteurs, quant à la rentabilité économique du projet financé, le décalage entre la rentabilité annoncée et la rentabilité réelle de l’investissement n’étant, au demeurant, pas mesurable avant le terme de la première année d’ exploitation.
Ainsi et même si le prêteur avait attendu la signature du contrat de rachat d’électricité pour débloquer les fonds, il n’aurait pu prévenir le préjudice économique subi par les acquéreurs.
Quant à la non-conformité de l’installation réalisée au regard de la décision administrative de non-opposition à travaux, la justification du dépôt de la déclaration préalable de travaux n’aurait pas permis au prêteur d’empêcher la non- conformité de l’installation réalisée au regard des règles d’urbanisme.
En effet, la société Franfinance, en sa qualité de prêteur, n’était pas tenue d’une obligation de conseil ou de vérification de la conformité de l’installation photovoltaïque projetée, au règlement de la zone architecturale protégée de [Localité 11] ou à la déclaration préalable de travaux déposée en mairie, comme le serait un maître d »uvre ou un constructeur.
En outre, les époux [X] ne démontrent pas que cette non-conformité n’a pu être régularisée par une déclaration de travaux modificative ni qu’elle implique le démontage de l’installation.
Dans ces conditions, les intimés ne justifient d’aucun préjudice en lien avec la faute du prêteur et doivent être déboutés de leurs demandes tendant à voir priver la société Franfinance de son droit à restitution du capital prêté, et à la voir condamnée à rembourser aux époux [X] les mensualités perçues au titre du remboursement du crédit.
Le jugement est infirmé en ce sens.
Au regard de l’issue du litige les époux [X] sont déboutés de leur demande de condamnation de la société Franfinance au paiement de 5000,00 euros, à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel lié à la poursuite du remboursement du crédit, en raison de l’appel interjeté.
Les époux [X] seront condamnés aux dépens d’appel.
L’équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, à hauteur d’appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, par défaut et en dernier ressort,
Déclare recevable l’appel de la société Franfinance
Infirme le le jugement déféré en ce qu’il a :
‘ dit que la société Franfinance a commis une faute la privant de son droit à restitution du capital prêté,
‘ condamné la société Franfinance à rembourser aux époux [X] les mensualités perçues au titre du contrat de crédit,
Statuant à nouveau de ces chefs,
Déboute les époux [X] de leur demande tendant à priver la société Franfinance de son droit à restitution du capital emprunté,
Les condamne à payer à la société Franfinance la somme de 22900,00 euros, montant du capital emprunté, sous déduction des mensualités de remboursement déjà versées,
Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions, dans les limites de l’appel,
Y ajoutant déboute les époux [X] de leur demande de dommages et intérêts contre la société Franfinance,
Condamne les époux [X] aux dépens d’appel,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile .
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Marc MAGNON, Conseiller, suite à l’empêchement de Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière Le Président