Conditions Générales de Vente : 19 septembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/19332

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Conditions Générales de Vente : 19 septembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/19332

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Chambre commerciale internationale

POLE 5 – CHAMBRE 16

ARRET DU 19 SEPTEMBRE 2023

(n° 72 /2023 , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/19332 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGWMQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Novembre 2022 -Tribunal de Commerce de paris RG n° 2022000525

APPELANTE

Société BTL FRANCE

société à responsabilité limitée,immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 791 169 436,

ayant son siège social : [Adresse 1],

prise en la personne de ses représentants légaux,

Ayant pour avocat postulant : Me Vanessa MONEYRON, avocat au barreau de PARIS, toque : JD152

Ayant pour avocat plaidant : Me Virginie LOBO, avocat au barreau de VAL D’OISE, toque : 280

INTIMEES

Madame [G] [J]

née le 21 Juin 1953 à [Localité 4] (ALGERIE), de nationalité algérienne,

demeurant : [Adresse 2] (ALGERIE)

Ayant pour avocat postulant et plaidant : Me Marcin RADZIKOWSKI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1266

BTL ALGERIE

société à responsabilité limitée,

immatriculée sous le Numéro d’Identification Statistique (NIS) 001516099066768

ayant son siège social : [Adresse 3] (ALGERIE)

non constituée

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 04 Juillet 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Daniel BARLOW, Président de chambre

Mme Fabienne SCHALLER, Présidente de chambre

Mme Laure ALDEBERT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Najma EL FARISSI

ARRET :

– par défaut

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Daniel BARLOW, président de chambre et par Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* *

*

I/ FAITS ET PROCEDURE

1. La cour est saisie de l’appel interjeté par la société de droit français BTL France contre un jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 10 novembre 2022 dans un litige opposant cette société à Mme [G] [J], ressortissante algérienne exerçant la profession de médecin.

2. BTL France poursuit une activité de vente, de négoce et de commissionnement de matériel médical et esthétique. Elle a émis deux devis, datés des 11 et 25 décembre 2016, à l’intention du docteur [J], ayant pour objet la fourniture et la livraison d’équipements de médecine esthétique, pour un montant total de 27 534 552,28 dinars algériens (DZD).

3. Ces devis prévoient la livraison du matériel en Algérie, un « Paiement en DINARS ajusté au taux banquaire (sic) en vigueur lors du règlement » et un « Règlement à BTL FRANCE SARL ».

4. Le 8 mai 2017, Mme [J] a réglé à la société de droit algérien BTL Algérie la somme de 22 952 613,75 DZD, correspondant au montant du second devis établi par BTL France. BTL Algérie a délivré un bon de versement et a attesté la remise du chèque de banque.

5. Le matériel, qui devait être livré au moment du paiement, ne le fut que partiellement, le 19 juillet 2017, par BTL Algérie.

6. Estimant que BTL France avait manqué à ses engagements contractuels, du fait de ce retard, du caractère incomplet de la livraison, du non-respect des obligations de formation liées à la commande et de l’inefficacité du dispositif, Mme [J] a mis en demeure cette société, par courrier du 9 janvier 2019, de procéder à la reprise du matériel et à la restitution concomitante du prix perçu par BTL Algérie, et de lui octroyer une compensation financière.

7. Par lettre du 18 février 2019, BTL France a répondu qu’elle n’entendait pas donner une suite favorable à ces demandes, faisant valoir qu’elle n’avait jamais conclu de contrat avec Mme [J], le bon de livraison ayant été émis par BTL Algérie, bénéficiaire des paiements.

8. Par acte du 4 septembre 2019, Mme [J] a fait assigner BTL France devant le tribunal de commerce de Paris.

9. Le 18 décembre 2019, elle a fait assigner BTL France et BTL Algérie devant le tribunal de Dar el Beida (Algérie).

10. Par acte du 18 juin 2021, elle a fait assigner BTL Algérie en intervention forcée devant le tribunal de commerce de Paris.

