REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 6
ARRET DU 17 FEVRIER 2023
(n° 33 /2023, 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00793 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CE7XC
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 04 Janvier 2022 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS RG n° 20/10379
APPELANTE
S.A.S. ELYOR ENERGY FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Laurent ZARKA, avocat au barreau de PARIS, toque : L0245
INTIME
Monsieur [E] [G]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Me Didier NAKACHE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1087
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 24 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Valérie GUILLAUDIER, Conseillère faisant fonction de Président
Mme Valérie GEORGET, Conseillère
Mme Alexandra PELIER-TETREAU, Vice-Présidente faisant fonction de Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Valérie GUILLAUDIER dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffière lors des débats : Mme Suzanne HAKOUN
ARRET :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Valérie GUILLAUDIER, Conseillère faisant fonction de Président et par Céline RICHARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Le 14 décembre 2015, M. [G], entrepreneur individuel, a commandé, dans le cadre de son activité professionnelle, un projet de mise à disposition d’un hangar agricole solaire avec générateur photovoltaïque auprès de la société Elyor Energy group Nv .
Par acte d’huissier en date du 19 octobre 2020, M. [G] a assigné la société Elyor Energy France devant le tribunal judiciaire de Paris en remboursement de la somme de 6 000 euros et en paiement du montant de la clause pénale et de dommages et intérêts.
Par conclusions d’incident en date du 20 octobre 2021, la société Elyor Energy France a demandé au juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris que soient déclarées irrecevables les demandes présentées par M. [G] à son encontre en raison du non-respect de la clause de médiation.
Par ordonnance en date du 4 janvier 2022, le juge de la mise en état a statué en ces termes :
Rejetons la fin de non-recevoir soulevée par la société Elyor Energy France et tirée du non-respect d’une clause de médiation ;
Déboutons M. [G] de sa demande de dommages-intérêts ;
Condamnons la société Elyor Energy France aux dépens de l’incident ainsi qu’à payer à M. [G] la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
***
Par déclarations en dates des 5 et 25 janvier 2022, la société Elyor Energy France a interjeté appel de l’ordonnance.
Par ordonnance en date du 12 mai 2022, les procédures ont fait l’objet d’une jonction.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 31 janvier 2022, la société Elyor Energy France demande à la cour de :
Déclarer l’appel recevable,
Réformer l’intégralité de l’ordonnance rendue le 4 janvier 2022,
Déclarer irrecevables les demandes présentées par M. [G] à l’encontre de la société Elyor Energy France puisqu’il n’a pas respecté la clause de médiation instituée dans les conditions générales de vente, qu’il avait acceptées,
Débouter M. [G] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Condamner M. [G] à verser à la société Elyor Energy France la somme de 5000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 19 avril 2022, M. [G] demande à la cour de :
Déclarer l’appel irrecevable, en tous les cas mal fondé,
Déclarer recevables ses demandes,
Débouter la société Elyor Energy France de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
Condamner la société Elyor Energy France à payer à M. [G] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,
Condamner la société Elyor Energy France à payer à M. [G] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.
La clôture a été prononcée par ordonnance en date du 27 octobre 2022.
MOTIVATION
Sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Elyor Energy France
Moyens des parties
La société Elyor Energy France soutient que les parties ont signé un bon de commande contenant des conditions générales de vente qui comportaient une clause de médiation qui n’a pas été mise en oeuvre par M. [G] ce qui entraîne l’irrecevabilité de ses demandes.
En réplique, M. [G] fait valoir que la demande de la société Elyor Energy France est en contradiction avec ses conclusions au fond aux termes desquelles elle conteste être partie au contrat, que les termes généraux et imprécis de la clause excluent qu’elle soit qualifiée de clause instituant une procédure de conciliation préalable et obligatoire et que son assureur a invité la société Elyor Energy France à un règlement amiable du litige.
Réponse de la cour
Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Il résulte des articles 122 et 124 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées ; licite, la clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en oeuvre suspend jusqu’à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent. (Ch. mixte., 14 février 2003, pourvoi n° 00-19.423, 00-19.424, Bull. 2003, Ch. mixte, n° 1)
La situation donnant lieu à la fin de non-recevoir tirée du défaut de mise en oeuvre d’une clause contractuelle qui institue une procédure, obligatoire et préalable à la saisine du juge, favorisant une solution du litige par le recours à un tiers n’est pas susceptible d’être régularisée par la mise en oeuvre de la clause en cours d’instance (Ch. mixte., 12 décembre 2014, pourvoi n° 13-19.684, Bull. 2014, Ch. mixte, n° 3 ; 3e Civ., 6 octobre 2016, pourvoi n° 15-17.989, Bull. 2016, III, n° 131).
En l’espèce, selon l’article 8-3 des conditions générales de ventes, paraphées par M. [G],
‘ Les parties conviennent que tout désaccord ou différend relatif à la présente convention ou découlant de son interprétation ou de son application sera soumis à une médiation. A cet effet, les parties aux présentes s’engagent à participer à au moins une rencontre de médiation en y déléguant une personne ayant pouvoir de décision. Le médiateur (agréé par la Commission fédérale de médiation) sera choisi par les parties. Les présentes conditions générales sont soumises à la loi française. Il en est ainsi pour les règles de fond comme pour les règles de forme.’
Contrairement à ce qu’a retenu le juge de la mise en état, la clause litigieuse institue une procédure de médiation obligatoire et préalable à la saisine du juge.
Il résulte des éléments versés aux débats que M. [G] n’a pas mis en oeuvre cette procédure, étant observé que le courrier de son assureur dont il fait état dans ses conclusions n’est pas versé aux débats, la seule pièce produite par ses soins étant, conformément à ce qui est mentionné dans le bordereau de communication de pièces, les conclusions au fond de la société Elyor Energy France.
Dès lors, le défaut de mise en oeuvre de la clause constitue une fin de non-recevoir, ce dont il résulte que les demandes de M. [G] formées devant le tribunal judiciaire de Paris sont irrecevables, le fait que la société Elyor Energy France conteste, dans le cadre de la procédure au fond, être partie au contrat étant manifestement inopérant.
L’ordonnance du juge de la mise en état sera infirmée sur ce point.
Elle sera confirmée en ce qu’elle a rejeté la demande de dommages et intérêts de M. [G] puisqu’il n’est pas démontré que cette fin de non-recevoir a été soulevée tardivement et avec une intention dilatoire.
Sur les frais du procès
L’ordonnance sera infirmée en ce qu’elle a condamné la société Elyor Energy France aux dépens et à payer la somme de 800 euros à M. [G] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour, statuant à nouveau, condamne M. [G] aux dépens et rejette les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
En cause d’appel, M. [G] sera condamné aux dépens et les demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
***
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme l’ordonnance, sauf en ce qu’elle :
– rejette la demande de dommages et intérêts de M. [G] ;
Statuant à nouveau,
Déclare irrecevables les demandes de M. [G] à l’encontre de la société Elyor Energy France formées devant le tribunal judiciaire de Paris,
Condamne M. [G] aux dépens de première instance,
Rejette les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Y ajoutant,
Condamne M. [G] aux dépens d’appel,
Rejette les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière, La Conseillère faisant fonction de Président,