Conditions Générales de Vente : 2 février 2023 Cour d’appel de Caen RG n° 21/01487

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Conditions Générales de Vente : 2 février 2023 Cour d’appel de Caen RG n° 21/01487
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AFFAIRE : N° RG 21/01487 –

N° Portalis DBVC-V-B7F-GYI4

 

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DECISION du Juge des contentieux de la protection de CHERBOURG OCTEVILLE

en date du 15 Avril 2021 – RG n° 20/000160

COUR D’APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 02 FEVRIER 2023

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

N° SIRET : 542 097 902

[Adresse 1]

[Localité 5]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me France LEVASSEUR, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Aurélie DEGLANE, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

INTIMES :

Madame [R] [P] épouse [H]

née le 14 Août 1960 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Monsieur [Y] [H]

né le 15 Mars 1959 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentés par Me Jonathan MINET, avocat au barreau de CAEN,

assistés de Me Samuel HABIB, avocat au barreau de PARIS

INTERVENANTS :

S.E.L.A.R.L. BALLY M.J. liquidateur de la société NOUVELLE REGIE DES ENERGIES DE FRANCE, à l’enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE

[Adresse 4]

[Localité 6]

prise en la personne de son représentant légal

non représentée, bien que régulièrement assignée

DEBATS : A l’audience publique du 14 novembre 2022, sans opposition du ou des avocats, Madame EMILY, Président de Chambre, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme FLEURY, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

ARRÊT prononcé publiquement le 02 février 2023 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

* * *

Après démarchage, le 5 mars 2013, [Y] [H] et [R] [P] épouse [H] ont contracté auprès de la société sas Nouvelle régie des jonctions des énergies de France, intervenant sous l’enseigne commerciale Groupe solaire de France (ci-après dénommée “Groupe solaire de France”) une prestation de fourniture et d’installation d’une centrale photovoltaïque pour un montant ttc de 20.900 euros.

Suivant offre préalable régularisée le même jour, la société banque Solfea a consenti aux époux [H] un crédit affecté à la réalisation d’une prestation de fourniture et d’installation de panneaux photovoltaïques, d’un montant de 20.900 euros pour une durée de 143 mensualités et remboursable en 132 mensualités de 222 euros, précédées d’un différé de paiement de 11 mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 5,37 % et au taux annuel effectif global de 5,50 %.

Il est constant que la centrale photovoltaïque a été installée le 18 mars 2013.

Le 19 mars 2013, le Groupe solaire de France, a facturé sa prestation aux époux [H] pour un montant total de 20.900 euros , comprenant la fourniture du matériel et la pose de ce dernier (pour un montant de 2.242,99 euros ht).

Selon courrièr de la société Electricite de France (ci-après dénommée “EDF”) à M. [H], du 16juillet 2013, la mise en service de l’installation photovoltaïque a été effectuée le 9 juillet 2013

Le 4 mai 2014, les époux [H] et la société EDF ont signé un contrat d’achat annuel de l’énergie électrique produite par les panneaux photovoltaïques précités.

Selon factures établies le 8juillet 2014, le 8juillet 2015, le 8juillet 2016 et le 8 juillet 2017, les époux [H] ont vendu l’électricité produite par leurs panneaux photovoltaïques aux montants respectifs de 896,33euros, 905,59 euros, 796,34euros et 894,15 euros.

Par actes d’huissier en date du 2 mars 2018, les époux [H] ont fait assigner le Groupe solaire de France pris en la personne de la SELARL Bally M.J., ès qualités de mandataire liquidateur de ce dernier, et la société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société Banque Solfea, devant le tribunal d’instance de Cherbourg-en-Cotentin aux fins de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.

Par jugement en date du 15 avril 2021, le tribunal judiciaire de Cherbourg-en-Cotentin a :

– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 05 mars 2013 ;

– constaté la nullité de plein droit du contrat de prêt affecté ;

– condamné la société BNP Paribas Personal Finance à restituer à M. et Mme [H] la moitié des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 5 mars 201 3, soit la somme de 8.840 euros au titre des sommes versées jusqu’au mois de novembre 2020 inclus ;

– débouté M. et Mme [H] de leur demande de remise en état antérieur à l’encontre de la SA BNP Paribas Personal Finance ;

– débouté M. et Mme [H] de leur demande d’indemnisation d’un préjudice financier et d’un trouble de jouissance ;

– Condamné la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M. et Mme [H] la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts :

– débouté la société BNP Paribas Personal Finance venant de sa demande tendant au remboursement du capital prêté ;

– débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

– condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens et à payer à M. et Mme [H] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 31 mai 2021, la société BNP Paribas a fait appel du jugemennt.