11. Par jugement du 10 novembre 2021, la troisième chambre de ce tribunal a statué en ces termes :

Dit l’action de Mme [J] [G] de l’affaire RG 2021040375 recevable ;

Dit recevable mais mal fondée l’exception d’incompétence soulevée par la société SARL BTL France ;

Se déclare compétent ;

Joint les affaires n°RG 2019049496 et 2021040375 en la cause RG J2022000525 ;

Renvoie les parties à l’audience collégiale de la 3ème chambre du 7 décembre 2022 à 14 heures, pour communication des pièces et conclusions au fond des parties ;

Dit que le greffe procèdera à la notification de la présente décision par lettre recommandée avec accusé de réception adressée exclusivement aux parties ;

Dit qu’en application de l’article 84 du code de procédure civile, la voie de l’appel est ouverte contre la présente décision dans le délai de quinze jours à compter de ladite notification ;

Dit que chaque partie conservera à sa charge les frais irrépétibles qu’elle a engagés ;

Réserve les autres demandes ainsi que les dépens ;

12. La société BTL France a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 24 novembre 2022.

13. Par ordonnance sur requête du 2 décembre 2022, elle a été autorisée à assigner à jour fixe Mme [G] [J] et la SARL BTL Alger à l’audience de la chambre commerciale internationale de la cour d’appel de Paris du 14 février 2023, à 16 heures.

14. L’assignation consécutive à cette autorisation a été transmise aux autorités compétentes, à la demande de BTL France, le 14 décembre 2022.

15. Mme [J] a constitué avocat le 10 janvier 2023.

16. À l’issue de l’audience du 14 février 2023, l’affaire a été renvoyée à l’audience du 4 juillet 2023, dans l’attente d’un retour des autorités algériennes sur les suites de l’assignation délivrée à la société BTL Algérie, qui ne s’est pas constituée.

II/ PRETENTIONS DES PARTIES

17. Dans ses conclusions du 12 janvier 2023, BTL France demande à la cour, au visa des articles 1103, 1193, 1128, 1583 et 1199 du code civil, ainsi que l’article 100 du code de procédure civile, de bien vouloir :

– DECLARER la société BTL France recevable et bien fondée en son appel.

– INFIRMER le jugement rendu le 10 novembre 2022 par le tribunal de commerce de Paris en toutes ses dispositions.

Et statuant à nouveau :

– DECLARER l’incompétence du tribunal de commerce de Paris au profit du tribunal algérien.

– CONDAMNER Mme [G] [J] à payer à la société BTL France la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

– CONDAMNER Mme [G] [J] aux entiers dépens.

18. Dans ses conclusions du 3 juillet 2023, Mme [J] demande à la cour, au visa des articles 42, 100 et 1104 du code de procédure civile et de la jurisprudence citée, de bien couloir :

– DIRE ET JUGER recevable et bien fondée les demandes de Madame [G] [J] ;

– DÉBOUTER la société BTL FRANCE de l’intégralité de ses demandes en ce qu’elle est de mauvaise foi et mal fondée ;

– CONFIRMER le Jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 10 novembre 2022 en ce qu’il s’est déclaré compétent pour juger l’affaire.

– CONDAMNER solidairement, la société BTL FRANCE et la société BTL ALGERIE à payer à Mme [G] [J] la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– CONDAMNER solidairement, la société BTL FRANCE et la société BTL ALGERIE en tous les dépens.

III/ MOTIFS DE LA DECISION

19. La société BTL France conclut à l’incompétence du tribunal de commerce de Paris en faisant valoir que :

– Mme [J] a conclu un contrat de fourniture de matériel médical directement avec la société BTL Algérie comme en atteste (1) le chèque libellé en dinars algériens et encaissé par la société BTL Algérie, (2) le bon de livraison émis par la société BTL Algérie, (3) la facture de la transaction émise par la société BTL Algérie ;

– la prestation ayant été exécutée en Algérie par une société algérienne, les tribunaux algériens sont compétents pour statuer sur ce litige, ce dont Mme [J] était consciente puisqu’elle a également assigné les sociétés BTL France et BTL Algérie devant le tribunal de Dar el Beida (Algérie) le 18 décembre 2019 ;

– le principe d’autonomie de la personne morale ne permet pas à Mme [J] de réclamer à la société BTL France le remboursement de la somme perçue par la société BTL Algérie ;

– la clause de droit applicable et d’élection de for en faveur du droit français et du tribunal de commerce de Paris stipulée dans le devis du 25 décembre 2016 est inapplicable dès lors que ce devis n’a pas été suivi d’effets, la prestation ayant été exécutée par BTL Algérie ;

– la condition d’identité des parties prévue à l’article 100 du code de procédure civile fait défaut dans la mesure où, au départ, la société BTL Algérie n’était attraite que devant le tribunal algérien, les demandes de Mme [J] n’étant manifestement pas les mêmes dans les deux instances.