Dans ses dernières conclusions du 2 novembre 2021, elle demande à la cour de :

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté les époux [H] de leur demande de remise en état antérieur et de leur demande d’indemnisation d’un préjudice financier et d’un trouble de jouissance et de l’infirmer pour le surplus.

Statuant à nouveau sur les chefs réformés ;

A titre principal,

– juger irrecevables les demandes de M. et Mme [H] faute de déclaration de créance et les débouter de l’intégralité de leurs demandes ;

A titre subsidiaire,

– juger n’y avoir lieu à nullité du contrat principal et du contrat de crédit et débouter M. et Mme [H] de l’intégralité de leurs demandes ;

À titre plus subsidiaire, en cas de nullité des contrats,

– juger qu’aucune faute n’a été commise dans le déblocage des fonds, que les époux [H] ne justifient d’aucun préjudice certain, direct et personnelqui résulterait d’une éventuelle faute du prêteur, et condamner solidairement M. et Mme [H] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 20.900 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt, au titre de l’obligation pour les emprunteurs de restituer capital prêté déduction faite des remboursements effectués,

A titre encore plus subsidiaire, en cas de faute du prêteur et de préjudice des emprunteurs ;

– condamner solidairement M. et Mme [H] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 20.900 euros au titre de l’obligation pour les emprunteurs de restituer le capital prêté déduction faite des remboursements effectués avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt,

– juger que le préjudice subi par M. et Mme [H] s’analyse comme une perte de chance de ne pas contracter, dont la probabilité est de l’ordre de 5%, soit la somme maximum de 1.000 euros ;

– ordonner la compensation entre les sommes mises à la charge dechacune des parties ;

A titre infiniment subsidiaire,

– fixer la créance de la société BNP Paribas Personal Finance à la procédure collective de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France à la somme de 20.900 euros correspondant au capital emprunté ;

En toutes hypothèses,

– débouter les époux [H] de l’intégralité de leurs demandes ;

– juger que les éventuelles condamnations prononcées le seront en deniers et quittances ;

– à titre principal condamner solidairement M. et Mme [H] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 3.600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d’appel et les entiers dépens de première instance et d’appel et à titre subsidiaire, fixer la créance de la société BNP Paribas Personal Finance pour la somme de 3.600 euros à la liquidation judiciaire de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d’appel et les entiers dépens depremière instance et d’appel.

Dans leurs dernières conclusions du 19 septembre 2022, les époux [H] demandent à la cour de :

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente et du contrat de prêt affecté, condamné la société BNP Paribas à leur payer la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts, débouté la société BNP Paribas de sa demande de remboursement du capital prêté, condamné la société BNP Paribas au paiement d’une somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens ;

– infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau ;

– juger leurs demandes recevables et bien fondées ;

– débouter la société BNP Paribas de l’intégralité de ses demandes ;

– ordonner le remboursement par la société BNP Paribas des sommes qui lui ont été versées au jour de l’arrêt à intervenir ;

A titre subsidiaire,

– condamner la société BNP Paribas à payer à M. et Mme [H] la somme de 11.450 euros, à titre de dommage et intérêts, du fait de la négligence fautive de la banque ;

– prononcer la déchéance du droit de la banque aux intérêts du crédit affecté ;

En tout etat de cause,

– condamner la société BNP Paribas à verser à M. et Mme [H] la somme de :

– 3.000 euros au titre de leur préjudice financier et du trouble de jouissance,

– 4.191 euros au titre du devis de désinstallation ;

– condamner la société BNP Paribas à payer à M. et Mme [H] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’au paiement des entiers dépens ;

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, la cour venait à infirmer le jugement de première instance et déboutait M. et Mme [H] de l’intégralité de leurs demandes, dire et juger que ceux-ci reprendront le paiement mensuel des échéances du prêt aux conditions identiques à celles fixées par le tableau d’amortissement, soit à hauteur de 221 euros par mois, jusqu’à apurement de la dette et sans préjudice tiré de l’exécution provisoire de la décision de première instance.

la SELARL Bally M.J, liquidateur de la société Nouvelle régie des énergies de France, n’a pas constitué avocat, la déclaration d’appel et les conclusions de l’appelante lui ayant été signifiées par acte d’huissier du 5 juillet 2021 remis à personne habilitée.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 october 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

SUR CE, LA COUR

A titre préliminaire, il sera relevé que les demandes de dire et juger ne sont pas des prétentions sur lesquelles il y a lieu de statuer.

Sur la recevabilité des demandes des époux [H]

La société BNP Paribas soulève l’irrecevabilité des demandes des époux [H] au motif que ceux-ci n’ont pas déclaré de créance à la liquidation judiciaire de la société Groupe solaire de France.

Les époux [H] soutiennent que leur action est recevable puisqu’ils ne forment aucune demande en paiement à l’encontre de la société Groupe solaire de France.

Selon l’article L622-21 I du code de commerce, Le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L. 622-17 et tendant :

1° A la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ;

2° A la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

En l’espèce, les emprunteurs fondent leur demande d’annulation du contrat de vente sur la violation des dispositions de l’article 121-3 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, et sur les vices du consentement, sans demander de condamnation du vendeur au paiement d’une somme d’argent, ni invoquer le défaut de paiement d’une telle somme, ni réclamer le prix de vente.

Leurs demandes ne se heurtent donc pas au principe de l’interdiction des poursuites et sont recevables.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

sur la nullité pour non respect des mentions obligatoires

La vente a été conclue en l’espèce dans le cadre d’un démarchage à domicile.

L’article L 121-23 ancien du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, dispose que ‘les opérations visées à l’article L. 121-21 (relatif au démarchage à domicile) doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d’exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l’intérêt et le taux effectif global de l’intérêt déterminé dans les conditions prévues à l’article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l’article L. 121-25, ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26.’

Les époux [H] fournissent un original du bon de commande qu’ils ont signé.

La société BNP Paribas fournit une photocopie du bon de commande contenant plus de mentions que l’exemplaire fourni par les intimés.

Comme l’a relevé le premier juge, seul l’original du bon de commande peut être pris en compte, aucun élément ne permettant de déterminer les circonstances dans lequelles les rajouts ont été faits.

Le bon de commande indique le nom du démarcheur et celui de Groupe solaire de France, l’adresse du siège, l’adresse internet , un numéro vert, le numéro RCS.

Il n’y a pas ainsi de difficulté sur l’identité du vendeur et ses coordonnées.

Les intimés ne reprennent d’ailleurs pas ce point dans leurs dernières conclusions.

Le bon de commande précise l’achat d’une centrale photovoltaïque de 3000 WC sans plus de précision. La marque du matériel n’est pas précisée, pas plus que le modèle ou le nombre de panneaux. Ces éléments sont essentiels pour opérer un choix s’agissant de matériel de haute technologie.

Une plaquette publicitaire ne peut suppléer les carences du bon de commande.

Concernant les conditions d’exécution du contrat à savoir les modalités et le délai de livraison ou l’exécution de la prestation, les conditions générales, intégrées au bon de commande, font état d’une livraison au domicile de l’acheteur dans un délai de 3 mois suivant la commande.

Aucune indication n’est toutefois donnée sur la durée des travaux et leur modalité d’exécution, ce qui constitue également une irrégularité.

Il est mentionné un montant total de financement de 20 900 euros sans indication du nombre de mensualités, du montant de la mensualité sans assurance, avec assurance, du TEG, du taux nominal. Toutefois, ces informations étaient parfaitement connues des époux [H] qui ont signé le même jour le contrat de crédit affecté.

Par ailleurs, il n’est pas exigé une ventilation entre le prix du matériel et celui de la main d’oeuvre.

Le bon de commande contient bien un bordereau de rétractation qui contrairement à ce qui est soutenu par les intimés peut être détaché sans amputer aucune partie fondamentale du contrat.

Par ailleurs, aucun article 4 des conditions générales de vente ne stipule qu’une fois la livraison effectuée, le chantier de pose achevé et après l’attestation de satisfaction relative aux travaux finis, le contrat est ferme et définitif.

Cette clause ne serait en toute hypothèse pas en contradiction avec le bordereau de rétractation puisque les travaux ne peuvent débuter qu’une fois le délai de rétractation passé.

Le questionnement des époux [H] sur la durée de la garantie n’est pas un motif d’annulation du contrat.

Les omissions retenues, à savoir l’absence de désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens vendus et l’absence de précision sur les conditions d’exécution du contrat, ne permettent pas au consommateur de comparer diverses offres, ni de s’engager en toute connaissance de cause puisqu’il ne dispose pas de toutes les informations.