20. Mme [J] réplique que :

– les conditions générales de vente de la société BTL France contiennent une clause attributive de juridiction désignant le tribunal de commerce de Paris ;

– en application de l’article 25 du Règlement Bruxelles 1 bis, la compétence des juridictions française doit dès lors être confirmée ;

– les faits démontrent manifestement que la cocontractante de Mme [J] est BTL France, BTL Algérie n’étant qu’un outil logistique pour la défenderesse dans ce litige ;

– BTL France a obtenu le paiement des sommes correspondant aux devis qu’elle a émis et a perçu les fonds ;

– les juridictions françaises restent compétentes au regard des exigences de l’article 100 du code de procédure civile, la juridiction algérienne ayant été saisie en deuxième.

SUR CE :

21. L’action à l’origine du présent appel a été initiée en 2019 par une ressortissante de nationalité algérienne contre une société de droit français, ayant son siège à [Localité 5], aux fins de voir engager sa responsabilité civile contractuelle devant les juridictions françaises.

22. Le litige présente donc un caractère international et relève, dans le temps comme dans l’espace, du champ d’application du Règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012, dit « Bruxelles I bis », concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale.

23. Conformément à l’article 4, paragraphe 1, de ce règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État.

24. Elles ne peuvent, selon l’article 5, paragraphe 1, être attraites devant les juridictions d’un autre État membre qu’en vertu des règles énoncées aux sections 2 à 7 du chapitre relatif à la compétence, soit aux articles 7 à 26 de ce règlement.

25. Selon l’article 25, paragraphe 1, si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d’une juridiction ou de juridictions d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties.

26. En l’espèce, la société BTL France, défenderesse à l’instance initiale, a son siège dans le ressort du tribunal de commerce de Paris.

27. Elle ne conteste ni l’existence ni la validité d’une « clause n° 12 » insérée dans les « conditions d’utilisation » annexées aux devis qu’elle a adressés à Mme [J] les 11 et 25 décembre 2016, aux termes de laquelle :

« Les présentes conditions générales de vente sont soumises au droit français. À défaut de résolution amiable, tout litige relatif à la formation ou à l’exécution d’une commande et de ses suites sera portée devant le Tribunal de commerce de Paris. ».

28. Ces deux critères de rattachement justifient, chacun, en application des dispositions précitées, la compétence de cette juridiction pour connaître des demandes formées par Mme [J] contre BTL France sur le fondement de ces devis.

29. Les moyens développés par l’appelante reposant sur l’absence de contrat la liant à la demanderesse sont à cet égard inopérants, pour porter, non sur les critères définissant la compétence du juge français, mais sur le bienfondé des demandes formées par Mme [J] devant ce juge.

30. L’existence d’une instance pendante devant la juridiction algérienne est, de même, indifférente. Outre que la nature exacte des demandes portées devant cette juridiction reste indéterminée, faute pour les parties de produire le moindre élément sur l’objet et l’état de cette procédure, il apparaît en toute hypothèse que le tribunal de Dar el Beida a été saisi après le tribunal de commerce de Paris, de sorte que les conditions du dessaisissement pour cause de litispendance invoqué par l’appelante ne se trouvent pas réunies.

31. La cour relève, surabondamment, que la compétence du tribunal de commerce de Paris à l’égard de la société BTL Algérie se trouve établie par sa compétence pour connaître des demandes initiales de Mme [J], s’agissant d’une intervention forcée.

32. Le jugement querellé sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions soumises à la Cour.

33. La société BTL France, qui succombe en son appel, sera condamnée aux dépens.

34. Elle sera en outre condamnée à payer à la Mme [J] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

IV/ DISPOSITIF

Par ces motifs, la cour :

1) Confirme en toutes ses dispositions soumises à la cour le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris (3ème chambre) le 10 novembre 2022, sous le numéro de RG J2022000525 ;

2) Condamne la société BTL France à payer à Mme [G] [J] la somme de deux mille euros (2 000,00 EUR) en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

3) La condamne aux dépens.

LA GREFFIERE, LE PRESIDENT,

 


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