La nullité du contrat de vente doit donc être confirmée, s’agissant d’une nullité d’ordre public prévue par le code de la consommation.

La nullité qui sanctionne ces irrégularités constitue cependant une nullité relative et, conformément aux dispositions de l’article 1338 ancien du code civil, à défaut d’acte de confirmation ou ratification, l’exécution volontaire du contrat entaché de nullité après l’époque à laquelle l’obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée emporte renonciation aux exceptions de nullité.

En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que :

– les consorts [H] ont pris connaissance des articles L 121-23 à L 121-26 du code de la consommation figurant de manière claire et apparente au verso du bon de commande ;

– ils ne pouvaient ignorer que ni la marque des biens vendus, ni le modèle ou le nombre de panneaux, ni les modalités d’exécution du contrat n’étaient renseignés sur le bon de commande ;

– néanmoins, ils ont signé le 18 mars 2013, l’attestation de fin de travaux, pris possession de l’installation, conclu un contrat de rachat d’énergie avec EDF , reçu paiement pour l’électricité produite et procédé au paiement des échéances du crédit.

Ces éléments suffisent à caractériser qu’ils ont, en pleine connaissance de cause des irrégularités affectant le bon de commande, entendu renoncer à la nullité du contrat en résultant et manifesté de ce fait une volonté expresse et non équivoque de couvrir ces irrégularités.

Il n’y a donc pas lieu à annulation du contrat principal de vente pour non respect de l’article L 121-23 ancien du code de la consommation.

Le jugement sera infirmé.

Sur les vices du consentement

Les époux [H] soutiennent par ailleurs avoir été trompés par des manoeuvres dolosives consistant à faire état de partenariats mensongers avec EDF ou GDF-SUEZ, à faire une présentation fallacieuse de la rentabilité de l’installation, à entretenir une confusion sur le caractère définitif du contrat et à ne pas donner d’information sur les modalités de financement du matériel acheté.

La société Sogelease fait valoir que les éléments constitutifs du dol ne sont pas justifiés, que le bon de commande ne fait pas état d’une promesse d’autofinancement, que les allégations sur le partenariat ne sont pas étayées, que le bon de commande précisait l’engagement des acheteurs.

Selon l’article 1116 ancien du code civil, dans sa version applicable à la cause, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.

Il ne se présume pas et doit être prouvé.

La charge de la preuve de manoeuvres dolosives de nature à vicier leur consentement pèse sur M. et Mme [H].

Il ne résulte d’aucune pièce contractuelle ni précontractuelle que la société Groupe solaire de France se serait engagée contractuellement sur la rentabilité de l’opération dont les bénéfices auraient permis de couvrir les mensualités du prêt.

Il n’est fait mention d’aucune aide de la région.

Il est effectivement fait état d’une garantie de rendement à hauteur de 90% pendant 25 ans. Il n’est pas démontré le caractère mensonger de cette mention qui concerne la production énergétique des panneaux installés et leur bon fonctionnement sur cette durée.

Le mail du 14 mars 2013 émanant de la société Groupe solaire de France fait état d’un report de 11 mois du remboursement du crédit et indique que cela permet d’amorcer une trésorerie en vendant l’électricité à EDF sans rembourser le crédit.

Il est fait état d’une production d’énergie verte. Ces assertions n’apparaissent pas mensongères ni trompeuses.

Les époux [H] indiquent qu’aucun accord n’a été demandé aux organismes publics concernés quant à la mise en place d’un programme dans le cadre du Grenelle de l’environnement. Ils ne s’expliquent pas sur le contenu de la tromperie qu’ils auraient subie puisqu’il est constant qu’ils ont pu vendre leur électricité sans qu’ils invoquent de difficultés sur ce point.

Sur l’aide à l’installation de 1000 euros, il n’est pas établi qu’elle était mensongère, les époux [H] ne s’expliquant pas sur la nature de cette aide.

La plaquette commerciale invoquée, mentionnant ‘Un système d’autofinancement’ pensé avec la banque Soléa pour aider à financer et à amortir le projet sans que cela ne se ressente sur le budget au quotidien, n’a pas de valeur contractuelle, et de toute façon ne contient pas d’engagement sur un résultat absolu et certain. Il est en effet précisé dans cette plaquette que le revenu généré par les panneaux photovoltaïques dépend de la région, du nombre de panneaux installés et de leur puissance.

Il n’est ainsi pas établi que le vendeur aurait donné aux acquéreurs des renseignements erronés et faux relatifs au rendement de l’installation de nature à vicier leur consentement.

De même, l’omission de certaines mentions obligatoires sur le bon de commande, relevée plus haut, ne suffit pas à caratériser l’intention de tromper.

Quant au logo ‘ Partenaire GDF SUEZ Dolce Vita’ inscrit sur le bon de commande, il peut être de nature à induire en erreur puisque ce partenariat n’est pas démontré et que si des professionnels exerçant cette activité peuvent être partenaires, c’est seulement au titre de leurs autres domaines de compétence.

Neanmoins, les époux [H] ne prouvent pas que ce logo GDF SUEZ a été déterminant de leur consentement et que sans sa mention ils n’auraient jamais contracté.

Par ailleurs, le caractère définitif du contrat après l’écoulement du délai de rétractation et l’octroi du crédit était évident. Les conditions du crédit étaient connues des époux [H]. dès le 5 mars 2013.

Il en résulte que M. et Mme [H] échouent à rapporter la preuve d’un dol et que leur demande d’annulation du contrat sur ce fondement doit être rejetée.

Sur le contrat de crédit

Le contrat principal n’étant pas nul, il ne peut y avoir de nullité subséquente et automatique du contrat de crédit.

Les époux [H] font par ailleurs valoir que le contrat de crédit est nul sur le fondement de l’article L311-13 du code de la consommation, l’établissement de crédit devant faire connaître de manière expresse sa décision d’accorder le crédit dans un délai de 7 jours à compter de l’acceptation de son offre et la demande de crédit est réputée refusée si, à l’expiration du délai de 7 jours, aucune décision du prêteur n’est parvenue à l’emprunteur.

L’article L311-13 ancien du code de la consommation, applicable à la cause, énonce que le contrat accepté par l’emprunteur ne devient parfait qu’à la double condition que ledit emprunteur n’ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l’emprunteur sa décision d’accorder le crédit, dans un délai de sept jours. L’agrément de la personne de l’emprunteur est réputé refusé si, à l’expiration de ce délai, la décision d’accorder le crédit n’a pas été portée à la connaissance de l’intéressé. L’agrément de la personne de l’emprunteur parvenu à sa connaissance après l’expiration de ce délai reste néanmoins valable si celui-ci entend toujours bénéficier du crédit. La mise à disposition des fonds au-delà du délai de sept jours mentionné à l’article L. 311-14 vaut agrément de l’emprunteur par le prêteur.

L’offre de crédit a été signée le 5 mars 2013 et les fonds ont été mis à disposition au-delà du délai de 7 jours, l’information de l’acceptation de la banque ayant été reçue le 14 mars 2013.

Cette mise à disposition des fonds après le délai de 7 jours vaut agrément de l’emprunteur par le prêteur.

Il s’ensuit que le contrat a été vablement formé et qu’aucune nullité n’est encourue de ce chef.

Sur la faute de la banque

Les intimés font valoir que la banque a commis une faute :

– en ayant octroyé un crédit accessoire à un contrat nul,

– en participant au dol du vendeur,

– en délivrant les fonds sans vérifier que le vendeur avait exécuté son obligation,

– en ne vérifiant pas leur solvabilité,

– en ne leur précisant pas le coût total du crédit,

– en ne justifiant pas que la société Groupe solaire de France, en sa qualité de prescripteur de crédit, est régulièrement répertoriée et remplit ses obligations de formation.

Les fautes invoquées liées à l’octroi d’un crédit accessoire d’un contrat principal nul, ne seront pas examinées, le contrat principal n’étant pas annulé.

S’il est exact que la BNP Paribas personal finance était tenue de vérifier la régularité du bon de commande et qu’elle n’a pas relevé les causes de nullité l’affectant, les appelants ont renoncé à se prévaloir des irrégularités en poursuivant l’exécution volontaire du contrat de vente, ainsi qu’il a été retenu plus haut.

Il n’existe donc pas de préjudice en lien avec la négligence de l’organisme financier.

Par ailleurs, il n’a pas été retenu l’existence de manoeuvres frauduleuses de la part du vendeur.

Ces moyens seront donc écartés.

La banque, qui n’était pas contractuellement tenue de s’assurer de la mise en service de l’installation, a libéré les fonds au vu de l’attestation de fin de travaux signé par M. et Mme [H] le 18 mars 2013, aux termes de laquelle il était attesté que les travaux, objets du financement, étaient terminés et conformes au devis et demandé le paiement de la somme empruntée.

Ce document permettait au prêteur de s’assurer que la société venderesse avait pleinement exécuté ses obligations telles que prévues au contrat principal.

il convient de rappeler que les travaux ont été exécutés et réceptionnés . L’installation fonctionne. Il n’est aucunement justifié d’un refus des travaux par l’autorité administrative.

Il ne peut donc être reproché de faute à la banque de ce chef.

Il est justifié que le crédit a été accordé après que les époux [H] ont rempli une fiche de solvabilité dans laquelle ils indiquent être mariés, avoir un enfant, être propriétaires de leur logement, percevoir des revenus d’un montant de 3555 euros par mois et rembourser deux crédits à la consommation à savoir 270 euros par mois jusqu’en 2016 et 149 euros jusqu’en 2015.

Ils ont signé cette fiche et fourni des documents justificatifs.

Il n’apparaît pas que le montant de remboursement de 221 euros par mois était excessif et les échéances ont été payées.

La banque a donc bien vérifié la solvabilité des emprunteurs et aucune faute n’est caractérisée, les époux [H] ne rapportant pas la preuve, qui leur incombe, de l’inappropriété du crédit à leur situation financière.

Il est également reproché à la banque de ne pas avoir mentionné dans l’offre de crédit le coût total du crédit et les intimés demandent que la faute de celle-ci soit retenue ou à titre subsidiaire la déchéance du droit aux intérêts.

Il résulte des articlesL311-18, R 311-5 et L 311-48 anciens du code de la consommation, applicables à la cause, que l’offre de prêt doit mentionner le montant total du crédit, la sanction étant la déchéance du droit aux intérêts.

En l’espèce, il y a lieu de constater que l’offre de prêt ne précise pas le coût total du crédit, la case de l’encadré inséré au début du contrat intitulée ‘ montant total dû’ n’étant pas remplie.

Dès lors, il sera fait droit à la demande de déchéance du droit aux intérêts.

Les intimés prétendent encore que la société BNP Paribas Personal Finance a violé la disposition de l’article L 311-8 du code d ela consommation qui instaure une obligation de formation des personnels des prêteurs et des intermédiaires à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement ainsi que les dispositions de l’article L546-1 du code monétaire et financier qui oblige les intermédiaires en opération de banque à être immatriculés sur le registre unique prévu à l’article L512-1 du code des assurances.

A supposer ces manquement établis,la sanction ne ne peut être que la déchéance du droit aux intérêts qui a déjà été prononcée concernant le non respect de l’article L311-8 du code de la consommation.

Par ailleurs, les époux [H] ne rapportent pas la preuve du non-respect des dispositions de l’article L546-1 du code monétaire et financier par Groupe solaire de France.

Les époux [H] seront, au vu de ces éléments , déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

Le contrat principal n’étant pas annulé et aucune faute n’étant imputée à la banque, les demandes relatives aux frais de remise en état de la toiture, au préjudice financier, au trouble de jouissance et au préjudice moral seront rejetées

La banque ne formule de demande en paiement qu’à titre subsidiaire en cas de nullité des contrats.

Il sera donc jugé que la banque est déchue de son droit aux intérêts sur le prêt octroyé à M. et Mme [H] selon le contrat conclu le 5 mars 2013.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement relatives à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens seront infirmées.

L’équité commande de débouter les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [H], succombant pour l’essentiel de leurs demandes, sont condamnés in solidum aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire , mis à disposition au greffe ;

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a déclaré recevables les demandes présentées par M. et Mme [H], débouté M. et Mme [H] de leur demande de de remise en état et de leur demande d’indemnisation d’un préjudice financier et d’un trouble de jouissance ;

INFIRME le jugement déféré pour le surplus ;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées ;

DEBOUTE M. et Mme [H] de leur demande en annulation du contrat de vente et du contrat de crédit affecté ;

DEBOUTE M. et Mme [H] de leur demande de dommages et intérêts ;

DIT que la société BNP Paribas personal finance est déchue de son droit aux intérêts sur le prêt octroyé à M. et Mme [H] selon le contrat conclu le 5 mars 2013 ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. et Mme [H] aux dépens de première instance et d’appel ;

DEBOUTE les parties de leurs demandesplus amples ou contraires ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

N. LE GALL F. EMILY

 


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